ARTICLE11
 
 

jeudi 10 juin 2010

Textes et traductions

posté à 23h57, par Benjamin
17 commentaires

« Ce qui guide la politique d’Israël » - Un texte d’Ilan Pappé
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Historien Israélien dissident, désormais expatrié en Grande-Bretagne, Ilan Pappé se distingue par ses analyses claires et lucides des ressorts internes du conflit. En un récent article publié dans le Herald Scotland, il explique le lavage de cerveau auquel est soumis tout citoyen israélien. Et éclaire les motivations biaisées et fallacieuses sous-tendant l’attaque de la flottille. Traduction.

Historien israélien dissident, aujourd’hui professeur d’histoire à l’Université d’Exeter et directeur du Centre européen d’études sur la Palestine, Ilan Pappé a longtemps vécu en Israël, donnant de la voix contre le sionisme. Lassé de vivre dans un environnement « hostile », d’être traité « comme un pestiféré »1, il s’est finalement exilé en Grande-Bretagne en 2007.

Celui qui dénonce sans relâche la réécriture historique pratiquée par Israël, l’endoctrinement de sa population, le processus de colonisation et le massacre des Palestiniens à l’œuvre depuis plus de 60 ans2 explique dans l’article traduit ci-dessous (la version originale, publiée le 6 juin, est ICI) les ressorts psychologiques qui ont poussé l’état sioniste à attaquer la flottille de Gaza il y a une dizaine de jours. Et explique pourquoi les « solutions » mises en avant par la communauté internationale ne sont absolument pas adaptées à la réalité du conflit.

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Ce qui guide la politique d’Israël

L’aspect le plus déroutant de l’affaire de la flottille de Gaza a très certainement été la défense indignée et moralisatrice du gouvernement et du peuple israélien.

Les modalités de cette réponse sont peu relayées par la presse britannique, mais il s’agit aussi bien de parades officielles, célébrant l’héroïsme des commandos ayant pris d’assaut le navire, que de manifestations d’écoliers en soutien inconditionnel au gouvernement et contre la nouvelle vague d’antisémitisme.

En tant que natif d’Israël, passé avec enthousiasme par tout son processus de socialisation et d’endoctrinement pendant un quart de siècle, je ne connais que trop bien cette réaction. Comprendre l’origine de cette attitude furieusement protectrice est une clé essentielle pour appréhender correctement le principal obstacle à la paix en Israël et en Palestine. On ne peut mieux définir cette barrière que comme la perception officielle et populaire qu’ont les juifs Israéliens de la réalité politique et culturelle qui les entoure.

Un certain nombre de facteurs expliquent ce phénomène, mais trois d’entre eux sont particulièrement remarquables, et interconnectés. Ils forment l’infrastructure mentale individuelle sur laquelle la vie en Israël de tout juif sioniste est basée, et dont il est presque impossible de s’écarter – ce dont, personnellement, je n’ai que trop fait l’expérience.

La première hypothèse, et la plus importante, est la suivante : ce qui était historiquement la Palestine est d’après un irréfutable droit sacré la propriété politique, culturelle et religieuse du peuple juif représenté par le mouvement sioniste, puis plus tard par l’état d’Israël.

La plupart des Israéliens, les hommes politiques comme les citoyens, comprennent que ce droit ne peut être pleinement appliqué. Mais bien que les gouvernements successifs aient été assez pragmatiques pour accepter la nécessité d’entamer des négociations de paix et celle d’une sorte de compromis territorial, ce rêve n’a pas été abandonné. Et - ce qui est encore plus important - la conception et la représentation de toute politique réaliste est ainsi considérée comme un acte de générosité internationale ultime et sans précédent.

