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jeudi 18 septembre 2008

Médias

posté à 10h45, par JBB
16 commentaires

Qu’on se le dise : Libé ne transige pas avec la déontologie…
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Les lecteurs de Libération ont découvert aujourd’hui une belle preuve d’indépendance de leur journal. Dans la rubrique « Making off », le quotidien se gargarise de ne pas vendre ses espaces de pub à n’importe qui. Et se vante de refuser de servir de relais à de malsaines propagandes. Classe, n’est-ce pas ? Oui. Sauf que cette déontologie est à géométrie variable…

La déontologie…

Sentez-vous sonner ce mot grave et chargé de sens ?

Le sentez-vous s’affirmer, se suffisant à lui-même et si péremptoire.

Il vit, presque, comme volant de ses propres ailes.

La dé-on-to-lo-gie !

Je ne peux m’empêcher de le faire rouler en bouche.

De le savourer avant de le prononcer.

De l’apprécier comme un bon vin avant de l’expulser avec sérieux et emphase.

La dé-

On-

To-

Lo-

Gie !

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Je ne suis pas le seul à le goûter, d’ailleurs.

Et je sais que bien des journaux, titres de presse et plumitifs de tous acabits ont ce mélange d’amour et de crainte pour un mot si essentiel.

Libération, par exemple.

Qui se fend aujourd’hui d’une petit rappel des règles les plus élémentaires de la profession dans sa rubrique « Making-off ».

Une précision relevée par le site Arrêt sur Image : Libération explique avoir refusé de publier une publicité du gouvernement russe présentée comme un « hommage aux victimes de la tragédie en Ossétie du Sud » et cite une agence de presse russe qui raconte que « L’ambassade de Russie à Paris était prête à payer 9 000 euros pour un quart de page dans la rubrique Annonces », remarque Gilles Klein, avant de citer un deuxième passage de la rubrique : « L’annonce vendue par l’ambassade insinuait que Moscou n’aurait fait que voler au secours de la pauvre Ossétie du Sud pour la libérer des griffes de la Géorgie. Libération refuse régulièrement ce type d’annonces proposées par toutes sortes de régimes. »

Ça, c’est déontologique.

Vraiment.

Tant il ne sera pas dit que Libération vend son espace aux pires salopards, même pour 9 000 euros.

L’argent n’achète pas tout, monsieur !

Respect.

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Sauf que…

Libération devrait la mettre un peu en veilleuse sur ce domaine de la publicité et de l’intégrité des annonceurs.

Le quotidien ayant vendu la veille, pour la première fois de sa désormais morne existence et ainsi que le remarque Marianne2, ses pages d’ouvertures à la Française des Jeux.

Une double de « publi-info », audacieusement intitulée « Regards croisés sur le jeu et le loto » et comportant cinq textes sans aucun intérêt, signés de pseudo-sociologues et philosophes dont on devine qu’ils ont dû toucher un chèque conséquent pour se ridiculiser ainsi à enfiler de grossières perles sur le Loto.

Le meilleur restant celui de l’indépassable (forcément…) Pascal Bruckner, qui affirme benoîtement que « Le Loto est la version sécularisée de la grâce » après s’être enflammé sans retenue sur la si géniale fonction de la Française des Jeux : « Démocratisation du frisson mais sans le vertige de la chute, addiction light, petite messe laïque. Le vrai ressort de la participation, c’est l’idée folle que l’on va provoquer le hasard sur son propre terrain, que les esprits de la fortune, par une chiquenaude miraculeuse, pourraient nous avoir élu, nous seuls entre des millions. »

Joli, non ?

Oui, c’est beau comme du BHL vantant les mérites de la Roue de la Fortune.

__3__

Si on ne peut pas vraiment reprocher aux cinq personnalités sélectionnées par la Française des Jeux d’avoir vendu leur plume contre espèces sonnantes et trébuchantes, sauf à pointer la médiocrité de leurs textes.

