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jeudi 6 juin 2013

Textes et traductions

posté à 17h26, par Régine Foglia
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Us et coutumes de l’espèce policière en territoire québecois

« Les oreilles vont et viennent rapidement d’avant en arrière, en se croisant parfois dans les cas les plus désespérés. Lorsque le bruit est identifié, ce qui se fait lentement dans un cerveau habitué à pédaler à vide, le policier garde obstinément les oreilles pointées et la tête haute, son front veiné comme une pierre. Puis [...] il baisse la tête et continue à cogner le sans-abri ou l’étudiant coincé entre ses jambes. »

Le printemps 2012 (surnommé érable) a été chaud à Montréal. Tout d’abord grève étudiante, il a culminé en une véritable explosion sociale, avec répression tout azimut à la clé – 3 509 arrestations, 41 blessés et nombre de Lois Spéciales liberticides. Ayant participé de près à cette crise, nous avons considéré de plus près encore les comportements étranges et mal connus des policiers québécois (officiers, hommes de troupe, chevaux, agents en civils et agents en uniformes, femmes et hommes). Nous vous livrons ici le résultat de ces édifiantes observations, prises entièrement sur le vif.

Avant de pousser plus avant le sujet, nous tenons à signaler que notre travail d’observation a débouché sur une révélation fort éclairante : il semblerait que les policiers québécois soient issus d’une forme particulière d’élevage sélectif. Celle-ci les prédisposerait à voir leur intelligence maximum limitée à celle d’une tranche de bacon ranci, tout en leur inoculant au cœur la violence de l’autorité et ses odeurs nauséabondes. Cette intuition sera discutée en long, en large et en travers dans un prochain article de Nature, revue de références – comme chacun sait – en ce qui concerne les découvertes scientifiques majeures.

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Us et coutumes de l’espèce policière en territoire québecois

Avertissement au lecteur : Dans le texte qui suit, nous ne nous attardons pas sur les sentiments qu’éprouve spontanément le policier lambda (tous corps confondus) : haine, inquiétude permanente, exaltation, égocentrisme, comportement antisocial, instinct grégaire, manipulation, excitation sexuelle, frustration, ennui, cupidité, irritabilité, etc. Tout cela est connu. Un psychopathe ne s’y tromperait pas et reconnaîtrait trop facilement sa propre parenté avec cette combinaison de facteurs disséminés chez ceux et celles qui jouent de la matraque à grands renforts de grognements, la salive accumulée à la commissure des lèvres, les parties génitales comiquement comprimées dans un petit slip de couleur vive, un peu de bave coulant, la parure classique d’un gun tiède et chaleureux (je vais le buter, je les déteste tous) à l’ombre de la ceinture et un très gros problème d’identité ou même de compréhension simple (Pourquoi vous m’aimez pas ? Je vous protèèèèège). Cette courte étude vise à montrer ce que l’on ne sait point, et qui pourtant permettrait de prévoir pour l’avenir immédiat, le comportement d’un policier dans les manifestations, rassemblements ou lors de ses randonnées sportives de chasse aux SDF où il jouit d’une totale impunité.

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Méthodologie : Dans la méthode anthropomorphique, on a tendance à se focaliser sur les cas positifs – fort rares – où il semble que le policier se soit montré intelligent et doué de la capacité de raisonner. Ceux qui appliquent cette méthode omettant consciencieusement les cas contraires, elle est donc purement anti-scientifique et les hypothèses qu’elles suscitent sont facilement réfutées. La méthode dépressionniste, pour sa part, est basée sur des tests de laboratoire ET de véritables évaluations en milieu naturel comme nous les avons annoncées. Appliquant notamment le célèbre principe d’équivalence rat/policier, deux espèces dont les aptitudes varient peu, nous avons mené diverses études à la méthodologie implacable. Leurs résultats ne variant pas, nous estimons qu’ils peuvent être interprétés avec confiance. Notons que cette méthode est également utilisée par le célèbre Institut Léger Marketing dont les résultats des sondages et la probité, voire l’éthique commerciale, sont bien connus.