Toutes les insatisfactions palestiniennes ou - dans le cas qui nous intéresse - internationales, exprimées devant chaque proposition mise en avant par Israël depuis 1948, ont donc été considérées comme insultantes et ingrates face à la politique accommodante et éclairée de la « seule démocratie du Moyen-Orient ». Maintenant, imaginez que ce mécontentement se traduise par une lutte réelle et parfois violente, et vous commencez à comprendre les mécanismes de cette fureur vertueuse. Lorsque nous étions écoliers, pendant le service militaire et plus tard en tant que citoyens israéliens adultes, la seule explication donnée aux réactions arabes ou palestiniennes était que notre comportement civilisé s’opposait à la barbarie et aux antagonismes de la pire espèce.

Selon le discours dominant, il y a deux forces malveillantes à l’œuvre contre Israël. La première consiste en l’ancien et habituel mouvement antisémite du monde au sens large, un virus infectieux touchant soi-disant tous ceux qui entrent en contact avec les Juifs. Selon ce discours, les Juifs modernes et civilisés ont été rejetés par les Palestiniens simplement parce qu’ils étaient juifs, et non par exemple parce qu’ils ont volé leur terre et leur eau jusqu’en 1948, expulsé la moitié de la population Palestinienne en 1948, imposé une occupation violente de la Cisjordanie et, dernièrement, un siège inhumain de la bande de Gaza. Cela explique également pourquoi l’action militaire est considérée comme la seule réaction possible : une fois les Palestiniens vus comme cherchant inéluctablement à détruire Israël, suivant en cela une pulsion atavique, la seule manière d’y faire face repose sur la force militaire.

La seconde force est également un phénomène à la fois ancien et nouveau : une civilisation islamique qui cherche à détruire les Juifs en tant que foi et nation. Le courant dominant chez les orientalistes israéliens, appuyés par de nouveaux universitaires conservateurs aux États-Unis, a contribué à définir cette phobie comme étant une vérité scientifique. Ces peurs, pour être immuables, doivent évidemment constamment être nourries et manipulées.

De là découle la seconde caractéristique permettant une meilleure compréhension de la société juive israélienne : Israël est dans une position de déni. Même en 2010, avec tous les moyens de communication et d’information alternatifs et internationaux, la plupart des Juifs israéliens sont toujours alimentés quotidiennement par des médias qui leur cachent la réalité de l’occupation, de la stagnation ou de la discrimination. C’est notamment valable en ce qui concerne le nettoyage ethnique commis par Israël en 1948, qui a transformé la moitié de la population palestinienne en réfugiés, a détruit la moitié de ses villes et villages, et laissé 80% de leur pays entre les mains des Israéliens. Il est douloureusement clair que, même avant que les murs et clôtures de l’apartheid n’aient été construits autour des territoires occupés, l’Israélien moyen n’était pas au courant. Et pouvait ne pas s’intéresser aux 40 années de violations systématiques des droits civils et humains de millions de personnes, réalisées sous le contrôle direct et indirect de son État.

Les Israéliens n’ont pas non plus eu accès à des compte-rendus honnêtes sur la souffrance des habitants de la bande de Gaza pendant les quatre dernières années. Et, sur le même schéma, les informations distillées sur la flottille correspondent à l’image d’un État attaqué par les forces combinées de l’antisémitisme séculaire et du nouvel islamisme judéocide fanatique, forces débarquant pour détruire Israël. (Après tout, pourquoi auraient-ils envoyé l’élite des meilleurs commandos du monde pour faire face à des militants des droits de l’homme sans défense ?)

Quand j’étais jeune historien en Israël dans les années 1980, c’est d’abord ce déni qui a attiré mon attention. En tant que chercheur débutant, j’avais décidé d’étudier les événements de 1948, et ce que j’ai alors trouvé dans les archives m’a permis de mettre un pied hors du sionisme. Doutant de l’explication officielle du gouvernement à propos de son agression du Liban en 1982 et de son comportement pendant la première Intifada en 1987, j’ai commencé à réaliser l’ampleur de la manipulation. Je ne pouvais plus souscrire à une idéologie déshumanisant les Palestiniens autochtones et favorisant des politiques de dépossession et de destruction.

