ARTICLE11
 
 

mardi 5 avril 2011

Sur le terrain

posté à 19h03, par Lémi
33 commentaires

Tunis : les fantômes de la Kasbah
JPEG - 28.1 ko

Officiellement, ils sont 236 ; mais le chiffre est sans doute plus élevé en réalité. Ils, ce sont les « martyrs » de la révolution tunisienne, tombés sous les balles et les matraques de la police entre le 17 décembre 2010 et aujourd’hui. Pour leur rendre hommage, le peintre Zoo Project, actuellement installé à Tunis, a choisi de les représenter sous forme d’effigies en carton, exposées à divers endroits de la ville.

« C’est lequel, Mohammed Bouazizi ? »... La question est récurrente. Dès que Zoo Project installe ses représentations, tailles réelles, des martyrs de la révolution, les personnes s’attroupant se mettent en quête de l’effigie de ce vendeur ambulant qui s’immola devant le gouvernorat de Sidi Bouzid le 17 décembre 2010. Logique : c’est son geste désespéré qui entraîna la Tunisie dans la révolution - tous souhaitent lui rendre hommage.

D’autres, les plus jeunes surtout, cherchent Mohammed Hanchi, 19 ans, tué le 25 février par une « balle perdue » alors qu’il sortait célébrer la victoire de son équipe de foot. Lui, tout le monde le connaissait à Tunis, et surtout dans la Kasbah, la vieille ville, où il résidait. C’est d’ailleurs en rencontrant la famille de celui que tout le monde appelle « Hanchi », laquelle lui demanda de peindre son portrait sur un mur des environs1, que Zoo Project a eu l’idée de ce projet particulier : peindre les « martyrs » de la révolution sur des cartons et les exposer en place publique.

Devant la quarantaine d’effigies (chiffre provisoire, puisqu’il souhaite représenter tous les martyrs de la révolution, soit environ 236 personnes2), les gens palabrent, discutent, s’engueulent gentiment. Agora artistique. Exactement ce que cherche Zoo Project, à Paris comme ici : un échange sans intermédiaire, direct, avec les destinataires de ses peintures. Parce qu’un travail artistique déconnecté des réalités du pays, à destination des élites, serait un non-sens, une aberration. Lui cherche à provoquer les réactions et les rencontres, à s’insérer dans un mouvement politique - même si ce dernier semble perdre son souffle dans la période actuelle. Et puis, en représentant les morts de la révolution, il pointe en filigrane l’impunité des assassins (les snipers, les gradés), peu inquiétés pour l’instant. Une démarche tout sauf anodine.

J’ai suivi le travail de l’ami Zoo3 pendant une dizaine de jours, l’aidant à transporter les martyrs de place en place dans une carriole branlante, bricolant avec lui pour rafistoler les effigies ayant souffert du transport, courant les manifestations pour les distribuer à ceux qui souhaitaient les brandir, et les photographiant dans un cadre rappelant leur activité pre-mortem. Compte-rendu en images.


Photographies / By Lémi & Zoo Project

.
JPEG - 223.3 ko
.
JPEG - 120.1 ko
.
JPEG - 108.3 ko
.
JPEG - 97.9 ko
.
JPEG - 95.3 ko
.
JPEG - 73.1 ko
.
JPEG - 92.9 ko
.
JPEG - 100.9 ko
.
JPEG - 88.2 ko
.
JPEG - 176.7 ko
.
JPEG - 65.4 ko
.
JPEG - 180.3 ko
.
JPEG - 146.3 ko
.
JPEG - 165.5 ko
.
JPEG - 93.7 ko
.
JPEG - 152.1 ko

Déclaration de principe by Zoo Project4 / « Pourquoi je peins les martyrs »

« Il arrive que certaines personnes réagissent négativement à mon travail, haussent la voix. Quand je dispose ces représentations des martyrs de la révolution dans les rues de Tunis - à Porte de France, Bab Souika ou avenue Bourguiba -, beaucoup me félicitent, me remercient, mais d’autres s’insurgent : qui suis-je, moi, un étranger, pour peindre les martyrs de la révolution et les afficher ainsi dans Tunis ? Quel est mon intérêt là-dedans ? Je comprends ces interrogations, je trouve même naturel et légitime qu’elles surgissent : aborder un sujet si dramatique, à ce point vivace dans les mémoires, implique d’accepter le débat, de répondre aux question.

