ARTICLE11
 
 

mercredi 16 janvier 2013

Médias

posté à 18h40, par Lémi
28 commentaires

« Winner magazine » – les gagneurs au banc d’essai

Il faut imaginer la scène, ces gens réunis pour trouver un titre à leur magazine, l’accroche parfaite à leur projet ; brainstorming intense. Et soudain l’un d’eux se lève, frappé par l’inspiration : « Et si on l’appelait ’Winner’, tout simplement ? Avec un sous-titre type ’Le Magazine des gagneurs’ ? » Et les présents d’opiner en chœur, ravis : « C’est parfait ! » Vision d’enfer.

«  Debout ! Roulons-nous dans des mots culottés qui donnent envie, qui motivent, qui soulèvent. Le courage de dire que le vital c’est la vie ! » (Véra Baudey, rédactrice en chef de Winner, janvier 2013)

*

Winner, «  le magazine des gagneurs », adorable mensuel dont l’achat te grillera à tout jamais auprès de ta buraliste1, en est à son sixième numéro. C’est un imprimé de 132 pages clinquant et moche qui ressemble aux chiantissimes magazines disséminés gratuitement dans les TGV par la SNCF. Sauf qu’il est vendu à cinq euros et semble plutôt massivement distribué (il y a eu plusieurs campagnes d’affichage dans les kiosques). Très mal foutu, dans la forme (textes imbitables, graphisme pseudo-chic cheap) comme dans le fond (une seule rengaine, recyclée à toutes les sauces, de la politique à l’écologie : « soyez winner »), cette charmante publication est éditée par la société Pavé dans la Mare (uh uh) et dirigée par une femme de lettres, Véra Baudey, qui est à l’écriture d’édito ce que l’ornithorynque est à la zoologie : une énigme.

Lire Winner de fond en comble n’est pas de tout repos tant les émotions assaillent le lecteur, confronté à un redoutable carrousel éditorial. De l’incrédulité initiale à la colère vengeresse, de la rage à l’ennui ferme, de la poilade au dégoût, il se verra gratifié de tout un panel de ressentis. Au fil des pages, la sensation de mal au cœur s’intensifiera, jusqu’au possible rejet digestif, conclusion adéquate mais pas forcément agréable. Pour t’éviter cette déconvenue, Article11 a pris les devants, plongeant dans les entrailles de la bête en n’écoutant que son courage aviné.

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« Sérieusement ? »

C’est une blague ? Voilà sans doute la première réaction de tout individu normalement constitué découvrant la dernière campagne d’affichage lancée par Winner. Un tel titre, un tel sous-titre (« Le magazine des gagneurs »), et la ganache de Séguéla (aka Mister La Rolex fait l’homme) en couverture, ça semble presque trop gros pour être vrai. Quoi ? Des gens se seraient réunis pour discuter d’un projet de magazine et auraient débouché sur ce concept ? Des individus auraient mis la main au porte-feuille pour le financer, flairant la bonne affaire ? Et cela durerait depuis six numéros ? Dur à croire.

Une fois le magazine en main, le doute persiste. Les huit premières pages uniquement composées de publicités (Ferrari, Banque Palatine, McLaren...) laissent augurer d’un possible dénouement rapide : ce ne serait pas une vraie publication mais une sorte de piège pubesque, un happening éditorial pour fourguer des pages et des pages à des annonceurs et filer avec l’argent de la caisse dans un palace suisse, type le Grand Hôtel Kempinski (qui a droit à une pub en pages 2-3, à un entretien avec le manager général en pages 64-69 et à une dernière salve de pub en pages 70-71), point de chute tout sauf anodin : Winner précise avec emphase que ce palace genevois offre « La plus grande suite d’Europe, 1080m2, vue à se pâmer  » - youpi.

