ARTICLE11
 
 

vendredi 10 avril 2009

Entretiens

posté à 09h58, par Lémi
25 commentaires

Mona Chollet : « Le triomphe de Sarkozy résulte d’une manipulation à grande échelle des imaginaires. »
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Le cerveau, ultime terre de liberté d’un hexagone qui se berlusconise à tout va ? Que nenni. Lui aussi est aux prises avec un adversaire de taille, truc visqueux et polluant qui s’immisce partout. Médias, communicants et politiques vandalisent notre imaginaire à la manière Sarkozy, souligne Mona Chollet dans « Rêves de droite, défaire l’imaginaire sarkozyste » ; et dans cet entretien qu’elle nous a gentiment accordé.

On croit connaitre tout ça sur le bout des doigts. Après tout, on est en terrain connu : la manière dont Sarkozy forge son image de conquérant via cet imaginaire bling bling décomplexé, on y est confronté tous les jours. Pourtant, en parcourant l’ouvrage que Mona Chollet, journaliste au Monde Diplomatique et animatrice du site Périphéries, a consacré au sujet, Rêves de droite, défaire l’imaginaire sarkozyste (éditions Zones), on se rend compte que c’est encore plus grave qu’on ne le pensait. Loin d’être une comète isolée dans le ciel criard des joutes médiatico-politiques, Sarkozy est bien l’aboutissement d’un processus rationnel, d’une manière de voir le monde. Il est le nom de quelque chose, pour reprendre la formulation d’Alain Badiou.
Au fil des pages, on hésite entre deux attitudes : sourire de la grossièreté des ficelles mises en œuvre (Ah, Sarkozy expliquant que lui aussi eu une enfance difficile, rappelant combien il souffrait de n’avoir que du saumon fumé ordinaire dans son frigo alors que tous ses amis de Neuilly mangeaient du saumon fumé made in Traiteur, c’est Cosette qu’on ressuscite) ou se lamenter de leur efficacité perverse (« La plèbe applaudit à la bonne blague de sa propre spoliation » car on lui « donne le sentiment d’en être. »).
Car c’est un fait : les exhibitions de luxe et les impudeurs répétées de Sarkozy sont pour l’instant une arme politique dévastatrice, remarquablement adaptée à notre époque et à son salmigondis médiatique. En faisant rêver sur son ascension, en racontant de « belles histoires » à la sauce TF1 (l’ascension du petit hongrois parti de rien ; Rachida, Rama et Fadela sorties de l’enfer des banlieues à force de volonté), en rentabilisant chaque occasion de mise en scène, Sarkozy a gagné la bataille des imaginaires. Dans l’affaire, c’est aussi une vision du monde décomplexée, rollexisée et dominatrice, qui s’est installée à l’Élysée. Pour Article11, Mona Chollet revient sur ce processus.

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Comment vous est venue l’idée d’écrire ce livre ?

Rêves de Droite est né d’un article que j’avais écrit sur Périphéries, juste après la présidentielle. J’y traçais les contours de cet imaginaires sarkozyste qui triomphait alors. Ça a attiré l’œil d’un éditeur qui m’a proposé de pousser les choses plus loin. Et puis, j’avais envie de creuser le sujet, ça faisait un moment que je m’interrogeais là-dessus. Il y a quelques années, j’avais aussi écrit un article sur Erin Brockovich, un film que je vois comme très représentatif de la manière dont on fait rêver les masses avec la réussite d’un individu, réussite permettant d’oublier l’injustice politique qui reste la règle pour la majorité.
Et puis, plus j’avançais et plus me rendais compte de l’efficacité de cet imaginaire qui joue sur des ressorts très primaires de l’être humain. Les ficelles sont grossières : le besoin de reconnaissance personnelle doublé d’un contenu matérialiste. Ce besoin de reconnaissance n’est d’ailleurs pas incompatible avec un contenu positif, mais la gauche l’a abandonné depuis trop longtemps. Si bien que la France, faute de modèle alternatif, n’est pas à l’abri de devenir l’Italie.

