ARTICLE11
 
 

samedi 7 février 2009

Le Cri du Gonze

posté à 08h31, par Lémi
10 commentaires

Courrier de l’au delà : M. Don Quichotte, de La Manche, nous écrit à propos des « chimères » sarkoziennes
GIF - 7.5 ko

« La lance levée, le bouclier bien ficelé à votre bras guerrier, vous foncez en mugissant vers ces mirages que je connais si bien, ces fantasmes de l’imagination. Hombre ! Quelle magnifique détermination à ne pas ouvrir les yeux, à rester dans l’erreur fantasmée ! Presque jaloux j’en serais si je n’y voyais pas un clair hommage à mes escapades passées. »

GIF - 48.5 ko
« Que Dieu me protège !, s’écria Sancho, n’avais-je pas prévenu Votre Grâce de bien prendre garde ? Ne l’ai-je pas avertie que c’étaient des moulins à vent et que, pour s’y tromper, il fallait en avoir d’autres dans la tête ? »
Miguel Cervantès, Don Quichotte de La Mancha

« Aujourd’hui, rien. »
Journal intime de Louis 16, 14 juillet 1789.


Monsieur le Président,

Je n’ai pas pour habitude de sortir de mon silence post-mortem, j’y suis trop confortablement installé. Le silence glacé de mon tombeau me ravit, j’y échafaude mille fantaisies, mille aventures flamboyantes dans lesquelles toujours j’ai le beau rôle ; j’y repousse des armées et conquiers des cœurs purs, chevalier pour l’éternité. Bref, tout à mon bonheur mental, je ne m’intéresse plus trop au vacarme extérieur. La réalité de ce monde terne m’a trop déçu, je m’en méfie comme de la peste désormais. Les années passent et je me terre, bienheureux zombie aux rêves de gloire. A l’abri du monde.

Alors, me demanderez-vous, pourquoi sortir de ma réserve post-mortem ?
C’est très simple : quelques rares informations vous concernant sont venues troubler mon repos. Des broutilles, certes, mais elles ont suffi à me convaincre du fait qu’il existe d’étranges similitudes liant nos destins respectifs. Nous sommes frères, en quelque sorte, partageons le même sort, celui d’éternels exilés dans des chimères incomprises.
Comme je l’ai affirmé il y a bien longtemps : « Oiseaux de même plumage volent en compagnie ». Et votre plumage, sauf votre respect, me semble très proche du mien…

Car que de de choses nous lient, que de similitudes nous partageons ! Et quelle constance dans l’aveuglement je sens s’enraciner en vous, guerrier de l’impossible !
La lance levée, le bouclier bien ficelé à votre bras guerrier, vous foncez en mugissant vers ces mirages que je connais si bien, ces fantasmes de l’imagination. Hombre ! Quelle magnifique détermination à ne pas ouvrir les yeux, à rester dans l’erreur fantasmée ! Presque jaloux j’en serais si je n’y voyais pas un clair hommage à mes escapades passées.

Quelques idéalistes réfugiés dans un village perdu se targuent de vous défier gentiment en ne suivant pas votre modèle capitaliste ? Ils deviennent une armée secrète complotant dans l’ombre, une force du mal obscure et innombrable, à garder sous les verrous pour un temps indéfini.
Comme moi par le passé, vous galopez vaillamment vers des ennemis inexistants, moulins modernes adaptés à vos fantasmes sécuritaires contemporains. Magnifique destin que celui d’un chevalier luttant pour de nobles causes, fonçant tête baissée vers la déculottée.

