ARTICLE11
 
 

jeudi 11 décembre 2008

Le Cri du Gonze

posté à 09h30, par Lémi
43 commentaires

Pourquoi je n’échangerais pas un baril d’Eduardo Galeano, d’Howard Zinn ou de Noam Chomsky contre mille de BHL
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Il y a ceux qui écrivent le drame d’un continent comme ils le feraient d’un roman tragique, histoire sombre mais passionnante de l’exploitation de ceux d’en bas et de leur mise au pas. Et il y a ceux qui parent leurs discours creux et convenus des ores médiatiques et du flonflon publicitaire. Disons, d’un côté Galeano, de l’autre BHL : entre les deux, on a choisi. Et vous aussi…

"L’atmosphère générale est au désespoir. Seul un changement de perspective historique peut permettre d’éclairer nos ténèbres. Souvenons-nous que nous avons bien souvent été surpris au cours du XXe siècle. Surpris par l’apparition soudaine d’un mouvement populaire, par le brusque renversement des tyrannies, par l’étonnante renaissance de flammes que l’on croyait éteintes.
Nous devons retrouver cette tradition qui, d’une révolution à l’autre, s’est faite rare dans l’Europe qui l’a vu naître : ne pas quitter le rang des déshérités et ne jamais servir les maîtres !
"

Howard Zinn

Je vais être franc avec vous :
Ce billet n’est pas ce qu’il devait être. En cours de route, il a dévié, pris la tangente, pour finalement amerrir là où il n’était pas attendu.

Au départ, ce devait être un compte-rendu de lecture précis et détaillé consacré à un livre qui m’a profondément marqué : « Les veines ouvertes de l’Amérique Latine ». L’oeuvre d’un intellectuel uruguayen, Eduardo Galeano. Et surtout le bouquin essentiel pour qui voudrait se plonger dans l’histoire tumultueuse de l’Amérique Latine à partir du moment ou les puissances occidentales (Espagne et Portugal d’abord, puis Angleterre et évidemment Etats-Unis) s’avisèrent du fait que, non seulement les civilisations du coin (Incas, Aztéques, Mayas…) possédaient des trésors faramineux, mais que la terre là bas regorgeait de richesses. L’histoire effarante du pillage systématique d’un continent.
Comme le mildiou sur une récolte, l’homme blanc déferla sur l’Amérique Latine, et durant cinq siècles l’écrasa sous son joug de fer au nom de sa prétendue supériorité. Sous la plume d’un indien Nahuatl des environs de 1550 évoquant les troupes de Cortès, cela donne :

« Comme le feraient des singes, ils soulèvent l’or, ils s’assoient avec des gestes qui miment leur jubilation, on dirait que leurs cœurs sont rajeunis et illuminés. Il est évident que c’est ce qu’ils désirent avidement. Tout leur corps se dilate à cette idée, ils montrent à cet égard un appétit furieux. Ils convoitent l’or comme des porcs affamés. »

Et sous celle d’Eduardo Galeano :

« La division internationale du travail fait que quelques pays se consacrent à gagner, d’autres à perdre. Notre partie du monde, appelée aujourd’hui Amérique latine, s’est prématurément consacrée à perdre depuis les temps lointains où les Européens de la Renaissance s’élancèrent sur les océans pour lui rentrer les dents dans la gorge. »

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Au final, un tableau précis de cinq siècles d’impérialisme occidental, un livre plus que nécessaire dont le seul défaut est d’avoir été réactualisé pour la dernière fois en 1978.

Mais voilà, si j’envisage encore de terminer ce billet (un jour, promis), il s’avère que l’ampleur du sujet traité ainsi que mon respect profond pour l’ouvrage en question sont incompatibles avec ma petite forme en ce matin chilien brumeux. En clair, plus je scribouille sur le sujet, moins j’ai l’impression de servir sa cause. Il y a des jours comme ça...

Par contre, pour qui s’intéresse aux problématiques liées au travail d’historien, il y a une chose qui saute aux yeux, et qui à mon avis mérite d’être relevée : c’est qu’Eduardo Galeano fait partie de ces (trop) rares intellectuels contemporains qui refusent de se conformer au moule de l’histoire officielle, celle qui s’enseigne dans les écoles et règne dans les médias.
Son livre, s’il est documenté et précis, est tout sauf un travail universitaire et conventionnel. Galeano écrit avec ses tripes, avec sa souffrance. Il a vu son pays, l’Uruguay, dévasté par l’ingérence des Etats-Unis et gouverné par des fantoches tortionnaires. Il a vu le peuple qu’il côtoyait et aimait torturé et enfermé, l’ensemble d’un continent livré aux appétits de puissances économiques totalement indifférentes aux sorts des êtres humains.

Alors, quand il a fallu livrer un compte-rendu de cet esclavage qui cachait son nom, de dresser le tableau de ces cinq siècles d’horreur motivées par la soif de l’or, Galeano n’a pas seulement listé les faits historiques et fait étalage de ses connaissances sur le sujet. Non : il a pris parti, s’est impliqué dans son sujet. Cette longue litanie de douleurs et de morts qui ne semble pas avoir de fin, Galeano la conte avec une colère qui ne se cache pas.
Car, comme Howard Zinn, autre grand historien dissident, Eduardo Galeano se méfie de l’histoire officielle. Et comme Zinn1, il se penche en priorité sur l’histoire des opprimés, de « ceux d’en bas ».
Seule différence : Quand Zinn retrace l´histoire du syndicalisme américain, de la condition ouvrière dans les grandes villes de Californie, ou de la lutte pour les droits civiques des populations noires du Sud des Etats-Unis, Galeano convoque la figure des mineurs boliviens, des ouvriers des champs de pétrole vénézuéliens ou des dernières communautés d’indiens Mapuche résistant encore et toujours à l’envahisseur. Si le cadre géographique et humain change, le but reste le même, chez l’un comme chez l’autre : redonner au peuple la place qu’il mérite dans l’histoire : la première…

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Autre similitude entre les deux historiens : la clarté de leurs livres et la finesse de leurs styles. Car pour raconter cette histoire populaire, la désembourber de sa version officielle, il est essentiel de se débarrasser du sabir universitaire et du langage hermétique habituel. Ce que Galeano explique, en conclusion de l’ouvrage :

