ARTICLE11
 
 

samedi 3 octobre 2009

Le Charançon Libéré

posté à 13h17, par JBB
71 commentaires

Émile Henry et l’acte de naissance de la bombe à l’aveugle ; un échec, déjà
JPEG - 16.1 ko

Il en a marqué l’apothéose autant que le linceul. C’est avec Émile Henry, l’un de ses plus farouches partisans, que l’idée de propagande par le fait a commencé de refluer. En posant la responsabilité collective de la bourgeoisie et en réalisant le premier attentat « aveugle », cet anarchiste a inauguré un nouveau cycle historique du terrorisme. Et a surtout nui à la doctrine dont il se réclamait.

1

Honte à moi et à la descendance que je n’aurai jamais : je ne connaissais pas Émile Henry. Oh, bien sûr : je savais que c’était un anar, pur de dur, qu’il avait fait joujou avec des explosifs, sans guère de considération pour les victimes innocentes, et qu’il avait mal fini, le cou dans la lunette, la lame qui tombe et fait « zip », tête séparée du corps et balancée dans un bête panier d’osier. Je connaissais tout ça, donc. Mais je ne maîtrisais guère les détails de l’itinéraire de cet apôtre absolu de la propagande par le fait, j’ignorais qu’il fut - finalement - le premier d’une longue liste, celle des terroristes préférant frapper aveuglément plutôt que de s’en prendre à une cible précise et symbolique, et surtout je n’avais pas pris la totale mesure de l’incroyable vague anarchiste des années 1880-1896, attentats qui se multiplient et vraie dynamique idéologique. Et puis, j’ai lu Dynamite Club, L’invention du terrorisme à Paris, ouvrage de l’historien américain John Merriman, bon bouquin, vivant et instructif2. Et la lumière fut, comme dirait l’autre.

JPEG - 70.1 ko
-

La misère comme terreau de l’anarchisme

Planter le décor, John Merriman fait ça à la perfection. Il raconte le Paris populaire repoussé aux portes de Paris par les travaux de Napoléon III et du préfet Haussmann, de 1852 à 1870. Il décrit la misère incroyable du petit peuple - ouvriers crevant la dalle et exploités jusqu’au trognon - et l’effarant fossé social qui les sépare des bourgeois. Il revient sur la Commune et sur la haine qu’elle a révélée, politiques tremblant de voir les ouvriers reprendre les armes et nantis, ceux-là même qui encourageaient et applaudissaient les soldats fusillant les insurgés, prêts à tout pour les en empêcher. Il dit le terreau fertile que ce fut pour les idées anarchistes, et combien ceux-ci ont un temps donné les pires cauchemars à des possédants certains que venait l’apocalypse sociale. Et il tourne - tout au long de l’ouvrage - autour de cette idée cruciale : peut-on poser des bombes aveugles au nom d’une très respectable volonté de renverser un ordre social injuste ? John Merriman ne semble guère y croire, réponse en filigrane dans le bouquin, même si son propos est de dresser le contexte du passage à l’acte plutôt que de donner un avis tranché. Tant qu’on y est, je ne te cache pas que je n’y crois pas non plus, autant d’un point de vue éthique qu’au regard de l’efficacité : le deuxième attentat réalisé par Émile Henry, bombe jetée en un café bourgeois, fit infiniment plus de mal au mouvement anarchiste - par la répression qu’il a déclenchée - qu’il ne causa de tort aux dominants.

Reprenons. 1892, l’anarchisme a le vent en poupe. Les groupes sont légions dans Paris, en France et dans toute l’Europe, prônent l’action violente pour mettre bas l’ordre social et militent sans relâche pour l’avènement d’une société sans classe ni pouvoir. Les journaux anars sont nombreux et les idées qu’ils propagent trouvent un large écho auprès d’une classe populaire encore peu défendue par un syndicalisme tout juste naissant. Les attentats anarchistes, dirigés contre des politiciens, des hommes d’affaires et des chefs d’État, contribuent largement à cette popularité, la masse des exclus les voyant souvent comme une vengeance bien méritée contre ceux qui les oppressent et les affament : Ravachol, auteur au début de l’année 1892 de deux attentats dirigés contre des acteurs judiciaires de procès faits aux anarchistes, bénéficie ainsi d’une réelle popularité, mythe d’autant plus fort que l’homme - lors de son exécution - marchait vers la guillotine en chantant. Les livres de Kropotkine ou de Sébastien Faure tournent de main en main, tandis que leurs auteurs multiplient les prises de parole. Et partout, l’idée de l’action directe, de l’affrontement avec les rosses, de la nécessité de prendre les armes.

-

Émile Henry, de la propagande par le fait à l’attentat aveugle

Fils de bourgeois, enfant d’un père communard, étudiant brillant venu à l’anarchisme par son rejet sans concession d’un « État qui fait le malheur des classes inférieures occupées à lutter pour survivre quand les riches vivent grassement », Émile Henry est très vite gagné à l’idée de la propagande par le fait, cette revendication de l’illégalité comme meilleur façon de hâter la Révolution. Pour celui que révulse « le spectacle révoltant de cette société (…), où tout est une entrave à l’épanchement des passions humaines, aux tendances généreuses du cœur, au libre essor de la pensée », « c’est l’amour qui déclenche la haine », la sensibilité aux souffrances humaines qui légitime l’emploi des bombes. Conséquent, il ne tarde pas à mettre ses idées en accord avec ses actes. Et dépose, le 8 novembre 1892, une bombe devant les bureaux de la Compagnie des mines de Carmaux, dont les dirigeants viennent de mater avec brutalité une longue grève de mineurs. Découverte, la bombe est amenée au commissariat de police de la rue des Bons-Enfants, où elle explose. Coup de chance pour Émile : malgré l’émotion suscitée par son attentat et la panique qu’il déclenche dans Paris, en dépit de la mobilisation de policiers bien décidés à mettre la main sur celui qui a tué cinq des leurs, il passe à travers les mailles du filet, n’est pas arrêté. et gagne l’Angleterre, alors havre relatif pour les anarchistes pourchassés dans toute l’Europe.

JPEG - 58.8 ko

En France, la répression contre les anarchistes s’intensifie. Auguste Vaillant, travailleur vivant dans la misère, militant résolu à la dénoncer et à venger Ravachol, décide alors de frapper un grand coup. Et balance, le 9 décembre 1893, une bombe (emplie de petits clous, elle était conçue pour blesser plutôt que tuer) en pleine chambre des Députés. L’attentat ne fait que des blessés légers, mais Vaillant est condamné à la peine capitale et guillotiné en février 1894. Sa mort fait d’autant plus de bruit dans les cercles anars qu’elle est précédée de peu de l’adoption des « lois scélérates », ensemble de mesure interdisant de fait toute propagande des idées anarchistes.

Revenu en France, Émile Henry veut venger Vaillant (qui souhaitait lui-même venger Ravachol, je ne sais pas si tu suis…). Et imagine pour cela de s’en prendre à un café choisi au hasard, pour peu qu’il soit lieu de rassemblement des bourgeois. Le 12 février 1894, il jette ainsi une bombe au milieu du café Terminus - proche de la gare Saint-Lazare - avant de tenter de prendre la fuite. Cette fois, il est arrêté. Se sachant promis à la guillotine, l’attentat du café - qui a fait 20 blessés et un mort - s’ajoutant à celui du commissariat, il tient vaillamment son rang au procès. Et il justifie son point de vue, rapporte John Merriman :

Vaillant était inconnu de la plupart des compagnons avant son arrestation, explique Émile. Mais la campagne de la police contre les anarchistes les a rendus collectivement responsables de son acte. C’est maintenant le tour de la bourgeoisie d’être collectivement responsable de son exécution. Les anarchistes doivent-ils agir uniquement contre les députés qui votent des lois contre eux, les magistrats qui les appliquent, les polices qui les font respecter ? Non. La police agit pour le compte de la bourgeoisie qui profite du travail des ouvriers. Les petits-bourgeois ne sont pas meilleurs que les autres, puisqu’ils applaudissent les actes du gouvernement. (…) Ils sont ’la masse bête et prétentieuse qui se range toujours du côté du plus fort« . Ils sont la clientèle ordinaire du café Terminus et des autres grands cafés. C’est pour cela qu’il a frappé au hasard. Le moment est venu pour la bourgeoisie de comprendre que »ceux qui ont souffert sont enfin las de leurs souffrances : ils montrent les dents et frappent d’autant plus brutalement qu’on a été plus brutal avec eux". Les anarchistes n’ont pas de respect pour la vie humaine, parce que la bourgeoisie elle-même n’en a montré aucun.

