ARTICLE11
 
 

mardi 13 avril 2010

Sur le terrain

posté à 15h08, par JBB
27 commentaires

Antiterrorisme : légalisation de l’arbitraire et extension de l’exception
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L’affaire dite de Tarnac en a été une parfaite illustration. Mais les occasions de pointer l’extension de l’arbitraire antiterroriste sont multiples, de l’affaire Chalabi dans les années 90 à l’interpellation récente de 200 manifestants. Au fil des ans et des lois, la législation d’exception est devenue norme, champ des poursuites s’étendant encore et encore. Le point sur la question, avec le Calas.

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Le genre d’invitation qui ne refuse pas : le Comité pour l’abrogation des lois antiterroristes (Calas) organisait hier une réunion publique, avec toute une brochette d’intervenants au programme. Pour être honnête, je m’y étais surtout rendu pour entendre Alain Badiou ; manque de pot, le philosophe ne s’est finalement pas pointé…
Mathieu Bonduelle, secrétaire général du Syndicat de la magistrature, Carlo Santulli, président de l’Observatoire juridique de la vie politique, et l’avocat Antoine Comte, l’un des animateurs du Calas, étaient bien là, eux. Tu pourras lire ci-dessous leurs trois interventions sur le sujet de l’antiterrorisme (de bonne qualité, même si ma préférence va à la dernière, celle de Mathieu Bonduelle). Je me suis par contre dispensé de prendre des notes pendant l’intervention des deux politiciennes invitées, des sénatrices ; je suis sûr que tu ne m’en tiendras pas rigueur… Dans le cas inverse, je te renvoie au résumé lapidaire de l’une de ces prises de parole sénatoriales par la camarade Antimollusque : « J’ai l’impression de recevoir l’ordonnance du dermato… »

Avant de plonger dans le compte-rendu, tu noteras combien le débat sur l’antiterrorisme semble être « passé de mode » depuis que Julien Coupat a été libéré ; un désintérêt regrettable tant le sujet est essentiel. Tu ne manqueras pas - aussi - d’aller faire un petit tour sur le site du Calas, pour te tenir au courant des publications et activités du comité. Et tu pourras enfin - si le cœur t’en dit - consulter cet autre compte-rendu publié par Article11 il y a un an, à l’occasion d’une conférence sur l’antiterrorisme donnée par le chercheur Laurent Bonneli et le juge Gilles Sainati.

Voilà. La parole est à eux1.

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Carlo Santulli : l’angle pénaliste

« Le concept d’infraction politique, qui est au cœur de la compréhension de la législation antiterroriste, a eu une vie agitée dans l’histoire pénale. Pour une bonne raison : il n’est pas simple d’appréhender le délit politique. Deux difficultés principales :
- Comment savoir quand une infraction devient politique ? Elle peut l’être par nature, ce qui simplifie la définition : trahison, espionnage, fraude électorale… Mais elle peut aussi être définie par des critères très subjectifs, en fonction du but poursuivi. L’infraction de droit commun devient alors politique en raison d’un contexte politique.
- Quand l’infraction politique apparaît, l’idéologie du droit pénal est de décourager l’éventuel auteur d’infraction avant sa commission, avec l’idée que la peine doit être sévère pour dissuader. Problème : celui qui cherche à changer le monde n’est pas découragé par une peine dissuasive. À la limite, on peut prendre l’exemple des attentats-suicides : leurs auteurs ont décidé de mourir pour leur cause ; autant dire qu’ils se préoccupent peu de la peine encourue…

Cette difficulté à appréhender l’infraction politique se traduit dans le double traitement - opposé par nature - qui lui est fait après la Deuxième Guerre mondiale. D’un côté, on traite l’infraction politique jugée grave comme du droit commun : il s’agit de rendre possible l’extradition3 de gens accusés de terrorisme. De l’autre côté, on crée une législation dérogatoire pour les personnes accusées de terrorisme. C’est dans ce « jonglage » entre le droit commun et la législation dérogatoire que se situe un évident paradoxe.