« Je sais qu’il a pu paraître sacrilège que ce manuel de divulgation parle d’économie politique sur le ton d’un roman d’amour ou de piraterie (...). Je soupçonne l’ennui de servir ainsi, trop souvent, à bénir l’ordre établi, en confirmant que le savoir est un privilège des élites. »

Et donc, ce que d’aucuns raconteraient en autant de grands mots creux, Galeano le traite sur le ton du roman, insufflant vie à son récit. Certains le lui reprochent, sûrement les mêmes qui reprochent à Zinn son approche trop « humaine » de la science historique. Ou qui vilipendent Noam Chomsky ou Alain Badiou pour leurs prises de position frontales respectives (l’un contre l’impérialisme ricain, l’autre contre le vent de « réaction » soufflant de par chez nous).
Chez Galeano comme chez eux, le traitement de l’histoire est synonyme d’engagement2 : il s’agit de mettre les mains là où les plumes conventionnelles (qu’elles soient médiatiques ou universitaires) ne vont pas. A cette « Trahison des Clercs »3 dont parlait déjà Julien Benda en 1927, rares sont ceux que l’on peut poser en contre-exemples. Ils n’en sont que plus précieux.

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1 Dont il te faut absolument, si ce n’est déja fait, acquérir l’intégralité de ses livres traduits, publiés par Agone.

2 Pour Galeano, cet engagement se paya d’un exil forcé en Espagne, les dictatures uruguyaennes et argentines ayant mis sa tête à pris après la parution du livre

3 Ici, je voulais déverser quelques couches de fiel sur la figure de l’intellectuel français à paillettes, dans la plus belle tradition BHL/Finki/Fog ultra-vide et puis finalement je me ravise. A quoi bon répéter ce que tout le monde sait ?


COMMENTAIRES

 


  • jeudi 11 décembre 2008 à 09h51, par Alexis

    Bonjour,

    C’est bien Eduardo et non Roberto le Galeano dont vous écrivez. Étant donné que tout le monde ne connaît pas l’écrivain uruguaien (pas ici en France en tout cas), ce serait bien de corriger le prénom dans le titre et le corps de l’article.

    Amitiés,

     × A

    • jeudi 11 décembre 2008 à 10h08, par JBB

      Mince… La honteuse bourde…

      Lémi ne peux le faire, reparti sur les routes chilienne agiter son pouce en attendant la voiture salvatrice. Mais je corrige pour lui.

      Merci beaucoup. :-)

    • mardi 16 décembre 2008 à 18h51, par Lémi

      Hem, effectivement ca la fout mal. Merci d avoir signalé la méga bourde. Sinon, j ai des excuses, quelqu un avait mis de l alcool dans mon Pisco... (et puis je le signalais, quand même, que ce jour naviguait sous de mauvais augures : "il y a des jours comme ça....)
      Amitiés itou (doubles si c est bien l Alexis auquel je pense)

      • vendredi 2 janvier 2009 à 21h53, par beth’apar

        .

        Je découvre votre espace... Je devrais m’attacher.
        Vous êtes aviateur ? Vous semblez respirer loin des sommets de pâquerettes et, aussi, vous apparaissez soucieux du plancher des vaches.

        Vous aimez la musique ?... http://www.article11.info/spip/spip...

        .



  • Formidable votre voyage et en plus vous lisez.

    Vous êtes parti avec qelle agence de voyage ?Je viens de faire en bus(avec wc et télévision)la visite du centre cosmique de l’univers(la gare de Perpignan)ensuite j’ai continué sur l’Espagne(je n’avais que le week-end).
     × Dans les hotels pour les repas, avez vous les entrées à volontées et les boissons sont elles comprises ?
     × Pouvez vous me conseiller pour mon prochain voyage,j’hésite entre l’Andorre et Monaco ?
    J’ai eu un retraité pendant mon voyage qui est allé en Amérique du Sud,il m’a dit qu’il y avait beaucoup de retraités qui faisaient l’Argentine ,le Chili :vu qu’ils avaient les moyens.

    J’attends avec impatience vos nouvelles aventures.C’est troublant ,on dirait que j’écris à un héros de roman.



  • De bien belles lignes qui ne peuvent que donner envie de lire ou de relire ces écrivains. Quant à l’entartré perpétuel c’est encore lui faire trop d’honneur que de le citer en face de tels hommes.

    • C est vrai, la tarte a la crème BHL commence a fatiguer. D ailleurs, promis, je ne l invoque plus avant 2009 voire 2010 (qui sait, il se peut qu avec ce boycott via Article 11, BHL sombre rapidos dans l anonymat. Si il n a plus l appui de grands groupes de presse comme le motre, tout est possible...).
      Salutations



  • jeudi 11 décembre 2008 à 16h08, par JCharles

    En effet, formidable livre que « les veines ouvertes ». Oh combien utile pour comprendre comment, aux cours des siècles, l’Amérique latine a été impitoyablement exploitée, vidée de ses richesses minerales, humaines etc... Un certain degout de nos nations indéniablement impérialistes et avides d’argent, ne peut que faire surface après la lecture de cet ouvrage.

    PS : cela dit, j’adhère au commentaire de Monique : destination de retraité le Chili :-)

    • mardi 16 décembre 2008 à 19h02, par Lémi

      Je me doutais que tu avais du itou parcourir le livre en question. Dont je ferais bientot une recension plus détaillée, dès que cette flemme intellectuelle aura déserté mon esprit. Et pour le dégoût dont tu parles, je pense qu’on ne peut que le ressentir à la lecture du livre, ou alors on est mort.

      Plutôt d accord pour dire que Chili est mou, et donc j agréé avec Monique (momo, si tu me lis, je t embrasse). D ailleurs dans 2 jours, comme Capri, Chili sera fini (los sientio).
      Slurp



  • jeudi 11 décembre 2008 à 23h58, par Un lecteur acharné

    Pour ceux lisant l’anglais, on peut lire A People’s History of the World de Chris Harman chez Verso.

    Gros livre, mais tout à fait passionnant.



  • C’est autre chose que du Pierre Jourde :
    « Si l’islam est incompatible avec la démocratie et la liberté d’expression, si en outre certains fondamentalistes entreprennent de nier la Shoah ou d’en insulter les victimes, que penser des ressemblances objectives avec le nazisme et le fascisme ? Sont-elles purement fortuites ? »

    En 5 lignes , il fait l’amalgame entre Islam, fondamentalisme, nazisme, fascisme, en suggérant que l’Islam et les musulmans nient la Shoah, la démocratie et la liberté.

