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mardi 26 août 2008

Le Charançon Libéré

posté à 13h54, par JBB
17 commentaires

Dans l’éternelle lutte entre le bien et le mal, la France a choisi son camp. Sus aux infidèles !
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Il y a ceux qui, à l’image de la ministre des affaires étrangères suisse, baissent déjà leur pantalon face au totalitarisme taliban. Et il y a les autres, qui sont décidés à mener la croisade contre le Mal absolu et multiplient à l’envi rodomontades guerrières et amalgames douteux. Notre glorieux président fait partie des seconds. Ça ne devrait pas vous étonner plus que ça…

Je suis déçu.

Vachement désappointé.

Et même carrément dégoûté par la récente prise de position de nos voisins helvètes.

Non que j’attache une grande valeur à l’opinion des Suisses, hein.

Mais je n’imaginais pas que ce petit pays puisse se montrer si veule et lâche.

Si tolérant face à l’abjection.

Si munichois, en fait.

Je sais, je sais : j’aurais dû me douter qu’il n’y avait rien de bon à attendre d’une nation professant la neutralité et le refus du militarisme.

Et savoir que bon sang ne saurait mentir, la compromission étant l’une de ces valeurs que l’on inculque dès le plus jeune âge aux petits suisses (désolé… il fallait que je la place…).

Mais : quand même…

Que l’Helvétie accepte de s’attabler avec le malin et consente à ripailler avec Belzébuth me défrise.

Et je ne peux que regretter la déclaration de Micheline Calmy-Rey, ministre des affaires étrangères suisse.

Laquelle vient d’annoncer qu’elle serait prête « favoriser le dialogue avec Oussama Ben Laden et Al-Qaïda  ».1

Tout en prévenant ceux qui y verraient une « glissade prototerroriste » : « Le dialogue ne conduit pas inexorablement à accepter l’inacceptable ; comprendre ne veut pas dire excuser et ne signifie pas complicité ».

Comme si, quand il s’agit d’affronter le mal absolu, on pouvait se permettre ces minauderies et ces demi-mesures…

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Cette prise de parole de la ministre suisse aura au moins le mérite de clarifier les choses.

Et de montrer qu’il existe bien deux camps face au totalitarisme taliban.

D’un côté, ceux qui en ont dans le pantalon.

De l’autre, ceux qui préfèrent le baisser .

Au fond, on doit se réjouir que des positions nettes se fassent jour, séparant clairement les munichois qui se ponce-pilatent les mains des courageux défenseurs de l’humanité, résolus à se battre pied à pied pour toutes ces valeurs qui nous dépassent mais méritent qu’on se tatane énergiquement la gueule.

On ne peut donc que se féliciter de la récente prise de position de Nicolas Sarkozy.

Meneur de revue présidentiel qui, à Maillé, ce village victime de sanguinaires nazis, a su ne pas y aller avec le dos de la cuillère pour mieux décrire les enjeux du conflit en Afghanistan.

« On comprend mieux ce que peut signifier le mot d’humanité quand on le confronte à l’inhumanité absolue, comme on comprend mieux ce que veut dire la civilisation et pourquoi il faut la défendre quand elle se trouve confrontée à la barbarie la plus totale », a d’abord classiquement rappelé notre guide mémoriel.

Avant de s’éloigner quelques secondes de son discours officiel et écrit pour une envolée pleine d’à-propos : « Et je pense notamment au sacrifice de nos dix jeunes soldats, face à ces barbares moyenâgeux terroristes que nous combattons en Afghanistan. »

Tant il est vrai que le mort au combat de dix soldats est comparable au massacre de 124 civils.

Et que l’hydre taliban vaut le totalitarisme nazi.

Hein…

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Qu’on ne s’y trompe pas.

Ce léger écart de parcours oral est le seul passage significatif du discours.