Le 21 mai 1894, Émile Henry, 22 ans, marche bravement vers l’échafaud. Crie « Courage, camarades ! Vive l’anarchie ». Et est guillotiné.

JPEG - 74.6 ko
-

Qu’en retenir ?

Un, la vision d’Émile Henry - et surtout son deuxième attentat - est loin d’être partagée par tous ses camarades, non plus que d’être comprise par les ouvriers (qui lui préfèrent, à juste titre, un Auguste Vaillant) : eux se demandent pourquoi frapper des innocents quand le jeune homme pose qu’il « n’y a pas d’innocents ».

Deux, l’attentat du café Terminus frappe durablement les esprits, traumatisme accentué par une presse qui en fait des tonnes. Les gens prennent peur, l’État réagit avec violence, résolu à mettre bas le mouvement anarchiste. Une troisième vague de lois scélérates est votée en juillet 1894, tandis que la répression s’intensifie sans relâche. « Un ennemi mortel de l’anarchie n’eut pas mieux agi que cet Émile Henry, lorsqu’il lança son inexplicable bombe au milieu de tranquilles et anonymes personnes venues dans un café pour y boire un bock, avant d’aller s’en coucher », constate ainsi le critique et romancier anarchiste Octave Mirbeau.

Trois, l’attentat du café Terminus marque - paradoxalement ou non - le reflux de l’idée de propagande par le fait dans les cercles anarchistes. Il y aura d’autres attentats, à commencer par l’assassinat du président Sadi Carnot par le jeune anarchiste Santo Caserio en juin 1894 (pour venger Henry, qui souhaitait lui-même venger Vaillant, qui souhaitait lui-même venger Ravachol, je ne sais pas si tu suis…), mais ils vont progressivement se raréfier. Parallèlement, l’anarcho-syndicalisme, marqué d’un rejet relatif de l’illégalisme et surtout de la montée en puissance des syndicats (légaux en france à partir de 1894), prend son envol. Les bombes, c’est terminé, et l’anarchisme ne retrouvera par ailleurs plus jamais l’audience qu’il a connu dans la France de la fin du XIXe siècle.

Quatre, Émile Henry est profondément moderne. Parce qu’il annonce - premier d’une longue lignée - un phénomène qui va s’imposer au cours du XXe siècle, et à l’évidence perdurer pendant le XXIe : les attentats à l’aveugle. C’est, avec la bombe du café Terminus, le terrorisme que l’on connaît qui prend son envol. Je te renvoie, sur ce point, au billet que j’ai tiré du remarquable ouvrage de Mike Davis, Petite histoire de la voiture piégée.

Cinq, et pour en finir, Émile Henry n’aimait pas les gens. Il le revendique lui-même, d’ailleurs : « J’aime tous les hommes dans leur humanité et pour ce qu’ils devraient être, mais je les méprise pour ce qu’ils sont ». A l’évidence, il n’est guère de juste posture révolutionnaire qui puisse naître d’un tel sentiment, sinon à considérer ceux qu’on prétend défendre comme des pions un rien méprisable. Une erreur, celle d’un rapport froid et clinique à la notion d’humanité, qui sera rééditée - beaucoup plus tard - par nombre d’apôtres de la lutte armée, à commencer par les membres de la RAF ou des Brigades Rouges.



1 J’ai décidé - unilatéralement, bien entendu - de lancer un cycle sur le thème « Violence et activisme ». Que si ça t’intéresse, c’est cool, et tu peux même lire ou relire le premier acte, autour du livre de Carlos Marighella, le Manuel du guérilléro urbain et le deuxième, autour de l’étonnant destin de l’ancien terroriste d’extrême-gauche Hans-Joachim Klein. Que si ce n’est pas le cas, ben, je ne sais pas trop quoi te dire ; à demain ?

2 Même si multipliant un peu trop les coquilles.


COMMENTAIRES

 


  • Une des grandes ironies de cette histoire, c’est que le polémiste et poète Laurent Tailhade s’était exclamé après l’attentat de Vaillant au Palais-Bourbon décembre 1893 « Qu’importe de vagues humanités pourvu que le geste soit beau ! » Il fut, par hasard, l’une des victimes de l’attentat d’Henry, il y perdit un œil par un éclat. Tailhade était à l’origine un libertaire plutôt individualiste et esthétisant, comme cela se faisait dans les milieux symbolistes. Il restera anarchiste malgré tout, mais il tourna fort mal durant la Première Guerre et il se mua alors en patriotard enragé, sans doute à cause de son goût pour l’injure et sa tendance au pamphlet. il est aujourd’hui fort méconnu, je possède quelques livres anciens de lui (on l’a négligé aussitôt qu’il fut mort) et il y a dans ma ville un petit éditeur qui republie certains de ses textes oubliés (Cynthia 3000).

    Voir en ligne : http://champignac.hautetfort.com

    • Décidément, tu es incollable sur tous les sujets. :-)

      L’histoire est piquante, en effet. Et je trouve même qu’il est là quelque justice : à prôner l’esthétisme de la violence pour l’amour de l’art, sans mettre les mains dans le cambouis, il y a comme une forme de juste retour des choses dans le fait de s’en trouver légèrement frappé.
      Pour compléter, John Merriman suggère que le critique anarchiste Félix Fénéon aurait été l’auteur de cet attentat du restaurant Foyot, qui a par hasard coûté son oeil au critique et poète anarchisant Tailhade ; dur milieu que celui de la littérature… :-)

      • Je connais juste un peu les peintres et les poètes ou journalistes de cette époque alors que j’aurais plus de mal pour ceux d’une autre période. Fénéon (que je connais mieux que d’autres auteurs) a fait partie du procès des Trente après que l’on a rerouvé dans son hureau des détonateurs, mais il a ridiculisé l’accusation par ses réponses d’une grande logique que je conseille à la lecture, et puis on avait visé large en présentant plus d’accusés que possible devant le tribunal : Henry n’est que l’un des coupables possibles, mais pas le seul accusé lors du procès et ce sera le seul condamné à mort, même s’il n’y a aucune preuve formelle contre lui (il revendique juste l’acte comme légitime). On se croirait dans l’affaire de Tarnac quand on lit les textes. Il a fallu ratiboiser tout le milieu anarchiste de l’époque et surtout lui faire peur, mais les accusations ne reposaient sur rien (mis à part les aveux spontanés d’Henry, fort sujets à caution) et Fénéon a juste été révoqué de la fonction publique sans faire de prison. L’affaire est bizarre. Comme si on avait voulu faire une oeuvre de propagande sans chercher les faits.

        Voir en ligne : http://champignac.hautetfort.com

        • « Henry n’est que l’un des coupables possibles, »

          Tu parles bien d’Emile Henry ? Parce que si oui, il a été interpellé après avoir été pris en chasse par un garçon de café, un flic et des bons citoyens. Il fuyait après avoir balancé l’engin dans le café Terminus (nom bien choisi, d’ailleurs…).
          Par contre, en effet, il n’a sans doute pas agi seul. Un témoin parle d’un homme en sa compagnie, juste avant que la bombe explose. Et la chambre d’Henry aurait été « nettoyée » juste après son arrestation, par des camarades venus récupérer explosifs et pièces compromettantes : quand la police a débarqué chez lui, la porte de sa petite piaule avait déjà été enfoncé.

          • Ah ! alors là, j’apprends quelque chose. Je croyais à une rafle au hasard d’éléments suspects dans laquelle il aurait été pris parmi d’autres. Mais il y a des choses troublantes dans le procès de Fénéon, comme le fait que l’attentat ait eu lieu le 12 février et que la perquisition dans les bureaux du ministère de la Guerre (pas au domicile de Fénéon) ait eu lieu en avril seulement. S’il avait voulu se dessaisir des détonateurs suspects comme les autres complices suspectés, il en aurait eu largement le temps et tout le monde pouvait avoir accès à son bureau puisque c’était un lieu public. Est-ce que Fénéon s’estimait plus à l’abri en cachant les ustensiles compromettants dans l’un des lieux les plus symboliques de la sûreté selon le principe de la Lettre volée, est-ce qu’il a été piégé du fait de ses relations et a-t-on placé des preuves d’attentat à dessein dans son bureau qu’il partageait d’ailleurs avec plusieurs personnes ? Pourquoi l’a-t-on révoqué alors qu’il bénéficiait d’un acquittement en justice ?