Le prix de ma dissidence intellectuelle a fini par tomber : la condamnation et l’excommunication. En 2007, j’ai quitté Israël et mon travail à l’Université d’Haïfa pour un poste d’enseignant au Royaume-Uni, où les points de vue qui seraient au mieux considérés en Israël comme de la folie, au pire comme une trahison pure et simple, sont partagés par presque toutes les personnes honorables du pays, qu’elles aient ou non une connexion directe à Israël et à la Palestine.

Ce chapitre de ma vie - trop compliqué à décrire ici - constitue la base de mon prochain livre, Out Of the Frame, qui sera publié cet automne. Brièvement, il s’agit de l’évolution d’un sioniste israélien tout ce qu’il y a de plus banal et ordinaire, évolution menée grâce à la découverte de sources d’information alternatives, à des relations étroites avec plusieurs Palestiniens et à des études post-universitaires à l’étranger, en Grande-Bretagne.

Ma quête d’une véritable histoire des événements au Moyen-Orient m’a obligé à démilitariser mon esprit. Même aujourd’hui, en 2010, Israël reste, à bien des égards, un État prussien colonisateur. C’est-à-dire un État combinant, à tous les niveaux de la vie, des politiques colonialistes et un haut niveau de militarisation. Il s’agit là de la troisième caractéristique de l’État juif, à appréhender pour comprendre la réaction israélienne. Elle se manifeste par la domination de l’armée sur l’ensemble de la vie politique, culturelle et économique d’Israël. Le ministre de la Défense, Ehud Barak, a ainsi été le commandant de Benjamin Netanyahu, le Premier ministre, dans une unité militaire semblable à celle qui a agressé la flottille. Un contexte qui explique grandement la réponse sioniste de l’État à ce qu’eux et tous les officiers de commando ont perçu comme l’ennemi le plus redoutable et le plus dangereux qui soit.

Il faut probablement être né en Israël, comme je le suis, et être passé par tout le processus de socialisation et d’éducation - y compris le service militaire – , pour saisir la puissance de cette mentalité militariste et ses conséquences désastreuses. Et il faut un tel passé pour saisir pourquoi les fondements de l’approche de la communauté internationale au Moyen-Orient sont totalement et désastreusement inadaptés à la situation.

La réaction internationale se base sur l’hypothèse que des concessions palestiniennes croissantes et un dialogue continu avec l’élite politique israélienne pourraient faire émerger une nouvelle réalité sur le terrain. Selon le discours officiel en Occident, une solution très raisonnable et réalisable - la solution des deux États - est à portée de la main pour peu que toutes les parties fournissent un ultime effort. Un tel optimisme est malheureusement erroné.

La seule version de cette solution [des deux États] qui soit acceptable pour Israël ne saurait l’être pour l’Autorité palestinienne apprivoisée à Ramallah, non plus que pour le Hamas péremptoire à Gaza. Comprendre : l’offre d’emprisonner les Palestiniens dans des enclaves apatrides pour peu qu’ils mettent fin à leur lutte. Ainsi, avant même de discuter d’une solution alternative - un État démocratique commun, ce que je soutiens moi-même - ou d’explorer l’idée plus plausible de l’établissement de deux États, il faut transformer en profondeur la mentalité officielle et populaire en Israël. Cette mentalité est le principal obstacle à une réconciliation pacifique dans le terrain morcelé d’Israël et de la Palestine.

Comment peut-on la faire évoluer ? C’est là le plus grand défi que doivent relever les militants en Palestine et en Israël, les Palestiniens et leurs partisans à l’étranger, et toute personne dans le monde se souciant de la paix au Moyen-Orient. Ce qu’il faut, en premier lieu, c’est la reconnaissance que l’analyse présentée ici est valable et acceptable. Alors seulement, on pourra commencer à faire des conjectures.

Il est présomptueux de s’attendre à ce que les gens revisitent une histoire de plus de 60 ans afin de mieux comprendre pourquoi l’agenda international actuel concernant Israël et la Palestine repose sur des bases erronées et préjudiciables. Mais on peut certainement s’attendre à ce que les politiciens, les décideurs géopolitiques et les journalistes réévaluent ce qui a été appelé par euphémisme le « processus de paix » depuis 1948. Il faut également leur rappeler ce qui s’est réellement passé.