Il faut attendre la page 15 pour que se matérialise le premier texte made in Winner, signé Véra Baudey, rédactrice en chef. L’édito. Gros morceau. Là aussi, tout laisse penser à une blague : prose fantaisiste, argumentation étrange, phrases absconses. C’est très mauvais mais très drôle. Extraits :

« En avant la France, aligne-toi au départ de la course à un avenir meilleur. Il est super-débile de proscrire l’optimisme. La culture française a toujours de l’entregent et son influence demeure intacte. Plus la crise sonne à la porte, plus on se réfugie dans l’utopie. Ennemis ou amis, tous les oracles s’unissent pour affirmer que, par des temps d’une aussi triste réalité, on ne peut que baisser les bras. Mais justement, c’est quand la partie semble perdue que soudain, en fulgurance, percute la volonté de renverser la situation d’un ultime coup de reins rageur et victorieux. Alors tout devient possible, parce que l’excès aveugle notre conscience et nous donne des ailes. Voici que passe l’occasion de gagner le grand match d’une ère nouvelle. Soyons Winner ! La France réveille-toi ! Secoue-toi ! Bouge-toi ! Branche-toi. Cesse de te regarder le nombril. Regarde les autres, ceux qui sont devant. Il ne faut pas les laisser mener la course. Fonce ! »

Yep, à première vue et en toute objectivité, il serait super-débile de prendre ce tissu d’inepties au sérieux. Même Le Figaro, Valeurs actuelles ou Direct-soir, pourtant experts en la matière, auraient refusé une telle avalanche de lieux communs à la Youpla-boum patriote et incantatoire. Il y a des limites au néant éditorial. En lisant cet édito, tu penses à Charles Pasqua en tutu fluo, voire à un mariage chelou entre Petit ours brun et le Grand Charles, ce n’est pas tolérable.

La suite immédiate semble confirmer l’hypothèse happening, notamment cette page 16 magistralement intitulée « Jacques Séguéla voit plus vite » et accompagnée d’une citation de Mao (« Si tu mets tes pas dans les pas de ceux qui ont marché devant toi, tu ne les dépasseras jamais »). Un mélange raffiné et absurde qui fleure bon le gag rédactionnel. Si bien que tu raccroches à l’évidence : il y a forcément un moment où arrivera l’explication, type « On vous a bien eu, les mecs ! Vous pensiez quand même pas qu’on parlait sérieusement ? »

Malgré tout, pris d’un doute, tu accélères le rythme de lecture (fini de picorer) et sautes nerveusement de page en page, en quête du dénouement attendu.

Ça défile.

P. 18 - Portrait sans concession de Séguéla2 par la rédaction. Extrait : « Il est brillant, tourbillonnant, désinvolte et concentré. Il enchaîne les pirouettes comme les années, avec légèreté. En quelques mots, Jacques donne plus de plaisirs que de longs discours. La compétition est pour lui un moteur puissant : « cela me maintient en forme et me permet de penser plus vite, pluis loin », avant d’ajouter dans un souffle : « C’est la meilleure façon d’être en contact avec le monde de demain, de mieux imaginer les méandres et contours du futur.  » (Incrédule, tu relis : En quelques mots, Jacques donne plus de plaisirs que de longs discours. Sérieusement ? Un être humain pourrait pondre une telle phrase sans second degré ?)

P. 20 – Texte du dénommé Séguéla (qui n’est pas seulement publicitaire mais également penseur de haute volée) abordant la pub à l’ère numérique, « cette accélératrice digitale des pensées, des idées...  ». Cinq longues pages très confuses décapitant les acquis de la Révolution française (sa marotte) et encensant ceux permis par la pub. Et en conclusion cette affirmation rassurante : « Nos enfants et nos petits-enfants n’ont pas de souci à se faire ». Voilà qui est dit.

P 29 – Entretien avec Olivier Perruchot, « General Manager de Piaget France ». Malin : comme même à Winner on ne peut placer des pubs à chaque page (question de déontologie), le publi-entretien s’y substitue, variant les plaisirs tout en ayant la même fonction (quatre montres Piaget en gros plan, dont deux occupant chacune une pleine page).

...