            Voir en ligne : http://champignac.hautetfort.com

            • Non, non, il doit y avoir un quiproquo.

              Tu avais écrit : « Henry n’est que l’un des coupables possibles »

              Mais à l’évidence, au regard de ta réponse, tu pensais à Félix Fénéon. Qui est, en effet, juste un coupable possible, pour l’attentat du restaurant Foyot. Et qui s’est très brillamment moqué du ministère public lors du procès des Trente, avant d’être remis en liberté.

              L’histoire de la piaule et des explosifs, donc, concerne Emile Henry, et non Fénéon. On ne s’était pas compris.



  • Gilles DELEUZE écrit : « La pensée n’est rien sans quelque chose qui force à la pensée (...). »
    Avec Article11, vous y contribuez.
    Grand merci à vous tous.



  • A l’évidence, il n’est guère de juste posture révolutionnaire qui puisse naître d’un tel sentiment, sinon à considérer ceux qu’on prétend défendre comme des pions un rien méprisable. Une erreur, celle d’un rapport froid et clinique à la notion d’humanité

    Oui certes,mais sa jeunesse (22ans) explique très bien une telle position,me semble-t-il.
    Cela nous renvoie à Netchaiev que tu connais sûrement,ce russe qui pronait la destruction aveugle et la mit en pratique de manière inquiétante,refusant toute « compromission » dans sa vie et dans celle de ses camarades.
    Evidemment,tout le monde a fini par le rejeter comme lui rejeta tout le monde.
    A noter que le modèle de terreur révolutionnaire qu’il prônait inspira beaucoup Lénine (et Dostoievsky pour ses Possédés).

    • L’âge, l’intransigeance absolue de la jeunesse, est sans doute un très bon facteur d’explication, oui.

      Pour Netchaiev, il y a à l’évidence des points communs (la fin justifie les moyens, etc.). Mais je vois quand même une différence fondamentale : avec ses camarades, Henry s’est comporté de façon droite et intègre, fidèle à l’amitié et respectueux des engagements des autres. Tandis que Netchaiev était, quand même, une sacrée raclure dans la vie quotidienne autant que dans l’action politique, escroquant ses camarades, les instrumentalisant, mentant et foutant une merde sans nom dès qu’il en avait l’occasion. Et ce n’est guère à l’honneur de Bakounine d’avoir un temps - avant de tourner casaque - supporté et encouragé un homme tel que celui-ci. Jusqu’à écrire à son propos :

      «  Un spécimen de ces jeunes fanatiques qui ne doutent de rien et qui ne craignent rien, et qui ont posé pour principe qu’il en doit périr sous la main du gouvernement beaucoup, beaucoup, mais qu’on ne se reposera pas un instant jusqu’à ce que le peuple se soit soulevé. Ils sont admirables, ces jeunes fanatiques, des croyants sans Dieu et des héros sans phrases !  »

      • Oui oui tout-à-fait,de grosses différences.Netchaiev est un cas extrème qui justement il me semble illustre jusqu’où peut aller une telle position doctrinaire.C’était un nihiliste avant tout,il était de son pays.Ceci dit,et encore une fois sans cynisme,si ce type de fanatiques a pu trouvé des appuis jusque dans la pensée de Bakounine,c’est à mon avis pour des raisons pratiques,je veux dire l’utilité concrète que l’on peut tirer de tels personnages en périodes de troubles (et la Révolution est une période de troubles et de violences).Le caractère extrème et ensuite même criminel de l’itinéraire de Netchaiev,s’il peut le rendre détestable et-ou condamnable moralement,lui confère tout de même et à cause de cela une valeur exemplaire pour comprendre cette époque,et sans qu’il soit nécessaire de juger de la valeur intrinsèque de ses actions.



  • « J’aime tous les hommes dans leur humanité et pour ce qu’ils devraient être, mais je les méprise pour ce qu’ils sont »

    Que celui qui ne s’est jamais trouvé en porte à faux entre son Amour Universel pour son prochain et une grosse conne acariâtre en képi, lui jette la première pierre...

    Voir en ligne : http://jide.romandie.com



  • dimanche 4 octobre 2009 à 14h42, par nicocerise

    « je les méprise pour ce qu’ils sont », on croisent tellement d’élus qui méprisent leurs électeurs et des chefs de bureau méprisant leurs employés. Ils n’ont même pas l’excuse d’aimer l’Humanité.

    Voir en ligne : ceriselibertaire

    • dimanche 4 octobre 2009 à 18h18, par JBB

      Je te rejoins : ceux-là n’ont aucune excuse.

      • mercredi 7 octobre 2009 à 04h54, par pièce détachée

        « J’aime tous les hommes [dont je suis] dans leur humanité et pour ce qu’ils devraient être, mais je les méprise pour ce qu’ils sont [et moi donc aussi]. » — (italiques et contenu des crochets droits © pièce d.)

        Homme, femme, et moi-même, je te méprise pour ce que tu es là maintenant pour de vrai, vivant, fatigué, merdique, désirant, pas conforme, fatigant, désiré, erratique, sûr de tellement rien que tu ne sais même pas si c’est bien toi que j’aime, ni si tu m’aimes bien moi (qui j’espère suis bien moi). Quel bordel ! Homme, femme, et moi-même, tu me fais peur. Reste plutôt dans les chaînes de ce que, homme ou femme ou moi, tu devrais être : alors tu ne bougeras plus, et je pourrai enfin dire « je t’aime » à aucune personne singulière, sans remuer les lèvres, sans me compromettre, droit debout devant un miroir glacé d’humanité (aimable) sans humains (méprisables).

        Cette perspective épouvantable me fait penser, en moins rigolo, à une satanerie de Hitchcock où il est question d’un type fou amoureux à la fois d’une certaine couleur bleue idéale et d’un beau spécimen trop humain : il couche le spécimen toute nue et le peint toute en idéal magnifique, et comme de juste, le spécimen meurt asphyxié (les hitchcokologues pourvoiront aux détails, références et corrections).

        J’aime beaucoup (sérieux) ce truc d’Alunk :

        « Justement dans la société « d’amour universel pour son prochain » continueront d’exister les grosses connes acariâtres, mais elles ne porteront pas de képi ... »

        ... Et sans le képi, tout connement humaines, elles se rouleront dans l’herbe (j’en connais, comme quoi...)



  • Il me semble que la vitesse à laquelle le mouvement anarchiste s’est désolidarisé d’un des leurs, sous des prétextes moraux, montre avant tout leur immaturité.

    Abandonner la propagande par le fait parce qu’on serait taxé (par ses ennemis !) de terrorisme (et c’est péché, peut-être ? A part dans les déclarations des représentants de la bourgeoisie de Thiers à Bush ?), ou sur des justifications bidons, du genre : poser une bombe, c’est provoquer la répression. Donc poser une bombe, c’est « faire le jeu » de la réaction. Le sophisme a encore vaincu.

    Pourtant la conséquence est tirée : les idées anarchistes refluent dès qu’ils abandonnent le terrain du conflit armé. Les fameuses lois scélérates n’auraient pas suffit à les faire taire si les anarchistes ne s’étaient pas cantonnés à la rédaction de pamphlet de peur d’aller « trop loin » dans la guerre sociale (drôle d’idée soit dit en passant, il me semble que la réaction n’avait pas tant de scrupules).

    • Il me semble que je ne suis pas du tout d’accord avec toi.

      « Abandonner la propagande par le fait parce qu’on serait taxé (par ses ennemis !) de terrorisme (…), ou sur des justifications bidons, du genre : poser une bombe, c’est provoquer la répression. »

      Tu oublies un point essentiel dans ta phrase : « poser une bombe » à l’aveugle. Soit la balancer dans un café choisi au hasard, avec tout plein de morceaux de gens frappés au hasard qui s’en vont se coller aux murs et perdent leurs tripes sur le parquet. Ça change un peu tout, quand même, hein.