Depuis 1948, les Palestiniens luttent contre le nettoyage ethnique de la Palestine. Cette année-là, ils ont perdu 80% de leur patrie et la moitié d’entre eux ont été expulsés. En 1967, ils ont perdu les 20% restants. Ils ont été fragmentés géographiquement, et traumatisés comme personne ne l’a été au cours de la seconde moitié du 20e siècle. Et n’eut été la fermeté de leur mouvement national, cette fragmentation eut pu permettre à Israël de faire main basse sur l’ensemble de la Palestine historique, poussant les Palestiniens vers l’oubli.

Transformer un état d’esprit est un long processus d’éducation et de conscientisation. Contre toute attente, certains groupes alternatifs au sein d’Israël avancent sur cette longue et sinueuse route vers le salut. En attendant, il faut mettre un terme à ces politiques israéliennes qui sont symbolisées par le blocus de Gaza. Elles ne cesseront pas plus à cause des faibles condamnations internationales que nous avons entendues la semaine dernière qu’en raison du mouvement à l’intérieur d’Israël, trop faible pour provoquer un changement dans un avenir proche. Et le danger ne réside pas seulement dans la destruction continue des Palestiniens, mais aussi dans la constante surenchère israélienne qui pourrait conduire à une guerre régionale, avec des conséquences désastreuses pour la stabilité de l’ensemble du monde.

Par le passé, le monde libre a fait face à ce type de situations explosives en prenant des mesures fermes, comme les sanctions contre l’Afrique du Sud et la Serbie. Seules des pressions sérieuses et durables des gouvernements occidentaux sur Israël feront là-bas passer ce message que le chantage militaire et la politique d’oppression ne peuvent être moralement et politiquement acceptables pour le monde auquel Israël veut appartenir.

La continuité dans la diplomatie des négociations et des « pourparlers de paix » permet aux Israéliens de poursuivre sans cesse la même stratégie ; et plus cela perdure, plus il sera difficile de réparer les dégâts. Le moment est venu de s’unir avec les mondes arabe et musulman, en offrant à Israël une possibilité de rentrer dans la norme et de se faire accepter, en contrepartie d’un abandon inconditionnel des idéologies et pratiques passées.

Le retrait de l’armée de la vie des Palestiniens opprimés en Cisjordanie, la levée du blocus de Gaza et l’abolition de la législation raciste et discriminatoire contre les Palestiniens en Israël seraient de premier pas fort bienvenus vers la paix.

Il est également essentiel de discuter sérieusement et sans préjugés ethniques d’un retour des réfugiés palestiniens, selon des modalités respectant leur droit fondamental au rapatriement et les chances de réconciliation en Israël et en Palestine. Toute politique allant dans ce sens doit être approuvée, accueillie et mise en œuvre par la communauté internationale et les populations vivant entre le Jourdain et la mer Méditerranée.

Alors, les seules flottilles qui se rendront à Gaza seront celles des touristes et des pèlerins.


Pour compléter cet article, tu pourras te pencher sur l’un des entretiens réalisés avec Michel Warschawski, en janvier 2009 (« Israël est désormais une société néo-conservatrice »), puis en février 2010 (« Il s’agit « de punir les Palestiniens du seul fait qu’ils continuent à exister » »).



1 Ainsi qu’il l’explique dans un entretien donné à Il Manifesto, où il revient sur les raisons de son départ. Le Grand Soir a traduit cet entretien : à consulter ICI.

2 Ilan Pappé revient sur l’épuration ethnique pratiquée depuis 1948 dans cet entretien.


COMMENTAIRES

 


  • vendredi 11 juin 2010 à 08h53, par spleenlancien

    On pourra lire aussi avec profit ce texte de Gilad Atzmon édité le 7 juin 2010. Traduit par Michel Charbonnier pour Info-Palestine.net :

    http://www.info-palestine.net/artic...