On doit par contre s’étonner de la conscience à géométrie variable de Libération.

Quotidien qui cède un jour ses pages les plus renommées à une entreprise prospérant sur le dos de la misère des gens et s’engraissant sur la dépendance de ses clients.

Et journal qui se gargarise le lendemain d’ultimes scrupules de conscience en la matière.

Voilà.

C’est ça, la déontologie.

Un joli mot, non ?


COMMENTAIRES

 


  • jeudi 18 septembre 2008 à 13h53, par proxy

    pour reprendre la formule de la « zazie » de Queneau je dirai : deontologie mon c...
    qui a donc paye « libé » pour chanter les louanges du nazillon de tiblissi a l’occasion de la derniere crise dans le caucase ?
    qui paye « libé » pour son soutien indefectible à la guerre u.s en afghanistan ?
    qui finance « libé » lorsque ce journal defend israel bec et ongles ?
    pourquoi « libé » est-t-il plus sarkoziste que les militants ump ?
    qui a « libé » peut m’expliquer le soutien de ce canard a la presence de l’armée francaise en afghanistan ?
    pourquoi attaque-t-il ceux qui contestent la these u.s du 11/9 ?
    etc...etc...
    ce journal est devenu un pilier de la pensée unique en france !
    ps : essayez une fois de laisser un commentaire sur libé en ligne ! a moins qu’il ne verse dans le sens de l’article ! ce commentaire sera censuré !

    • jeudi 18 septembre 2008 à 15h00, par JBB

      Je n’ai pas essayé de laisser un commentaire sur Libé.fr. Par contre, j’adhère à votre constat, mais sans aller jusqu’à dire qu’il est plus sarkozyste qu’un militant UMP (là, vous poussez un peu…).

      Mais c’est clair que Libération est devenu désespérément chiant et inintéressant, en sus de représenter une forme parfaite de pensée unique socialo-démocrato-libérale. Je le lisais encore chaque jour il y a cinq ans ; je ne l’achète plus qu’exceptionnellement aujourd’hui.

      • jeudi 18 septembre 2008 à 15h34, par un-e anonyme
      • jeudi 18 septembre 2008 à 15h36, par Dominique

        Libé ne modère pas lui-même les forums ouverts sous les articles (à distinguer des blogues de Libé qui eux sont modérés de façon variable par les auteurs-journalistes ou par la responsable des blogues). Il sous-traite cela à la firme française Concileo qui elle-même sous-traite la veille à une entreprise en Inde ; je ne crois pas que le niveau de français en Inde pour ce genre de travail sous-payé soit vraiment extraordinaire, ni même que l’on trouve beaucoup de locuteurs francophones dans ce pays. Cela doit fonctionner surtout par mots clés bannis. Coïncidence : c’est la même société qui modère les forums sous les articles du Figaro. Si, si ! Et après, on s’étonne que les forums en question se transforment en tribunes du Front Haineux au moindre fait-divers avec appels au meurtre à la clé (parce que vu ce qui passe au travers de la modération, il y a de quoi se poser des questions sur le lectorat des deux journaux). La question de la modération de ces forums est une vraie question, je l’ai posée chez moi de temps à autre, elle est débattue de manière approfondie chez Narvic de Novövision, et elle mérite un intérêt. Il y a des choses à censurer (quitte à paraître dictatorial, je ne pense pas que l’on puisse laisser passer certains textes injurieux ou appelant à la haine) qui ne le sont pas et puis des échos de propos sucrés du fait de leur thématique (parfois douteuse comme celle des conspirationnistes). Ce que je retiens, c’est que ces forums sont illisibles, que personne n’échange réellement, que chacun y tente sa petite propagande en publiant dix fois le même texte copié-collé pour chaque page ouverte, que des monstruosités peuvent s’y écrire en toute légitimité, et que c’sst un grand portbawak où plus personne ne se comprend. Il y a derrière des problèmes techniques (l’architecture des pages, la sous-traitance à une société incapable, un traitement semi-automatisé) et financiers (modérer, cela coûte de l’argent) au delà d’une simple orientation du journal. Pour moi, la solution est très simple : je ne lis plus les commentaires au bas des articles de la presse papier en ligne, quel que soit le titre.