      Le terrorisme et la lutte armée, une bonne part des anars de l’époque l’assumaient et le revendiquaient. La plupart n’ont pas condamné (bien au contraire) les attentats de Ravachol, parce que la cible (des hommes de loi) était claire. La plupart - encore - n’ont pas condamné (bien au contraire) l’attentat de Vaillant, parce que la cible (la chambre des députés) était tout aussi claire. La plupart - toujours - n’ont pas condamné le premier attentat d’Henry, parce que la cible (le bureau de la Compagnie des mines et indirectement le commissariat) était claire. Une partie d’entre eux - enfin - se trimballait avec des flingues et avaient appris à confectionner des bombes, pour s’en servir contre une ennemi clairement identifié. Bref, c’était pas des enfants de choeur et ils assumaient un combat politique sans concession.
      En clair, ton « Le sophisme a encore vaincu » me semble aussi malvenu que complètement faux. Parce qu’il fait l’impasse sur la lutte armée que les anarchistes ont alors revendiquée et pratiquée. Et qu’il ne mentionne pas non plus la spécificité des réticences contre le 2e attentat d’Henry : des attentats oui, des attentats contre les civils non.

      « drôle d’idée soit dit en passant, il me semble que la réaction n’avait pas tant de scrupules »

      C’est l’argument d’Émile Henry. Il me semble, moi, que quand tu utilises ce type de moyen, une bombe dans un café, tu as déjà perdu.

      • Un des premiers arguments de Henry est : les petits-bourgeois sont les premiers responsables de l’élection et du maintien des gouvernements réactionnaires qui se succèdent dans la joie et la bonne humeur pour toujours plus d’idéologie bourgeoise-sécuritaire à tous les étages, et les cochons seront bien gardés.
        Ce que je veux bien comprendre.
        Partant de là, il décide de cesser de frapper uniquement les ennemis les plus puissants pour semer la terreur au sein des troupiers de la réaction.
        Que la riposte finisse par tomber est inévitable. Ça ne rend pas son acte condamnable.
        Que des imbéciles rongés par la trouille se solidarise d’instinct avec la défense des intérêts des puissants, et appuient avec vigueur la répression qui s’ensuit me paraît justifier, ne serait-ce qu’à posteriori, la bombe qui visait précisément ces connards (parce que ce sont des connards, je crois que tu en conviendras sans chipoter).

        Et puisque tu en parles justement : les anarchistes assumaient la lutte armée, mais l’abandonnent en constatant que ça peut dégénérer. C’est pourtant difficile de penser la révolution sans savoir qu’à un moment où à un autre, ça dépassera les bornes des limites : les vendéens se feront massacrer, les vieux règlements de compte reviendront à la surface, on lynchera sans procès des curés et des petits-bourgeois avec qui on aurait éventuellement bu un coup en temps de paix, tout en sachant les minables, lâches et/ou stupidement cyniques, qu’ils étaient en réalité.
        C’est dans ce sens que je parle d’immaturité.

        Pour être plus précis, cette histoire me fait penser aux partis de gauche institutionnels qui condamnent les Black Block qui foutent le feu à un hôtel ’innocent’ à Strasbourg, ou les furieux qui crament les bagnoles ’de gens qui n’ont rien demandé’ dans leur quartier. « Ca décrédibilise tout le mouvement ». Il ne manque pas, sur article XI, de railleries face à des arguments imbéciles de ce genre.

        Après, savoir s’il vaut mieux faire sauter un PMU notoirement FN ou un café branché à St-Germain notoirement PS, la question se pose. Ouvrir un débat national à l’explosif demande un peu de doigté, encore faut-il que nos plus proches alliés politiques ne se préparent pas à nous lâcher, donc à nous laisser à la merci des flics.
        Je dirais bien que c’est faire le jeu des poulets, mais en réalité, c’est faire leur travail : isoler les éléments dangereux de la société pour les rendre vulnérables. L’arrestation est encore laissée aux uniformes, mais je serai moyennement surpris d’apprendre que des factions de gauche radicale (voire révolutionnaires) aient mené des traques ou des opérations de délation contre des minorités ’violentes’, qui ’décrédibilisent’ leur lutte, et bien sûr, ’font le jeu de leurs adversaires’ ’même si ça part d’une bonne intention’ (et je ne parle pas des stals, qui sont un peu trop connu pour ce genre de pratiques).

        On vit une époque où le meurtre politique s’est éloigné, et où il est difficile de démêler les condamnations du meurtre en lui-même et celle du meurtre ’au hasard’ - ce qui n’est jamais vraiment le cas, on tue au hasard, mais dans des populations ciblées.

        PS : ça serait bien aussi d’oublier de mentionner ’innocent’ - ou un équivalent genre ’civil’ - à chaque fois qu’il y a des morts, j’ai l’impression d’entendre le pape qui tiendrait le JT de france 2, ce qui blesse mes petits nerfs sensibles.

        PPS : Et attention, je comprends parfaitement cette idée de ne pas frapper les ’civils’, je dis juste que je comprends aussi le fait de les frapper. Si demain, un type qui décide de tirer dans le tas d’une manifestation d’amour pour notre camarade président, je me vois mal lui jeter la pierre. Ou lui garder porte close s’il est dans la merde. Ou toute cette sorte de chose. Voire même, tiens, je pourrais dire que c’est pas la moitié d’un con, et que si y’en avait plus des comme lui, on aurait moins de problèmes.
        Et s’il tue un autre type venu trouer la peau du camarade président, je trouverais ça bien malheureux, mais ça me paraît un peu raide de condamner le premier pour ça.

        • Le raisonnement d’Henry, je le comprends. Mais il est pour moi impossible de le justifier. Pas parce que la riposte suit. Mais simplement parce que je ne crois pas une seconde, et au risque de me répéter, à la légitimité d’attentats aveugles. Pour rejoindre l’historien Mike Davis (pas vraiment un réactionnaire, tu me l’accorderas) qui évoque les voitures piégées : « En fin de compte, la voiture piégée est une arme fondamentalement fasciste, et la cause de ceux qui y ont recours reste irrémédiablement souillée par le sang des innocents. »

          D’ailleurs : non, je ne crois pas que tous les mecs installés à l’intérieur du café Terminus étaient forcément des « connards », et qu’ils méritaient donc de sauter. C’était des bourgeois venus prendre une bière, des gens qui avaient la vie facile et des mecs qui appartenaient à la caste des dominants. Dans le tas, il y avait des connards et des salopards, mais aussi des moutons ne se posant pas de question et peut-être même des petits bourgeois sympathiques (voire même des pauvres venus se payer un godet, façon sortie exceptionnelle de l’année). Si tu trouves qu’il y a là justification suffisante pour leur balancer une bombe à la tronche, on n’a clairement pas la même vision des choses.

          L’immaturité n’est pas non plus pour moi de se dire qu’il est des moyens qu’on ne souhaite pas utiliser. Même si je te rejoins grandement sur un point : les anars de la fin du 19e siècle donnent l’impression de s’être brûlé avec ce qu’ils prônaient. En publiant les meilleurs moyens de se fabriquer une bombinette (puisque certains journaux l’ont fait), ils auraient pu se douter que certains des usages de la recette pourraient ne pas leur plaire. Alors oui : le mec du Père Peinard qui tourne casaque sur Henry après avoir écrit tant et tant sur la nécessité de saigner les bourgeois n’était sans doute pas très conséquent. Pas plus qu’un Bakounine ayant joué avec Netchaiev avant de le rejeter.

          « Il ne manque pas, sur article XI, de railleries face à des arguments imbéciles de ce genre. »

          Le parallèle se tient. Tu conviendras, par contre, que chacun fixe les limites de ce qu’il juge acceptable. En ce qui me concerne, le jour où les black block balanceront des explosifs dans des lieux publics en visant tout le monde et personne, je ne te cache pas que je les verrai avec beaucoup moins de sympathie.

          De façon générale, je constate qu’on n’est radicalement pas d’accord. Je pense que la fin ne justifie pas les moyens et qu’un homme ou un groupuscule adoptant ce type de tactique aveugle (tant qu’elle est isolée et ne s’intègre pas dans un réel processus révolutionnaire de masse) décrédibilise son combat et écrase les valeurs-même au nom desquelles il prétendait se battre. Pour prendre un exemple plus récent qu’Henry, j’en vois une illustration parfaite dans l’itinéraire de la RAF qui, en mai 1972, place une bombe dans l’immeuble Springer, attentat qui fera 34 blessés, essentiellement des ouvriers. Quand tu te retrouves à faire sauter ceux-là mêmes que tu prétends défendre, y a quand même comme un problème.