Aussi bien en ce qu’il illustre une nouvelle fois l’absence de scrupules de Nicolas Sarkozy, prêt à toutes les récupérations et amalgames du moment qu’ils lui sont utiles (sans même sentir combien le drame de Maillé est plus proche du bombardement aveugle par les alliés de 90 civils afghans que du décès de 10 soldats d’occupation dans une guerre qui n’est pas la leur).

Qu’en ce qu’il expose au grand jour ce qui était patent depuis quelques mois : l’entrée de la France, sans tambours ni trompettes, dans la grande alliance bushiste du bien contre le mal.

Nos soldats étant désormais engagés dans une croisade, celle que personne ne pourrait refuser de mener contre un ennemi si abominable que ses exactions doivent se mesurer à l’aune des horreurs nazies.

Une thématique qui devrait fleurir dans les mois, si ce n’est les années à venir, tant il est désormais évident que la France va mettre des forces croissantes dans la bataille afghane.

En un mot : Montjoie Saint-Denis, sus aux infidèles et aux salopards !

Quant aux Suisses…



1 Basé sur une dépêche AFP, l’article du Monde est titré : La ministre des affaires étrangères suisse prête « à s’asseoir à la table de Ben Laden ». Une manipulation selon le Réseau Voltaire, qui souligne que les propos initiaux de la ministre ont été déformés.


COMMENTAIRES

 


  • L’argument de Munich commence à me courir largement sur le haricot et je réfléchis à un billet sur cette figure de style - variante de la théorie de Godwin -, parce qu’en quelques jours les différents Munich ont commencé à s’empiler dans les discours de tous les va-t-en-guerre que ce soit au sujet de l’Afghanistan ou de la Géorgie ou de l’Irak et demain l’Iran Avant, on sortait Munich tous les deux ou trois ans seulement - pour la Croatie, pour la Bosnie, pour le Kosovo, mais pas pour la Palestine ou la Tchétchénie ou la Côte d’Ivoire ou le Congo ou... Il y a des Munich un peu partout à présent selon les causes médiatiques, ce seul nom suffit à décrédibiliser l’interlocuteur (qui sera de toute manière non plus un pacifiste bêlant ou un agent de la cinquième colonne, mais un bobo - la suprême insulte des temps nouveaux). Comment pourrait-on donner raison à Hitler et Mussolini en même temps lorsque l’on reçoit l’épithète de munichois ? On rentre dans le rang alors... Munich est devenu la tarte à la crème des bonimenteurs néo-cons qui veulent des guerres sans réfléchir à la suite et qui hurlent au lieu d’argumenter les faits, mais à force d’en user cela finira par se voir.

    • Je ne crois pas que Munich ne soit qu’un argument, c’est plutôt l’illustration de la philosophie générale d’après-guerre : si on intervient pas, voyez ce qui arrive. Le problème c’est que la plupart des ressentiments ont été créés par les puissances alliées, Françaises et Anglaises, avec toutes les conditions de paix imposées aux Allemands. Une intervention a mené à plus d’intervention.

      On peut aussi faire remarquer que la solution finale n’a été mise en place que lors de la guerre, et que Goebbels lui-même a déclaré que sans cette guerre, aucune extermination des Juifs n’aurait été possible.

      Cela est aussi appuyé par le livre « They thought they were free » de Milton Mayer, qui date des années 50, où il part dans un village en Allemagne, interviewer des anciens Nazis, dont un qui disait travailler à l’intérieur du système pour le corrompre. Parmi les dix qu’il a pu interroger pendant plusieurs mois, aucun n’a jamais approuvé directement l’extermination, ni même reconnu en être au courant. Ils savaient que quelque chose se passait, mais sans plus.

      Voir en ligne : Ils pensaient qu’ils étaient libres

      • @ Dominique : ô comme je vous comprends pour Munich. Et même quand la référence n’est pas expressément présente, on la sent qui tournoie dans l’air. Le discours de Sarko à Castres cet après-midi (pour une fois, je l’ai vu à la télé. En fait, il ne sait pas parler et passe son temps à enchaîner les fautes, les approximations et les mauvaises tournures de phrases. Un désastre…) était ainsi empli de cette référence silencieuse.