Et ça continue encore et encore, sur des pages et des pages, entre envolées politiques réacs («  en 2013 on cessera de rêvasser en prétendant qu’un enfant peut avoir deux papas et pas de maman  », prophétise Vincent Hervoüet, penseur à TF1) et fines analyses («  la réussite est une station d’aiguillage  », explique doctement Alain Marty, du Wine & Business club). Comme l’explication ne vient toujours pas, tu finis par prendre la chose au sérieux. C’est dur à croire, mais... ce n’est pas une blague. Oui, Véra Baudey est une personne réelle. Elle écrit sérieusement des trucs comme « c’est quand la partie semble perdue que soudain, en fulgurance, percute la volonté de renverser la situation d’un ultime coup de reins rageur et victorieux » (poids des mots, choc des formules). Et des gens ont réellement cogité pour pondre 132 pages de cet acabit. Boum.

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*

La gueule des winners

Une fois admis que Winner n’a rien du poisson d’avril, la première impulsion est de se dire qu’il convient de le disséquer page par page. D’analyser, par exemple, les propos de Robert Lafont, directeur général de Lafont Presse (dans son giron, quatre-vingt splendides publications au service de la grandeur humaine telles que Jour de France, Création d’entreprise ou Entreprendre), qui, dans une belle envolée, déclare sans rire :

 « Je suis arrivé à la conclusion, avec tous les dirigeants que je rencontre, que tout le monde a sa chance. Les gros, les maigres, les vieux, les jeunes, des « monsieur » (Sic), des pauvres, des connus, des inconnus. Ce qui est fascinant, c’est qu’il n’y a pas d’archétype. Il manque aussi des entrepreneurs dans l’Assemblée […]. Les grands patrons, Bolloré, Pinault, Arnault, n’interviennent pas du tout dans la politique. Pourtant, on aurait besoin de leur avis. On dirait qu’ils ont peur, alors qu’avant Dassault et d’autres donnaient leurs opinions sur les décisions politiques. C’est dommage. »

Yep, il serait tentant de lister toutes les perles de ce type et d’en dresser une typologie. Mais outre que j’ai d’autres ornithorynques à fouetter et que je sens pondre l’insidieux Nervous breakdown à force de feuilleter l’animal, ce serait sans doute se tromper de grille d’analyse. Les puissants sont peut-être stupides, mais pas à ce point. Et imaginer que ce type de lectures serait privilégié dans les salons de la Haute relèverait surement de l’erreur d’analyse. Winner doit sans doute être distribué gratuitement dans nombres d’endroits chicos où le communs des losers ne foutra pas les pieds et il n’a pas besoin de lecteurs attentifs. C’est plutôt un support à publicités haut de gamme, entrecoupé de quelques pseudos-articles ou éditos pour (très bancalement) donner le change. Qu’il soit vendu en kiosques ou pas ne change rien à sa santé financière, parce que la manne publicitaire (essentiellement montres de luxe à plusieurs smics, bagnoles et palaces) lui suffit. C’est l’hypothèse 1, qui aurait pour conclusion : ne sous-estimons pas l’ennemi ; con peut-être, mais pas à ce point.

L’hypothèse 2 voudrait qu’on s’arrache Winner à Megève, à Saint Barth, sur les bancs du Sénat ou dans le 16e arrondissement, et qu’il soit longuement débattu par les riches et puissants de ce pays, voire de ce monde (tous les « articles » sont traduit en anglais). Hypothèse tentante parce qu’elle permet d’aisément et totalement inverser la donne de départ du magazine en nous conférant à nous, simples mortels désargentés, le statut de winners intellectuels devant l’éternel.

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Pour en savoir plus et faire avancer le débat, il faudrait trouver les chiffres de vente de Winner, enquêter un tantinet, la jouer gagneur en quête de rentabilité journalistique. Le résultat se situerait surement entre les deux hypothèses. Ou pas. Perso, je m’en lave les mains, puis les désinfecte soigneusement. Je n’ai jamais été aussi fier d’être un loser revendiqué : au vu de cet étalage glauque, il serait super-débile de viser autre chose.