          Pour conclure, je crois à la vie et à la joie (ça fait niais, mais c’est comme ça), à l’action intelligente et à la fidélité à des valeurs humaines, pas au droit unilatéral que se donneraient certains de frapper au hasard et en dehors de tout processus révolutionnaire. Hop !

          • Si l’attentat dans l’immeuble Springer a effectivement été le début de la fin de la relative popularité de la RAF, il faut quand même noter que travailler à Springer est moyennement neutre dans la guerre sociale. Si demain, TF1 saute avec certains de ses employés, je me vois mal pleurer alors que justement j’ai une bouteille au frais qui ferait tout à fait l’affaire.

            Tu sembles attaché à leur condition ouvrière, ce je peux comprendre, mais j’ai une question quand même : le flic étant le prolétaire assigné à la contre-insurrection permanente, est-il une partie des forces réactionnaires à abattre avec joie ou un prolétaire que le cocktail molotov blesse injustement ? (le pauvre, faut bien qu’il mange, il fait que son boulot)

            Je sais, la réponse est facile. Mais compliquons donc : le journaliste embedded en irak est-il un complice de l’invasion ou un civil innocent ? Le technicien quelconque qui bosse depuis quinze ans sur le JT de tf1, qui fait partie de la famille ? L’intérimaire qui préfère faire le montage d’une nouvelle preuve « qu’on manque de prison en France, surtout à cause des descendants d’immigrés mal intégrés qui ramènent leur culture barbare jusque dans nos banlieues », plutôt que de crever la dalle ? Et si celui-là fait partie des « civils innocents », quid du délateur contre récompense qui balance ses voisins sans-papiers pour nourrir ses enfants ?

            Voilà pour ma première objection.

            Mais j’en ai une deuxième, et pas des moindres, finalement. J’entends parfaitement que chacun fixe ses limites, ça me paraît être un minimum. Mais que fait-on des limites des autres ? En particulier de ceux qui vont plus loin ?
            Prenons un équivalent de la RAF virtuel et un immeuble de TF1 avec pleins de morts dedans (c’est quand même un peu réjouissant, non ? même pas un peu ?). Les mecs se disent : chez article XI, c’est des mecs sympas, ils vont nous planquer quelques jours. Tu laisses ta porte fermée ?
            Ou plus compliqué : tu ne tiens pas à les planquer toi-même, t’as ta conscience, tout ça, mais un ami le fait. Que se passe-t-il concrètement pour toi ?
            Mais il y a pire : les mecs se disaient qu’ils allaient chez quelqu’un qui lit A. XI régulièrement et justement tu viens de pondre un truc sur les salauds qui font sauter des immeubles de TF1 sans regarder qui est à l’intérieur. Le mec leur laisse la porte fermée. N’es-tu pas responsable de ça, ne serait-ce qu’en partie ?
            Maintenant, un poil plus troublant sans provocation aucune : en quoi est-ce différent de ce que la police attends du bon citoyen indigné par tant de sang versé sans raison ? (Alors qu’on bon vieux dialogue social responsable aurait permis de lancer un débat national, dont qu’il ne pouvait sortir que le meilleur, bien sûr)

            PS : Et deux objections mineures :
             × Où obtient-on un certificat de processus révolutionnaire en cours, avec autorisation de dépasser les bornes ?
             × Les fascistes ne frappent pas au hasard, ils frappent ceux qu’ils désignent comme des ennemis, même lorsqu’il s’agit d’un enfant juif à envoyer à Dachau, d’un enterrement en Afghanistan bombardé au cas où, ou d’une rafle de gauchistes et de leurs plus ou moins proches.
            D’ailleurs, le raisonnement « les fascistes font ça, donc la méthode est fasciste » est franchement bancal. Ou alors, il arrêter de prendre les armes. Ça serait drôle si on ne l’entendait pas si souvent. La confusion entre la violence et le fascisme, ou le meurtre et le fascisme, font les beaux-jours de la sociale-démocratie « apaisée » qui nous pourrit durablement la lutte, au nom de son apaisement justement.

            PPS : Maintenant que j’y pense, à aucun moment la RAF n’a prétendu défendre les ouvriers. C’est d’ailleurs pour ça que les marxistes les traitaient d’anarchistes. Ils désiraient joindre leurs efforts aux luttes du tiers-monde (c’était pendant le Viet-Nam et Springer diffusait de la propagande pro-guerre), par la prolongation de la guerre anti-impérialiste en métropole. C’est d’ailleurs pour ça que les anarchistes les traitaient de marxistes.

            • Mais que fait-on des limites des autres ?

              C’est une question à double tranchant. Qu’on fait la RAF, les BR ou, dans un registre plus pacifique, les Black Bloc, des limites des autres ? Leur ont-ils demandé leur avis avant de se lancer dans leur actions ?Ont-ils réfléchis sur les conséquences que ça aller avoir sur les autres ?

              Est-ce que parce que quelqu’un se réclame d’opinions proche de moi il peux faire n’importe quoi et s’attendre à ce que le défende inconditionnellement ?

              J’ai lu un texte intéressant sur la RAF, il y a quelques mois : l’auteur entre autre critiquait le coté chantage moral de leurs actions, du genre « nous ont fait ce qu’on veut indépendamment des avis de tout le monde, mais si tu ne nous soutient pas après c’est que tu es un traître réactionnaire »

              • @ Kaos : Pour ta première objection, ma réponse est rapide : pour moi, aucun de ceux que tu sites n’est un coupable. Ils participent au système, comme nous le faisons pratiquement tous à des degrés (très) divers. Selon moi, ça n’a de sens que de s’attaquer à ceux qui tirent les ficelles, qui incarnent l’autorité et le pouvoir. Les autres ne sont que des lampistes.

                Pour ta deuxième objection, une certitude : je n’aurais aucune - mais alors : aucune - sympathie pour le mec qui ferait sauter un immeuble avec des techniciens, des secrétaires, des cuisiniers et femmes de ménage, des employés de bureau etc. au motif qu’ils bossent - plus ou moins directement - pour TF1. Pour être honnête, le mec qui ferait ça, je ne le balancerais pas aux flics ; mais lui foutre mon poing dans la gueule, j’adorerais.

                « La confusion entre la violence et le fascisme, ou le meurtre et le fascisme, font les beaux-jours de la sociale-démocratie »apaisée« qui nous pourrit durablement la lutte, au nom de son apaisement justement. »

                C’est marrant : pour moi, c’est l’inverse. C’est parce que certains ont employé les mauvaises méthodes, ont perdu de vue qu’il n’y a qu’en usant d’une violence intelligente et maîtrisée qu’on peut faire avancer la société et sont partis totalement en couilles dans une frénésie sanglante que, dans les années 70, une véritable alternative d’extrême-gauche n’a pas pris comme elle aurait pu et que la sociale-démocratie vit - aujourd’hui - des jours apaisés.

                Pour ton deuxième Ps, tu as tout à fait raison. D’abord internationaliste, la RAF ne prétend pas agir pour le bien des ouvriers. Elle prétend - par contre - aider à libérer les aliénés, les dominés, les exploités. Avec dans l’idée qu’en se libérant soi-même par la lutte armée, on montre aussi la voie aux autres, on leur tend une perche pour leur propre libération.

                @ CaptainObvious : pour les black blocks, c’est différent. Il est pas mal de pays - à commencer par l’Allemagne - où il n’existe pas le même antagonisme entre « manifestants classiques » et partisans de l’affrontement. Les deux coexistent et se voient comme au service d’une même cause, avec des moyens différents. Ça me paraît une saine façon de voir les choses.

                • « Les deux coexistent et se voient comme au service d’une même cause, avec des moyens différents. Ça me paraît une saine façon de voir les choses. »
                  Pour moi, tout s’arrête là. Nul besoin de condamnation (stalinienne) des ’errements’ de ses alliés.

                  Je note aussi que même le flic n’est pas un ennemi, donc que le cocktail molotov le blesse injustement, donc que le black bloc est un dangereux ennemi de la révolution...

                  Quant au délateur qui a carte blanche parce qu’il n’a pas le ’vrai’ pouvoir.....