« Si bien que la France, faute de modèle alternatif, n’est pas à l’abri de devenir l’Italie. »

Selon vous, nous vivons dans une « société casino ». Comment la définiriez-vous ?

C’est une société dans laquelle il n’y a plus aucun projet commun, dans laquelle il ne reste plus que des individus qui chacun tentent leur chance. C’est une sorte de grande loterie. Et ça, ça ne peut pas faire une société viable.

Ou situez-vous les origines de ce triomphe de l’imaginaire sarkozyste telle que vous le décrivez ?

Il faudrait être un historien pour répondre précisément à cette question. Mais c’était probablement en germe depuis l’après-guerre. A partir du moment où il y a eu un essor de la société de consommation et de l’audiovisuel, cet imaginaire a commencé à s’imposer. Et bien sûr, il a triomphé dans les années 1980, les années du fric-roi.
A ce sujet, il y a un texte de Pasolini qui m’a beaucoup marqué. C’est un texte sur la télévision publié dans les « Écrits Corsaires » : Pasolini en parle comme d’une espèce de bombe nucléaire culturelle. Pour lui, la télévision est une manière d’éradiquer complètement la culture propre des gens et de la remplacer par un imaginaire uniformisé et petit-bourgeois qui leur enlève toute estime d’eux-mêmes. C’est un texte très fort, surtout quand on pense à ce qui s’est passé ensuite en Italie avec Berlusconi.

Donc il y a sur cette question un poids énorme des médias de masse et de la pub ?

A partir du moment où des médias de masse propagent un univers de valeurs, de désirs et de rêves complètement aliénés, c’est évident que ça a une énorme influence sur les gens. On voit très bien cette idée d’espèce de confort industriel qui prend le pas sur tout, s’impose dans notre société via la pub et les médias. On rend désirable des choses secondaires, avec une forme de tyrannie du « neuf », du « dernier cri » : il faut donner l’impression aux gens que ce qu’ils ont eux-mêmes est vieux, dépassé, démodé. Et qu’ils doivent acheter pour compenser. Sur la longueur, tout ce que les gens avaient comme culture propre, comme estime d’eux-mêmes, a été détruit, remplacé par la consommation. Désormais, la question est : comment reconstruire ça ?

Il y a dans votre approche de la consommation, quelque chose qui fait penser aux situs, notamment à leur analyse du « spectacle ».

C’est vrai que tout ça a déjà été dit. En 68 et dans les années qui ont suivi, il y a eu énormément de mises en évidence de tout ça. Mais depuis c’est un peu tombé en désuétude.
Et puis, nous sommes dans une culture de gauche particulière, qui méprise l’imaginaire. Cette culture donne parfois l’impression qu’il suffit de dénoncer l’exploitation pour que les gens se révoltent. On aligne des chiffres et des données économiques pour montrer une injustice flagrante, mais on se méfie de l’imaginaire. Je pense que c’est contre-productif.

« A gauche, on se méfie de l’imaginaire. Je pense que c’est contre-productif. »

Vous faites un « portrait de la gauche en hérisson » : «  la gauche se vit comme un camp retranché : tenter la moindre sortie serait courir le risque de se trouver en terrain ennemi. »

La critique de la consommation a été beaucoup récupérée, y compris par la consommation elle-même. Du coup, il y a une énorme méfiance, une sorte d’ascétisme. Tout devient potentiellement source de trahison, de récupération, si bien qu’on se replie vraiment sur le strict minimum. On est tellement dans une logique de méfiance – justifiée, en un sens – qu’on se réfugie dans l’intellect pur, et ça c’est dommage. Il ne s’agit pas de remplacer un imaginaire manipulateur par un autre, mais d’être attentif aux représentations que les gens se prennent en plein visage en permanence, et de l’effet que ça peut avoir.