    Après ça, il (Jourde) peut dire ce qu’il veut sur les libertés démocratiques ...façon « droits-de-l’homme-blanc-occidental-possédant ».

    Ce commentaire fait bien sur référence à une autre billet de ce blog .. Octobre 2008 je crois :)

    J’avais dit que Pierre Jourde j’en étais revenu ...
    Et pour cause : Lire Galéano, Chomsky ou Zinn me dispense largement de lire Jourde ...



  • vendredi 12 décembre 2008 à 15h29, par pièce détachée

    Article XI est instamment prié de cesser de vanter les mérites de livres que, mis à part ceux de Pocket, je rêve de pouvoir acheter. Surtout ceux d’Agone, dont les catalogues me rendent débile de frustration. Pour se venger de devoir m’en offrir un de temps en temps (à ma demande), ma mère le brandit devant les invités en commentant : « Ma fille aînée, c’est une tête ; elle est pas mariée mais elle est intelligente [sic et merci pour les autres] ». Article XI, l’ourse savante debout sur ses papattes arrière te le dit comme elle le pense : ça refroidit la dinde.

    • Juste un petit commentaire réactionnaire :
      Cessez un peu de dire tout et n’importe quoi sur la supposée « histoire officielle ».
      De quoi parlez-vous au juste ?! Ça n’existe pas, c’est un délire de paranoïaque, l’histoire officielle !
      Nous ne vivons pas en dictature, pour ce qui est de l’Uruguay, plus depuis 25 ans, la prenthèse ayant durer 10 ans, ou même moins si on considère que les véritables années de terreur réactionnaire ont été celles allant globalement de 1973 à 1976/77/78.
      Mais à quoi ça sert de parler faits, arguments et histoire réelle avec des gens qui ont tout compris, tout entendu, tout vu et tout interprété !
      Faîtes donc tourner les beaux noms de Galeano, Zinn et Chomsky, et pouruoi pas ce proto-fasciste de Benda, fort bien !
      Mais n’insultez plus l’histoire. C’est un processus tout aussi réactionnaire et conformiste que de produire des discours ant-scientifiques et anti-intellectuels tels que les vôtres que de produire des discours savants qui disqualifient le travail et le point de vue des profanes (ce que je en fais pas !).
      Savoir allier la science avec les activités profanes de l’histoire, l’histoire populaire, les amateurs, etc., volà une tâche vraiment courageuse aujourd’hui, sur les traces des Annales des annés 1930, de Marc Bloch et Lucien Febvre.
      L’ennemi, c’est le simplisme.

      Salutations

      • samedi 13 décembre 2008 à 18h49, par pièce détachée

        Cher(e) Aa,

        Pour clarifier vos idées (sans parler de leur formulation), vous êtes invité(e) à lire ceci, ou cela, ou encore cela.

        • Sans parler de la violence symbolique de votre commentaire (« clarifier votre pensée »), je ne vois pas pourquoi la référence à Noiriel et au CVUH, à moins de les diviniser et de vouloir tétaniser tout adversaire (même si comme moi on est familier de cette pensée) ces gens fort sympathiques on en conviendra, invaliderait ma pensée. Et l’on voit bien comment des adorateurs de la liberté, de la pensée libertaire et la protestation peuvent être de biens vilains censeurs...

          Demander à un membre du CVUH spécialiste de l’Amérique latin ce qu’il pense des Veines ouvertes de Galeano, ou encore de l’Histoire populaire de Zinn.
          Moi je dirais que ce sont des livres émouvants et stimulants, mais en aucun cas ils ne doivent ne pas être discutés, et surtout opposésà une supposée histoire officielle qui n’existe que dans la pensée confuse d’excités historisants, chose fort répandues, depuis le marxisme jusqu’au tiers-mondisme en passant par les nouvelles formes de pensée critique, tout cela n’étant d’aillleurs pas illégitimes, mais discutables...

          • samedi 13 décembre 2008 à 20h22, par pièce détachée

            Cher(e) Aa,

            Aaah... la « violence symbolique de [mon] commentaire »... C’est à se frotter les yeux pour vérifier qui a signé, ci-dessus, les mots « délire de paranoïaque », « proto-fasciste », « réactionnaire et conformiste », « anti-scientifiques et anti-intellectuels », « pensée confuse d’excités historisants », « bien vilains censeurs », « tétaniser tout adversaire ».

            Aaah... Pauvre, pauvre Aaaa...

            • Très bien : reprenons dès le début.
              Je critique le message initial sur Galeano, Chomsky et Zinn, car relevant franchement de l’apologétique d’un certain style de critique historique et sociale, et méprisant abondamment « l’histoire officielle », c’est-à-dire en fait, l’histoire universitaire, cela va sans dire, ni Eduardo Galeano, ni N. Chomsky ni H. Zinn n’étant des historiens professionnels.
              Mon propos n’est pas, dès le début, n’est toujours pas, de disqualifier ce genre de littérature. Si Chomsky n’est pas très drôle, au moins aura-t-il parfois un intérêt pour proposer un point de vue radical et extrêmement violent, ce qui aura certes le mérite d’exciter la jeunesse et les demi-habiles, mais aussi une valeur certaine de chroniqueur protestataire. Bref, je ne dis pas, et peu de gens disent, que « Chomsky c’est pas bien » (mis à part les grands prêtres néoconservateurs, Nicolas Weill du Monde, ce que personne ici ne peut se réclamer me semble-t-il). Et il a peut-être son importance en tant que protestaire.
              Maintenant, protester encore aujourd’hui contre « l’histoire officielle », arborant des nonagénaires de la guerre froide, fort sympathiques, mais tout de même pas les plus exposés aux actualités..., c’est tout de même un peu fort.

              J’irai plus loin : dans le « renouveau » de la « pensée critique », dans les mouvements politiques et sociaux contemporains qui voient en France l’arrivée d’un nouveau parti se voulant anti-capitaliste, il est fort à craindre de retrouver bien des errances des années 1960...et d’autres périodes « révolutionnaires »...
              La politique a bien du mal à se départir du mythe, de la mythologie, l’une d’elles étant bien sûr la révolution, l’autre étant les prophètes, Galeano en étant l’un d’eux, Chomsky étant une sorte de St Pierre de la contestation actuelle.