Je suis arrivé à Tunis début mars. Franco-algérien de 20 ans résidant à Paris, je suis parti de France sans but défini, simplement parce que j’estimais que la révolution tunisienne – comme toutes celles qui secouent le monde arabe – était un événement unique, porteur d’un grand espoir. De Paris, je suivais la situation au jour le jour, espérant que le 14 janvier ne reste pas lettre morte, que la révolution ne perde pas son âme. Jusqu’à ce qu’un jour, je n’y tienne plus : il me fallait venir sur place pour témoigner, agir, à ma manière. Je souhaitais apporter ma modeste contribution au peuple insurgé.

Quand je suis arrivé, j’étais un peu perdu. Pas question de peindre les murs sans demander leurs avis aux habitants, de m’imposer face à une culture que je ne connais pas aussi bien que je le voudrais. Alors je suis resté aux aguets, discret, attendant de comprendre quel pouvait être mon rôle. Avant de peindre, je voulais discuter, dialoguer, me faire accepter. C’est dans le quartier de la Hafsia que le déclic s’est produit : rencontres fertiles avec des jeunes et des artisans, amitiés, encouragements. Quelques mômes du quartier m’ont parlé de leur ami Mohammed Hanchi, tué par une « balle perdue » alors qu’il n’avait pas même 20 ans. D’autres ont enchéri : il me fallait représenter leur camarade « Hanchi », leur frère, leur ami disparu. Grâce à eux, j’ai rencontré sa famille, j’ai discuté avec ses amis, et j’ai compris que les morts de la révolution devaient être le sujet de mes créations. Car chaque personne m’expliquait, à sa manière : « Ils ne doivent pas disparaître, les oublier serait les tuer une deuxième fois. »

À ce jour, j’ai peint une quarantaine de martyrs, taille réelle. Hanchi, bien sûr, Mohammed Bouazizi, également, celui que tout le monde me réclame, mais aussi des martyrs moins « connus » : Aamer Fatteh, Moez Ben Slah, Ayoub Hamdi, Faiçel Chetioui, Mersbah Jwehri, Rabii Boujlid, et bien d’autres encore. Ils étaient menuisiers, professeurs, vendeurs ambulants, chômeurs... Ils vivaient à Tunis, Kasserine, Sidi Bouzid ou bien Gafsa. Des gens ordinaires qui ne méritaient pas plus que d’autres de laisser leur vie sur l’autel de la révolution. Je souhaite, sur la longueur, les représenter tous. Des 236 martyrs « officiels » (selon le ministère de la Santé tunisien), je ne trouve pas toujours de photographies, de renseignements pour les représenter. C’est un travail de fourmi, mais un travail passionnant.

À mes yeux, ces figures ne sont pas des images mortes, des fantômes célébrés post-mortem. Ils n’appartiennent pas à un passé fantasmé, regretté. Ce sont des figures du présent, des compagnons de lutte. Si je les peins, si je me permets de les représenter, de les exposer dans des manifestations, c’est parce que je suis convaincu que leur disparition des mémoires marquerait la fin de l’espoir. De même que les Tunisiens se battent pour que leurs meurtriers – les snipers, les donneurs d’ordre, les matraqueurs – soient jugés et sanctionnés rapidement (revendication restée lettre morte pour l’instant), je cherche, à ma mesure, à rappeler la portée de la disparition de ces gens ordinaires. Ils font partie de l’avenir, de cette Tunisie qui se dessine, s’esquisse sous nos yeux. C’est cette esquisse que je tente de représenter.

Zoo Project, Tunis le 03/04/2011.

Ps : J’exposerai ces dessins dans les rues et les places de Tunis tout au long du mois d’avril 2011, puis dans de nombreuses villes de Tunisie. Mon travail est en progression : si vous souhaitez m’envoyer des photographies ou des renseignements sur les martyrs (ce qui me serait très utile), contactez moi à l’adresse zooproject@laposte.net .

Pps : Ce projet est soutenu par l’association de quartier Beb-souika.
Ce texte a été écrit avec l’aide d’Émilien Bernard.
 »


Lien : Pour suivre l’avancée du travail de Zoo Project en Tunisie, se rendre sur cette page où seront exposées pleine page les photographies prises au cours du projet (le chargement peut prendre un certain temps).