Outre ces deux directions opposées, la législation française a connu une évolution primordiale depuis 1986, et l’adoption d’un système spécial pour punir l’association de malfaiteurs en vue de commettre une infraction politique. Notez le « en vue de », qui rend dispensable l’acte préparatoire ; à la limite, notre réunion d’aujourd’hui pourrait être vue comme une tentative de ce genre…
Une infraction aussi large représente bien entendu un danger pour les libertés publiques, porte le risque tangible d’une dérive liberticide. Vous vous attendez à ce que je prenne l’affaire dite de Tarnac en exemple ? Je vais en citer une autre. Soit la décision prise le 8 octobre 2008 par le gouvernement britannique de saisir les comptes de la banque islandaise Landsbanki, pour éviter que les intérêts britanniques ne soient lésés dans sa faillite. Le gouvernement s’est appuyé sur une loi antiterroriste de 20014 pour bloquer l’argent. C’est très révélateur : la législation anti-terroriste est ainsi faite qu’elle peut être utilisée pour n’importe quoi, n’importe quand ; même en cas de crise financière… »

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Antoine Comte : de la contamination du droit commun par la législation d’exception

« Depuis la Révolution française coexistent dans la législation le droit commun et les lois d’exception. Ces lois d’exception établissent une incrimination spéciale, une juridiction spéciale et un traitement spécial de l’affaire. Les plus connues sont celles-ci :
- En 1893 et 1898 sont promulguées des grandes lois contre le mouvement anarchiste, dites lois scélérates. Elles introduisent la notion d’association de malfaiteurs et permettent de poursuivre les actes préparatoires. Alors que la « propagande par le fait » battait son plein, il s’agissait d’appréhender la préparation plutôt que l’acte lui-même.
- En 1963, la loi sur la sûreté de l’État créé une juridiction mi-civile mi-militaire pour juger les personnes accusées de porter atteinte à la sécurité de l’État. La procédure y est réduite, les peines beaucoup plus lourdes et l’appel impossible. François Mitterrand fait supprimer cette Cour de sûreté de l’État en 1981.
- Le 9 septembre 1986, une nouvelle loi définit le terrorisme comme « une entreprise individuelle ou collective tendant à troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur », avec une centralisation des poursuites à l’instruction et au jugement. Des juges spéciaux sont créés, qui vont devenir de véritables acteurs politiques. Quant aux jurés, ils sont supprimés.
Il faut noter que cette juridiction d’exception de 1986 ressemble à s’y méprendre aux juridictions d’exception de 1942, elle est constituée à peu près de la même manière. Il faut noter aussi les lourdes conséquences de cette juridiction d’exception pour les justiciables : garde-à-vue étendue à 96 heures en matière antiterroriste (contre 48 h pour le droit commun), puis à 144 h avec la loi de 2006 (c’est-à-dire six jours !), renforcement des pouvoirs policiers et de ceux des juges d’instruction, pouvoirs spéciaux accordés aux juges…

Vous devez aussi savoir que les progrès déterminés par des lois n’affectent jamais la législation antiterroriste. Ainsi, par exemple, de cette loi de mars 2007, censée corriger certains des dysfonctionnements de la justice constatés lors de l’affaire d’Outreau. Elle prévoit notamment l’enregistrement des débats chez le juge d’instruction et celui des gardes-à-vue dans les affaires criminelles, mais ne s’applique pas à l’antiterrorisme…
De façon générale, je crois que la division entre droit commun et lois d’exception n’existe plus aujourd’hui ; l’exception a gangrené le droit français. C’est particulièrement évident pour toutes les affaires qui touchent aux stupéfiants ou à la délinquance organisée5 : le régime de garde-à-vue y est de 96 heures (au lieu de 48 h). De la même manière, si le droit commun prévoit l’entretien avec un avocat dès la première heure de garde-à-vue, ce délai est porté à 48 h pour les affaires de proxénétisme, d’extorsion de fonds aggravée, d’association de malfaiteurs, de vol en bande organisée, de destruction, et à 72 h pour celles de terrorisme et de trafic de drogue.
Finalement, à part le fait d’assassiner son conjoint (où la garde-à-vue reste de 48 h et où un avocat peut intervenir dès la première heure), le traitement de droit commun a totalement disparu. La contamination est ainsi réalisée : le droit commun n’existe à peu près plus, techniquement parlant. C’est un mouvement de fond, initié de longue date. Après 1968, on avait déjà cherché à rendre terroriste - à terroriser, donc - le mouvement social : en 1977, la Convention européenne des droits de l’homme posait ainsi le principe que l’extradition est toujours valable en matière terroriste. En 2001, ce sont les lois Jospin-Vaillant, qui permettent le fichage d’à peu près tout le monde. Puis la loi Sarkozy sur la sécurité intérieure, les lois Perben I et II… vous en avez à la pelle !
La dernière en date est la loi de mars 2010 sur les bandes violentes. Avec, dès qu’elle a été votée, deux applications très révélatrices : l’arrestation d’une bande de jeunes à Châtelet et l’interpellation de toute une manifestation devant la prison de la Santé6. Toute personne présente à une manifestation peut être considérée comme potentiellement violente. C’est dramatique. »