              • « délire de paranoïaque » : je maintiens que opposer Galeano, Zinn et Chomsky à « l’histoire officielle » se rapproche fortement de la paranoïa pure et simple... bien que sophistiquée, on en conviendra !

                « proto-fasciste » : Julien Benda l’était tout le monde sait, ce n’est pas violent de dire ça, c’est clinique, c’est un fait !

                « réactionnaire et conformiste », « anti-scientifiques et anti-intellectuels » ; c’est effectivement anti-scientique et anti-intellectuel de jeter en pâture à « l’histoire officielle » tous les écrits universitaires tel que produit dans l’article...

                « pensée confuse d’excités historisants » : bon la formule est expéditive, c’est vrai, mais bon, ça correspond pas mal à Galeano, je suis désolé, pour quelqu’un qui connaît un peu l’histoire latino-américaine, le journalisme historique radical du viel Eduardo est un peu aujourd’hui un conte pour excités du bocal... Même s’il a joué son rôle, notamment contre la dictature des militaires de droite, il n’est plus très aimé, et puis ça vieillit vite ces choses-là, vous savez...

                « bien vilains censeurs » : envoyer à la figure que je dois clafier mes pensées grâce à vos références du CVUH et de Noiriel militant, c’est carrément de la violence symbolique, et pas très fine !
                « tétaniser tout adversaire » : c’est que vous avez esayé de faire, pas de chance, vous n’avez pas de fanatique en face de vous ! Et je ne me laisse pas faire...!

                Mais vous confortez mon opinion que des Zinn et Chomsky peuvent tout à fait créer des fanatiques.

                • Houlà. Alors je m absente cinq jours et la violence se déchaîne en ces lieux ? Bon, je voudrais pas m’immiscer dans une querelle privée, mais je vais essayer de faire l’arbitre.

                  @Pièce détachée
                  Comme je suis plutôt d accord avec toi, pas grand chose à rajouter. Merci d’avoir essuyé l’averse...

                  @ A 3
                  Je vous trouve bien remonté. Il y a certaines choses qui m’intéressent dans ce que vous dites (la référence à Marc Bloch et l école des annales par exemple, qu il aurait été intéressant de faire apparaitre dans ce billet, je vous l accorde) mais j ai un peu l impression que vous faites un faux procès (avec une véhémence assez étonnante, d ailleurs). A mon avis, ce que Zinn et Galeano font, ce n est pas écrire une autre histoire, c est l’écrire sous un autre angle, avec une approche différente. L histoire officielle, en ce sens, c est celle qui prend toujours le même point de vue, ne cherche pas d’autre direction. En ça, elle est passive, et d ailleurs elle ne cherche pas vraiment a se diffuser, a sortir de son cénacle pour initiés. C est ce que j admire chez Zinn ou Galeano, cette capacité à s’adresser à d’autres qu’à un public plutôt universitaire (sans que, méthodologiquement, ils ne tombent dans des travers réducteurs). Pour Benda, je citais juste une oeuvre, je ne faisais pas allégeance à ses convictions (je suis amoureux fou de certains livres de Céline, ce n’est pas pour ça que je me retrouve dans l’ignoble bonhomme).

      • Certes les propos de Lémi sont un peu expéditifs mais ils restent dans le vrai :

        ... intellectuels contemporains qui refusent de se conformer au moule de l’histoire officielle, celle qui s’enseigne dans les écoles et règne dans les médias...

        Il ne cite que des « intellectuels contemporains » et ne leur prête pas l’étiquette d’historiens, et encore moins celle d’universitaires. Pour « L’histoire officielle » : Quel est le degré de culture générale des jeunes aujourd’hui ? Quelle est l’étendue de leurs connaissances historiques ? Le niveau baisse ... et je remercie Zinn et Chomsky de réveiller la curiosité historique de personnes qui n’ont probablement pas eu la chance ou la possibilité d’aller suivre des vrais cours d’histoire à l’université. Car c’est bien là le problème : seule une minorité a accès aux résultats de recherches poussées historiques. Ni l’école (primaire ou collège), ni les médias poussent les gens à creuser le « pourquoi du comment ». Il a donc raison de parler d’« histoire officielle », il aurait pu parler d’« histoire dans le vent » ou de « ragots de comptoirs », bref l’histoire officielle est désormais l’histoire admise par la majorité de nos contemporains, rien de plus. Depuis que j’ai quitté l’université je me suis aperçu que les gens ne connaissent rien des travaux universitaires, dans tous les domaines ! Comment leur en vouloir ? Au lieu d’être aussi vindicatif donnez-leur une liste d’ouvrages à lire ou à consulter, en y joignant vos commentaires, vos indications, toute passerelle qui permettrait d’éclairer le profane ... Bref, faites de l’éducation populaire au lieu de crier au scandale, merci d’aimer votre prochain et d’oublier les écarts de langage.

        • Cher A. Grizzly,

          Ceci est bien différent de ce qu’on a proposé.
          Les écarts de langage sont déplaisants, certes, dans plusieurs sens, vous en conviendrez d’ailleurs.

          De l’éducation populaire, pourquoi pas !

          Mais il faudrait de ce fait commencer pas ne pas mépriser le travail intellectuel.

          Le grand malheur des temps actuels, surtout en France, si vous permettez que j’exprime quelques diagnostics personnels, est que le niveau de base du savoir « populaire », c’est-à-dire, général , est de mon point de vue, très faible, et que d’un autre côté on a des « intellectuels de Médias » extrêmement influents, quasiment tyranniques et au plus bas niveau du type intellectuel que l’Europe connaît depuis quelques centaines d’années.
          Les causes sont de mon point de vue les mêmes, c’est la culture (entendue comme système de représentation ou forme symbolique ou économie de biens symboliques comme on voudra) qui s’est développée comme un système de consommation comme un autre du capitalisme, cela suivant le développement d’une société capitaliste de consommation de masse (comme Adorno ne l’aurait sûrement pas imaginée telle, mais l’a tout de même intuitionné me semble-t-il).