        • jeudi 18 septembre 2008 à 19h44, par JBB

          « je ne lis plus les commentaires au bas des articles de la presse papier en ligne, quel que soit le titre. »

          Je fais de même. Que ce soit sur Le Post, 20 Minutes, Libé ou Le Figaro, le niveau est affligeant. Il n’y a que les commentateurs du Monde qui relèvent un peu le niveau.

          C’est d’ailleurs inquiétant de voir que, dès qu’un média draîne un certain nombre de lecteurs, la médiocrité et la bêtise l’emportent sur tout le reste.

          • jeudi 18 septembre 2008 à 22h14, par Dominique

            Hum... pour le Monde, j’aurais un avis plus circonspect : seuls les abonnés peuvent écrire des commentaires, mais il est possible de s’abonner à très bas prix pour un mois seulement et de communiquer ses identifiants à un groupe de connaissances. On imagine que ce n’est pas 6 euros qui vont arrêter celui qui a décidé de faire sa petite propagande en ligne, surtout s’il la partage avec tous ses potos. Cela fait qu’à certains moments, dans les cas d’actualité chaude comme un meurtre en banlieue ou sur des sujets bien polémiques comme l’Education nationale, on a l’impression que l’on est tombé sur un forum des auditeurs de Radio-Courtoisie (la radio qui porte mal son nom). Ailleurs, c’est plus vivable et utile. Le filtre est important par rapport à Marianne ou à l’Obs, mais il n’est pas tout et il ne peut tout. Ce qui manque se résume en deux mots : des sous ! Donc des êtres humains. Comme ailleurs.

            Mais où trouver ces sous pour ces nouveaux modes d’expression populaire ? Ben... c’est pas gagné. La pub ne rapporte pas assez pour couvrir les frais et on ne sait si elle permettra encore demain à maintenir les services en ligne même si la pub a tendance à investir en masse la Toile ailleurs que sur les sites de presse traditionnelle et à fuir la presse papier. Or il faut maintenir des espaces de discussion pour afficher beaucoup de pages vues et de visiteurs afin d’attirer la pub en ligne qui augmente par rapport à la pub sur papier, et puis on va se casser la gueule gravement parce que l’on aura raté le virage dans la montée d’escalier... Les journaux jouent leur survie depuis deux ans avec l’ouverture de ces forums informels afin de gonfler leurs chiffres de visiteurs uniques et de pages vues pour les publicitaires, mais il est certain qu’il y aura des morts à l’arrivée. Libé est bien parti pour faire un joli cadavre tout propre, mais ce n’est pas le seul. Et la raison sera alors seulement : les sous. Pas l’idéologie.



  • jeudi 18 septembre 2008 à 14h22, par PT

    Dans un registre identique, JB, la dernière livraison de So Foot propose un publi-rédactionnel de quatre pages fort joliment troussé pour le compte de la marque Puma, bénéficiant de la même maquette que le reste du mag et signé d’un journaliste maison (Chérif Ghemmour, par ailleurs pigiste pour GQ et sur Europe 1). Classe.

    • jeudi 18 septembre 2008 à 15h05, par JBB

      Ouais, c’est un vaste mouvement d’ensemble. Et ça devient de moins en moins évident de sortir de la petite monnaie pour se payer magazines ou journaux au kiosque du coin pour finalement se retrouver avec ce type de pages dans les mains. Quand je pense qu’il y encore quatre ou cinq ans, ce type d’opération faisait hurler tout le monde…



  • samedi 20 septembre 2008 à 22h03, par pierrot123

    Pourquoi perdez-vous encore votre temps avec Libé, qui n’est plus qu’un triste et exsangue ectoplasme, agité, de ci de là, par les navrantes jactances des Tartuffes de la « Pensée Dominante » ?
    Au Diable, Libé, même plus bon pour le poissonnier...!