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Mathieu Bonduelle : un régime d’exception, vraiment ?

« Il faut souligner un point essentiel : évoquer des détournements et des abus laisse entendre qu’il pourrait y avoir une bonne législation antiterroriste. C’est évidemment fallacieux : la législation antiterroriste est intrinsèquement mauvaise, car elle se fonde sur l’idée que plus on reproche un fait grave à quelqu’un, moins il est nécessaire de lui accorder des droits. Cette position va totalement contre l’héritage des Lumières, puisqu’elle pose qu’on peut priver de droit un homme soupçonné de faits graves et postule que la fin justifie les moyens.
Il y a un enjeu évident de qualification juridique des faits. Notez, d’ailleurs, que le terrorisme est le seul domaine de la loi française où l’on trouve un préfixe « anti ». Il n’y a pas de juges « anti-stupéfiants » ou « anti-délinquance organisée », mais il existe des policiers et des juges antiterroristes. C’est révélateur : en filigrane, il y a l’idée de guerre, la conviction qu’il faut tout faire pour lutter contre le terrorisme.

L’article 421-1 du Code pénal pose que constitue un acte de terrorisme toute « entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur ». Avant de détailler toutes les infractions pouvant en relever. Soit, entre autres : « les atteintes volontaires à la vie, les atteintes volontaires à l’intégrité de la personne, l’enlèvement et la séquestration ainsi que le détournement d’aéronef, de navire ou de tout autre moyen de transport », « les vols, les extorsions, les destructions, dégradations et détériorations », « le recel du produit de l’une des infractions » citées juste avant, « les infractions de blanchiment » et même « les délits d’initiés »… C’est un champ extrêmement large, absolument énorme !
Ce système apparaît d’emblée comme intrinsèquement abusif. Le fait de choisir d’écrire « ou » dans la définition (« par l’intimidation ou la terreur ») et celui de ne pas définir « l’intimidation » ni « la terreur » ne sont rien d’autre qu’une légalisation de l’arbitraire.

Mais toute la responsabilité n’en revient pas au législateur. Les juges ont l’habitude de se défausser sur le législateur, ce qui est mensonger : on ne peut pas exonérer l’institution judiciaire. Prenons l’exemple de l’affaire dite de Tarnac : les policiers ont vérifié certains faits, le Parquet de Paris a décidé d’embrayer en faisant rentrer ces faits dans le champ antiterroriste et le juge d’instruction a suivi. Mais ce dernier aurait pu dire non ! Il ne l’a pas fait. Au contraire, même, il a jugé utile de justifier longuement sa compétence…
L’antiterrorisme est ainsi une coproduction législative et judiciaire. Autre exemple : quand un juge interprète des propos de Jean-Marc Rouillan parus dans la presse, il le fait d’une certaine manière. Et cette manière n’est sûrement pas étrangère à son statut de juge anti-terroriste. Cette spécialisation pose ainsi un vrai problème, parce que les juges du pôle antiterroriste sont très marqués, très orientés. Ainsi du juge Bruguière, qui était notamment à la manœuvre lors du procès Chalabi : dans le cadre de cette affaire, 138 personnes ont été interpellées de 1994 à 1998 ; 51 d’entre elles ont finalement été innocentées, pour certaines après une détention longue de trois ans7. Le rôle du juge Bruguière a été déterminant, il a évidemment commis des abus. Mais il faut aussi souligner qu’on retrouve ces abus ailleurs que dans l’antiterrorisme : la détention provisoire est un problème en soi en France, indépendamment de toute notion antiterroriste.