Mais prenez-garde. Le monde ne manque pas d’embûches semées par ceux qui rêvent de vous faire payer pour vos rêves de grandeur. Vous vous briserez contre les ailes de ce moulin si les choses tournent mal. Ou, pire encore, la population se montrera incapable de comprendre votre cause, se fera hostile. J’ai encore en mémoire ce terrible souvenir, ces bergers me lapidant de leurs pierres malfaisantes, ceci seulement parce que, dans mon enthousiasme chevaleresque, j’avais confondu leur troupeau de moutons avec une armée ennemie.
Que voulez-vous, les âmes pures comme les nôtres déchaînent les jalousies, les passions mauvaises. Cela ne vous empêchera pas, j’en suis sûr, de continuer votre noble quête, la quête de chimères et le brassage de vents aventureux…

JPEG - 12.6 ko

De merveilleuses aventures vous attendent, proches des miennes mais adaptées à votre époque vrombissante. Je sens poindre ce moment où véritablement, vous et votre gouvernement (dans lequel, une fois n’est pas coutume, j’ai repéré une autre âme soeur, blonde comme les blés) donnerez toute votre mesure chevaleresque. D’un sans-papier de 12 ans, vous ferez un leader d’Al Qaida qu’il faut massacrer impitoyablement. D’une femme de ménage berrichonne, la nouvelle Rosa Luxembourg. Du club de pétanque de Béziers, l’avant-garde des hommes-crabes aux desseins maléfiques. Et que sais-je encore ? Vous avez fait vos preuves, vous les ferez encore. Ce n’est pas celà qui m’inquiète.

Non, ce qui m’inquiète, c’est que, je le pressens, dans l’excitation de votre quête, dans la multiplication des aventures, vous ne verrez pas poindre l’ennemi, le vrai. Comme moi cinq siècles plus tôt, tout occupé à combattre des chimères, vous ne prendrez pas la mesure de vos vrais ennemis. Et au moment décisif, quand il faudra combattre, démunis vous serez.
Face à vous commencent à s’agiter des armées de mécontents. Et chaque jour ils seront plus déterminés à vous renverser de votre trône, Rossinante moderne. Et vous, naïf et doux rêveur, vous n’y voyez qu’une bande de moineaux faciles à disperser…

Bientôt, ils seront dans la rue, par millions, ça ne saurait tarder. Vous les traiterez comme un feu de paille, une colonne d’insectes faciles à écraser sous votre talonnette de fer. Alors, pauvre hère, vous vous ferez rossez. Totalement.
Ce fut mon destin, glorieux dans ses erreurs, tragique dans son épilogue. Ce sera le vôtre.

__0__

PS : bien entendu, cette chronique ne cherche pas à assimiler véritablement le petit nabot inculte au grand Don Quichotte, saint homme abreuvé de littérature et d’intentions limpides. Seulement à pointer du doigt l’aveuglement d’un pouvoir qui fantasme la réalité pour mieux nous manipuler…


COMMENTAIRES

 


  • PS : bien entendu, cette chronique ne cherche pas à assimiler véritablement le petit nabot inculte au grand Don Quichotte, saint homme abreuvé de littérature et d’intentions limpides.

    Cette nécessaire précision rend d’autant plus judicieux ce qui précède.



  • […] un pouvoir qui fantasme la réalité pour mieux nous manipuler…

    Je ne sais pas s’il fantasme la réalité ce pourvoir, je dirais plutôt qu’il la manipule pour mieux nous manipuler en effet. De plus la reconnaître pour ce qu’elle est, cette réalité, ce serait reconnaître l’échec flamboyant. « On » a voulu, « on » veut nous couler dans un moule à l’anglo-saxonne du pire modèle, et les Français ne l’acceptent pas sentant d’instinct, si ce n’est par raisonnement, que ce modèle est destructeur, on en a chaque jour des preuves éclatantes.. Faire de la France une entreprise privée avec à sa tête un super-pdg, c’est déjà une grossière erreur, le faire pas force une faute politique. La peur cédera devant la nécessité.

    On rue dans les brancards ailleurs aussi. En Angleterre ça ne va pas tout seul non plus. On n’en parle guère ici.

    Depuis neuf jours, des milliers d’ouvriers d’une vingtaine de sites industriels ont débrayé en Grande-Bretagne. […] des grèves touchaient les quatre coins de la Grande-Bretagne. Plusieurs milliers de grévistes du secteur industriel protestent depuis plus d’une semaine contre le recrutement d’ouvriers étrangers. Ils se disent victimes de discrimination.

    http://www.cyberpresse.ca/internati...