1 « Ah tiens, vous lisez ça, vous ? J’aurais jamais imaginé...  »

2 Par ailleurs conseiller en communication du magazine. Le monde est petit.


COMMENTAIRES

 


  • mercredi 16 janvier 2013 à 22h32, par Laffreux

    « Nos enfants et nos petits-enfants n’ont pas de souci à se faire ».

    Quand un mec comme Séguéla dit un truc comme ça, c’est là qu’il faut commencer à flipper.

    Et oser écrire, dans la même phrase, qu’Arnault et consorts n’interviennent pas dans le Politique, et que le fait que Dassault ne le fassent plus est « dommage »...

    On touche là au sublime.
    Que ce soit conscient ou non.

    La psychanalyse a encore de grands jours devant elle.



  • jeudi 17 janvier 2013 à 08h41, par Soisic

    Tiens, j’ai trouvé un « Winner » : Fabien Manuel, directeur artistique d’une agence de Com’, dans l’esprit brillant duquel a germé cette fabuleuse idée de parc d’attraction sur le thème exclusif de la Pub’. Rien qu’à voir le site, ça fait rêver...
    _ www.adslandpark.com

    Moi je dis, c’est du Winner XXL !



  • jeudi 17 janvier 2013 à 11h34, par Tim Pesta

    C’est de la même veine que « Boronali » peintre (anagramme d’Aliboron que l’on avait fait peindre avec sa queue...)
    Vera= vrai
    Baudey=........ Allez à vous de deviner !



  • jeudi 17 janvier 2013 à 11h39, par Karib

    Un journaliste, un jour, posa cette question iconoclaste à M. Laurent Fabius, ci-devant Premier ministre : « Monsieur Laurent Fabius, quel est pour vous le plus beau mot de la langue française ? » Et le petit marquis de répondre : « Gagner. »



  • jeudi 17 janvier 2013 à 14h29, par christian lehmann

    C’est au delà du réel. En farfouillant sur le net j’ai pu tomber sur quelques autres passages de la prose absolument pathétique de la Baudey. Il faut oser, effectivement, aligner les phrases surréalistes, les métaphores éléphantesques, les contre-sens faussement géniaux, quand on a le QI d’une huître. Belle trouvaille, les gars. A côté de ça, les éditoriaux séniles du grand-père Dassault dans le Jours de France des seventies c’est presque du La Bruyère.



  • jeudi 17 janvier 2013 à 15h17, par Buk Is God

    Pitié ! Dites moi que c’est un fake tendance dada !
    Nom de dieu que c’est laid sinon



  • jeudi 17 janvier 2013 à 15h24, par Emma

    Hallucinant... ça laisse sans voix...

    Pour voir le dernier édito de la Baudey, c’est ici : http://www.winnermagazine.com/img/E...

    • lundi 18 mars 2013 à 02h57, par léo

      c’est sûr que c’est pas un fake ? je n’arrive pas à croire qu’on puisse écrire de telles débilités ET les publier et que ce soit vraiment du premier degré.
      >
      « on se noie d’écume, trop occupé à guetter la prochaine grosse vague. Remplissons notre garde-moral trop vide. »
      sérieusement ?
      je n’ai jamais rien lu d’aussi mauvais...
      Merci pour l’article très drôle, et bien écrit, lui, il réconforte à hauteur de la terreur inspirée par le winner mag.



  • jeudi 17 janvier 2013 à 15h30, par bob

    Super article (comme toujours) avec ça la presse écrite va retrouver ses lecteurs...
    On les sens quand même de plus en plus gênés par le déclin et le déclinisme ambiant qui l’accompagne, c’est bon signe !



  • jeudi 17 janvier 2013 à 17h11, par Sergio

    A quand le magazine des « gagneuses » ?

    (oui, je sais, c’est nul, mais Winner magazine, c’est aussi nul...)