Il faut enfin rappeler l’existence de cette circulaire de la Chancellerie qui, en juin 2008, stigmatise la mouvance anarcho-autonome : toute l’affaire de Tarnac est partie de là ! Ce sont les membres du Parquet - c’est-à-dire les procureurs - qui reçoivent ce genre de circulaire. Il ne faut pas s’étonner, ensuite, que ce même Parquet ait pris des référés-détention à chaque fois que le juge des libertés décidait de libérer ceux de Tarnac qui étaient en détention. »

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1 J’ai essayé de coller au mieux au texte des interventions, mais il y a forcément des raccourcis ou des maladresses dans ma retranscription. Par ailleurs, les notes de bas de page sont de mon fait.

2 Illustration piquée au Jura Libertaire.

3 En vertu de l’article 696-4 du Code de procédure pénal, l’extradition n’est pas accordée « lorsque le crime ou le délit a un caractère politique ou lorsqu’il résulte des circonstances que l’extradition est demandée dans un but politique ». En clair : les délinquants politiques ne peuvent théoriquement pas être extradés. Sauf… si l’infraction est grave, auquel cas elle est censée perdre son caractère politique. Je te cite ici un extrait de Jurispedia : « Dans un arrêt du 7 juillet 1978 (Croissant), le Conseil d’État a déclaré que le fait que les crimes reprochés auraient eu pour but de renverser l’ordre établi en Allemagne ne suffit pas, compte tenu de leur gravité, à leur conférer un caractère politique. Juridiquement, cette formule implique que le critère de l’infraction politique est le mobile, sauf si l’infraction reprochée est une infraction grave. A contrario, si une infraction est peu importante, mais accomplie dans un but politique, ce sera une infraction politique. »

4 Le 8 octobre, le gouvernement britannique a en effet décidé d’appliquer la loi anti-terroriste pour la sécurité de 2001 contre Landsbanki, donnant l’ordre de geler ses avoirs. Note que c’est la première (et unique fois) qu’un pays membre de l’OTAN utilise la législation antiterroriste contre un autre pays allié membre de l’OTAN.

5 Une incrimination très large puisqu’elle recouvre le vol et la séquestration en bande organisée, l’association de malfaiteurs, l’extorsion de fonds aggravée, le proxénétisme aggravé ou en bande organisée.

6 Je te renvoie pour cette dernière au très bon billet d’Ubifaciunt.

7 Le scandaleux cas du « réseau Chalabi » est ainsi évoqué par Human Rights Watch : « En novembre 1994, 93 personnes seront arrêtées en un seul jour, marquant le début d’une série d’arrestations qui se poursuivront pendant deux années et qui viseront des membres présumés d’un réseau de soutien aux combattants islamistes en Algérie. Le 25 juin 1995, 131 personnes seront arrêtées dans cinq villes différentes de France, à nouveau sur présomption d’implication dans une activité terroriste. En définitive, 138 personnes seront jugées en 1998 pour association avec un groupe terroriste, désigné en France sous le nom de ’réseau Chalabi’. En raison d’un manque d’espace au tribunal central, le procès extrêmement controversé se déroulera dans le gymnase d’une prison située en périphérie parisienne. Cinquante et une personnes seront relaxées, dans certains cas après une détention provisoire longue de trois ans, tandis que 87 seront reconnues coupables. Quatre autres seront acquittées en appel. Parmi les condamnés, 39 recevront des peines de moins de deux ans tandis que les quatre principaux accusés, dont Mohamed Chalabi, le chef présumé, seront condamnés à des peines allant de six à huit ans. »

8 Illustration trouvée sur le net ; je ne sais de qui elle est l’œuvre.


COMMENTAIRES

 


  • retranscription quasi intégrale des propos tenus par les trois intervenants. bravo.
    les sénatrices n’étaient là que pour se dédouaner des dérives législatives assumées par la gôôôche.
    manquait effectivement Badiou, mais aurait-il fait autre chose que son numéro ?!?
    pas de débat non plus faute de temps. les seules questions posées (4) relevaient du strict sort personnel de tel ou tel mais ne me semblaient pas à la hauteur des interventions liminaires.

    les parents des principaux mis en cause de l’affaire de Tarnac semblent accuser le coup. le soutien semble s’étioler. il faut réagir.

    ps : manquait aussi la sono.

    • « les sénatrices n’étaient là que pour se dédouaner des dérives législatives assumées par la gôôôche »

      C’est exactement ça. Un long bavassage pour condamner les errements du passé et promettre que, c’est juré, craché, la gauche allait changer pour peu qu’on vote pour elle. C’eut pu être rigolo si ça n’avait été aussi soporifique.

