ARTICLE11
 
 

samedi 17 janvier 2009

Le Charançon Libéré

posté à 12h42, par JBB
11 commentaires

Hortefeux, ce « compatriote » qu’on préférerait ne pas avoir…
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La chose pourrait paraître anecdotique. Mais il n’est finalement guère de meilleure illustration de la xénophobie d’état que le récent prétendu impair de Brice Hortefeux, ministre de la République croyant fin de souligner que Fadela Amara est bien « une comptriote » avant de préciser que ça n’allait pas de soi. Un échange digne du pire des cafés du commerce.

Il y a des jours comme ça…


Il pleuvait et tout était gris.

Ville qui pleure et dégouline partout.

Je cherchais une adresse - coin introuvable - et j’avais fini par pousser la porte du premier troquet venu, histoire de me sécher un brin

Accoudé au comptoir, je faisais glisser lentement ma bière.

Sans prêter grande attention à mes voisins de boisson.

Grandes gueules en fin de course, soucieux de s’arsouiller avant la nuit et de boire assez d’alcool pour oublier la journée.

Chacun dans son coin, moi de passage, indifférent, eux trois ancrés ici, clients fidèles.


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Mine de rien - quand même - j’écoutais un brin leur conversation, n’ayant que ça à faire.

Paroles de piliers de comptoir, vieux fatigués de la vie et depuis longtemps aigris, tristes sires évoquant ces arabes qui ne faisaient rien tant que se montrer glandeurs comme pas un, voleurs de naissance, intéressés seulement pas les avantages sociaux et pas digne de patauger dans les mêmes marécages qu’eux.

Discours avinés qu’on a tous entendu un jour, hésitant à intervenir au milieu d’une phrase pour protester de cette connerie flagrante tout en sachant que ça ne servirait à rien.

J’en étais là, décidé à finir ma bière et à quitter au plus vite cette compagnie de peu, quand un arabe est entré.

S’est lui aussi accoudé au comptoir, installé entre moi et les trois fâcheux.

Et a commandé sa bière discrètement, geste de vieil habitué.

A côté, c’était l’effervescence, deux des bougres se poussant du coude et tentant d’alerter le troisième - dos à l’intrus et qui ne l’avait pas encore repéré - de la présence de l’ennemi.

Mimiques sur mimiques pour qu’il baisse le ton, lui ne s’apercevant de rien et continuant à discourir sur la bassesse des arabes et la nécessité de s’en protéger.

Jusqu’à ce qu’il comprenne enfin que quelque chose clochait.

Qu’il se taise.

Se retourne.

Laisse tomber son regard sur l’arabe descendant sereinement sa binouze.

Et s’écrie : « Mais… c’est Mouloud ! Ça va, Mouloud ? »

Les deux autres, muets.

Lui, reprenant : « Ça fait longtemps que t’es pas venu, content de te voir. Je t’offre une bière ? »

Les deux autres, cois.

Lui, faisant signe au bistrotier, petit geste pour lui dire de remettre ça.

Les deux autres, silencieux.

Lui, se retournant vers ses compagnons de boisson et devant leurs mines effarouchées : « Mouloud, c’est pas pareil. Ça fait vingt ans qu’il vient ici, je le connais bien. C’est pas lui le problème, mais les autres. Mouloud, il est des nôtres. »

Tous se sont alors replongés dans leur bière, reprenant leur conversation sur ces basanés qu’ils détestaient.

J’ai fini mon verre et je suis parti.


De cette scène de bistrot tristement banale, il ne faudrait guère prétendre tirer de conclusions.

Sauf à pointer l’immense potentiel de conneries des gens, si bêtes qu’ils en deviennent désarmants.

Il en va autrement - par contre - quand une semblable saynète se déroule sous les ors de la République.

Qu’elle s’inscrit dans le cadre d’une cérémonie officielle de passation des pouvoirs, d’un ministre l’autre.

Et qu’elle est jouée par ceux-là mêmes qui n’ont aucun droit à la bêtise crasse.

Ainsi de Brice Hortefeux, sinistre de l’Identité nationale si habitué à faire la chasse à l’immigré qu’il n’a pu s’empêcher, en pleine cérémonie de passation des pouvoirs, de souligner à propos de Fadela Amara : « C’est une compatriote. »

Avant d’ajouter, sur sa lancée : « Comme ce n’est pas évident, je le précise. »

Plouf-plouf…


Il n’est guère plus révélateur que ce supposé impair.

Triste exemple d’un air du temps que le gouvernement a su instiller.

Où la nationalité française ne va plus de soi que pour ceux dont la peau est blanche.

Les autres - arabes, basanés, noirs, jaunes ou roses fluo - devant prouver qu’ils sont des nôtres, pour l’effarante raison que« ce n’est pas évident ».

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Il n’y a rien de pire que de voir les plus hauts représentants de la République se muer ainsi en piliers de comptoir du café du commerce.

Sinon que d’assister aux pathétiques efforts de la victime de leurs stupides préjugés pour faire semblant de rien.

Et pour rattraper le coup.