Bien que la conscience d’un policier nous soit totalement inaccessible, notre analyse permet de dégager des grandes lignes, en se fondant sur le principe de causalité : un fait se répétant à chaque fois que les mêmes conditions sont reproduites, la probabilité devient aussi valable qu’une preuve. Or il est prouvé que le policier agit comme un petit enfant qui croit tromper le monde avec un petit air innocent lorsqu’il crotte dans sa boite à lunch (gamelle), qu’il mange ses crottins ou qu’il se mord les testicules. Selon les témoignages concordants de ses amis journalistes, le policier rêve de grande douceur et de contes de fées. La monotonie des coups qu’il donne, les vexations qu’il assène, ses préjugés nombreux, lui confèrent le bien-être épisodique de la perversion, vérité divine de l’autorité policière cachée derrière les lunettes sombres, dernier recours de sa fuite en avant. Tout cela, nous l’avons constaté au cours de notre étude menée auprès d’un échantillonnage représentatif à Victoriaville le 4 mai 2012 et à Montréal durant le beau printemps 2012.

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Si l’humanité possède de pleines charrettes de connaissances sur la psychologie des protozoaires, amibes, castors, ratons-laveurs et autres habitants de la biosphère québecoise, il est aujourd’hui très difficile, voire tout bonnement impossible, de se procurer un livre traitant de sa psychologie. Nous serons donc les premiers à consacrer quelques pages à ce vaste sujet, se basant sur nos constatations ex vivo et in vitro. Tâche essentielle : ce bel animal est infiniment intéressant à étudier. Il est d’ailleurs surprenant de voir tant de personnes graviter autour de lui et si peu s’intéresser à ses mimiques et expressions.
Notre étude propose quelques observations prises sur le vif et d’autres plus documentées. Elle permettra sans doute de stimuler la recherche et de passer de la rareté à l’abondance.

Considérations générales

L’inquiétude :

Une attitude bien connue du policier est celle qui traduit l’inquiétude. Elle est en effet assez fréquente dans ce milieu : son instinct syndical lui fait prendre tout bruit insolite extérieur à ceux de la Fraternité des Policiers et Policières du Québec, son syndicat, pour la présence inopportune d’un jeune ou, mieux, d’un étudiant, son plus mortel ennemi (s’il en trouve un à proximité, celui-ci se retrouvera vite étendu au ras du sol, matraqué, et arrêté), voire d’un itinérant (lui sera illico battu, menacé, puis déporté en rase campagne - démerde-toué maintenant). Le policier est un auditif primaire, qui s’inquiète facilement du moindre stimuli sonore. Il lève brusquement la tête et la tourne sous son casque, oreilles pointées vers l’endroit d’où lui semble venir le bruit suspect.

Premier degré : les oreilles vont et viennent rapidement d’avant en arrière, en se croisant parfois dans les cas les plus désespérés. Lorsque le bruit est identifié, ce qui se fait lentement dans un cerveau habitué à pédaler à vide, le policier garde obstinément les oreilles pointées et la tête haute, son front veiné comme une pierre. Puis s’il se rend compte que ce bruit n’a rien d’insolite (putain l’enfoiré), il baisse la tête avec un soupir de détente et continue à cogner le sans-abri ou l’étudiant coincé entre ses jambes (il a pas l’air gentil cui-là), toujours respectueux de consignes de sécurité adaptées aux besoins de la célébration de la force. Sa manière de frapper est cruciale, tout comme la brutalité et le nombre de coups (sacrément difficile tu veux dire, faut pas se blesser). L’obscurité est aussi une sacrée gageure mais stimulante (pas facile de pêter la yeule dans l’obscurité).

