ARTICLE11
 
 

mercredi 3 septembre 2008

Le Cri du Gonze

posté à 09h58, par Lémi
13 commentaires

Poutine en a comme des melons : la propagande par le tigre
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Il traquait les Tchétchènes « jusque dans les chiottes », exhibait ses biscotos dans la steppe, malmenait la démocratie sur ses terres et sortait l’artillerie face à des voisins « récalcitrants ». Déjà, il nous impressionnait ! Mais maintenant qu’il castagne du tigre mangeur d’hommes, on est obligé de faire allégeance : Vladimir Poutine est le Rocky du 21e siècle.

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Déjà dans Rocky IV, ça s’était joué à peu. La bannière étoilée n’avait pas été loin d’encaisser une raclée retentissante. Vieillissant, Rocky ne faisait pas le fier face à la machine de guerre slave : des muscles à n’en plus savoir que faire, une salle acquise à sa cause, un dopage forcené, etc… l’infâme russkov, Ivan Drago, genre de Richard Virenque aryen métissé de Hulk, semblait invincible. Un géant aux pieds de tungstène. Le public ne s’y trompait pas, qui agitait en braillant des nuées de banderoles avec faucilles et marteaux. C’était évident : si Rocky perdait, c’était tout l’occident qui mettait un genou à terre face à l’hydre russo-coco-méchante.

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On tremblait. Stallone encaissait. Tombait. Se relevait, encore et toujours, sanglant mais vaillant. Sur la fin, grâce à son sang froid capitaliste, sa bravoure toute ricaine, Rocky triomphait, sauvant et sa vie et l’économie de marché (on n’est pas Rocky pour rien). La foule moscovite s’empressait de remplacer le marteau et la faucille par la bannière étoilée, les portraits de Marx et Lénine par ceux de Ford et Reagan, la goulasch par le Mac-Do, le Star Splanged Banner résonnait en territoire coco, les confettis tombaient en rafales… Bref, grosse dérouillée pour le méchant. Happy end au finish, sur la ligne. La propagande, alors, était du bon côté.

Mais voilà, ce temps béni de l’Oncle Sam triomphant, guerrier viril et dur abritant sous ses muscles d’acier des tombereaux de dévotion héroïque à la patrie – cette mère des braves – n’est désormais plus l’apanage d’Hollywood et de la CIA : un nouvel héros venu de l’Est a débarqué pour nous en mettre plein la vue. Il en a comme des melons, porte le kaki comme personne et ne fait qu’une bouchée des tigres mangeurs d’homme.

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Vladimir Poutine, donc, n’est pas une demi portion. On l’avait déjà vu arborer ses habits de nouveau Rambo, lors d’une séance photo impromptue dans les steppes sauvages de la Russie profonde. En toute décontraction, l’ancien tortionnaire du KGB, bourreau à ses heures perdues, se ressourçait auprès de mère nature. Au menu : chasse, pêche, nature et biscotos, le coutelas solidement fixé à la hanche. (Pour les amoureux de la raison d’état exhibée en bandoulière, des photos sont disponibles sur le site officiel du Kremlin, ici) . De la propagande kaki guerrière ? Oh, non… Le président était juste en vacances et avait été surpris alors qu’il vaquait à ses occupations habituelles, torse nu, biceps sortis, mâchoire contractée. Pas très fair-play, même…
Quelques pisse-froids (étrangers, bien entendu) avaient alors osé insinué que l’on frôlait la mise en scène de la sur-virilité présidentielle, le Goebbels réactualisé, la propagande éhontée. Heureusement, les médias russes s’étaient abstenus de toute faute de goût, se contentant de souligner avec euphorie et impartialité la grâce martiale de leur président aux cojones d’airain. Leni Riefenstahl aurait été là qu’elle aurait salement pris son pied.

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Seulement, voilà, le très intrépide Poutine n’avait pas encore vraiment fait ses preuves à l’époque. Il avait beau posséder de solides références, il lui manquait quelque chose. Un coup d’éclat, une action vraiment guerrière, de quoi l’enraciner définitivement comme idole suprême auprès d’un peuple russe déjà salement lobotomisé.

Et Paf ! Voila t’y pas que, par hasard ce week-end, alors que le vaillant héros de la nation se balade en Sibérie avec des gardes chasses, un tigre féroce et mangeur d’hommes se libère de son piège, prêt à dévorer tout ce qui se présente.

Un tigre ? Ni une, ni deux, Sylvester Poutine s’empare d’une carabine et tire une fléchette anesthésiante2 sur l’animal en furie. C’était moins une. Commentaire de la chaîne publique qui répercute la chose avec des trémolos d’excitation patriotique : « Vladimir Poutine n’a pas seulement réussi à voir de très près le prédateur géant mais a aussi sauvé notre équipe de télévision. » Et tous les médias de la très libre Russie de faire leur une sur l’intrépidité d’un Premier ministre que le monde leur envie. La classe !