          Résultat : on a des gens très en colère, très souffrants, et qui ignorent tout ou presque tout des causes de leur souffrance et de leur colère, mis à part quelques icônes dérivées du monde spectaculaire.
          On écoute Jacques Sapir, par exemple, parler de la crise économique actuelle, rares sont ceux 1) qui savent l’écouter, le comprendre, questions de compétence 2) qui ont accès à ses textes ou à ses entregistrements—là vous avez raison il faut de l’éducation populaire, ce qui n’est pas gagné mais est indispensable je suis d’accord avec vous, 3) Il faut savoir, une fois reçu le message, non seulement le comprendre mais

          vouloir

          le comprendre, comme l’ironise avec souffrance Jacques Bouveresse, Michel Foucault a eu beau dévoiler le pouvoir des dispositifs de savoir, la volonté de savoir est très loin d’être partagée !
          C’est aussi et surtout ça, l’incitation à vouloir savoir, au lieu de l’éducation, comme si les gens étaient des enfants ! Car les gens ne veulent pas savoir ! Ils aiment leurs téléphones portables, leurs jeux, leurs musiques, leurs activités atomiques de shopping, de télévision, etc. etc. etc.

          Qu’en pensez-vous, Monsieur A. Grizzly ?

          • J’approuve, et votre argumentation est bien présentée, mais votre verdict final, le vouloir, me semble un peu rapide. Je ne veux pas confondre Education et Instruction : c’est un choix et une volonté politique. Le vouloir est une attitude qui découle d’une éducation réfléchie, programmée par l’éducateur, les éducateurs devrais-je préciser (les parents, l’école et les associations, cf. les travaux de Philippe Mérieux et autres pédagogues). Je suis consterné, comme vous, de voir les gens avachis devant leur téléviseurs, de les voir courir après le dernier produit à la mode ou s’endetter pour des pacotilles. Impossible de discuter sérieusement, avec son voisin ou son beau-frère, d’éducation, de sociologie, d’économie, d’histoire, de politique, de religion etc ... la réponse immédiate de votre interlocuteur sera « houlala ça me prend la tête » ... Par contre parler de la « Star Ac’ »« , du dernier »IPod« ou des résultats sportifs est une garantie de popularité. Je ne peux pas leur en vouloir si je considère que l’éducation de l’enfant n’a pas été faite : soit les parents n’ont rien fait, soit l’école n’a rien fait, soit l’association sportive ou culturelle n’a rien fait pour mon interlocuteur. J’ai eu la chance d’être fils de femme de ménage immigrée et illettrée, qui a eu la conscience politique et la force morale de me donner accès à tous ces aspects de l’éducation, ... mais tous mes contemporains n’ont pas eu cette chance. Il reste ensuite à savoir si mon interlocuteur peut être »sauvé", si l’éducation populaire peut lui redonner du vouloir à un âge où le cerveau ne désire plus être ouvert aux apprentissages de valeurs. Je pense que oui et j’admets qu’il s’agit d’une croyance personnelle qui, tous les jours, semble irrationnelle face au mur des médias et des puissances qui nous gouvernent. Dans ma construction de valeurs Article 11 garde sa place en temps qu’un élément, parmi d’autres, d’éducation populaire, laquelle est limitée par définition. Et là je vous rejoins : rien ne pourra remplacer des années de recherche personnelles, à l’université ou dans d’autres lieus de savoir.

            Les blogs d’internet sont comme des pièces d’un puzzle, ils donnent envie de chercher les pièces manquantes, ils doivent réveiller des internautes atones. Et pour trouver le vouloir il faut d’abord passer par le désir de vouloir ... Je n’ai évoqué que le principe d’éducation, que je veux distinguer de l’instruction, deux notions qui sont encore à séparer du dressage. Mais je n’ai pas l’intention de développer davantage : internet est un média qui se prête davantage à des réactions épidermiques et émotionnelles. Tout au plus peut-on y brandir des étendards ou aiguiller sur des pistes à creuser, et vous faites bien de citer des auteurs à lire ! Au plaisir de vous relire prochainement.

            • @ Alain Grizzly
              Je partage avec vous cette impression que l’histoire telle qu elle est pratiquée au niveau universitaire nage en circuit fermée et qu elle ne s ouvre pas vraiment à l extérieur. D’ou le désintéressement collectif pour l histoire, désintéressement qu’il est facile d observer au jour le jour (jusque dans les discours d hommes politiques, par exemple). C est pour cela que quand quelqu un comme Zinn, Chomsky, Galeano, voire Bloch en son temps, arrive a secouer l indifférence, à sortir de la pathie universitaire, je lui en suis fortement reconnaissant. A mon sens, c est là que le savoir se transforme en quelque chose d’autre qu une pure et vaine accumulation.

              @ A 3
              On en revient au même point. Je vous suis sur le constat (apathie collective, voire crétinisme ambient) mais pas sûr les causes. A mon sens, on ne peut pas dire, « les gens ne veulent pas apprendre » ou « ils ne veulent que de la »star ac« . C est vrai en un sens, mais ça ne dépend pas d’eux, plutòt de leur éducation et du milieu dans lequel ils grandissent. Je ne crois pas que certains naissent assoifés de savoir et de vérité. Je crois plutôt que l’on vit dans une société qui a peu à peu abandonné le culte du savoir en tant que tel, personnalisé. Les lectures personnelles, les ouvertures au monde ne sont pas favorisées, scolairement comme à un niveau plus global. Le savoir désormais serait réservé aux élites. Alors quand quelques uns essayent de renverser ça (j en reviens à Galeano and co.), d’ »humaniser" le savoir, je les admire énormément...

              • Chers Alain Grizzly et Lémi,

                Il y a méprise sur mon message.

                Je n’ai pas voulu signifié que comme vous le dîtes le savoir ce n’est qu’une question de volonté.
                Au contraire, j’ai bien conscience des limites de compétence, c’est-à-dire sociales, ou socio-cognitives, comme on voudra l’exprimer, le fait que statistiquement la plupart de gens ayant accès aux livres et au savoir sont issus des couches supérieures (bien insister cependant sur le « plupart des fois », car ne pas simplifier et s’aveugler devant une certaine mobililté, bien que certes en développement inégale, come toujours).

                Ce n’est pas qu’une question de compétence, ce que je veux dire, est que même ayant les compétences pour comprendre, beaucoup de gens ne veulent pas comprendre. Ce qui est un autre problème que vous ne traitez tellement pas que vous ignorez ce que je dis et redis.