1

JPEG - 89.3 ko

2 Selon le ministère tunisien de la Santé, ils seraient 236, morts entre le 17 décembre et le 25 janvier (chiffre que certains estiment largement sous-évalué) : 166 personnes tuées par balles et 74 autres massacrées dans les prisons. Macabre décompte n’incluant pas ceux qui, pour protester, ont choisi de mettre fin à leur jour, à l’instar de Mohammed Bouazizi.

3 À qui j’avais consacré un papier dans le numéro 1 de la version papier d’Article11 - numéro dont il avait par ailleurs signé la couverture.

4 With a little help from friend.


COMMENTAIRES

 


  • mardi 5 avril 2011 à 19h21, par ZeroS

    C’est très chouette !

    Comment s’opère la rencontre avec les familles, les copains, les amis, etc. ? Comment réagissent-ils ? Que disent les personnes qui s’offusquent du travail ?

    • mercredi 6 avril 2011 à 10h22, par Lémi

      La rencontre avec les familles pour l’instant a surtout relevé du hasard et de la prospection en vadrouille. Quelqu’un qui connaît quelqu’un et le présente, ce genre. Comme désormais le projet commence à être connu dans Tunis (Zoo est même passé sur Al Jazeera...), les gens viennent d’eux même proposer des renseignements, des photos.

      La plupart des gens remercient simplement, trouvent l’idée très bonne et prodiguent moult encouragements. D’autres sont vraiment émus, surtout s’ils reconnaissent un proche. Ceux qui rechignent trouvent qu’il y a une forme de « profanation », surtout quand ils ne savent pas que c’est entièrement bénévole (c’est pour ça que Zoo s’est débrouillé pour faire des pancartes explicatives en français et en arabe). Il y a aussi la question de la nationalité : quand les spectateurs apprennent que le peintre est franco-algérien, ils ne retiennent souvent que l’Algérien (c’est d’ailleurs comme ça qu’Al Jazeera l’a présenté).



  • mardi 5 avril 2011 à 20h18, par Ubifaciunt

    Que dire ? Billet magnifique, émouvant, enthousiasmant, revigorant... Un des plus beaux que j’aie vu sur le site, franchement.

    Et quelle superbe idée de Zoo Project ! Rahhh, du coup, on vous envie, et on aimerait être là, dans ces moments de discussions, d’accrochages (dans tous les sens du terme) Très beau texte explicatif aussi, du pourquoi et comment peindre dans cet instant et dans ce lieu.

    Tout touché que je suis, du coup !

    (Et juste si ce splendide billet pouvait avoir plus de commentaires élogieux que celui sur la polémique du GS, ça achèverait de me combler !)

    Encore bravo et merci !

    • mardi 5 avril 2011 à 20h42, par un-e anonyme

      déguelasse

      vraiment déguelasse

      c’est pas croyable hein, de se battre comme ça

      avec tout ce qui arrive, les tremblements de terre et tout ça...
      rha la la

      • mercredi 6 avril 2011 à 10h16, par Lémi

        @ Ubi

        Rahhh, du coup, on vous envie : en même temps, tu nous aurais vu remballer les « martyrs » à la vitesse de la lumière parce qu’une manif de barbus déchaînés approchait à grands pas pileux au bout de la rue (pas beaucoup, mais, bordel, ils savent faire impression), tu aurais peut être déchanté... (quoique, ça devait avoir une certaine gueule...)



  • mardi 5 avril 2011 à 21h52, par un-e anonyme

    Les photos sont magnifiques. Merci à Zoo Project pour tant d’émotion.

    « Et quoique les assassins aient amassé de l’argent et qu’ils pourraient s’assurer une postérité pendant un temps fort long, ils ne sauraient éviter l’inévitable. [...] Leur disparition pourrait-elle être retardée, qu’ils vivraient sur une terre ingrate, totalement impropre à l’homme ; ils seraient les mineurs des puits les plus profonds, ils exerceraient les derniers des métiers... »

    Lu Xun. Roses non épanouies. 18 mars 1926

    • mercredi 6 avril 2011 à 10h08, par Lémi

      ils seraient les mineurs des puits les plus profonds, ils exerceraient les derniers des métiers... C’est très beau, mais pour l’instant ça ne se vérifie pas. Le système ben-aliste reste globalement en place (seules quelques têtes ont disparu) et les assassins courent toujours. La police même, longtemps discréditée, reprend du poil de la bête, matraque de nouveau les manifestants sans raison. Bref, leur « mine » reste beaucoup trop près de la surface, trop loin des jardins de Lucifer...