    Voici un extrait du témoignage d’un chômeur anglais, solidaire des grévistes (c’est moi qui souligne) :

    « It’s about time the power triangle was turned upside down and back to its normality where the people tell the politicians what to do, the politicians don’t tell the people what to do. All these men are making sacrifices because they are determined to see this through and get a resolution and get justice. This is a small price to pay to achieve a victory for something you believe in ».

    (Il est grand temps que le triangle du pouvoir se remette dans le bon sens, c’est au peuple de dire aux politiques ce qu’ils doivent faire, ce n’est pas aux politiques de dire au peuple ce qu’il doit faire. Tous ces hommes font des sacrifices parce qu’ils sont déterminés à obtenir ce changement, à obtenir un résultat, à obtenir justice. C’est un petit prix à payer pour arriver à la victoire de ce à quoi vous croyez.)

    http://news.bbc.co.uk/2/hi/uk_news/...

    Voir en ligne : http://carnetsfg.wordpress.com/

    • Effectivement, les indices s’accumulent, ici ou outre-manche (merci pour les infos, c’est vrai que pas grand monde n en parle) : dans la situation actuelle, le pouvoir est simplement aveugle et dépassé, même si manipulateur. Et l’aveu d’échec, si ils ne le feront jamais, on finira bien par le leur fourrer dans la bouche, par la force.
      Même d’ici, en Bolivie, on sent bruissser l’indignation collective occidentale...



  • LA QUETE

    Rêver un impossible rêve

    Porter le chagrin des départs

    Brûler d’une possible fièvre

    Partir où personne ne part

    Aimer jusqu’à la déchirure

    Aimer, même trop, même mal,

    Tenter, sans force et sans armure

    D’atteindre l’inaccessible étoile

    Telle est ma quête,

    Suivre l’étoile

    Peu m’importe mes chances

    Peu m’importe le temps

    Ou ma désespérance

    Et puis lutter toujours

    Sans question ni repos

    Se damner

    Pour l’or d’un mot d’amour

    Je ne sais si je serai ce héros

    Mais mon cœur serait tranquille

    Et les villes s’éclabousseraient de bleu

    Parce qu’un malheureux

    Brûle encore, bien qu’ayant tout brûlé

    Brûle encore, même trop, même mal

    Pour atteindre à s’en écarteler

    Pour atteindre l’inaccessible étoile.



  • samedi 7 février 2009 à 10h27, par Dame DULCINEE du TOBOSO

    Mon amoureux,laisse ces mortels,j’ai froid aux pieds,reviens te coucher.

    • samedi 7 février 2009 à 19h04, par Lémi

      Ma dulcinée, je reviens de ce pas, le monde extérieur est trop gris de toute manière (on va même jusqu’à me comparer à un nabot dénué de toute classe, dans quel monde vivent-ils ?), et une bouillotte je ramène.



  • Petit et nabot
    ça fait un peu trop

    S’il est tout petit le pauvre
    ce n’est pas de sa faute

    Il a d’autres défauts
    que n’etre pas bien haut

    J’en connais un qui a un grand nez
    et c’est pas juste de s’en moquer

    A trop le comparer à Lilliput
    tu passes pour une langue de pute

    de ce fait
    l’affreux excité
    de ses méfaits
    est presque exonéré

    cyrano

    • samedi 7 février 2009 à 19h20, par Lémi (Don Q.)

      Respect...


      Il est vrai qu’a trop me vautrer,
      dans l’épithète facile je pourrais risquer,
      à mes propos d’ôter toute crédibilité,

      Veuillez excuser, Cyrano,
      un emportement hors de propos,

      Un homme tel que vous comprendra, j’en suis sûr,
      que, parfois, lorsque les temps sont durs,
      juste colère mène au parjure.

  • Répondre à cet article