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lundi 26 janvier 2009

Le Charançon Libéré

posté à 11h40, par JBB
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Prix de gros pour « l’ultra-gauche » : quand elle rafle, la police ne fait pas de détails…
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Police 1 - autonomes 0. A peine débuté, samedi à Barbes, le match opposant militants de « l’ultra-gauche » et forces de l’ordre a été plié par ces dernières. En encerclant en deux coups de cuillère à pot les manifestants et en appliquant la vieille recette « on gaze, on embarque, on discute pas », les policiers l’ont facilement emporté. Mais oublient un peu vite qu’il y aura un match retour…

Diantre…

Quelle efficacité !

En deux temps trois mouvements de matraque, la police française a prouvé, samedi à Barbes, son aptitude retrouvée aux rafles de masse.

Encerclant avec une habilité toute poutinesque la centaine de participants à cette manifestation non autorisée, organisée en soutien à Isa, Juan et Damien, détenus depuis plusieurs mois et accusés d’avoir tenté d’incendier une dépanneuse de police.

Usant avec une remarquable parcimonie de gaz lacrymos, à tel point que le métro passant à proximité ne put marquer pendant les deux heures suivantes l’arrêt à la station tant l’air était irrespirable.

Et embarquant tout ce joli monde en moins de temps qu’il n’en faut à un CRS expérimenté pour descendre un litre de bière.

Oui : bien joué.

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De cette manifestation étouffée dans l’œuf, impétrants gazés et embarqués avant même que d’avoir pu déployer une banderole - ou presque - , on retiendra qu’elle aura surtout permis à la police d’enrichir ses fichiers d’une centaine de noms de militants de cette « mouvance anarcho-autonome » qui donne des cauchemars à Alliot-Marie.

Fiches qui ne sauront manquer de servir un jour ou l’autre pour tisser le fil de ces vérités anodines et projections fantasmées qui, mises bout à bout, constituent l’essence de l’incrimination d’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste.1

De ce coup pour rien, manifestants pris au piège d’une nasse bien montée, on retiendra aussi qu’il concoure à l’évidence à la création de ce danger « anarcho-autonome » que le pouvoir s’entête à agiter depuis des mois.

Tant il est évident que ces gazages préventifs et arrestations de masse ne peuvent qu’encourager une radicalité naissante, agitation montante contre un régime qui ne fera pas de cadeaux et qui est bien décidé à faire la guerre aux activistes d’extrême-gauche.

De cette rafle rondement menée, on retiendra enfin qu’elle participe à cette criminalisation de la contestation initiée par le locataire de l’Elysée.

Répression à flux tendu et désignation d’un ennemi, qu’il s’agisse de « l’ultra-gauche », de Sud-Rail ou d’une jeunesse qui s’agite en tous sens, tactique imaginée par Sarkozy pour conjurer le vent mauvais qu’il sent monter à la faveur de la crise et dont il ne voudrait surtout pas qu’il gonfle les voiles des partisans d’une remise en cause radicale du système.

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Mais le régime aura beau faire.

Il ne pourra traiter ainsi les millions de gens qui descendront dans la rue jeudi, décidés à arpenter le pavé pour dire leur ras-le-bol de ce gouvernement.

Non plus qu’il ne pourra rééditer ce joli coup, samedi, contre les milliers de personnes qui viendront clamer leur hostilité à la législation antiterroriste.

A moins que…

Nicolas Sarkozy étant décidé à frapper fort et sans retenue, on ne saurait trop lui recommander de prendre exemple sur le gouvernement italien.

Lequel - avec une constance admirable - montre depuis dix ans la voie à suivre en matière de régression sociale et de réduction des libertés.

Et vient de franchir une nouvelle étape, par la grâce d’une directive mitonnée par le ministre de l’Intérieur transalpin, Roberto Maroni (Ligue du Nord).

Circulaire qui projette d’interdire les manifestations devant les lieux de culte, les ambassades, les casernes, les centres commerciaux et les quartiers très peuplés (soit grosso merdo partout en ville…).

Et d’obliger les organisateurs de manifestations à verser une « caution » pour les éventuels dommages causés par leurs troupes.

Chouette idée qui - combinée à la décision de Berlusconi de multiplier par dix le nombre de soldats patrouillant dans les villes de la Botte (laquelle n’a jamais si bien porté son nom) - devrait garantir au président du Conseil italien une certaine sérénité.

Hein…

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Nul doute qu’en ce domaine France et Italie cheminent de concert, les Italiens ayant juste un peu d’avance.

Et qu’à Rome ou à Paris, la réaction étend son gris manteau.

A nous de dire « stop ».

Et de défendre ces libertés qu’ils s’ingénient à ratiboiser.



1 Le cas de l’avocate interpellée il y a une dizaine de jours après avoir tenté, selon la police, de mettre le feu à deux voitures dans Paris est à ce sujet très révélateur. Au nombre des maigres charges pesant sur elle et son ami, charges supposées justifier la garde à vue pour « association de malfaiteur en relation avec une entreprise terroriste », la police avait retenu la participation à des manifestations : « De source proche de l’enquête, l’avocate parisienne a été aperçue lors d’une manifestation en novembre 2003 devant la maison d’arrêt de la Santé lors du deuxième Forum social européen tenu en France. Plus récemment, elle aurait participé à une réunion le 6 décembre dernier à Montreuil (Seine-Saint-Denis) pour brocarder les interpellations de Tarnac. Son ami Kevin, présenté de source policière comme ’gravitant dans la mouvance d’ultragauche’, serait connu pour ’avoir manifesté activement son soutien à Julien Coupat’ », rapportait ainsi Le Figaro.


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