    • vendredi 18 janvier 2013 à 06h53, par Rico

      Mon commentaire me paraît trouver toute sa place en « réaction » à celui-ci.
      À l’adolescence, j’ai découvert un usage que j’ignorais du mot winner, au cours d’une visite chez une famille canadienne anglophone : le petit garçon (il devait avoir 8 ans et j’en avais 14), sans doute fort préoccupé comme cela arrive souvent à son âge, de comparaison de taille ou de forme, m’a demandé de lui montrer mon « winner ». Sur le moment, j’ai été assez étonné de cette appellation, avec l’âge (56 ans aujourd’hui), je comprends mieux.
      Cela illustre assez bien à quel niveau fonctionne ce magazine - celui de la pulsion - d’où le rapprochement inévitable avec l’usage du mot « gagneuse ».
      Finalement, pour combler les attentes de Mme « Baudet », il faut sans doute lui souhaiter long vit, plutôt que longue vie.
      Si je me laissait aller à mes pulsions, la première chose que j’aurais envie de dire à tous les gagneurs qui se projettent dans ce torchon, c’est « fuck off » (encore plus adapté que l’équivalent français « va te faire foutre »). Mais à force d’aller et venir, j’ai appris à me retenir. Merci Sergio !



  • jeudi 17 janvier 2013 à 17h38, par wuwei

    Vous avez une vie difficile les potes d’’Article 11, car être obligé de poser vos yeux délicats (certes embués par le rosé) sur une pareille horreur et la disséquer c’est courageux.



  • jeudi 17 janvier 2013 à 17h56, par parachrematistique

    Esthétique façon magazines Air France ou SNCF, c’est exactement ça !

    La question serait en effet de savoir jusqu’à quel point l’équipe//team rédactionnelle adhère aux foutaises//bullshits qu’elle écrit. Il serait rassurant d’apprendre que l’on n’a affaire qu’à une bande de cyniques produisant un support publicitaire. Mais l’effet d’auto-conviction sur le lecteur doit être bien réel : je participe de la gagnattitude//winnerness de tous ces héros dont je lis les aventures.

    Salutations perdantes,

    http://parachrematistique.wordpress...



  • jeudi 17 janvier 2013 à 18h37, par GoG

    Bien le bonjour par ici, ça fait un brin. Nous continuons de lire Article XI, mais avions perdu nos velléités commentatrices, et ce, certainement pas du fait du canard, toujours aussi excellent ! Longue vie à Article XI, donc, même s’il s’est pris quelques mois d’hibernation bien méritée.

    Bref, l’appel des « winners » était bien trop puissant pour ne pas me faire sortir de ma léthargie contemplatrice, et, en tant qu’ancien multimilliardaire devant l’éternel, donc ancien adepte de ce genre de manœuvres retorses, je me permets, Lémi, d’invoquer une troisième hypothèse qui expliquerait la présence de ce torchon (un de plus) en kiosque dont les piles viennent polluer les invendus des kiosquiers précarisés.

    Sa fonction est à mon avis double, d’une part la couverture sert de publicité (gratuite cette fois) à l’heureux et gentil PDG-actionnaire_majoritaire élu du mois : son groupe paye des sommes astronomiques (aux frais des princesses précaires, bien sûr) pour avoir la chance d’être présent dans un encart de Winner, Winner lui offre un juste retour sur investissement un lui offrant une interview consensuelle dont les extraits les plus fulgurants seront brocardés partout où la couverture pourra être exposée, en grand format de préférence. C’est du win-win entre gens de bonne compagnie. Et au sein des classes supérieures, il n’est rien de plus raffiné que des échanges d’ascenseurs courtois et trébuchants.