Ainsi de la réaction de Fadela Amara à la honteuse sortie de Brice Hortefeux : « Nous sommes tous les deux Auvergnats, lui blond aux yeux bleus et moi un peu… voilà, résultat des courses, on ne ressemble ni l’un l’autre aux Auvergnats, au profil des Auvergnats. C’est pour ça qu’il a dit ça », a tenté de justifier la secrétaire d’Etat à la politique de la Ville.

Triste façon de se prêter à ce jeu malsain.

Quand il eut fallu pourfendre Hortefeux.

Dénoncer son racisme patent.

Et se refuser à le considérer, lui, comme « un compatriote ».

Même si c’est évident, je le précise.



1 Photo Benjamin Lemaire.


COMMENTAIRES

 


  • samedi 17 janvier 2009 à 13h12, par Dominique

    Fissa, fissa ! dégage !
    Brice Hortefeux à Azouz Begag.
    La réalité serait plutôt ça. On a toujours quelques bons bougnoules pour pouvoir taper plus tranquillement sur l’immense masse des mauvais.

    Voir en ligne : http://champignac.hautetfort.com



  • dimanche 18 janvier 2009 à 10h00, par Gitana

    Coucou Charençon........me voilà de retour d’un pays de bougnoules où je me sens comme un poisson dans l’eau ! et rien n’a bougé et surtout pas la bêtise crasse de nos zélites !

    Il y en a beaucoup qui ont leur arabe, leur nègre qui n’est pas comme les autres ça me fait penser aux « bons pauvres » de nos dame patronnesses d’antan. Tout change et rien ne change.

    Si tu ne l’as déjà fait écoute ou réécoute ce brave Adamo et sa chanson « inch’allah » - tout change et rien ne change........



  • dimanche 18 janvier 2009 à 14h46, par Marsiho

    Avec Besson, tout va changer, vous verrez...
    Plouf, plouf...

    Voir en ligne : http://www.politique-jeunesse.com



  • dimanche 18 janvier 2009 à 20h03, par littlehorn

    D’un autre côté, quand le raciste fermait sa gueule, le nationaliste rêvait que la France était trop bonne, trop gentille, quel service qu’on rendait, à jeter les gens dans l’eau, à les parquer dans des immeubles modernes, etc.

    Alors moi je dis, tant mieux qu’Hortefeux se sente plus pisser ! Racisme à l’air, racisme en l’air.



  • lundi 19 janvier 2009 à 15h10, par Isatis

    Ah oui, les propos de café du commerce............... et aussi ailleurs, tenus par des gens que je pouvais croire raisonnables et raisonnés sur le sujet.

    Et bien non ! Combien de fois m’est-il arrivé de tomber sur le cul à l’audition de conversations tenues par des gens que je croyais hors de ces stupidités dangereuses ? La première fois, ça met KO et ça fait réfléchir pour être paré d’une bonne réponse bien cinglante pour les fois suivantes.

    Comme j’ai la chance d’être presque l’Europe à moi toute seule, y compris la Turquie grâce aux origines vraiment très diverses de mes ancêtres, à chaque fois que je me trouve confrontée à un ou plusieurs bas-de-plafond qui bavent sur l’ennemi de l’intérieur (bande de trouillards eunuques de la pensée) je laisse causer et j’attends que ça atteigne l’ignoble, ce qui ne manque pas d’arriver rapido, puis de mon moins moche sourire je demande très gentiment si ça ne gène personne autour de la table (du zinc, du comptoir, de l’assemblée, etc....) que j’ai un arrière grand-père turc ou italien, ou grec, ou....selon la teneur des débats de caniveaux entendus. Je jète le froid le plus bandant possible sur une assemblée merdeuse qui ne sait plus comment s’en sortir, les imbéciles sont mouchés et je vois à leur air perplexe qu’ils se demandent comment se fait-il que j’ai les yeux bleus, la peau blanche à éphélides et pas de couteau en travers du bec pour égorger les fils et les compagnes.

    Rien de vous empêche d’en faire autant, c’est rigolo, ça emmerde le clampin qui déblatère et ça soulage !

    Je me presse de rire de tout de peur d’avoir à en pleurer :-)



  • Madame Valérie (Hortefeux) est aussi une de nos compatriotes. Aujourd’hui, plus que jamais, Madame Com de la Caisse d’Epargne, ne veut plus se tenir à l’écart. La voilà qui entre dans le jeu politique. Non... elle ne va pas aider directement son Homme Brice, non. Son rôle sera de jouer « Gloire, Amour et Beauté » pour rectifier le portrait un peu écorné de Brice parti puis revenu de la Chasse.
    Madame Valérie demandera des cours de maintien à Charlotte Rampling lors de ses vacances à Saint-Tropez afin d’être au Top de la Présence médiatique. Aujourd’hui, l’appel à la Beauté (Jeunesse et Maturité) font partie intégrante du jeu politique de Little Nikos.
    BiBi en parle en détail sur son site.
    A bibientôt.

    Voir en ligne : Les (Horte) feux de l’Amour"

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