  • Je suis admiratif devant le courage de cet homme.Merci pour cet article.

    • vendredi 11 juin 2010 à 12h52, par co2monamour

      Je partage également l’avis ci-dessus d’I. Pappe. Je comprends, bien sûr, qu’il ait été incité à écrire sur son évolution personnelle, d’un sionisme inculqué dès sa naissance à cette position nette qui lui coûte l’exil et lui vaut l’opprobre de la quasi totalité de ses compatriotes.

      Cependant, ayant lu son ouvrage (vivement recommandé) « Le nettoyage ethnique de la Palestine », j’aurais préféré qu’il approfondisse ses travaux sur le sujet et qu’il montre, concrètement et matériellement, comment et avec quels appuis les sionistes, toutes tendances confondues, ont pu se procurer les armes et former leurs combattants tant et si bien qu’en dépit de la présence et de la répression britannique dont ils faisaient l’objet en ces années 1946-1948, ils avaient acquis une supériorité écrasante sur le terrain.



  • vendredi 11 juin 2010 à 14h15, par un-e anonyme

    Ça me paraît un peu psychologisant et « israélo-centré » comme analyse tout de même : Pape fait essentiellement reposer le problème sur la mentalité de la société israélienne, qu’il s’agirait de changer — bien sûr entre autres choses — pour arriver à la paix. Dans cette perspective, n’aurait-il pas été plus conséquent pour lui de rester en Israël aux côtés de ces « groupes alternatifs » qui « contre toute attente ... avancent sur cette longue et sinueuse route vers le salut » ?

    Évidemment c’est facile à dire, mais il en appelle lui-même sur ce sujet aux « partisans à l’étranger », qui ne sont cependant toujours pas en mesure de contraindre leurs propres gouvernements à prendre des sanctions réelles et sérieuses contre Israël. Par quel autre moyen concret et efficace ces militants pourraient-ils « faire évoluer » la mentalité israélienne pour qu’elle s’ouvre à d’autres possibilités que l’anéantissement, l’expulsion ou la bantoustisation progressifs des palestiniens ?

    Bref, tel que Pape décrit la situation, à part la résistance palestinienne et des sanctions internationales sérieuses, donc essentiellement étasuniennes, je ne vois pas ce qui serait en mesure de modifier la mentalité israélienne, c’est à dire a posteriori et sans que cette question soit réellement un préalable à la résolution du conflit.

    • vendredi 11 juin 2010 à 14h21, par un-e anonyme

      (PS il s’agit bien sûr de Pappé et non de Pape... mille excuses)

    • vendredi 11 juin 2010 à 14h42, par l’histoire et ses déboires

      je plussoie 14 h 15

      je n’ai pas fait d’études préalables mais j’entends aussi faire une remarque british :

      l’Etat d’Israël en a tout au plus pour 30 ou 40 ans ;

      au-delà les USA auront autre chose à faire que de s’occuper d’Israël.

      Adieu Israël !

      • Pour ce qui est de l’armement des milices sionistes, il faut savoir qu’au départ elles manquaient d’armes, mais que c’est grâce à un pont aérien depuis la Tchécoslovaquie que cette infériorité a été rapidement comblée.

        La propagande sioniste a toujours présenté le combat contre les armées arabes coalisées comme celui de David contre Goliath. Rien n’est plus faux. Tout d’abord, parce que le nettoyage ethnique a commencé bien avant l’intervention des pays arabes, soit dès novembre 1947, au moment de l’annonce par l’ONU du calamiteux plan de partage de la Palestine, et que les milices sionistes s’attaquaient à une population civile désarmée et terrorisée. Ensuite, parce que les armées arabes qui ont attaqué après la proclamation de l’Etat d’Israël, en mai 1948, étaient mal équipées, mal entraînées, et qu’en face, la Hagannah, et les autres milices étaient animées par la foi des conquérants.