        @ Littlehorn : « aucun n’a jamais approuvé directement l’extermination, ni même reconnu en être au courant. Ils savaient que quelque chose se passait, mais sans plus ».

        Je n’ai pas lu ce livre. Mais… Qu’ils n’approuvent ni ne reconnaissent qu’ils aient été au courant ne prouve en rien qu’ils n’aient pas approuvé ou été informés avant, non ?



  • Quant aux Suisses…

    M’est avis qu’ils mangent trop de chocolat, ça doit être ça. Mais ma foi, mieux vaut manger du chocolat que les pissenlits par la racine... Enfin, ce n’est que mon avis n’est-ce pas.

    Voir en ligne : http://repvblicae.wordpress.com/

    • mardi 26 août 2008 à 18h29, par JBB

      On est d’accord. Je suis même prêt à manger le chocolat par les racines, d’ailleurs…



  • En 1938 à Munich, la France et la Grande Bretagne avaient sacrifié la Tchécoslovaquie aux appétits de Hitler pour tenter de sauver la paix.
    Le terme est resté depuis synonyme de lâcheté politique

    • mardi 26 août 2008 à 18h38, par JBB

      Un rapide rappel historique des termes du problème ne saurait nuire.

      Le meilleur reste le « ah, les cons ! » prêté à Daladier à son retour de Munich, quand une foule en liesse l’acclame au lieu de le huer.

      • mardi 26 août 2008 à 18h58, par Solveig

        Tout à fait.

        L’accord comprenait les plébiscites et la cession de territoires. Après la signature, les Tchèques sont introduits dans la salle : « Cela ressemblait à une lecture de verdict de tribunal, rapporte Daladier. Chamberlain fit une brève allocution, s’efforça d’expliquer les termes de l’accord. Les Tchèques furent dignes, mais Mastny (le représentant tchèque) ne put retenir quelques larmes... ».

    • mardi 26 août 2008 à 22h17, par littlehorn

      Vous ne pensez pas que cette version de l’histoire justifie précisément l’utilisation de l’argument de Munich de la manière dont les atlantistes le font ? Pour y mettre fin il faudrait peut-être ne plus regarder les évènements avec l’œil des mêmes qui nous sortent Munich pour justifier l’Iraq.

      Les histoires que nous racontons, à nous-mêmes et aux autres, déterminent la façon dont nous regardons le monde, la façon dont nous agissons. En ce sens, l’histoire de ce qui a mené à la 2nde Guerre Mondiale est telle un mythe de création pour la France. Et tout comme le mythe de la création de la femme, telle qu’expliquée dans la Bible, a mené les Chrétiens à voir les femmes comme inférieures,
      dire que la lâcheté a permis Hitler amène logiquement les uns et les autres à conclure qu’il faut intervenir avant que tout ne dégénère.

      Alors je vais être choquant, mais il faut bien le dire : dès le moment où le Traité de Versailles a été détruit par les Français et les Anglais revêches, qui ont imposé des conditions extrêmes, on ne pouvait que s’attendre à quelque chose comme Hitler. Hitler a été notre punition. C’est le traité qui a produit Hitler. Pas notre lâcheté.

      Cependant, j’engage aussi la responsabilité de Woodrow Wilson, qui lui n’était pas aussi mauvais perdant que nous, mais qui ne s’est pas opposé du tout, alors qu’il avait promis une paix sans condition aux Allemands.

      Mais pour en revenir à la Tchécoslovaquie, vous auriez voulu quoi exactement ? On devrait rappeler que le territoire en question a été arraché aux Allemands à la suite de ce traité maudit ! Je dis que Hitler était un monstre, mais que dans le cas de ces morceaux de territoire, il était dans son droit. Et ce n’est peut-être pas la lâcheté qui a vaincu lors de ces négociations, mais tout simplement l’absurdité de la situation qui est devenue intenable.