Les créateurs d’imaginaire - la pub ou les médias de masse - sont aux mains des pouvoirs économiques et politiques en place, au premier rang desquels Sarkozy. Quelle image de lui même cherche-t-il à mettre en avant ?

C’est sûr que c’est une énorme machine de guerre. On a beaucoup parlé de l’omniprésence de Sarkozy dans les médias pendant la campagne et quand il était ministre de l’intérieur. Mais j’ai l’impression que même les émissions qui ne parlaient pas de Sarkozy faisaient campagne pour lui…
C’est le même genre de personnage que Berlusconi : il invite à s’identifier à lui en tant qu’individu, pas en tant qu’incarnation de la nation. Il veut être vu comme un individu parmi d’autres auquel on pourrait s’identifier, comme quelqu’un de normal qui a réussi dans la vie.
Je pense même qu’il y a une espèce d’allergie à la politique chez Sarkozy, c’est très frappant. Il est incapable de passer au niveau supérieur, d’avoir une réflexion en surplomb, une réflexion politique. On voit bien comment il fonctionne : il y a un fait divers, il faut faire une loi. Il ne peut penser que dans le particulier, au coup par coup.

« Je pense même qu’il y a une espèce d’allergie à la politique chez Sarkozy, c’est très frappant. »

Pourquoi est-ce si efficace ?

Je ne suis pas sûre que ce soit très efficace. Reste qu’il a gagné les présidentielles avec cette image. Après, si on avait eu un vrai candidat de gauche – c’est triste à dire – ça se serait sans doute passé autrement. Disons que, par défaut, ça marche très bien.
Il y a en outre une logique médiatique très perverse dans la mesure où les médias sont demandeurs de personnages comme ça. Comme Royal se situait également sur ce terrain-là, il ne pouvait pas perdre : il y excelle.

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L’affronter sur son terrain est obligatoire ?

Personne ne le sait. A gauche, ceux qui essaient de revenir sur un terrain politique, de ne pas prendre les gens pour des imbéciles et de ne pas se comporter en vedettes du show-biz sont ringards (parce qu’il y a une vraie obsolescence dans la manière de faire de la politique) ou ringardisés par les critères médiatiques. Le système est peut-être trop verrouillé. C’est un peu déprimant…

Comment s’impose cet imaginaire sarkozyste ?

Jusqu’à ce qu’il change un peu de stratégie, je pense que Sarkozy misait sur le fait que les gens s’identifiaient à lui, qu’il allait leur en mettre plein la vue. Qu’ils allaient rêver en contemplant sa vie à lui et oublier leur propre vie.
C’est aussi un discours très culpabilisant. Il y a une manière de dire : « Si je suis arrivé là où je suis, c’est uniquement grâce à mes propres efforts et mon travail ». Et donc : « Si vous n’y arrivez pas, c’est de votre faute. » Il y a chez Sarkozy une volonté de gommer tous les déterminants sociaux qui lui ont permis d’en arriver là ; c’est pourtant moins difficile de devenir président de la République si on vient de Neuilly que si on vient de Saint-Denis.
C’est la même chose avec ses ministres. Rachida Dati en est l’exemple parfait. En la nommant, l’idée était de donner l’impression d’une méritocratie parfaite, sans discriminations sociales ou culturelles. Le grand slogan étant « quand on veut on peut », ce qui est évidemment une escroquerie totale. C’est une manière de réduire au silence ceux qui auraient pu critiquer cette richesse insolente étalée par ailleurs.

« Il y a chez Sarkozy une volonté de gommer tous les déterminants sociaux qui lui ont permis d’en arriver là. »

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Le fait que Dati soit d’origine maghrébine va en ce sens ?

Bien sûr, c’est symbolique. Elle est chargée de mettre en œuvre les mesures frappant d’abord les plus pauvres, donc beaucoup de gens de la même origine qu’elle, par la force des choses. Une catégorie sociale qu’on fait justement rêver en lui donnant en spectacle la réussite de Rachida Dati.
Les « belles histoires » incarnées par Rama Yade ou Rachida Dati soulignent le fait qu’il y a un problème d’intégration en France. Normalement, ce devrait être une banalité et elles des ministres comme les autres. Qu’une personnalité politique soit noire ou arabe ne devrait pas faire les gros titres.