    Deuxième fonction du bousin : attirer un certain type de lectorat, pas les classes supérieures, non, qui, si elles n’ont pas la finesse dont elles se gargarisent volontiers, ont tout de même reçu, avec leurs millions, assez d’éducation politique et sociale pour ne pas être les dupes, même flattés, d’une tribune dont la subtilité n’a d’égale que celle d’un butor éclopé (et encore, c’est plutôt joli un butor).
    Le lectorat visé, donc, serait plutôt celui d’une certaine bourgeoisie issue des classes modestes, qui n’a pas eu l’opportunité de macérer dans un habitus socio-culturel assez vaste pour aiguiser son sens critique, mais dont l’activité professionnelle à peu près florissante a fait bouger les lignes et convictions politiques pour les faire se rapprocher d’une certaine réaction, souvent proche de la Pen, et en tout cas résolument fascinée par le luxe et la réussite professionnelle.
    c’est cette classe sociale qui est visée, celle dont la crise pourrait à nouveau ébranler les convictions politiques, et ce sont des miettes de ce qu’elle ne possèdera au fond jamais (ou de façon très parcellaire) qui lui sont données en pâture afin de la garder dans le girond patricien de l’amour du travail, de la patrie et des grandes fortunes qui la font et la défont, représentées telles les célestes figures de proue d’un ordre où tout est « luxe, calme et volupté ».

    Fonctionnalité corollaire : cela permet sans doute à « Madame » d’occuper ses dimanches en saines écritures pendant que « Monsieur » s’affaire à ses placements.

    Sous ses airs de bric et de broc c’est juste un outil de lutte des classes dominantes parmi tant d’autres (paris match ou Stéphane Bern pour n’en citer que deux), et peut-être pas le plus inoffensif d’ailleurs.

    GoG



  • jeudi 17 janvier 2013 à 21h11, par Ulrich

    Putain ! ! ! quand j’ai vu cette couverture avec Séguéla défigurer mon kiosque habituel, je me suis immédiatement fait la même réflexion que celle que tu as dans le chapeau de ton article. Il fallait quand même oser... et ils l’ont fait. Il n’y a décidément plus rien à espérer de ce monde de cons finis.



  • vendredi 18 janvier 2013 à 07h42, par Remugle

    "Some speak of the future
    My love she speaks softly
    She knows there’s no success like failure
    And that failure’s no success at all"

    Bob Dylan
    Love Minus Zero, No Limit



  • vendredi 18 janvier 2013 à 14h24, par isatis

    Rhooolala…
    C’est une insulte à la race asine cette ouineuse à la gomme, arf……
    Pas arrivé sur mon coin de planète ce torche-cul, je suis en zone protégée faut croire :-)



  • vendredi 18 janvier 2013 à 19h13, par Nestor S

    Je pense qu’en fait certaines personnes n’ayant jamais éprouvé aucun doute sur rien ne voient aucune contradiction à citer Mao et Séguéla dans la même phrase...

    Puisque les deux font au final partie de la même « culture populaire » nébuleuse, sans trop de sens, mais avec des images, des « caractères » plus ou moins sympathiques...

    Un peu comme si on introduisait un article sur Pikatchu avec une citation de la Team Rocket du genre « rendez-vous tous ou ce sera la guerre »... La plupart des gens ne trouveraient pas ça contradictoire...

    Etonnant...



  • samedi 19 janvier 2013 à 17h29, par GF

    Merci, tiens, ça fait une poignée de semaines que la campagne de pub de cette horreur me salit l’horizon quand je me ballade. Je ne suis pas aussi masochiste que vous, ceci étant, et j’ai soigneusement gardé une distance de sécurité avec ce machin.

    Une autre hypothèse, pour compléter les autres, au cas où : c’est une manière d’augmenter la conscience de classe des richards de ce pays. Ou alors, la rédac chef s’ennuyait ferme à la maison et a quelques amis qui ne savent pas quoi faire de leur montagne d’argent...



  • dimanche 20 janvier 2013 à 17h45, par Thaddée Guenver

    Tiens ? Personne n’a encore pensé à faire le lien avec cet excellent détournement :
    http://www.youtube.com/watch?v=V1vD...

    C’est ça un Winner : un Narcisse qui se croit libre alors qu’il n’est que le plus parfait produit humain du Capital, la Marchandise devenue Homme.