                  C’est fou comme on préfère réprimer des passions, éventuellement excessives, qui cherchent la révolution, plutôt que les lâchetés quotidiennes qui font le ciment de la réaction.

                  Très fou.

          • D’ailleurs : non, je ne crois pas que tous les mecs installés à l’intérieur du café Terminus étaient forcément des « connards », et qu’ils méritaient donc de sauter.

            D’autant que même le fait d’être un connard n’est pas une raison pour se faire buter.

            Personnellement, je suis contre la peine de mort, même contre les derniers des porcs du genre Dutroux. Donc je ne vais pas m’amuser à la justifier pour des gens dont le seul crime est d’être supposés bourgeois.

            Il y a quand même une dimension éthique aux actions qu’on entreprend.

            • « Il y a quand même une dimension éthique aux actions qu’on entreprend. »

              Ben oui. Ou du moins : il devrait.

              • Entre une dimension éthique et un pathos catho larmoyant pour les précieuses vies humaines, y’a de la marge.
                D’autant qu’on en oublierai que les morts y’en a déjà, tous les jours, et que c’est pas l’amour de notre prochain qui va nous sortir de la merde.

                • « un pathos catho larmoyant pour les précieuses vies humaines »

                  Dit-il, confortablement installé derrière son ordinateur...

                  Ce mépris des vies humaines est bien caractéristique du fascisme. Heureusement pour nous, la plupart n’ont pas les moyens de leur ambitions et encore moins le courage.

                  • Tiens, quand on parlait de confusion entre le meurtre et le fascisme...

                    Et qui méprise la vie humaine de celui qui récuse la violence révolutionnaire, lui préférant la violence bourgeoise ordinaire ?
                    « Typique du fascisme » cette façon de ne pas réfléchir avant de parler.....
                    Et de ne pas lire, d’ailleurs, puisque ça a déjà été dit.

                    • Tiens, quand on parlait de confusion entre le meurtre et le fascisme...

                      Quelle confusion ? L’attentat aveugle est d’essence fasciste et sa justification par le fait que les victimes soient de près ou de loin des collaboratrices de classe aussi.

                      Et qui méprise la vie humaine de celui qui récuse la violence révolutionnaire, lui préférant la violence bourgeoise ordinaire ?

                      Vieille technique de l’homme de paille. Je suis contre la violence aveugle, donc je suis contre la violence révolutionnaire, donc je suis pour la violence réactionnaire. Tu vois, à quelques décennies près, tu aurais fait un bon stal aussi.

                  • D’ailleurs, puisque le troll vole bas :
                    Quel est le rapport avec le fait que je sois derrière un écran ?
                    Tu récusais déjà le raisonnement de celui qui prend les armes (Henry).
                    Il était fasciste lui aussi ?

                    • mardi 6 octobre 2009 à 12h00, par luc

                      cherche pas, kaos, ils voient des trolls partout, sur ce site, quand on n’est pas d’accord avec eux... Moi-même j’y ai eu droit, hier à 15:22 (cf. ci-dessous). Et, comme tu pourras le constater, je suis un troll particulièrement imprévisible puisque j’étais accusé tout à la fois 1) de justifier les attentats à l’aveugle 2) et d’en nier l’existence.

                    • Quel est le rapport avec le fait que je sois derrière un écran ?

                      Y en a pas, c’est juste que ça me fait rigoler les discours grandiloquent de ceux qui, bien planqués, ne se mettront jamais en danger.

                    • @luc : j’avais vu vos échanges qui partent un peu vite en cacahouète.
                      Mais les premières réponses de JBB (à mon message) n’étaient pas inintéressantes, avant que CaptainObvious ne largue ses simplifications outrancières et ses déformations calculées.

                      Et pour une petite réponse rapide à notre superhéros : oui, une barricade n’a que deux côtés. Et la conciliation pacifique est un gaz de combat notoirement utilisé pour endormir la révolution.
                      Mais parle-moi encore de la façon juste de mener la lutte et de la nécessité d’en condamner fermement les dérives. Oh Oui, fouette-moi.

                      • Sans revenir sur l’utilité et le bien fondé de l’attentat aveugle qui me semble contre-productif.

                        Même très mal équipé en matière oculaire (je sais c’est pour ça que ça s’appelle aveugle), il y a quand même une quantité phénoménale de cibles éminemment plus symboliques que des buveurs de bière pour saisir l’opinion publique ou poursuivre une lutte/révolution.

                        La liste des namedroppables entrant actuellement dans cette catégorie est si longue qu’il faudrait probablement toute une vie pour l’énumérer. Allez au hasard quelques nuisibles BHL, Attali, Baudoin Prot, n’importe quel CA de banque et de la majorité des grandes entreprises françaises et étrangères. Enfin bref, les ennemis de classe clairement identifié, c’est pas ce qui manque.

                        Et si on prend le temps de réfléchir avec un minimum de cynisme (même pas besoin d’aller jusqu’au degré pratiqué par les exemple suscités hein), on comprend de suite que niveau efficacité, il n’y a pas de communes mesures.

                        Maintenant c’est sûr, les caissières de supermarché à mi-temps participent elles aussi à la vaste entreprise d’asservissement générale mais est-ce que cela doit faire d’elles des choix valides... Non !

                        • Tiens un commentaire cohérent, ça se faisait rare.

                          Quitte à choisir une cible ’symbolique’, est-ce que le style de vie bourgeois de ce qu’on ose appeler ’la belle époque’ n’est pas un cible de choix dans ce domaine ?
                          Henry n’est pas allé poser sa bombe dans un café au hasard contrairement à ce qui est dit plus haut, il a choisi un café notoirement bourgeois, pas un bouge de Ménilmontant.

                          • J’imagine, mais je n’ai ni le temps (étant présentement au travail), ni l’envie (oui je dois le confesser) d’aller vérifier, qu’il existait à l’époque des cantines un peu plus « select », donc identifiées pour les banquiers et autres exploitants du petit peuple que le fameux café dont il est question.

                            Il devait rester quelques salons littéraires où il était bon ton de se montrer lorsque l’on était du côté des nantis, sans parler des palaces et des grands restaurants.

                            J’enquille en grand écart facial. A mon humble avis, des mecs comme Rimbaud, Apollinaire, Magritte, Duchamp ou Aragon ont bien plus fait avancé la cause révolutionnaire et souvent à leur corps défendant (je pense à Rimbaud qui finit dans la contrebande d’armes) qu’un type comme Henry. Je sais si je commence à plaider pour ceux qui font avancer la cause à leur corps défendant, très vite on peut placer GW Bush au firmament du panthéon révolutionnaire !

                        • D’ailleurs, j’aimerais bien savoir qui a vraiment été blessé et/ou tué dans cette affaire, histoire qu’on voit à quel point il était aveugle.

                      • Et pour une petite réponse rapide à notre superhéros : oui, une barricade n’a que deux côtés.

                        Yeah man !

                        Y a pas à dire t’es un vrai dur. Faut pas rigoler avec toi. Des barricades, 2 cotés. Une telle radicalité me fait trembler dans mes baskets. Bon l’avantages aussi c’est qu’il n’y pas besoin de trop réfléchir, genre sur le sort des prolos qui travaillent à TF1, ces traîtres qui ne méritent que d’être carbonisés par des couillus comme toi qui savent tout et qui peuvent mettre à feu et à sang n’importe quoi tant que c’est étiqueté ennemi de classe.

                        Dis moi, en parlant d’étiquette, tes vêtements, ils viennent d’où ? fait à la main, a partir de chanvre bio local ou fabriqué par des gamins asiatiques ? et ton ordi ? Moulé à la louche par des artisans ardéchois ou fabriqué dans les lao gaï chinois ?

                        Finalement, tu serais pas un peu du mauvais coté de la barricade non plus ? tu mériterais pas un peu de te faire sauter la gueule toi aussi ?

                        Enfin, bon, suffit de discuter, quand c’est que tu vas démolir TF1 ? Aller, je t’aide, pour l’explosif tu as juste besoin d’essence et d’engrais. C’est pas cher et ça se trouve facile.



  • Deux :
    La répression d’Etat est inévitable, que peut-on faire si on ne veut pas la provoquer ?

    De plus, si l’attentat aveugle est inutile et contre productif, comment expliquer que le terrorisme moderne semble justement principalement y recourir ?