Je n’ai pas vu « Slumdog Millionaire », donc je peux me tromper, mais il me semble que c’est exactement la même logique : c’est un gamin des bidonvilles qui s’en sort, devient riche, et tous les gens qu’il a laissés dans le bidonville sont censés oublier leur malheur en contemplant sa réussite. C’est la mort absolue de la politique. Il y a eu un très beau texte d’Arundhati Roy sur ce sujet, expliquant que si on avait que ça comme espoir à offrir aux gens, c’était vraiment pathétique.

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Comment en est-on arrivé à cet règne sans partage du matérialisme ?

Le spectacle prend toute la place. On préfère donner en pâture l’espèce de richesse extravagante et de luxe d’une infime minorité plutôt que de proposer des conditions de vie décentes pour tout le monde, mais pas très spectaculaires. Les médias aiment le spectaculaire, les belles histoires. C’est ça qui nourrit les machines, ce que décrit très bien Christian Salmon dans « Storytelling ».
Un projet de société où les gens vivent modestement ne sera jamais mis en avant. Malgré tout, il faut signaler le retour d’un discours – encore modéré – prônant une certaine forme de frugalité. On voit ça par exemple dans la presse anglo-saxonne. Il y a un type aux États-Unis qui est devenu une star parce qu’il construit de minuscules maisons en bois de 15 m2. Sauf qu’à l’arrivée, ce genre de discours est aussi une manière d’éluder les inégalités, de dire aux gens : « Vous n’avez rien mais c’est très bien comme ça, et en plus c’est écolo, vous allez sauver la planète… »

Le nerf de la guerre, ce ne serait pas le fait que les inégalités croissantes sont de mieux en mieux acceptées ?

Oui. On parvient à ça en jouant sur deux ressorts. D’abord, on table sur le fait que les gens vont complètement s’oublier eux-mêmes dans le spectacle. Et puis on les culpabilise en disant : « Si vous n’êtes pas riches c’est de votre faute. » C’est stupide, mais pour le moment ça marche. Même s’il y a eu un début de prise de conscience et même si Sarkozy a un peu changé d’approche ces derniers temps, jouant profil bas.

Ce revirement expliquerait la disgrâce de Dati, celle que vous appelez « la machine de guerre fictionnelle » ?

Je pense que c’est lié. Elle a surement trop étalé ce côté-là, il y avait des limites, Sarkozy l’a finalement compris.
Et pourtant, je pense que ce sont des gens qui sont eux-mêmes imprégnés de ces schémas de pensée. Sarkozy et Dati sont complètement « prisonniers » de cet imaginaire. Ils ont une joie sincère à s’exhiber sur des yachts et à poser en Saint-Laurent dans un palace. C’est leur vision de la vie et de la réussite.

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Cet imaginaire peut-il tomber en disgrâce ? Dans ce cas, par quoi le remplacer ?

À un moment, ça ne fonctionnera certainement plus du tout. Mais alors : quel autre modèle de bonheur et de vie en commun proposer ? Il est à réinventer. On a des repoussoirs mais pas vraiment de propositions inverses. C’est quelque chose que j’ai découvert lors de l’écriture de ce livre : il était vraiment évident de pointer les différents composants de cet imaginaire qui s’est imposé en France, beaucoup moins de proposer un autre modèle.
En outre, très peu de gens peuvent véritablement se revendiquer comme hors de portée de cet imaginaire. On est tous contaminés, au moins un peu. Et la nouvelle génération politique est nourrie de ça, transporte ce modèle avec elle.

François Ruffin cite dans « La Guerre des Classes » cette déclaration de Warren Buffet, le deuxième homme le plus riche du monde : « C’est évident qu’il y a une guerre des classes et que c’est la mienne qui est en train de la gagner. » Ça vous inspire quoi ?