Imagine-t-on notre propre timonier face à un mangeur d’homme ? Peuh, il fuirait en courant (déjà qu’il galère grave avec les pêcheurs…). Et Bush ? Le documentaire de Michael Moore, Fahrenheit 9.11, le montrait certes en train de chasser le tatou, mais l’animal ne pèse pas lourd dans l’échelle du mangeur d’homme… Alors qu’un tigre, c’est du costaud. Du lourd. Difficile de faire plus vendeur. Surtout quand il s’agit d’un concours de circonstances totalement impromptu, les caméras étant là par un pur hasard. Le monde est bien fait, non ? Comme Goebbels, un soir de spleen le disait à son bien aimé Führer : « Ils sont prêt à gober n’importe quoi, Dodolf, t’en fais donc pas. Quand ils entendent le mot clairvoyance, ils sortent leur revolver… »

N’empêche, ça doit cogiter dur à la cellule « comm » du Kremlin, tenue à faire encore mieux la prochaine fois. Ça va être quoi ? Un dragon mis en déroute ? Ben Laden étranglé à mains nues ? Une météorite repoussé d’une chiquenaude à la Bruce Willis ? Ou simplement une petite guerre avec les pays limitrophes ?



1 Ce dessin est oeuvre du camarade Tristan. Tu peux retrouver certains de ses dessins sur son blog, ICI.

2 Là dessus, c’est un peu décevant, je te l’accorde. Une fléchette anesthésiante ? Ca fait un peu tapette... En même temps, la suite du « reportage » le montre en train de gentiment caresser la bête endormie. S’agirait pas de croire que Vladimir Stallone n’est pas humain : sous les oripeaux du foudre de guerre bat un coeur sensible. A chacun son Adrienne...


COMMENTAIRES

 


  • mercredi 3 septembre 2008 à 10h55, par Flo Py

    Wah ! Quel homme ! Bon, je suis pas russe, mais je suis toute émoustillée ! C’est sûr qu’à côté, notre dresseur de dindes national peut aller se rhabiller !

    Bises et bonne journée, Lémi !

    PS : tu aimes les films de gladiateurs ?

    Voir en ligne : http://flopy.canalblog.com

    • mercredi 3 septembre 2008 à 20h10, par lémi

      Oui, si nous aussi on pouvait avoir un surhomme du même type, la politique ne ferait plus débat et notre petit père se déshabillerait à la place d’aller se rhabiller. On en serait tous amoureux, en pâmoison, et Article 11 serait une succursale de l’Elysée. Ce serait bath...
      Bises itou

      Ps : Si j’aime les films de gladiateurs ? et bien, j’aimais bien Astérix Gladiateur... Et Spartacus (mais suis même plus sur qu’ils gladiateurisent dedans...). Sinon, mes connaissances en la matière s’arrêtent là. Pourquoi ? Tu penses qu’il y a un filon à creuser ?



  • mercredi 3 septembre 2008 à 11h59, par Massu

    Ouais, peut être, peut être...
    Mais Bush, il peut sniffer de la coke ET boire du whisky, est ce que Poutine sait le faire ? Hein ?
    Sarkozy, sa femme, elle soutient l’ours des Pyrénées, ce qu’est mieux que de flinguer les tigres aux fléchettes, nous en conviendrons aisément (ou sentirons passer la justice). De plus, je crois savoir que la femme de notre président, elle était pas hotesse de l’air, elle...
    Et puis, last but not least, Mr Sarkozy met pas les patrons qu’ont des yachts en taule, lui, il les visite courtoisement.

    Bref, question virilité, aptitudes, savoir faire et savoir vivre, ze ouest is ze best, mais nous le savions déja.



  • mercredi 3 septembre 2008 à 21h43, par DJM de Cambrai

    Juste en repassant, mon caleçon pour demain, on dit aussi : « un j’en foutre qui n’en n’a guère », mais qui sait « en foutre plein la gueule à la populace ».
    Mais cela nous dix verges de POUTINE, qui lui au moins s’est « tirer » correctement.
    Léger, très léger ; on dirait du BIGARD…

    • jeudi 4 septembre 2008 à 20h42, par Lémi

      _Léger très léger, je dirais même, distinction suprême : mieux que du Bigard (C’est possible ?).
      Du coup je cherche une vanne en retour (« ce con, verge », nul. « Verge et tu repars ? » naze. « Vergincétorix le retour ? » argh), et, peu fier, je suis obligé d’abdiquer, la victoire est à toi... (Circonstance atténuante, je suis en train de défaire mes bigoudis en cogitant, ce n’est pas très pratique...)



  • mardi 9 septembre 2008 à 23h24, par hans

    Arrêtez vos conneries, les mecs ! Il s’agit d’une équipe scientifique, et ils ne l’ont pas tué, le tigre, ils l’ont endormi. Pour le mesurer. Et pour lui attacher un collier d’observation.
    La lobotomisation, c’est pas qu’au Kremlin. C’est aussi au Canard Enchaîné (R.I.P.), et les Tchétchènes dans les chiottes, ça commence à faire un peu ringard, à force. En panne d’inspiration ? Pensez pas toujours en rangs, comme ça. Ça déboussole.
    Hans.
    Ben, oui, personne n’est parfait.

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