Deuxième degré : Si au contraire le policier n’arrive pas à justifier le bruit (Pourquoi tu me dévisages comme ça, caaaaalice ?), il reste tendu, des idées en arme traversent son cerveau en lambeaux et, après quelques secondes, on distingue tout à fait limpidement ses nombreux pets explosifs. Désemparé, il explore alors son propre rectum avec des tic-faciaux grimaçants ; simultanément, ses genoux fléchissent légèrement et se mettent à trembler comme des quilles effrayées. Une crise d’anxiété qui se termine par des vomissements répétés sur les corps pétrifiés des itinérants et des étudiants (on est amis, oui ou non, vas-tu le dire ?). In fine, toutes ces tensions exacerbées, encombrées en sus du bric à bras des pensées du chef englouties dès son réveil, réactivent rapidement sa poitrine qui s’élargit démesurément, encombrée des merdailles et des oreilles tranchées des itinérants ou des étudiants supposés, butin couvert de mouches (on était vraiment de bons amis) : l’explosion n’est plus loin.

Troisième degré : Enfin, si au bout de huit ou dix secondes, il n’a pas encore déterminé la raison de son inquiétude (déconne-pas, moi ce que je veux, c’est que tout le monde soit heureux), le policier lance un cri long sonore en suant comme un porc. Il agite son gun et lance des représailles explosives sur le premier passant qui passe en passant. Puis il se dresse en cliquetant, enfle son jabot et vocifère un long cri étrange, résonnant à la manière de sacs d’ordures éparpillés qu’on rassemble devant la benne. Immédiatement, ses congénère l’entourent, se rassemblant dans un climat de crise de nerfs (Viens vite vouère ! si on allait faire un tour ? J’te dépose où donc ?), avant d’aller inspecter les restes du suspect, tâtant de la botte le visage troué du passant qui ne trouve plus rien à répondre, couché dead parmi les poubelles, étendu dans son propre silence, les bras croisés sur sa mort (nous n’étions pas très proches, la victime et moi).

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À noter que le cri de ralliement du troupeau n’est jamais lancé au moment du meurtre, il lui est postérieur de quelques nanosecondes. Le crime gratuit est suivi de chaudes congratulations (t’inquiète paaaaas, c’est lui qu’a commencé). Le policier, ventre tressautant, épaules bardées de fer, secoue alors les oreilles métalliques de ses collègues qui n’ont rien entendu, occulte leurs regards torves qui n’ont rien vu, ferme leurs lèvres qui n’ont rien à dire. Début d’exil pour le passant qui ne rentrera plus à l’heure. Le troupeau complice est prêt pour la fuite. Avocats, journalistes, syndicat, politiciens sont déjà au travail. Solitude absolue du passant que tous accusent.

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Considérations particulières

Dans la foulée de ce constat général, de nombreuses observations plus spécifiques effectuées durant la soudaine poussée policière printanière et estivale de février 2012 à septembre 2012, notamment à Victoriaville, ont permis d’analyser les faits suivants :

Policier qui mange ses crottins

Certains policiers, assez rares heureusement, ont le goût assez dépravé pour manger leurs crottins, ce qui n’est pas un régime indiqué pour un policier, même s’il semble économique pour la communauté et nos impôts. On a imposé à Victoriaville le port des muserolles fermées ou des casques intégraux qui permettaient de faire passer le goût de cette manie. On a essayé aussi un pantalon à poche pour collecter le crottin policier. De nombreuses options sont possibles, telle la stratégie bien connue du bouchon, mais qui reste difficile à introduire chez le policier rétif. On trouve ce bouchon en trois tailles et en trois textures nervurées dans les étals quincailleries des marques suivantes : Rona-L’entrepôt, Canadian Tire & Réno-dépôt, au rayon ferblanterie. Cependant, la meilleure formule reste d’arroser de crésyl les crottins à chaque production fécale. Le policier, malgré son handicap bien connu quant à la vivacité d’esprit, associe au bout d’un certain temps l’odeur de son crottin à celle du crésyl et perd généralement cette habitude insolite. On a parfois signalé quelques cas de constipation chronique accompagnée de la mauvaise humeur qui lui est associée. Quelques observateurs n’ont pourtant perçu aucune différence comportementale.