  • dimanche 20 janvier 2013 à 17h59, par NASA

    C’est pas possible !!! Je viens de lire l’édito du tromblon peroxydé là. Des textes j’en lis à la pelle, mais ce torchon est sans doute l’une des pires stupidité boursoufflée et prétentieuse que j’aie lue depuis longtemps. Les gars c’est pas sympa d’infliger de pareilles trucs à vos fidèles lecteurs....

    L’analyse sommaire mais percutant qu’en fait lun des commentateurs me semble taper dans le mille, cet étron éditorial est destiné à ceux qui n’en veulent, du genre des petits parvenus sans culture, mais qui, grâce à leur capacité d’adaptabilité au système, on su (wouah....) se hisser à une certaine hauteur dans la hiérarchie des zelés demeurés de ce système. Ils s’imaginent en être et pour tenter (en vain, forcément ...) de sauver les apparences, s’administrent à plus ou mins haute dose, l’ingurgitation de cette chose, croyant dur comme fer que voilà une des bibles des nouveaux maîtres à penser de la modernité joyeuse capitaliste...



  • dimanche 20 janvier 2013 à 23h37, par ZeroS

    Êtes-vous vraiment sûrs qu’il y a vraiment des gens qui achètent ce magazine autre que Lémi ?



  • mardi 29 janvier 2013 à 13h16, par le bédouin fou

    Waouh !

    Pour moi un magazine avec ce nom ne pouvait être que parodique. Surtout avec le trip bilingue, genre « les décideurs internationaux sont suspendus à nos articles ».

    Mais ils ont l’air sérieux comme des papes. La participation de Séguéla ne prouve rien, ce type est tellement narcissique qu’il est prêt à participer à n’importe quoi du moment que sa photo finisse sur papier glacé à côté de pub de luxe (de préférence Rollex). Alors soit c’est du premier degré, soit alors chapeau les artistes !

    Après avoir lu leur version en ligne, il est vrai que cette chose serait à sa place dans un avion avec les brochures Air France. On peut aussi dire qu’il s’agit d’un nouvel-obs réduit à l’essentiel, débarrassé du prétexte du journalisme, centré surtout sur un message clair (et brillant).

    Quand aux superbes éditos de Véra Baudey, j’ai l’impression de lire de la prose d’un générateur aléatoire de texte ou d’un traducteur automatique.

    Sinon merci de m’avoir fait découvert cette pépite de la presse et de votre analyse.



  • jeudi 18 juillet 2013 à 09h53, par Thess

    C’est un support de pubs à partager entre riches (« Tiens regarde, un article sur Jean-Marcel » « Il fait jeune sur la photo... par contre Vanina elle est trop retapée »). Le riche bosseur n’est pas reconnu dans l’espace public. Tout le monde se fiche de M. Fornas et de ses montres de lmuxe. Alors M. Forbas ne veut pas que de l’argent, il veut aussi l’affichage. Et pour ça, il y a Winner - et il est prêt à payer cher pour s’offrir ce luxe là, s’afficher dans l’espace public.

    Ensuite, pour ce qui est des contenus, ces gens ne réfléchissent pas, n’ont ni le temps ni le besoin de réfléchir. Pour pouvoir écouler leur came de montres à 10000 balles, ils n’ont pas eu à écrire une thèse en philosophie politique. Donc les contenus c’est juste les clichés habituels des dîners en ville de la haute. Et c’est redondant avec l’image : c’est so good d’être des winners, on se mire dans ces mots là. Avec en plus un petit bonus moral et politique à la clé : « si tout le monde serait comme nous, la terre sera composée de gens riches et beaux et heureux et qui bossent comme des dingues. »

    Au fond ils doivent bien savoir, quelque part, qu’ils se la racontent. Mais c’est vrai qu’ils bossent comme des dingues et que c’est vachement stressant. Alors bon, un petit plaisir narcissique, une fois par an, hein...



  • jeudi 27 juin 2019 à 06h45, par ss

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