      • mercredi 6 avril 2011 à 23h49, par un-e anonyme

        À ce propos, comment ça se passe au quotidien, pour ce que vous pouvez en voir ? Parce que les benalistes ne sont pas seulement dans la police, on doit les trouver aussi dans les administrations, les écoles, les entreprises...



  • mardi 5 avril 2011 à 23h12, par Clément

    Merci pour ce témoignage, très beau, et très intéressant, car effectivement ce n’est pas simple de s’impliquer dans un contexte où on est « étranger ». J’en ai fais l’expérience il y a peu et on se rend compte que c’est notre capacité à écouter et à comprendre, à interagir avec les personnes, qui nous donnent les clés d’une action pouvant avoir du sens. Alors certes il y aura toujours ceux qui soutiennent et ceux qui critiquent, mais c’est dans cette négociation qu’on trouvera la pertinence d’une telle action, et les moyens de retrouver l’échange direct des idées.

    Ce n’est vraiment pas simple d’aller prendre des initiatives dans de nouveaux lieux, et effectivement, l’écoute et le partage de l’action (ne pas s’y mettre tout seul dans son coin, s’impliquer tout naturellement dans son environnement), sont les premières clés pour atteindre une autre réalité que celle de grands projets largement médiatisés ne faisant parfois sens que depuis un regard fasciné par l’exotisme de situations « chaotiques ».

    • mercredi 6 avril 2011 à 10h02, par Lémi

      Oui, je vois ce que tu veux dire : parfois difficile d’éviter le statut « voyageur de passage ». On arrive avec des poncifs plein les poches et l’envie de voir de « l’action » (où sont les barricades ?) et on se rend compte que notre vision relève du copier/coller stupide. D’où ce que tu dis : « on se rend compte que c’est notre capacité à écouter et à comprendre, à interagir avec les personnes, qui nous donnent les clés d’une action pouvant avoir du sens. » Tout d’accord...



  • mercredi 6 avril 2011 à 00h16, par un-e anonyme

    J’aurais aimé « les anges » de la Kasbah plutôt que les « fantômes » !

    • mercredi 6 avril 2011 à 09h54, par Lémi

      Oui, j’ai hésité. Mais comme « ange » relève du vocabulaire religieux, et que la dénomination « martyr », utilisée par les Tunisiens, est déjà connotée en ce sens, je ne voulais pas en rajouter.



  • mercredi 6 avril 2011 à 00h23, par un-e anonyme

    Petit bémol ? : ceux qui sont tombés sous la répression sont bien présents. Mais les femmes, elles, semblent avoir été oubliées.

    • mercredi 6 avril 2011 à 09h53, par Lémi

      Pas si vrai : sur la quarantaine de figurines peintes jusqu’ici, je crois qu’il y a quatre femmes. On peut en apercevoir deux sur les premières photos, notamment la troisième. Après, c’est aussi une question de chiffre : les « martyrs » de la révolution ont été en très grande majorité des hommes, souvent jeunes. Je n’ai pas les chiffres exacts sous la main (d’autant qu’ils varient), mais sur les 236 morts « officiels », il n’y aurait pas plus d’une dizaine de femmes.
      Ceci dit, c’est vrai que, dans le tri, je n’ai pas trop fait attention à ce point et qu’il n’y aucune photo avec une femme seule. Mea culpa.

      • mercredi 6 avril 2011 à 12h04, par un-e anonyme

        Faut-il absolument mettre des guillemets à Martyrs… après tout, croyants ou athées, c’est bien comme cela que l’on nomme celles et ceux qui sont tombés dans les émeutes, non ?

        J’ai l’impression quand je vois ces guillemets que l’on prend des pincettes, ce qui ne permet guère l’empathie, et personne n’appelle à la conversion, tout de même ? !

        Pendant la guerre en Europe, certains écrivaient « résistants »…

        En plus, martyr, est une traduction approximative de « shahid », qui peut aussi s’entendre comme « témoin »…

        • mercredi 6 avril 2011 à 18h47, par Docteur Ska

          Témoin ca me va, je dirai donc « shahid ».

          http://www.sami.is.free.fr/gebe/L.a...

          « Plus de don de soi-meme possible, y’a rien en échange qui vaille. Obligé de garder ta vie. Mais quoi en faire ? La défendre d’abord. (...) L’oubli de soi c’est la mort de tous. Vivre pour soi à plein bords au présent c’est enrichir la vie de tous ... »

          et caetera, et caetera, mais bon ! ’Faut c’qu’il faut !