    Une distinction peut être faite : cela peut être efficace, voire accepté par un groupe, lorsque un tel attentat n’est pas perpétré contre son propre camp. je m’explique. en 2004, supposément Al Qaeda aurait fait sauter le métro de Madrid, en tuant plus de 200 innocents. ils ont quand même réussi à influencer le vote qui devait se tenir peut après et ainsi provoquer le retrait des troupes espagnoles d’Afghanistan. Le Hezbollah raisonne de la même manière lorsqu’il tire des roquettes à l’aveugle sur Israël. En bref, quand c’est chez les autres ca passe.

    Peut être que pour Henri, les autres c’étaient les bourgeois ?

    Et malheureusement aussi, la notion d’innocent varie énormément d’un groupe à un autre. les américains sont-ils innocents puisqu’ils ont élu George Bush ? pour nous, cela ne justifie pas le 11 septembre, pour Al Qaeda oui...

    Sans porter de jugement, je constate cependant que la question de l’efficacité et et du bien fondé de l’acte est compliquée et souvent subjective.

    • « si l’attentat aveugle est inutile et contre productif, comment expliquer que le terrorisme moderne semble justement principalement y recourir ? »

      C’est une très bonne question. :-)

      Il est pour moi contre-productif si tu prétends servir une cause juste, censée faire avancer la société dans laquelle tu vis. Il ne l’est à l’évidence pas si tu souhaites d’abord marquer un grand coup médiatique, terroriser la population, te situer dans le cadre d’un affrontement international (comme tu le remarques et je te propose sur ce sujet de consulter l’entretien, publié sur ce site, du collectif américain Retort, autour des attentats du 11 septembre) ou que tu n’en as pas grand chose à carrer des conséquences de tes actions (à l’image, par exemple, de groupes comme Le Sentier Lumineux, expert dans l’hémoglobine de masse, ou de la campagne dantesques d’attentats à la bombe lancée par Escobar en Colombie en 1993).

      Ensuite, y a un deuxième truc : au cours du XXe siècle, tu trouveras souvent, derrière les attentats à la bombe aveugles, trace de manipulations diverses et variées. Le jeu est brouillé, les intérêts compliqués, les bénéfices tordus et très indirects.
      On retombe là sur l’excellent ouvrage de Mike Davis, Petit histoire de la voiture piégée, lequel montre notamment (désolé, je vais citer mon billet sur le bouquin) « ce que nombre de ces groupes terroristes doivent au soutien des États et à la main des agences gouvernementales. L’incroyable succès de la voiture piégée au long du XXe siècle est ainsi aussi/d’abord le fait des puissances installées, jamais fatiguées de remuer le feu sous la cendre, d’avancer leurs pions meurtriers et de manipuler les exaltés de tous poils ».

      « Peut être que pour Henri, les autres c’étaient les bourgeois ? »

      Ça, c’est clair. Il le dit d’ailleurs très clairement.

      « je constate cependant que la question de l’efficacité et et du bien fondé de l’acte est compliquée et souvent subjective. »

      Je ne peux te donner tort, il y a quelque chose de très logique dans ta remarque. Pourtant, je ne m’y rangerai pas. Pour moi, tout simpliste que ça puisse paraître (et marqué de cette bonne vieille conception judéo-chrétienne du bien et du mal), il y a toujours une légitimité objective à dégager (ou pas).

    • dimanche 4 octobre 2009 à 22h19, par krop

      comme est inévitable le regard que l ont porte sur soi même !.

    • De plus, si l’attentat aveugle est inutile et contre productif, comment expliquer que le terrorisme moderne semble justement principalement y recourir ?

      L’attentat aveugle n’est pas forcément inutile et contre-productif. Ça dépend beaucoup des buts visés. Si, comme en Irak, le but c’est d’infliger la terreur à une population civile, c’est assez efficace. Par contre pour mettre en place les bases d’une société plus juste, c’est clairement contre-productif.



  • Dans l’histoire le recours aux attentats aveugles ont pour la plupart légitimés la répression et toutes les mesures de flicages exercées par le pouvoir y compris la manipulation comme dans l’attentat de la gare de Bologne en 1980, ou la presse et le gouvernement italien on commencé par prétendre à une action des brigades-rouges alors que c’était le fait de l’extrême droite manipulée par les services secrets. Ce qui ne veut pas dire que prendre les armes ne soit pas à un moment nécessaire mais certainement pas en tuant aveuglément.

    • « ...Ce qui ne veut pas dire que prendre les armes ne soit pas à un moment nécessaire mais certainement pas en tuant aveuglement ... »

      Il me semble, à mon très humble avis, que la tache est plus de faire en sorte que ceux qui disposent des armes les déposent, que de les prendre...mais je suis un genre incorrigible Rosa Luxemburgiste....

      Salud y pesetas

      • « Il me semble, à mon très humble avis, que la tache est plus de faire en sorte que ceux qui disposent des armes les déposent, »

        N’ayant aucune passion pour les armes et ceux qui les portent j’estime également que cela serait le mieux car je considère que la violence n’a jamais rien résolu. Cependant, il n’en est pas moins vrai que les résistants en 40 n’ont guère eu d’autres solutions pour se faire entendre.

        • Certes il y a eu des personnes magnifiques et anonymes chez les resistants, mais faut pas oublier que ce sont d’authentiques résistants qui ont livré Jean Moulin aux nazis, par exemple...
          alors magnifier la « lutte armée »...????

          • alors magnifier la « lutte armée »... ????

            Je ne vois pas dans mes écrits le moindre mot magnifiant la lutte armée. J’ai tout au plus dit que je m’abstiens de juger ceux qui à un moment donné ont pu se saisir d’une arme dans des circonstances où on ne leur laisser guère le choix. Quant à ceux qui ont livré Jean Moulin ils ne valent guère mieux que ceux qui se prétendant de gauche sont passés sans armes mais avec bagages dans les rangs de Vichy. En outre il est toujours plus facile de palabrer et de se prétendre « ceci » ou « cela » tant que l’on est pas dans une situation extrême.

            • non, non, ce n’est pas dans tes ecrits que je voyais une apologie de la lutte armée, ne te meprends pas Mr. wuwei, mais dans d’autres posts...puisqu’il me semble que le sujet c’est un peu « lutte armée, terrorisme, action directe chez les anars » et tutti quanti, j’exprimais juste mon point de vue...et les situations de violence, vu mon age, j’en ai connu, et de bien saignantes...fin des années soixante-début soixante dix, il y a eu des moments chauds en france...t’en souviens-tu ?...quand à se pretendre ceci ou cela, je suis vacciné et ne pense pas avoir perdu mon immunité...
              Salut...



  • @kaos

    à quoi on peut ajouter que c’est aussi à propos de ces années 1890, que l’article et les commentaires auxquels tu réponds sont aberrants. Le geste d’Henry, quelle que soit l’opinion que l’on puisse avoir à son propos, se voulait réponse concrète à l’exécution de Vaillant, survenue une semaine (!) plus tôt. La première des lois scélérates, elle aussi antérieure à son geste, date de décembre 1893. Et sa décision même de recourir à l’explosif survient en 1892 dans une période qui est déjà une période d’intense répression contre ce qu’il est convenu d’appeler mouvement ouvrier : le massacre de Fourmies date du premier mai 1891.

    C’est là bien sûr ce que se garde bien de souligner cet ouvrage ignorant, racoleur jusque dans son titre, et dont le sous-titre indique clairement les buts recherchés, dans la foulée du 11 septembre 2001... Les mêmes remarques valent à epsilon près pour les Etats-Unis de 1919-20 et l’ouvrage mystificateur de ce Mike Davis, sur lequel JBB n’en finit pas de s’extasier.

    On ne rend pas service au lecteur quand on spécule sur son ignorance des faits, et sur ses souvenirs de lecture de Dostoïevski, pour l’entraîner -à propos d’Henry- dans la direction d’un attentat de type nihiliste, qui aurait été commis au nom de la seule idée esthético-philosophico-intellectuelle que il n’y a pas d’innocents. Et la bonne foi de JBB, qui de son propre aveu parle ici de ce dont il ignore tout, serait mieux attestée s’il n’avait titré son article, « l’acte de naissance de la bombe à l’aveugle » -là où l’attentat d’Henry en fut au contraire l’acte de décès, pour ce qui est du mouvement anarchiste.