                Le problème essentiellement moral du fait que la plupart des gens ne veulent savoir ce qui se passe, ce qui est et comment ça se déroule.

                Un problème que les militants rencontrent abondamment !

                Et les travaileurs intellectuels rigoureux également, y compris dans leur propre profession...

                Je répète, « l’ennemi, c’est le simplisme », comme disait Lucien Febvre (co-fondateur des Annales).

                • @ A3

                  Oui, mais cette « volonté de savoir », cette curiosité intellectuelle qui pousse à aller voir ailleurs, n’est ce pas également quelque chose qui s’enseigne, que l’on reçoit ?
                  Je ne crois pas en l’« inné » d’une pensée intellectuelle personnelle et constructive. Je pense que ceci s’enseigne, se construit, au fil de rencontres, de découvertes partagées, de lectures non formatées qui un jour vous tombent dans les mains et vous encouragent à rebondir.
                  Après, ce débat est sans fin, je vous l’accorde. Et ce fil de discussion, au final, se révèle constructif. Il n’est donc pas question pour moi de rejetter en bloc ce que vous dites. Juste de diverger un tantinet sur cette question de l’apathie collective, qui me semble avant tout une construction sociale et médiatique.

                  Pour cette citation de Lucien Febvre, il va sans dire que j’agrée.Mais que, concernant ce billet, qui est purement orienté « Blog » plus qu’article longuement travaillé (je reviendrais bientòt, par contre, de manière plus fouillée sur le livre de Galeano), il s’agit avant tout de donner envie de lire, d’orienter vers ces auteurs que je trouve essentiels. Ce n’est pas dui « simplisme », juste une approche basée sur l’enthousiasme et invitant à y puiser ce que l’on veut (comme le faisait remarquer un commentaire d’A. Grizzly).
                  Salutations

                  • Le problème philosophique de l’inné et de l’acquis (typiquement philosophique, même si d’autres domaines s’en emparent aussi, les sciences humaines, la psychologie, la médecine, etc.) est des plus passionnants qui soient, et vous avez sûrement raison, une discussion qui peut s’avérer interminable.

                    Sur le fait de vouloir « donner à lire », donner envie de lire des bouquins qui vous ont plu, j’abonde en votre sens et et vous encourage à aller même encore plus loin, notamment en donnant d’autres lectures, parfois un peu contradictoires. Par exemple je recommande, pour ceux qui ne l’ont pas fait, la lecture et le visionnage de Avant la nuit de Reynaldo Arenas, écrivain cubain exilé écrivant son auto-biographie, et le film de Julian Schnaber, à mon sens passionnant.
                    Ou encore, Comment vint la nuit de Huber Matos, un commandant de l’armée rebelle de Fidel Castro, qui parce qu’il n’a pas voulu continuer et n’adhérait pas au système totalitaire qui se mettait en place, a envoyé une lettre à Fidel Castro en personne juste après la victoire (il en était un des grands artisans) et a été emprisonné pour 20 ans.

                    Tout cela est bon, voyez-vous, car dans la « culture de base » d’un mec de gauche, on ne sait pas très bien ces trucs là. Je dis de gauche, car parfois on peut avoir des préjugés pro-castristes sans le vouloir vraiment, c’est dans l’air.

                    Pareil, lire Hommage à la Catalogne de George Orwell est bon de lire aujourd’hui. Se souvenir que les révoltions, même celles qu’on peut aimer, ne sont pas toujours si charmantes et ont leur part d’ombre, internes et pas du tout dûes ni à la CIA, ni aux escadrons de la mort, ni à Pinochet ni à Franco ni à De Gaulle ni à Mitterand.
                    Pour le reste, vive la lecture, et tous mes encouragements à ce que vous faîtes !

                    • Oui, tout celà me semble juste, notamment votre conclusion ... et je pense que ni Howard Zinn ni Noam Chomsky, pour les avoir lu, ne vous contrediront. Il faut bien les replacer dans un contexte américano-américain où leurs analyses et conclusions sont plus vraies qu’ailleurs.

                    • @ A 3
                      Merci pour ces pistes de lecture (notamment « et la nuit est tombée » dont on m’a déjà dit le plus grand bien). Ceci dit, que j abonde dans le sens des 3 intellectuels autour desquels tournaient ce billet, tous plus ou moins marxistes ou pro-marxistes dans leur approche, ne fait pas de moi un naïf gauchiste aux influences unilatérales. Pour Orwell et son Adieu a La Catalogne, je suis le premier à le recommander, tant il est révélateur des désillusions qui guettent l’idéaliste sur le chemin de la révolution parfaite (et tant il est limpidement écrit). De mème qu’Arthur Koestler qui a suivi finalement un chemin assez parallèlle et le raconte admirablement. Ou Chalamov, l’homme qui a décrit le goulag (« récits de la Kolyma ») avec à mon avis une plume cent fois supérieure a Soljenitsyne. De même que tous les documents historiques aux premiers rangs desquels le « livre noir du communisme » et autres biographies impitoyable de Staline et Mao. Je serais plutòt un non aligné, à l’arrivée, très distant de toute forme de gauchisme naïf et béni oui oui (et le premier à cracher sur le régime liberticide de la baudruche Castro), et ouvert à toute forme de contradiction. Ce qui à mon avis caractérise également les gens dont je parlais dans cet article.
                      Sur le reste, vos interventions, avec celle d’Alain Grizzly, sont un plaisir. Il est toujours intéressant de voir se développer des fils de discussion de ce genre. Mème si, et j’en suis désolé, mes conditions matérielles actuelles (en voyage), m’empèchent d’y accorder le temps souhaité.
                      Salutations

                  • ERRATA :
                    Et la nuit est tombée est le titre en français du livre du Huber Matos.