    • dimanche 21 septembre 2008 à 12h57, par JBB

      Ben… il faut bien rigoler un peu de temps en temps, non ?

      (Mais j’aime bien votre efficace description de ce qu’est devenu le quotidien. Tout est dit.)



  • dimanche 21 septembre 2008 à 10h52, par citrouille

    S’il n’y avait que Libé....
    Je me suis arrêtée d’acheter le Monde Diplomatique en 2003 quand j’y ai vu à 2 reprises de la pub pour Microsoft. La déontologie de M.Cassen, en charge d’ATTAC en ce temps-là, m’a fait vomir.

    • dimanche 21 septembre 2008 à 12h59, par JBB

      A ce compte-là, il ne vous reste plus grand chose à feuilleter quand vous vous rendez aux toilettes. Le Monde Diplo, je ne l’évacuerais quand même pas en même temps que Libé. Il me semble qu’il reste, heureusement, des différences assez fondamentales entre ces deux publications.



  • mardi 23 septembre 2008 à 17h30, par Gotch

    C’est Koh Lanta en culotte de velours, ce Libé new look.... avec un p’tit chapeau tyrolien !

    Bizarrement, à chaque fois que j’ai répondu à Joffrin, c’était sur un ton acerbe. Quoique, sur la fin son prédécesseur n’en méritait pas moins....



  • jeudi 25 septembre 2008 à 21h48, par Moi

    Eh ben dites donc, si une guerre caucasienne équivaut pour vous à un tirage du loto, c’est que vous n’avez rien d’autre à faire que de couper les cheveux en quatre. Moi j’ai vu cette double page de pub dans Libé (d’ailleurs ce n’était pas la première fois que Libé vendait ces deux premières pages pour une pub), j’ai vu que c’était de la pub et je suis passé à autre chose (c’est ça qui est bien avec la presse papier, on n’est pas obligé de se taper la pub, on peut tourner la page. Ce qui n’est pas le cas à la télé). En revanche, vous vous l’avez lue cette pub (qui vous en a donné l’idée ? Marianne, sans qui ça ne vous serait même pas venu à l’idée d’aller acheter Libé que vous lisez sur Internet ?).
    Vous n’avez donc rien d’autre à faire ? Franchement ? Vous vous faites du mal là.

    • jeudi 25 septembre 2008 à 21h55, par JBB

      Mouais.

      Vous n’avez pas tort sur tout.

      Sauf sur un point essentiel : je trouve qu’un journal qui se targue un jour de ne pas vendre ses pubs à n’importe qui pour monter le lendemain l’une de ses plus grosses opérations de publi-rédactionnel, en plus avec ce voleur de toujours qu’est La Française des Jeux, est juste risible. Mais c’est seulement mon sentiment, hein…

      • samedi 27 septembre 2008 à 22h08, par Moi

        Publi rédactionnel ? Moi, j’ai bien vu écrit « publicité » en haut de ces deux pages de pub qui ne trompaient personne : y’avait pas le logo Libé, ni aucun autre des éléments graphiques qui rythment une page de Libé. Franchement, pour se tromper et croire lire un article de Libé, il faut être de très très mauvaise foi (ou myope).
        Quant à votre qualificatif de « voleur » pour la Française des jeux, je vous le laisse (y’a pas diffamation là ?), sans oublier de faire remarquer que ceux qui sont volés sont tous volontaires.
        Comme annonceur, il y a vraiment pire (ce qui ne justifie rien, bien sûr), mais je me répète, on parle de jeux de grattage et de jeux de hasard, pas de guerre. Comparons ce qui est comparable. Sinon, la critique ne vaut rien. L’indignation encore moins.
        Bien à vous.

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