      « mais aurait-il fait autre chose que son numéro ?! »

      Oui mais justement : j’ai jamais vu son numéro. :-)

      « le soutien semble s’étioler. il faut réagir. »

      Je suis plutôt d’accord. Mais je ne vois guère comment.

      • je note juste que les initiatives du CALAS sont très espacées dans le temps et ne sont ni médiatisées ni « portées » par ses illustres fondateurs-signataires (il n’y a qu’à voir l’indigence de leur site),
        que les comités de soutien nés dans l’après 11 nov sont au point mort,
        que les principaux intéressés, en dehors des diatribes provocatrices du Monde et de Libé (merci Hazan), ne font pas montre d’une pédagogie extrême pour ce qui est d’exposer et expliciter leur point de vue.

        j’ajoute à cela que l’énergie dépensée pour tenter de débaucher leurs codétenus issus des quartiers « difficiles » (fallait pas...) l’a été en pure perte.

        Le racolage médiatique orchestré aux côtés de bouffons tels que Vallini, Mamère ou Hollande brouille encore les cartes. Certes, cela était sensé lisser l’image du gruppetto mais cela ne rassure pas ’l’électorat de base".

        en bref, et pour rejoindre ton scepticisme, on ne peut pas faire le bonheur des amis contre leur gré... mais il ne faudrait pas qu’ils oublient que leur initiative (présumée) a induit une démultiplication des surveillances et des arrestations qui nuisent à tout le champ contestataire. donc on aurait pu s’attendre à une sorte de retour d’ascenseur, et une implication totale dans la lutte contre ces dérives sécuritaires, non ?!

        • Je te rejoins sur une partie du constat (mais pas tout). Clair que la sauce ne prend pas et que les initiatives se font rares. Je n’y verrais pas la faute du Calas, qui fait ce qu’il peut, mais peut-être - comme tu l’indiques - celle de l’absence d’une voix claire et portant loin de la part des principaux intéressés. En même temps, ils n’ont jamais prétendu à ce rôle, n’ont pas revendiqué porter cette alternative que beaucoup de gens attendent. Ça me semble difficile de leur reprocher.

          Je crois qu’il y entre aussi la regrettable conséquence d’une longue médiatisation. Tant qu’il était emprisonné et évidente victime, le groupe de Tarnac a mobilisé beaucoup d’énergies et fait parler de lui. Une fois cette période passée, certains semblent leur en tiennent rigueur.

          Par contre, je te rejoins : la volonté de taper large n’était sans doute pas la meilleure des idées. Ni quand Vallini et Mamère se radinent, ni quand certains s’expriment aux Grandes Gueules de RMC. Mais là-encore, je dirais que ça les regarde : ils en ont suffisamment chié pour ne pas avoir à répondre du choix de leur stratégie. A mon sens, du moins.

          Dernier point :

          « il ne faudrait pas qu’ils oublient que leur initiative (présumée) a induit une démultiplication des surveillances et des arrestations qui nuisent à tout le champ contestataire. »

          Là, je ne suis pas du tout d’accord. Parce que tout semble montrer et démontrer qu’il n’y a pas eu d’initiative de leur part, que c’est un pur montage policier. S’ils sont victimes, je ne vois pas trop comment on peut leur reprocher l’extension à d’autres de ce qu’ils ont subi.

          Enfin, pour ce qui concerne Villiers, j’ai cru comprendre que c’était toujours en cours. Pour l’instant, ça n’a pas donné grand chose. Mais plus tard, qui sait ?



  • Politologue, le Dr. Lawrence Britt a écrit un article sur le fascisme (« Fascism Anyone ? », Free Inquiry, printemps 2003). En étudiant les régimes fascistes de Hitler (Allemagne), Mussolini (Italie), Franco (Espagne), Suharto (Indonésie), et Pinochet (Chili), le Dr. Britt a trouvé qu’ils avaient 14 éléments en commun : ce sont ce qu’il appelle les caractéristiques déterminantes du fascisme. Ces 14 caractéristiques sont :

     1°) UN NATIONALISME PUISSANT ET CONSTANT : Les régimes fascistes ont tendance à faire un usage incessant de maximes, slogans, symboles, et chants patriotiques, et autre bric à brac. Les drapeaux sont partout, ainsi que les symboles de drapeaux sur les vêtements et les affichages publics.