                • Rassurez-vous, je vous comprend très bien, ayant moi-même pu souffrir de ce travers de civilisation. Par exemple, au moment des collectifs anti-libéraux (avant la dispersion due aux multiples candidatures) : ce sont toujours les mêmes militants qui se sont retrouvés, entre eux ! Dans ma ville nous avions une large palette de communistes, altermondialistes, associatifs, syndicalistes, écologistes etc ... mais il était impossible de ramener de nouveaux membres, malgré les « tractages » et tous les « corps à corps » engagés avec les passants. Idem à la sortie des écoles, si vous discutez avec des parents d’élève vous vous apercevez, effectivement, qu’ils ne veulent pas savoir. Ils ne veulent pas donner leur simple avis sur nombre de questions : il semble bien que la politique de l’autruche soit la plus partagée dans nos contrées (pardon pour l’autruche). Lorsque vous dites

                  que même ayant les compétences pour comprendre, beaucoup de gens ne veulent pas comprendre

                  cela s’applique effectivement à toutes les couches de notre société, quel que soit leur niveau « socio-cognitif », et plusieurs explications pourraient être avancées. Pour ma part je retiens essentiellement celle de la perversion de la société de consommation (mais une éducation adaptée peut y faire face ;-)) mais également celle de la peur, peur de se dévoiler, peur de s’affranchir en tant que personne entière et intègre, peur des ragots ... toute une série de peurs infantiles et souvent inconscientes qui découlent les unes des autres. Il me semble que ces peurs se sont installées peu à peu, sur deux ou trois générations … à fur et à mesure que l’individualisme s’est installé, avec moins de communication horizontale entre les citoyens et de plus en plus de communication verticale : pour caricaturer, télévision, « experts » et publicité ont uniformisé nos individualismes, donnant aux personnes le sentiment que nous avions tous les mêmes soucis, les mêmes envies, les mêmes besoins. Nous croyons avoir une identité commune alors qu’il n’y a moins de relations humaines. Et lorsque des militants aux élans fraternels essayent de prendre contact avec Monsieur ou Madame « tout le monde » le choc est décourageant, le fossé est formidablement creusé : comment le combler ? Ma réponse reste la même : pour lutter contre ces peurs inconscientes il n’y a que l’éducation ou l’épreuve de la vie (la crise économique va-t-elle ouvrir massivement les yeux et les consciences ?). A moins que la propagande de la « fin de l’histoire » ait porté ses fruits et que nous soyons les derniers mohicans face au « meilleur des mondes » qui se referme sur nous ... permettez-moi d’en douter.

                  • Je vous comprends fort bien, mon cher A. Grizzly.

                    Mais je crains que le militantisme et la mobilisation ne soit guère chose aisée. Les collectifs anti-libéraux dont vous mentionnez quelque expérience personnelle, n’ont certes pas seulement échoué à cause de leurs contradictions internes, mais aussi comme vous le dites à cause de multiples non-engagements, voire anti-engagements de nos concitoyens, nouvelles formes de conservatisme, parfois dégénérations fascistoïdes...!
                    Mais il est toujours difficile voire voué, de mon point de vue, partiel et partial, à l’échec, de tâcher de mobiliser à partir uniquement de militants. La colère sociale est là c’est certain. Mais La mobilisation doit partir, grandir et durer grâce à un « répertoire d’actions » plurifactoriel, mais dont l’action de la base me semble au moins déterminante sinon une condition fondamentale de possibilité de l’action politique.

                    Question politique de gauche, je serais personnellement curieux de savoir les développements du NPA, après l’énorme espace ouvert par l’auto-laminage du PS et la crise fiancière et du libéralisme.

                    N’êtes-vous pas curieux, vous aussi ?

                    • Effectivement, je suis curieux et observateur … L’inaction politique m’empêcherait de dormir ou de regarder mes enfants dans les yeux. Je n’ai que quelques mois à vivre sur cette terre et j’ai bien l’intention de rester un être humain, digne descendant d’une longue chaîne humaine qui n’a cessé de lutter depuis l’âge des cavernes ! Mes valeurs ne sont pas négociables.

                      A l’année prochaine, je coupe cet engin de mort pendant quelques jours !



  • samedi 13 décembre 2008 à 22h35, par Chinasky

    « Je vais être franc avec vous :
    Ce (billet) n’est pas ce qu’il devait être. En cours de route, il a dévié, pris la tangente, pour finalement (amerrir) là où il n’était pas attendu. Au départ, ce devait être…. »
    A qui cette introduction est-elle empruntée ? (Pour l’instant je sèche mais ça me reviendra surement vu que c’est presque du mot pour mot.) Lémi sur les routes peut-être, d’outre-tombe surement, trop d’exercices de style sans doute.
    « L’homme blanc qui déferle » ? L’ancien esclave qui reproduit, fait perdurer ce qu’il a lui-même subit ? L’Histoire des conquêtes ? C’est de cela qu’il s’agit ? De la domination de l’homme par l’homme ?

    JBB, vous me parliez de mauvaise foi ?

    Qui sont les auteurs qui écrivent dans le sens du poil ?
    Chomsky écrirait à rebours ? Ah ben plus de nos jours. C’est l’un des auteurs les plus cité sur le net ! Adulé même. Par de nombreux nihilistes qui s’ignorent.

    « Sabir universitaire » ?! Hohoho ! Je reviendrai par chez vous me faire servir des leçons de populisme.

    Tout les poncifs du politiquement correct, de la haine de soi, sont cumulés, on croirait lire du Piwi Plenel ! « Ben moi chuis un type bien, chuis pas xénophobe chuis xénophile » le même en miroir quoi, de Charybde en Silla ; que c’est originale, pas éculé du tout, à rebours de toute pensée unique, pas du tout dans le sens du vent. Tu parles d’une bonne gauche… va falloir travailler le jeu de jambes sacrément… les p’tis jabs là on est loin de l’uppercut.

    Dialectique et rhétorique défuntes dans l’hyper-criticisme du Noam, il y a peu de chance de sortir de l’idéologie victimaire… -ou de l’obscénité démocratique, dit comme ça pour faire allusion à un autre auteur (un clerc ?) qui l’a côtoyé, l’Amérique latine- ni du nouveau révisionnisme, médiatique entre autre, qui n’a parfois rien à voir avec le négationnisme et n’a rien à faire ni des anthropologues ni des historiens ni même en fait des sciences humaines.
    La version officielle de l’Histoire ? Keske c’est que ça ? Celle du manuel scolaire ? Celle de la loi (puisqu’elle s’en mêle) ? Pas celle de la recherche ?