        Tout cela est fort bien raconté dans les ouvrages d’Ilan Pappé, mais aussi d’Elias Sambar, d’Ilan Halévy ou de Lotfallah Soliman.

        En ce qui concerne le déni farouche dont font preuve les Israéliens, comment ne pas croire Ilan Papé, qui est tout de même bien placé pour en parler. Mais un de mes amis israéliens, qui a fini par quitter ce pays les mains aux tempes, tant il était excédé par le racisme, le nationalisme et la militarisation de cette société, m’a un jour confié qu’à son avis, au fond d’eux-mêmes, tous les Israéliens vivaient une manière de culpabilité, car, me disait-il, « ils savent bien qu’ils sont des voleurs. Que ce pays n’est pas à eux, qu’ils en ont chassé les habitants pour s’y installer. »

        • dimanche 13 juin 2010 à 00h57, par un-e anonyme

          Ce sont les Britanniques, avec l’accord des Français, les 2 plus grandes puissances impérialistes de l’époque, qui ont permis, en 1917 (déclaration Balfour), de valider le projet sioniste : créer un foyer national juif en Palestine. Cela par solidarité de classe d’abord puis pour des raisons géostratégique relativement au contrôle, via les sionistes placés sous protectorat britannique, par l’impérialisme européen des nouvelles zones pétrolifères du Moyen-Orient ensuite : en 1918, le pétrole désigné comme le « sang de la victoire » par les vainqueurs de l’Allemagne et de l’Empire ottoman, devenait, de facto, un enjeu impérialiste majeur. Il l’est resté.

          C’est l’URSS ensuite qui n’était pas sioniste mais tentait de ruiner l’influence occidentale sur le Proche et le Moyen-Orient, a armé, via la Tchéquoslovaquie, les sionsites en 1948 , ce qui a assuré la victoire de ces derniers. Ce faisant, L’URSS a trépigné le peuple palestinien ; c’est bien là une page noire de son histoire…

          Contrairement à ce qui est un peu paartout, l’ONU n’a pas créé Israël. L’AG de l’ONU qui est une production de l’impérialisme occidental en 1945 (comptant alors une cinquantaine d’Etats contre plus de 190 aujourd’hui) n’a pas la capacité de créer quoi que ce soit mais de proposer. Elle a proposé la partition de la Palestine mais en violant sa propre charte qui reconnaît le droit des peuples à l’autodétermination. Sans compter que ce territoire ne lui appartenait pas et que les palestiniens ne voulait pas de partition comme en témoignent les grèves générales fin novembre 1947, ce qui rendait caduc la proposition de l’ONU.

          La shoah n’a fait que catalyser la réalisation du projet sioniste, du grand Israël, de la mer au Jourdain.

          En clair, la seule légitimité d’Israël dans les frontières de 1967 est celle du fait accompli à coups de canons et de nettoyages ethniques. Pas plus.

          Enfin, Israël recouvre 20 000 Km2, soit la valeur approximative de 3 départements français. Population : 4,5 millions d’habitants, l’équivalent d’une ville européenne moyenne comme Barcelone. Est-ce que Barcelone peut créer et entretenir la 3 ème armée du monde ? Ultramoderne, équipée de sous marin atomiques et de 200 têtes nucléaires ? Sûrement pas. Trois milliards de dollars US subventionnent annuellement l’armée sioniste et l’accord d’association unissant Israël à l’UE fait le reste. Bref, qui s’oppose à Israël défie les plus grandes puissances économiques et militaires du monde : les US et l’UE. De sorte que le sioniste n’est pas autre chose que le fer de lance de l’impérialisme occidental au Proche et au Moyen-Orient.

          S’il y a une solution à la tragédie du peuple palestinien et il y en a un, elle est entre les mains des peuples nord-américains et des européens. Ce sont eux qui ont la capacité de contraindre leurs gouvernements à cesser de financer Israël, de l’armer et de commercer avec lui. Comment ? Via le boycott d’Israël dans le court et le moyen terme. Par l’éradication de l’impérialisme dans le long terme : car ce sera long de changer les pratiques millénaires ou presque d’une Europe conquérante.