     2°) LE MÉPRIS POUR LA RECONNAISSANCE DES DROITS DE LA PERSONNE : Par peur d’ennemis et par besoin de sécurité, les gens dans les régimes fascistes sont persuadés que les droits de la personne peuvent être ignorés dans certains cas, « par nécessité ». Les gens ont tendance à regarder ailleurs ou même à approuver la torture, les exécutions sommaires, les assassinats, les longues incarcérations de prisonniers, etc.

     3°) L’IDENTIFICATION D’ENNEMIS OU DE BOUCS ÉMISSAIRES COMME CAUSE D’UNITÉ : Le besoin d’éliminer la menace ou l’adversaire communément perçus, minorités raciales, ethniques ou religieuses, libéraux, communistes, socialistes, terroristes, etc., rassemble les gens dans une frénésie patriotique.

     4°) LA SUPRÉMATIE DE L’ARMÉE : Même quand les problèmes intérieurs sont nombreux, l’armée se voit accorder un montant disproportionné des fonds gouvernementaux et les programmes intérieurs sont négligés. On valorise les soldats et le service armé.

     5°) UN SEXISME RÉPRESSIF : Les gouvernements des nations fascistes ont tendance à être presque exclusivement dominés par les hommes. Sous les régimes fascistes, les rôles sexués traditionnels sont plus rigides. L’opposition à l’avortement est élevée ainsi que l’homophobie, et la législation et la politique nationale anti-gays.

     6°) DES MÉDIAS DE MASSE SOUS CONTRÔLE : Quelquefois, les médias sont directement contrôlés par le gouvernement, mais dans d’autres cas, les médias sont contrôlés indirectement par une réglementation gouvernementale ou par des porte-parole et des dirigeants sympathiques (aux vues du gouvernement).

     7°) UNE OBSESSION AVEC LA SÉCURITÉ NATIONALE : La peur est utilisée par le gouvernement comme instrument pour motiver les masses.

     8°) L’AMALGAME DE LA RELIGION ET DU GOUVERNEMENT : Les gouvernements des nations fascistes ont tendance à utiliser la religion la plus répandue de la nation comme outil de manipulation de l’opinion publique. Les dirigeants du gouvernement font un usage courant de la rhétorique et de la terminologie religieuses, même quand les principaux credo de la religion sont diamétralement opposés aux politiques et aux actions du gouvernement.

     9°) LA PROTECTION DU POUVOIR DES ENTREPRISES : C’est souvent l’aristocratie de l’industrie et des affaires d’une nation fasciste qui a mis les dirigeants du gouvernement en place, créant ainsi une relation avantageuse entre les affaires et le gouvernement et pour l’élite du pouvoir.

     10°) LA SUPPRESSION DU POUVOIR DES TRAVAILLEURS : Parce que la seule menace pour un gouvernement fasciste est le pouvoir des organisations de travailleurs, les syndicats sont soit entièrement supprimés soit sévèrement réprimés.

     11°) LE MÉPRIS POUR LES INTELLECTUELS ET LES ARTS : Les nations fascistes ont tendance à promouvoir et à tolérer une hostilité ouverte envers l’éducation supérieure et le milieu universitaire. Il n’est pas rare de voir des professeurs et autres universitaires censurés ou même arrêtés. La libre expression dans les arts est ouvertement attaquée et les gouvernements refusent souvent de financer les arts.

     12°) UNE OBSESSION DU CRIME ET DU CHATIMENT : Dans les régimes fascistes, la police obtient des pouvoirs presque illimités pour faire respecter la loi. Les gens acceptent souvent de fermer les yeux sur les abus de la police et même de renoncer à des libertés civiles au nom du patriotisme. Le pouvoir de la police nationale est souvent pratiquement illimité dans les nations fascistes. ``

     13°) LE REGNE DU FAVORITISME ET DE LA CORRUPTION : Les régimes fascistes sont presque toujours gouvernés par des groupes d’amis et d’associés qui se nomment à des postes au gouvernement et utilisent l’autorité et le pouvoir du gouvernement pour protéger leurs amis de l’obligation de rendre des comptes. Dans les régimes fascistes, il n’est pas rare que les dirigeants au pouvoir s’approprient ou volent carrément des ressources ou même des trésors nationaux.