    Ben si sans doute. Les journalistes et les politiques sont en charge d’écrire l’histoire, la vraie.
    Et là paf ! Un prof de sciences politiques (ce terme m’a tjrs fait marrer) et un journaliste romancier. On attend plus que le concours de l’idéologue déclaré.

    C’est quoi une réactionnaire pour vous ? Une personne contre le progrès ou quelqu’un qui ne pense pas comme les auteurs que vous chérissez ?
    Et l’humour, léger ou gras, serait-il réactionnaire ?

    Nan mais c’est quoi ce bordel ? Un baril de Chomsky ? Petit fils de pub va !

    • mardi 16 décembre 2008 à 19h54, par Lémi

      @ Chinaski

      Eh bien,
      Jolie plume, certes, encore plus joli pseudo, mais emportement un peu hors de propos il me semble. Pas le temps de vraiment répondre, mais suis pas sûr qu’il y ait grand chose à répondre. C est tellement facile de descendre ces 3 figures intègres en quelques mots, missiles rhétoriques faciles, sans apporter d’éléments pour étayer le propos. Je connais moins Chomsky (D autant que nombre de ses travaux relèvent de la linguistique) mais il y a une chose que je sais : Zinn et Galeano sont tout sauf des dillettantes populistes, encore moins réactionnaires. Pourquoi tant de fiel à leur égard ?

      « A qui cette introduction est-elle empruntée ? » Euh, bah soit mon inconscient reproduit à mon insu des passages d’oeuvres, soit tu fais fausse route (je penche pour la solution 2).

      • mercredi 17 décembre 2008 à 09h25, par Chinasky

        @ Lémi

        Emportement ? Non, déception éventuellement.
        Hors de propos ? Si vous voulez ; je ne fais que rebondir. Pas le temps non plus de développer.
        Facile effectivement.
        La question était simple : qui est et sera en charge d’écrire l’histoire, au jour le jour ?
        Descendre 3 figures intègres ? Replacer 2 à leur juste place et critiquer le troisième, certes sans démontrer, juste par allusion à sa rhétorique nihiliste de linguiste emphatique, destructeur de langue, roi de la comm’… c’est le produit d’un post/réponse.
        En tout cas je vais, grâce ou à cause de vous, approfondir mes connaissances de Benda.
        Le populisme, allusion à un autre comm’ sur un autre fil du site, ne vient que critiquer ici l’orientation du propos ; je n’attends pas la neutralité de vot’ part, ce serait plus stupide que naïf de la mienne.
        « Réactionnaire » ne vise pas les auteurs des livres mais la rédaction d’un ou deux posts qualifiant ainsi la « réaction » d’une de vos lectrices.
        Facile aussi de « sortir » une personne ou un post sans autre forme de démonstration qu’une conviction intime.
        « Sabir universitaire » c’est une contruction populiste.
        « Réactionnaire » balancé tout cru, c’est le plus souvent une insulte à cours d’arguments.

        L’intro ? Penchez pour la première. Kerouac ? Burrows ? Ginsberg ? Fante ? Ca me reviendra, je vous dis. Un essayiste peut-être. Mot pour mot. « Ce livre n’est pas ce qu’il devait être, en cours de route il a pris la tangente… »

        Je vous fais le crédit de ne pas être de mauvaise foi ou en tout cas d’être pétri de mots. Nul doute que de ce pétrin lèvent quelques influences, je sais de quoi je parle ;-)… voyez que je suis bonne pâte… empathique même.

        Lémi, je te salue.

        Ton peu dévoué mais néanmoins admirateur,
        Hank

        • mercredi 17 décembre 2008 à 11h45, par Chinasky

          Heu, je ne sais pas pourquoi mais je veux tjrs coller le w de William au cul de Burroughs, vous aurez rectifié de vous-même j’en suis sûr.
          Ciao.

        • mercredi 17 décembre 2008 à 16h40, par Lémi

          Cher Buk,
          J’attends donc avec curiosité la référence de cette citation que j’aurais pas mégarde emprunté. Je dois avouer que le mot pour mot m’étonnerait, mis je suis curieux. Et le cas échéant, je saurais reconnaitre l’extrème duplicité de mon cerveau (et l’acuité de tes connaissances littéraires). Ceci dit, je reste sceptique.
          pour le reste, je sens bien que Chomsky n’est pas ta tasse de thé, mais je crois que ce procès est un peu faux. Certes, c’est la « Star » des théories politiques alternatives, mais c’est plutôt quelque chose qui lui est tombé dessus (dans le désert culturel, une goutte d’eau intellectuelle attire les mouches bien mieux que le vinaigre) et dont il ne joue pas trop. Mais, je le répète, des trois c’est celui que je connais le moins.

          Semi grognon, semi sourire, je te salue

          • dimanche 21 décembre 2008 à 04h30, par Chinasky

            Salut.
            Tu ne perds rien à le méconnaître. Quant au procès que je lui fais... crois moi ou non, lis le. Note aussi peut-être que c’est sa théorie que j’évoque et que je critique ou que je mets en accusation, pas juste ses prises de position plus que sulfureuses dans la défense qu’il fit de Faurisson...
            Pour l’intro... ça me reviendra... j’ai pas ma bibliothèque sous la main sinon tu peux être certain que je serais déjà en train de feuilleter les oeuvres et ouvrages qui la composent. Ca m’agace d’ailleurs... un peu comme lorsqu’on ne remet pas le nom d’un acteur ou d’un film ; ça titille, ça ne laisse pas en paix... c’est quelque part planqué dans les limbes de ce qui abritent encore ce qui me reste de neurones... ça me reviendra ch’te dis... faudra être un peu patient. Tu n’es pas pressé, dis ? Moi pas ; ce n’est pas une démonstration ou une attaque dont il s’agit, plutôt une sympathie littéraire ; d’autant, faut que je te le dise, que du temps de ma jeunesse folle et à mauvaises moeurs dédiée, pratiquant une sorte de « cut up » presque plus inspirée des « cadavres exquis », j’ai tapé sur ma vieille Smith Corona électrique qwerty, entre une Gueuse et une Bécasse, ces mêmes mots, pour les faire miens.
            Bref, tu vois, l’exercice plus qu’une acuité littéraire, m’a mis sur la piste.
            Quelque chose m’a fait pencher pour la beat génération mais je m’éloigne peut-être.
            J’y repenserai. A bientôt donc.
            Ciao et bonnes lectures.

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