    • Euh…

      Un, je ne vois pas en quoi répondre à un massacre par un autre, Foyot en réaction à Fourmies, est intelligent. S’attaquer aux flics, au pouvoir, aux exploiteurs, oui ; balancer une bombe au hasard dans un café, pour moi, c’est juste de la merde.

      Deux, j’attends avec grande impatience - que je rigole - une réponse argumentée à l’ouvrage de Mike Davis. Tu peux l’expédier en un mot, « mystificateur », mais ça ne suffit pas vraiment à décrédibiliser un ouvrage aussi fouillé. A moins, bien évidemment, que tous les travaux d’historiens et bouquins ne suivant pas ta ligne, celle de la justification des attentats aveugles, ne soient que mystification… Auquel cas, le débat est clos, je te laisse faire joujou dans ta tour d’ivoire de Saint-Just apôtre du boum-boum.

      Trois, nulle référence n’a été faite aux nihilistes ou à Dostoïevski. En l’occurrence, Henry n’était pas nihiliste. Mais,il me semble qu’il s’est royalement planté, et c’est ainsi que son acte a été perçu par la majorité de ses camarades de l’époque. Tu peux toujours te plonger sur le passé en les traitant de pisse-froid, mais c’est juste très très facile : une bonne partie de ceux qui ont refusé de cautionner l’attentat d’Henry n’étaient pas vraiment des révolutionnaires de salon et en avaient suffisamment chié pour qu’on respecte leur position.

      • lundi 5 octobre 2009 à 14h36, par luc

        au lieu de falsifier mon propos (d’une manière qui n’est pas sans poser des questions sur ton présent ou sur ton passé militant), et de me présenter comme ayant ici justifié les attentats aveugles, tu ferais mieux d’aller te cultiver. Point ne sera besoin d’ouvrages savants : dans les mémoires d’Emma Goldman par exemple tu découvriras comment les Etats-Unis connurent en 1919-20 une vague de terreur anti-ouvrière sans précédent dans l’histoire de ce pays, connue sous le nom de red scare, et dans le contexte de laquelle fut commis l’attentat que ce Davis fait mine de découvrir avec gourmandise.

        Pour le reste je précise et si besoin est que je n’ai pas de « ligne » à défendre : il y a ce qui est vrai, il y a ce qui est faux -et c’est tout. Mais à l’impossible neutralité, nul n’est tenu... Et à ce titre je suis sans grande indulgence pour la puérile opération idéologique (post-onze-septembriste) à laquelle nous avons assisté avec la publication de ces deux ouvrages qui de mon point de vue, n’appellent pas de réponse sur le terrain historien.

        • lundi 5 octobre 2009 à 14h48, par JBB

          Répondre par la mise en doute de la sincérité militante, c’est juste minable comme argument. Autant que les trucs du style je-dis-que-tel-bouquin-c’est-de-la-merde-mais-je-m’abaisserai-pas-à-expliquer-pourquoi. Surtout quand tu parles de Mike Davis, qui n’est pas vraiment ce qu’on pourrait appeler un suppôt de la réaction.

          Sinon : merci pour tes lumières. C’était vraiment sympa de t’abaisser à mon niveau, grand gourou.

          • lundi 5 octobre 2009 à 15h21, par luc

            cette fois-ci tu nous en as dis trop ou pas assez, JBB. Non pas, en ce qui me concerne (je n’ai jamais fait mystère de mon titre de grand gourou), mais en ce qui te concerne : tu te présentes comme étant militant. Et, soit dit sans vouloir faire jouer à Internet un rôle policier qui n’est pas le sien, il me semblerait normal que par égard envers le public, et par fidélité envers tes propres convictions, tu précises de quel militantisme il s’agit.



  • Sur la question de l’emploi de la violence et de sa légitimité, il y a un (excellent) bouquin de Camus, c’est sa pièce « les justes ». Je crois que « l’homme révolté » est aussi sur le sujet, mais je n’en ai lu que quelques extraits. Le dernier (plutôt bon) film de Guédiguian, l’armée du crime en parle aussi incidemment.



  • Un article intéressant intitulé « Le mouvement anarchiste français et la Propagande par le Fait : l’exemple des frères Henry », repris intégralement sur le site de l’Atelier de Création Libertaire (http://www.atelierdecreationliberta...), est paru dans la revue Gavroche, fin 2008.

    Replaçant les attentats dans leur contexte historique et relatant les divergences idéologiques qui traversent le mouvement anarchiste de l’époque, il présente également l’intérêt d’évoquer largement le frère ainé d’Emile Henry, Fortuné, trop souvent occulté.

    A sa sortie de prison en septembre 1894, au sujet de l’attentat du café Terminus, Fortuné aura ces mots : « C’est un crime passionnel qu’il a commis. Je ne veux ni excuser ni expliquer mon frère, c’est l’avenir qui le jugera. On peut réprouver la bombe (…) on peut dire que c’est une folie, mais on ne peut pas dire que c’est un vil intérêt qui l’a poussé. ».

    • Je trouve extrêmement déplaisante la façon qu’a le dénommé Luc de s’adresser à JBB. Celui-ci, pas plus que nous, n’a la science infuse, et il peut certainement lui arriver d’ignorer tel ou tel événement, voire, horreur, de n’avoir pas lu tel ou tel livre. Si dès qu’on a une divergence on lance une injure ou l’on assassine son interlocuteur, à quoi bon discuter, dialoguer, échanger des arguments ? Apparemment, M. Luc doit vivre dans un univers ultra-radical, ne fréquenter que des adeptes de la ligne juste et jeter sur le vulgum pecus le regard méprisant que semble d’ailleurs jeter sur ses contemporains le dénommé Kaos. Tout cela fleure bon le pol-potisme autonomo-ultra-gaucho-radicalo casse-couilles.
      Merci à JBB de continuer à nous faire partager ses découvertes, ses enthousiasmes, ses coups de coeur. Merci à lui de prendre le temps nécessaire pour cela. Et merde aux donneurs de leçons, aux Saint-Just informatiques, aux Netchaïev de clavier. Je crains le jour où ils troqueront l’ordinateur pour le fusil d’assaut.

      • @ kok6gru : merci pour le lien. Ce que fait l’Atelier de création libertaire est en effet plus qu’intéressant. Carrément passionnant !

        Et tu as raison de rappeler l’existence de Fortuné Henry. Personnage important du mouvement anar, il a, après la mort de son frère et un passage en prison, fondé une communauté anarchiste dans les Ardennes. Une expérience qui a tourné court en quelques années.

        @ Karib : merci à toi :-)

        Outre le fait que tu prends gentiment ma défense, je te rejoins totalement sur cela :

        « merde aux donneurs de leçons, aux Saint-Just informatiques, aux Netchaïev de clavier. Je crains le jour où ils troqueront l’ordinateur pour le fusil d’assaut. »

        Rien n’est plus chiant que l’abominable esprit de sérieux de ceux qui se comportent sans cesse en stals jusqu’au-boutiste.C’est fatiguant et contre-productif.

        • mardi 6 octobre 2009 à 17h25, par Alunk

          Je hais cette société car elle est totalement mortifère, et y oppose l’amour de la vie. Si MALHEUREUSEMENT nous ne pouvons exclure la nécessité ponctuelle des armes, nous devons en définir les limites et surtout ne pas en être les esclaves. Parce que notre philosophie politique l’exige, mais aussi parce que l’histoire nous a appris que les Béria commencent toujours par les contre-révolutionnaires, puis par les tièdes, puis finissent par les plus engagés des révolutionnaires.
          Merci JBB de garder ton calme et de maintenir un niveau d’intelligence -dans la contradiction constructive- à ton blog



  • Un de tes anciens articles m’a fait découvrir Théodore Kazinsky (un mec en parlait dans les commentaires) et ce fut une découverte tout a fait monstrueuse.
    Désormais, celui-ci ne me laisse non plus indiffèrent et je viens de recevoir aujourd’hui « Dynamite Club ».
    Je vais le lire avec attention puis reviendrai ici poster un message à propos de ma lecture.
    Une chose est certaine que tu m’est d’une aide très précieuse JBB, Théodore kazi, ca a été la révélation pour moi, après Bakounine et Thoreau, MERCI ;D

    Voir en ligne : http://grossebourse.blogspot.com/

  • Répondre à cet article