     14°) DES ÉLECTIONS FRAUDULEUSES : Quelquefois, les élections dans les nations fascistes sont complètement factices. D’autres fois, les élections sont manipulées grâce à des campagnes de salissage contre les candidats de l’opposition, voire leur assassinat, l’utilisation de la législation pour contrôler le nombre des votants ou les limites des circonscriptions et la manipulation des médias. Les nations fascistes utilisent aussi systématiquement leur systême judiciaire pour manipuler ou contrôler les élections.

    Si bien sur nous n’en sommes pas encore là, certaines de ces caractéristiques sont appliquées depuis pas mal de temps sans que grand monde ne s’en émeuve outre mesure. Ce qui me me laisse penser qu’il ne faudrait pas grand chose pour que le pas (de l’oie) soit franchie définitivement.

    • Oui, il y a pas mal de critères qui concordent.

      Après, je ne crois pas trop au retour du fascisme - du moins, pas sous ce nom ; je crains bien davantage ce mélange d’autoritarisme, de surveillance permanente, de victoire de l’ordre néo-libérale et de pulsions haineuses de la population. Là, on est déjà en plein dedans, et ça n’est pas prêt de s’arranger.

      • A ce propos, un très bon film allemand sur ce thème du retour du fascisme : « La Vague ».
        Un professeur de politique en Allemagne veut prouver à sa classe, sceptique, qu’un retour du fascisme est possible et entame donc une démonstration grandeur nature avec sa classe.

        Cdlmt

        • Merci pour la référence, je vais essayer de le mater. Dans un style semblable, il y a aussi Force de Frappe, de Peter Watkins. Peu connu, le film conte le refus spontané d’ouvriers de chantiers navals de prêter main-forte à l’industrie nucléaire, l’écrasement de leur mouvement, et la façon dont l’Etat en profite pour, en quelques jours, devenir plus qu’autoritaire, fasciste. Si ça t’intéresse, j’en avais fait un (modeste) compte-rendu ICI.

      • Exact, c’est la formule du néoconservatisme : un mélange d’autoritarisme réactionnaire, le retour des « bonnes vieilles valeurs », mêlé d’une intense promotion, concrète et idéologique, de l’ultra-libéralisme.

        L’autorité n’a plus pour fonction d’assurer la prédominance d’une caste raciale, politique ou sociale, comme dans les exemples de fascisme, mais d’assurer l’efficacité et la pérennité du système marchand et du pouvoir des oligarques.

        Ce système s’accomode très bien des identitatismes et des affrontements sociaux : il les gère comme des prétextes, des chiffons rouges ou des excuses. Il s’appuie sur ce qu’il exacerbe (les tensions sociales, les crispations idéologiques) pour fonder ses mesures liberticides, lesquelles servent en réalité les oligarques desquels les politiques sont clients.

        La législation applicable à la circulation des biens culturels sur internet est typique de cette démarche.

        • On assimile l’internaute à un délinquant - voire un criminel, et on propose des lois raccord.

          Les clébards du pouvoir défilent dans les médias pour expliquer que finalement, l’internaute qui télécharge, c’est un peu l’allié objectif des pédophiles et des islamistes.

          Des lois sont votées pour réprimer le comportement qu’on a opportunément qualifié d’immonde, afin de pérenniser les modèles économiques d’industries moribondes.

          La fabrication du terroriste est l’une des activités principales des pouvoirs occidentaux, aujourd’hui.

          • mercredi 21 avril 2010 à 17h27, par Dr Maboul

            Et à force de se faire traiter de terroristes les internautes répliquent (mais timidement).
            La dernière performance en date :
            le site de thalassa sur france3

            Mais on sait bien quels sont les groupes qui profitent le plus des peurs des français et n’hésitent pas à orchestrer de vraie panique comme pour la grippeA.

            A quand la comparution de Roselyne Bachelot devant un juge anti-terroriste ?
            D’ailleurs lors de cette campagne ignominieuse les gens refusant le vaccin était petit-à-petit assimilés à des terroristes qui mettaient gravement en danger l’ordre publique...
            petit récapitulatif

            PS : L’article doit avoir 15 jours et ça commente toujours... bravo JBB ! ;)



  • coupat est liberé ; il est plus en prison ok, mais est ce qu’il est toujours sous contrôle judiciaire ?