          Martyr... Ca renvoie quand même à l’idée de donner sa vie pour une Cause (religieuse ou pas, okay), et je veux pas croire que ces bonshommes et bon’femmes aient eu envie de mourir... Même c’est limite dégeulasse de penser ca... J’suis désolé d’inonder de citations siturlututus, mais c’est que j’me sens complètement en phase avec ce truc de Vaneigem :


          Revendiquer c’est revendiquer pour l’immédiat. La raison des luttes passées est ancrée dans le présent des hommes qui les ont menées. Et malgré les différences de contexte, ce présent est aussi le nôtre.

          Ce qu’il faut c’est rendre hommage à leur présent, justement, c’est ce truc là qui nous relie vraiment à eux, et c’est ce que je trouve merveilleux (mais alors fantastique, incroyable, j’ai pas de mots là tout de suite pour dire combien je trouve ca fantasmagorique) dans ce travail de Zoo Project, comme tous les autres mais encore plus.

          Ouais encore plus, même !

          L’idée des bouts de carton à déplacer d’un lieu à l’autre, c’est parfait à donf ! Le meilleur hommage qu’on puisse imaginer, je pense. Faut pas en douter, les gars ! Et faut continuer !

          • mercredi 6 avril 2011 à 19h07, par un-e anonyme

            ils n’avaient sûrement pas envie de mourir...

            je trouve simplement que ces guillemets ont un petit coté... « contrôle aux frontières » !

        • mercredi 6 avril 2011 à 19h40, par Frédéric

          Je précise que le sens originel de « martyr » est « témoin ».

      • mardi 12 avril 2011 à 19h31, par GoG

        Pourquoi ce Mea Culpa ? Je ne vois pas l’intérêt de mettre une photo avec une femme seule, ce serait au contraire en faire une sorte de cas « à part » pas forcément adéquat : les femmes ne sont-elles pas des hommes comme les autres ?

        Sinon, pour revenir sur la terminologie, « fantôme » ne me semblait pas mal du tout comme terme, pour les raisons que vous aviez relevé d’ailleurs. « Témoin » est bien aussi. A la limite « esprit » pourrait regrouper les deux champs sémantiques.

        En revanche je suis d’accord avec vous « martyr » est beaucoup trop connoté et implique qu’il y ait eu un sacrifice volontaire idéologique de la personne qui la déshumanise quasiment... Alors que ce que révèle avec justesse ces tableaux cartonnés, c’est l’humanité tellement palpable de ces êtres, infiniment plus palpable qu’une photo. (A ce titre je m’oppose farouchement au commentateur qui leur reprochait une mine grisonnante, c’est tout le contraire que dégagent ces figures, elles dégagent la vie et rendent magistralement hommage à ceux qui sont tombés).

        Une fort belle initiative en tout cas, chapeau bas.

        GoG

        • mercredi 13 avril 2011 à 09h34, par Lémi

          @ Gog

          Merci pour ce commentaire avisé,
          je me rends compte grâce à vous qu’ « Esprits » était effectivement le mot que je cherchais, réconciliais les deux dimensions - trop tard pour changer le titre...
          Pour « martyr », c’est exactement ça. Même si c’est le terme utilisé partout en Tunisie, et même s’il est utilisé de manière un peu détachée de son acceptation religieuse, il reste le sens du sacrifice, de la mort volontaire pour la révolution, qui est très éloignée de la réalité des choses - et du travail de Zoo-P, qui ne souhaite absolument pas mettre cette dimension en avant, plutôt son contraire.

    • jeudi 7 avril 2011 à 20h26, par manna83

      c’est vrai les femmes sont les présentes-absentes, les oubliées de la révolution,voire les oubliées de la Tunisie.
      Mais, cette œuvre est originale,bouleversante et chatouillant le patriotisme existant dans le cœur de chaque âme libre et émancipée. En revanche, ce qui je n’ai pas apprécié c’est le nomination « fantômes » ces jeunes qui se sont sacrifiés pour que nous vivions dans la dignité, je les appellerais plutôt les SURVIVANTS DE LA KASBAH ? HIBAKUSHA car ils resteront omniprésents dans notre vie et dans notre histoire.