      Cela semble incohérent avec la déclaration de Daladier, mais seulement à première vue. Si vous y réfléchissez, Daladier se moquait des gens qui pensaient que la guerre avait été évitée, et évidemment elle ne l’a pas été. Et ce n’était pas ce qu’ils avaient en tête.

      Enfin, j’aimerais savoir de quelle lâcheté nous parlons ? Pourquoi devions-nous avoir peur ? Les Allemands gagnaient en puissance, mais nous étions toujours bien plus forts ! Non, ceux qui expliquent la Tchécoslovaquie par la lâcheté ne font que partir du mythe créé par Vichy pour expliquer la défaite Française. Non décidément, pour moi ce n’était pas de la lâcheté.

      • mercredi 27 août 2008 à 10h13, par Solveig

        ON a enterré la liberté en Europe en laissant la seule démocratie d’Europe centrale à l’abandon !

        Au retour de Daladier, Léon Blum lui-même déclare connement avec grandiloquence et des trémolos dans la voix : « Il n’y a pas une femmeeeee, pas un homme en Franceeee pour refuser à MM Chamberlain et Daladier leur juste tribut de gratitudeeeee ».
        Il cède ainsi aux sirènes de la politique de l’autruche...

        En 1938, l’écrivain Céline s’en prend aux méfaits de la guerre dans une approche antisémite avec deux bouquins qui dénoncent les Juifs comme des fauteurs de guerre « le spectre d’une nouvelle apocalypse, c’est aux Juifs qu’on le doit et patati et patata ». MALAISE : les lecteurs adorent !
        Comment alors s’étonner qu’une partie de l’opinion publique voyant dans le Juif l’agresseur potentiel de l’Allemagne, n’hésite pas à abandonner la Tchécoslovaquie... au nom de la paix ?

        Il y a bel et bien eu une trahison franco-britannique, et Staline en a même recueilli les fruits ...

        • mercredi 27 août 2008 à 13h14, par littlehorn

          Nous avons créé Hitler, par le traité de Versailles. La suite était logique. Une fois Hitler au pouvoir, il n’y avait plus de chance de revenir en arrière. Et tous les moulinets des pseudo gros durs d’aujourd’hui ne sont pas le résultat d’un véritable courage intellectuel, mais plutôt la conséquence de toutes les certitudes et de toute la propagande qu’on leur inculque depuis qu’ils sont tous petits.

          Autre petit problème, si on avait déclaré la guerre au moindre signe de résistance de l’Allemagne, alors le champ aurait été d’autant plus libre pour l’URSS.



  • mardi 26 août 2008 à 22h40, par Jean-Marie Liégeois Belgique

    Bonsoir Charançon,
    tu m’as fait peur au début de ton article mais la suite m’a rassuré !
    As-tu vu ce soir le JT de FR2 ?
    En invité d’abord l’inénarable Bernard Koucouche qui s’est exprimé par rapport aux russes en se contorsionnant sur sa chaise pour tenter de rester crédible.
    Ensuite, le père d’un jeune soldat tué en Afghanistan qui nous a expliqué qu’il avait réagi la semaine dernière en père qui condamnait la présence française la-bas mais que c’était le citoyen qui se trouvait à côté de Koucouche devant « Poujadas la vaseline » et que le citoyen ne parlerait pas comme le père avait parlé.
    Le citoyen pense que cette guerre, il faut la faire, qu’il faut au besoin envoyer plus de soldats, plus de matériel et qu’il allait changer d’occupation pour fonder une associaton qui viendrait en aide aux parents des militaires morts aux combats pour la « France » !
    Qui a bien pu transformer aussi vite un père déplorant la mort de son fils en un « citoyen » prêt à sacrifier tous les jeunes de France sur l’autel des neocons américains ?
    A propos de la Suisse, je disais justement sur un post cet après-midi à un internaute de se poser des questions sur l’origine de la fortune des Bush et je lui demandais de réfléchir au pourquoi Hitler n’avait pas envahi la Suisse alors qu’il ne s’était pas géné avec la Belgique ou les Pays-Bas !
    A plus et bonne continuation pour ce blog.

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