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vendredi 22 mai 2009

Le Cri du Gonze

posté à 10h52, par Lémi
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Courrier de l’au-delà : L.-F. Céline, de Meudon, nous écrit à propos du Festival de Cannes
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« Les v’la beaux ! Fins phénomènes ! Pâmés d’eux-mêmes ! A la louche la bouillie ! Plein les mirettes ! T’as vu comme ça brille mémère ? Ah la belle rouge ! Ça nous change de la grippe du porc ! La crise est morte ! A l’essentiel ! Jeanne Moreau a changé de dentier ! Pénélope est plus belle que Carla ! Johnny sort de sa tombe ! Tautou la femme-sandwich ! Ou sont les âmes ? »

On m’laissera donc jamais tranquille ? Pas moyen de roupiller outre-tombe ? Et les bonnes manières ? C’est pour ta grand-tante ? Pour les tranquilles, les mous, les constipés, les qui dérangent pas, qu’ont les effluves gracieux ? Les au garde à vous, qui crachent pas dans la soupe ? Pas pour Destouches, l’honni, le malappris, l’ordure suprême, hein ? M’en doutais ! Andouilles ! Assassins d’élite ! Je m’endors, je roupille, j’écrase enfin, et paf, ça rate jamais ! Les effluves débarquent ! Pire que les anglais ! Ragnagnas épiques ! Division Guderian c’est du gâteau ! Votre vomi vient toquer au nuage Destouches ! Et il insiste, l’ignoble ! Sans gêne, l’immondice ! Foutre ! J’en peux plus ! Je reviens vous botter le train ! Une dernière fois ! Avant la prochaine !

C’est pas un monde, Monsieur, c’est de la merde1. Et quand elle monte trop haut, qu’elle chatouille mes narines de gourmet ectoplasmique, c’est plus fort que moi, il faut que j’intervienne. Panzer Casper rue dans les brancards. Ça tient à ma nature, toujours eu le sang chaud quand il s’agissait d’abrutissements collectifs. Pas ma faute, hein, peux pas saquer les raouts décérébrants, les hochets paillettes, la grande messe des abrutis. Moi c’est Meudon qui me botte, mon jardin dans le ciel, ma poussière, mes chiens et la vielle Lucette, la seule qui ne trahira jamais. Les autres ? Chair à pal ! Chair à canon ! Chair à crémation ! Gaillardement qu’ils y plongent, dans l’immondice brillant. Ils s’affolent, les premiers qu’ils veulent y être, in the marécage, prononcé la bouche en cul de poule pour faire plus Houliwoud. En ce moment, c’est festival, ça les démange, ça brille de milles lampes vermoulues. Ils s’enfoncent en chœur. A Cannes, tous, dans la fosse à merde ! Les foutus marioles !

A croire qu’ils prolifèrent, qu’ils se sont même développés depuis mon départ. Le rabat joie est parti, on peut y aller, champagne !!! C’est pustulences et compagnie. On hurle TAPIS ROUGE, ils rappliquent dare-dare, s’ébrouent en cœur, jouent des coudes et des panards. Bousculade infernale !!! Heysel puissance 10 !!! Ça s’empoigne, ça trépigne, ça mordrait si ça pouvait, des marmots écrasés sous leurs sabots strass. Poussez, y’en aura pas pour tout le monde !!!

Faut bien qu’on bouffe qu’ils répondent … L’essence du yacht … Rubis sur l’ongle … Rivières de flash pêché mignon … Plutôt crever qu’être pas vu ... Panard suprême … 16 marches pour le toit du monde ... L’Everest c’est du pipi ... Starway to evil2 !!!

Le monde croule, se mange lui-même, se ronge la patte, l’apocalypse galope en fond sonore, et eux dansent, c’est sabbat, la Croisette s’amuse. Cascades de Rimmel, momies ressuscitées le temps d’un pas de danse racorni, Lazare a des groupies. Pas question d’être un ass been qu’ils hurlent, on va vous en foutre plein la vue du luxe criard genre Saint Trop. Paillettes en goguettes, Carlton et Majestic, Glamour glauque, fourrures léopard, renard ou gnou, strings zèbre, une foutue ménagerie pourrissante. C’est plus un festival c’est un cimetière fluo pour éléphants exhibo. Verdun again, ils pissent sur vos raies d’abruti, vous qui en redemandez. Du splendide carié ! Du Spectacle qui tache, mieux que le Beaujolais. L’avez bien cherché, en même temps. S’ils sont là, s’ils s’agitent, c’est votre faute. Pourriez pas zieuter ailleurs ? Bicher autrement ?

Je le disais déjà dans le Voyage, je persiste et signe : « Ce monde n’est je vous l’assure qu’une immense entreprise à se foutre du monde ! » Et pourtant, même moi, qui le sait et le resait, j’y replonge, devant l’écran, subjugué d’horreur. Je brame, j’enrage. Repos éternel ? Repasse voir demain, mon salaud, parait qu’on rase gratis !

Nouvelle montée des marches. Les v’la beaux ! Fins phénomènes ! Zoulous gratinés ! Frétillants de fausse gloire, pâmés d’eux-mêmes. A la louche la bouillie, pleins les mirettes de l’abruti moyen ! T’as vu comme ça brille mémère ? Ah la belle rouge ! Ca nous change de la grippe du porc ! La crise est morte ! On oublie nos emmerdes ! Rien dans le frigo mais plein la vue ! On bave, on se paluche les neurones ! Ça ragote à plein poumons : Jeanne Moreau a changé de dentier ! Paris Hilton réalisatrice ! Brad Pitt adopte des soudanais ! Penelope est plus belle que Carla ! Penelope joue aux dominos ! Johnny sort de sa tombe ! Hulot chipote ! Tautou la femme-sandwich ! Ou sont les âmes ? Ah, les salauds ! Z’en tiennent une sévère !

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Le service courrier de l’au-delà ayant reçu en 6 mois environ une bonne douzaine de lettres éructantes du sieur Louis Ferdinand Céline, il se décide à en publier une seconde, après son envolée glauque sur les JO de Pékin, ici. Qu’il ne croie pas pour autant que cette tribune lui soit ouverte sur demande. Quoique…



1 Herr Grimaud, ceci n’est pas du plagiat, seulement une génuflexion.

2 Si le sieur Destouches se permet des références (douteuses) à priori anachroniques à Led Zeppelin, c’est bien sûr que l’enfer n’est qu’une longue écoute forcée de tubes dégoulinants de Jimmy Page et Cie.


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