Policier qui se mord

Ce défaut, sans être grave, révèle cependant une névrose singulièrement commune. Le policier se mord, se pince à la poitrine, aux testicules, aux orteils, aux doigts, souvent assez fortement pour se faire d’inesthétiques marques dépilées et saignantes. Le même policier déchire ses couvertures, bat les prisonniers, tue les passants ou arraches ses bandages.
Traitement : douceur et distraction, petit animal de compagnie (étudiant, immigré de couleur, amérindien). Un bâton rigide relié du casque à la ceinture empêche le policier de pencher la tête, mais il nous semble trop contraignant. Une muselière hermétique de cuir laisse beaucoup plus de liberté. De plus, elle exige beaucoup moins de travail pour le soigneur.

Policier qui crotte dans sa gamelle

Quelques policiers prennent la curieuse et déplorable habitude de crotter dans leurs gamelles, certains très habiles le font en visant adroitement l’ice-pack. S’ils le font après avoir mangé leurs rations de poutine liquide, cet admirable mélange indigeste de frites grasses, de fromage gras fondu et de sauce farineuse et brune, il n’y a que demi-mal ; mais il en est qui recouvrent leur ration, la rendant ainsi inutilisable, et qui subissent un préjudice pour leur santé. Le policier qui se sent observé crotte rarement dans sa gamelle – il faut alors voir dans cette habitude un signe de pure perversité.
Traitement : en répandant la ration de poutine liquide dans une auge de grande taille et en changeant le policier de son coin d’auge chaque jour, il se pourrait que, dérouté par le changement, le policier arrête cet usage néfaste à la bonne tenue de sa gamelle.

Policier qui lèche les murs ou le sol

Dans leurs postes de quartier, certains policiers dégagent les crottins de leurs collègues du bout du nez et lèchent longuement n’importe quelle petite surface de peau grande comme la main, avant de recommencer ailleurs, gênant ainsi le travail de leurs collègues. D’autres lèchent longuement le bas des murs, leur bureau, les pieds des chaises, les fenêtres, des classeurs ou leurs stylos vite usés par un tel traitement. Cette manie ne présente aucun danger mais elle signale un manque de sels minéraux et une morale élastique.
Traitement : mettre un étudiant, un contestataire, un itinérant couvert de sel en présence du spécimen ; ils seront léchés avec application malgré leurs hurlements, mettant un peu de vie dans le poste de quartier. Certains postes de quartier fixent une pierre de sel au mur des toilettes créant le désavantage de toilettes rarement inoccupées.

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Policier postmoderne

Lorsqu’il est sain de corps et d’esprit si l’on peut dire, la joie du policier se manifeste par l’espièglerie avec laquelle il tente d’attraper avec les dents tout ce qui passe à sa portée, hormis les politiciens corrompus, les ingénieurs et les entrepreneurs de la ville de Montréal, les juges libéralement nommés, leurs collègues. Il ne faut surtout pas punir ce joyeux policier, ses petits faits anodins, son allégresse, entretiennent la confiance sociale dans ses capacités spirituelles et métaphysiques. Si on le punissait, il pourrait devenir hargneux et dangereux, ce qu’il n’est pas, tant son naturel exprime de bonheur paisible et d’enthousiasme naïf pour son prochain.

Un policier résigné n’est plus qu’une ombre de policier et il revient rarement à son état normal. Il faut laisser au policier cette petite fleur bleue de la pure gaieté qui, une fois ôtée, ne repousse plus.

Ce frais policier manifeste sa gaieté en arrondissant l’encolure, en secouant vivement la tête ou en bondissant sans raison apparente. Ces divers mouvements sont souvent accompagnés d’un couinement et d’un pet très bref. Ce policier postmoderne a besoin d’un exutoire, son trop-plein d’énergie se libère en mettant en mouvement les parties de son corps les plus utiles à donner des coups, à mordre, à crotter, toujours prêts à se dissoudre dans la fange pour se surpasser lui-même.


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