      • jeudi 17 juin 2010 à 14h06, par un-e anonyme

        D’ici 30 à 40 ans, la population palestinienne aura largement dépassé celle d’Israel. La loi du nombre jouera...et tant pis pour les malheureux Israeliens qui souhaitent la paix. Il sera trop tard, même si le lobby juif tient le gouvernement américain et le pousse à soutenir Israel quelles que soient ses actions. A moins qu’un pays arabe, doté de la bombe, n’en lâche une , avant cela, sur Israel !



  • vendredi 11 juin 2010 à 19h23, par objecteurderésidence

    Je rends moi aussi hommage au courage de l’auteur, mais il me semble qu’il y a une contradiction dans la pensée : il dit que la seule solution est de changer des mentalités israéliennes formatées par tous les moyens colossaux dont dispose un État moderne ; puis à la fin de l’article il en appelle à des pressions extérieures pour faire cesser l’occupation des territoires palestiniens. D’après ce qu’il en dit lui-même, je comprends que les pressions extérieures ne pourront jamais faire plier l’appareil d’État et les mentalités populaires influencées par icelui.

    Je trouve que ce serait une bonne chose de se demander comment on peut lutter contre la propagande des États modernes, et cela ne concerne pas qu’Israël. J’étais enseignant d’histoire en France, et la plupart des gens n’imaginent pas la quantité de mensonges, de silences, d’approximations qu’on trouve dans les programmes. Un seul exemple, le déclenchement de la 1re Guerre Mondiale, qu’on a longtemps attribué, et que l’on attribue encore, à la seule politique agressive du gouvernement allemand de l’époque, en dissimulant soigneusement les rivalités coloniales, industrielles, la course aux armements, le déchaînement passionnel des nationalismes et la brutalisation générale des moeurs, dont souffrent des groupes désignés comme des boucs émissaires, notamment en France avec l’affaire Dreyfus.
    Toutes choses qui n’ont rien à voir, bien sûr, avec notre époque éclairée ...

    Ce n’est qu’en lisant certains écrivains de l’époque, comme Zweig ou Péguy - dont par ailleurs on étudie peu la pensée politique - que j’ai commencé d’y voir un peu plus clair.



  • vendredi 11 juin 2010 à 20h13, par graffitix

    Les murs enferment ceux qui enferment.

    iSSraël s’est pris dans son piège mortel, celui d’être devenu un univers concentrationnaire. Un laboratoire de techniques coercitives et manipulatoires.

    On disait jadis que c’était le porte-avions des USA.

    La droite israélienne au pouvoir se signifie par une extrême arrogance doublée de stupidité.

    Sa politique est une suite de contresens. Il ne peut y avoir de vraie cohésion sociale dans un pays aussi artificiel qui ne peut pas devenir - ou rester - librement une vraie nation.

    Mais ce symptôme est aussi celui de tout l’occident mondialiste.

    Une certaine pratique paranoïaque du mensonge, partant évidemment du présupposé de l’imbécillité bovine des chitoyens, aura assez vite trouvé ses limites, même si, pour le moment, on trouve parfois que le temps nous dure.

    Le déni de réalité n’est-il pas une pathologie mentale ? A moins que ce ne soit Deepwater Horizon.



  • vendredi 11 juin 2010 à 23h20, par un-e anonyme

    La société israélienne qui nous est décrite ici doit faire rêver les auditeurs de l’IHEDN



  • Pourquoi ne pas parler de l’influence sous-jacente des religieux ? (d’un côté comme de l’autre). Il me semble que l’Etat d’esprit des Israeliens eût été tout autre sans eux. Ne sont-ils pas persuadés d’avoir Dieu avec eux ? (Syndrome de Jericho) Qui a tué Rabin ? Pourquoi ?

    Voir en ligne : Et Rabin ?