  • Merci pour le compte rendu de cette réunion publique.
    Finalement, je n’ai pas le déplacement...je préfère la montagne au mois de mai...

    Mais que peut-on attendre sincèrement des « officiels » ?

    Depuis ces dernières années, on vit des remakes de « section spéciale » à tours de bras...
    Tarnac, évidement et dernièrement, encore relaté chez A.11, le procès des tardivement présentés comme « présumés » incendiaires de Vincennes... et quand un manifestant perd un œil c’est encore, évidement, de sa faute ou de la faute du flash-ball qui, 8 fois sur 10, touche la tête... on devrait en faire une discipline olympique...champion de monde... pour le tonfa, ils s’exercent...(oui, c’est grotesque, ne regarde pas les 6’)

    Personne ne bouge, ni les politiques, ni les magistrats...

    • « pour le tonfa, ils s’exercent... »

      Rhhhhââââââ…

      Merci !

      (J’ai regardé les six minutes. Et me demande même si je ne vais pas m’en faire une deuxième fournée. Ce matraquage frénétique, mâtiné de pulsions majorettistes et de musique de daube, me met en joie. Beaucoup. Beaucoup beaucoup.)

      ((Sans déconner, y a même des spectateurs. Et ils applaudissent, en plus. Rhââââ…))

      « Personne ne bouge, ni les politiques, ni les magistrats... »

      Ben si : le mec au tonfa, il se remue bien, quand même…

       :-)

      • Re-merci à toi !

        Et ils applaudissent, en plus.

        Pareil !!!

        pulsions majorettistes et de musique de daube

        Et en rythme sur la techno wagnerienne... ;-)

        • mercredi 14 avril 2010 à 01h24, par un-e anonyme

          vous comprenez pas le grand art quand vous le voyez ! c est sur, avec vos claviers vous êtes plus rapides ! des poules devant un couteau !

          • à l’idolâtre anonyme du tonfa

            vous comprenez pas le grand art quand vous le voyez

            Ben généralement , quand je vois « le grand art » s’exprimer, c’est qu’il va s’écraser sur ma figure ou sur mon bras... et tu veux que je reste là à essayer de le comprendre ? Je ne m’appelle pas JC ...

            • mercredi 14 avril 2010 à 20h32, par A.S. Kerbadou

              Salut Fred !

              Merci, pour le tuyau tonfa.
              C’est qui JC ?

            • non il veut dire que le maniement du tonfa est vraiment un art, faisant partie de la vénérable discipline du « kobudō d’Okinawa ».

              si vous remarquez, le tonfa est avant tout une manivelle. Cela s’explique par le fait qu’à Okinawa, ile indépendante du japon jusqu’a 1872, le peuple était interdit de posséder des armes, de manière à ce qu’ils ne peuvent se rebeller contre leurs maitres japonais.

              à cause de cette interdiction, les gens d’okinawa ont commencé à developper des arts martiaux, pour pouvoir resister aux japonais, qui ne comprenaient pas d’armes traditionnelles, mais plutot des objets de la vie de tous les jours (sachant qu’a l’époque presque tout le monde était fermier). Pour cette raison, on trouve dans le Kobudo d’Okinawa le tonfa (manivelle, chose commune dans une ferme) mais aussi le « Bo », un long baton, le nunchaku (utilisé pour battre les céréales), le kama (une serpe), et l’« eku », (une pagaie)

              pour la meme raison, c’est à Okinawa qu’est né le « karate-do », ou la « voie de la main vide ».

              si les flics décident de détruire l’esprit de cet art martial et d’en faire un mauvais usage en l’utilisant pour attaquer, ce qui est interdit dans le kobudo aussi bien que dans le karate (qui doivent exclusivement être utilisés pour la défense ou pour aider quelqu’un en détresse) cela n’empêche qu’il s’agisse réellement d’un « grand art ».

              inscrit toi à un cours de kobudo ou de karate et t’apprendra aussi à t’en protéger :)

              Voir en ligne : le « grand art » version non flic

          • mercredi 14 avril 2010 à 20h24, par A.S. Kerbadou

            Je crois avoir compris.
            Le « grand art », c’est l’art de l’opéra-baston qui prend une dimension transcendante quand les artistes sont de vrais poulets noirs.

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