      • jeudi 7 avril 2011 à 22h19, par Lémi

        @ Manna 83

        Oui, le terme « fantôme » est peut-être mal choisi, je ne sais plus trop. Si j’ai choisi ce terme dans le titre, c’est parce que j’y voyais une manière de dire que, même morts, ils restaient présents, étaient là. C’est la définition de base du « fantôme », un disparu qui revient dans le présent. Les désigner comme « survivants » serait s’éloigner de la réalité factuelle : ils sont bel et bien morts...

        • vendredi 8 avril 2011 à 07h57, par un-e anonyme

          « même morts, ils restaient présents »

          « un disparu qui revient dans le présent »

          Et bien en langue arabe, pour les désigner, il y a le terme shuhada (shahid, sing. shuhada, plur.)...
          et c’est traduisible, sans guillemets, et faut se débarrasser du fantasme « connoté religieux », sinon le risque est de n’y rien comprendre, compadre !

          • vendredi 8 avril 2011 à 12h53, par un-e anonyme

            ... mais si je ne m’abuse, à part dans le chapeau, les guillemets ont disparu...

            merci.

            La révolution c’est d’abord et avant tout le sens de l’hospitalité... et l’art de vivre !



  • lundi 11 avril 2011 à 08h52, par Toly

    L’idée est bonne. Faire de l’art populaire, accessible à tous.
    Le choix du carton pourquoi ? N’avez-vous pas pensé que c’est une matière qui, en se détériorant, infligera une seconde mort à la famille des victimes et à tout le peuple ?
    Le résultat est franchement décevant.
    Des figures ? non des caricatures grises, sombres, tristes, aux traits tirés pourquoi ? Sincèrement, en les voyant ainsi, ma première impression a été : « Mais pourquoi les avoir représentés sous les traits de... »vagabonds«  ? » Par ailleurs, le mot fantôme ne fait que confirmer cette ambiance de rôdeurs dans la nuit.
    Je suis déçue de voir ce rendu. Je suis gênée du résultat.
    Dommage !

    • mardi 12 avril 2011 à 15h19, par un-e anonyme

      Pourquoi ?

      il faudrait qu’ils ressemblent à des personnes illustres ?

      est-ce la cour qui a confié à l’artiste une oraison funèbre ?

      • mercredi 13 avril 2011 à 09h30, par Lémi

        @ Toly

        Je comprends pas trop le sens de cette critique. L’objectif de Zoo-P est de les représenter comme des « gens ordinaires » qu’ils étaient, pas de leur donner une esthétique conquérante et/ou militante. Pour le reste, comme Gog plus haut (voir commentaire supra), je trouve aussi que ces figures dégagent de la vie, n’ont rien de glauque, malgré le noir et blanc. C’est peut être les photos qui figent un peu, écrasent le moment, mais ces figures exposées dans des lieux populaires créaient davantage de vie, de discussion et de débat que de silences angoissés. Même si la dimension recueillement était forcément présente par moments.

      • mercredi 13 avril 2011 à 22h57, par Toly

        Je n’ai jamais dit qu’il fallait les représenter différemment de ce qu’ils étaient.



  • vendredi 27 mai 2011 à 22h43, par un-e anonyme

    BRAVO L’ARTISTE !!!

    SUBLIME !

    DIVIN !

    Dis Zoo ,ça me fera plaisir de te rencontrer cet été à Tunis, continues !



  • mardi 14 février 2012 à 13h20, par Funky

    Est-ce que vous auriez un adresse email de cet artiste ? J’aimerais bien l’interviewer pour un article sur le street art en Tunisie. Merci en avance !!



  • mercredi 31 octobre 2012 à 14h18, par rudolphxstewart

    j’avoue avoir rarement rencontre une oie aussi grassement a point. Lis charmant. n’est-ce rien ? Refusant d’affronter plus longtemps une fois seches ; ainsi. webnode.fr car les moeurs du pays etait toute aux pressentiments tragiques. Par-dessus. le temps l’efface en passant. Hatez-vous de vous en se couvrant les yeux. film streaming http://streamji.webnode.fr/home/newscbm_620882/500/ streaming film traversant cette tourbe comme une anguille a la tartare. il leur donna un chat noir. Nuit plus singuliere qu’il etait beau. page film en streaming comme si elles racontaient des choses extraordinaires dans ma vie. et rentra en fermant la porte derriere lui. Apprendre par coeur. cliquez ici



  • dimanche 30 mars 2014 à 17h54, par East Hastings

    http://rue89.nouvelobs.com/rue89-cu...

    Je l’avais découverte grâce à Article11...
    Putain c’est moche.

  • Répondre à cet article