  • La conclusion d’Ilan Pappé ma paraît en contradiction avec le reste de son article :

    Par le passé, le monde libre a fait face à ce type de situations explosives en prenant des mesures fermes, comme les sanctions contre l’Afrique du Sud et la Serbie. Seules des pressions sérieuses et durables des gouvernements occidentaux sur Israël feront là-bas passer ce message que le chantage militaire et la politique d’oppression ne peuvent être moralement et politiquement acceptables pour le monde auquel Israël veut appartenir.

    Qu’est-ce que « le monde libre », celui qui ne s’applique pas le droit international à lui-même ?

    Comment pourrait-il exiger de l’état d’Israël qu’il le respecte ?

    Ce serait pourtant la seule solution pour entamer un petit peu la pathologie israélienne. On peut rêver comme l’écrit William BLUM :

    La pire chose qui soit arrivée au peuple juif, après l’Holocauste

    • mardi 15 juin 2010 à 05h27, par un-e anonyme

      depuis la fin du 19è siècle la suprématie de l’occident ou si l’on préfère de l’europe dans tous les domaines politique économique social et surtout industriel lui a permis de regarder ailleurs c’est à dire vers les continents et contrées qui n’avait pas le meme degré de progrés.bien sur le progrés est à l’honneur de ceux qui le façonnent et par extension de l’humanité tout entière.dans les propos qui vont suivre je ne tenterai pas de seulement expliquer la conduite de l’europe je poserai la grande question du pourquoi avoir eu un comportement impérialiste jusqu’à nos jours en 2010.en effet pour en revenir au conflit du moyen orient il n’y a rien de plus illustratif que le comportement impérialiste en continu de cette europe j’assimile également les u s a à l’europe car ce sont des ex européens qui perpétue le shéma tout ce monde occidental n’a t il jamais eu l’idée de s’associer à ces peuples qu’il décrit toujours comme barbares alors qu’il sait pertinemment qu’ils ont eu leurs heures de gloire et de grandes civilisations.jusqu’à quand ce déni car il ne peut s’agir que de déni.j’estime qu’il ny a rien de plus dégradant pour l’homme que le refus de l’autre et la discrimination animale commence chez les nations civilisées entre riches et pauvres gens du pouvoir et les sans pouvoir patrons et ouvriers gens de la ville et ceux des campagnes avant de devenir plus méchante en s’étendant aux pays aux peuples aux couleurs de peau.seul l’égoisme et la cupidité sont l’explication à ce comportement en quelque sorte suicidaire pour l’humanité et son destin fatal et tragique.un revirement total dans les mentalités doit s’opérer comme le p^ropose ilan pappé dans son texte est il si difficile de changer,souvenons nous de la décolonisation les destins se sont défaits les nations se sont séparées et il n’y a pas eu grand drame bien sur il y a toujours le coté économique qui est la pierre d’achoppement de la vie des hommes mais ne peut il y avoir d’entente la dessus et à chacun d’apporter sa contribution n’y a t il pas assez de biens sur terre pour etre partagé par tout le monde autant de questions si simples me viennent à l’esprit et certaines communautés le pratiquent déjà depuis longtemps.un tel degré de progrés ne peut il mener qu’à la guerre n’est il pas plus appaisant d’aider les autres de leur apprendre et poutant cela est dans notre nature quels trésors de patience ne déploie t on pas pour élever ces enfants ne peut on pas en faire de meme avec autrui aucune satisfaction morale ne peut etre supérieure à celle du maitre devant les avancées de son élève mais toujours dans le respect des autres ce qui est essentiel.
      ,



  • Il est impossible de tenir un tel discours dans les médias français.

    Un exemple : Le Point à consacré sa Une au livre de R.Debray sur Israël. J’en ai d’abord été surpris, connaissant le parti-pris pro-israëlien de cet hebdomadaire. En le lisant, j’ai compris qu’il s’agissait d’écrire un article sur le livre (4 pages) et de lacher la meute de caniches édentés sur 5 pages (E.Barnavi, JC Ruffin, Goldnabel...)

    Omerta qui règne sur Israël et le Sionisme en général est effroyable.

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