C’est certain qu’il y a une très forte conscience de classe chez les plus riches et qu’elle a été totalement détruite chez les plus pauvres. Il y a un énorme déséquilibre. Dans le miroir, les riches ont droit à un reflet ultra valorisant ; par contre, dans ce même miroir, les classes populaires ou moyennes ne voient plus rien, ou alors une sorte de reflet brouillé. On leur agite des modèles de réussite trompeurs qui débouchent sur la culpabilisation et l’oubli de leur identité. L’enjeu serait de retrouver des images plus valorisantes.

« Quand elles se regardent dans le miroir, les classes populaires ou moyennes ne voient plus rien, ou alors une sorte de reflet brouillé. »

Ici, au Diplo, j’ai bossé sur un numéro de Manière de Voir intitulé « Les Révoltés du travail ». On l’a illustré avec des images de film. Pour le préparer, j’ai vu plein de films, notamment ceux de Jean Renoir dans les années 1930 (« La vie est à nous » et « Le crime de Monsieur Lange »). Et je trouvais ça fou : à l’époque, tous les grands créateurs étaient du côté du peuple. Il y avait une effervescence politique autour des ouvriers qui englobait des œuvres culturelles très valorisantes. Les prolétaires étaient des héros, ils avaient une conscience très forte, une fierté, une solidarité.
Et j’ai l’impression qu’avec le temps on est passé de Jean Renoir aux Deschiens. Et qui a envie d’être un Deschien ?

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Vous décrivez des médias très complaisants. Comment inverser la tendance ?

Moi je suis une inconditionnelle d’Internet. D’ailleurs mon premier livre1 parlait de ça, décrivait Internet comme un lieu providentiel. Bien sûr, il y a des limites, tout le monde n’y a pas accès, et tout le monde ne l’utilise pas pour chercher de l’information différente. Mais c’est une possibilité magnifique.
Et je ne crois pas au discours des gens disant « s’il n’y avait pas Internet on serait déjà tous dans la rue en train de faire la révolution ». S’il n’y avait pas Internet, on serait devant la télé ! Bien sûr, il faut une démarche et une curiosité, mais c’est pareil pour tout.

Quel est le propos de votre deuxième livre, « La Tyrannie de la réalité » ?

C’est une critique du réalisme. Il s’attaque à ce discours omniprésent affirmant : « Il faut être réaliste, regarder les choses en face ». Pour moi, cela relève de l’arnaque. Ça présuppose que nous ne participions pas de la réalité, que nous serions dans une position d’extériorité. Dans ce livre, je montre comment le principe de réalité s’est construit comme une arme utilisée contre les gens. Pour cela, j’ai cherché à remonter aux sources de cette vision des choses, qui est très occidentale et pseudo-rationnelle.

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Cela rejoint la pensées de certains auteurs contemporains qui affirment qu’on ne peut plus penser les choses uniquement au niveau politique, qu’il faut remonter au niveau anthropologique : repenser complètement des choses qui nous apparaissent évidentes, les rapports des individus entre eux, des individus à la nature. A ce sujet, des auteurs comme François Flahault ou Jacques Généreux (notamment dans « La dissociété », un livre très important) ont écrit des choses fondamentales. Pour eux, le libéralisme et la droite prospèrent sur des conceptions philosophiques, des visions du monde et de l’humain, qui sous-tendent toute notre modernité. La droite pousse ces conceptions à l’extrême, mais c’est un arrière-fond sociétal. Toute notre pensée moderne est conditionnée par ça, même à gauche, et c’est là qu’il faudrait reconstruire la pensée critique.



1 Marchands et citoyens, la guerre de l’Internet, l’Atalante, 2001.

2 Également publié en poche, chez Gallimard Folio.


COMMENTAIRES

 


  • Merci.
    Comme c’est vrai, pas réel hein vrai, tout juste.

    Voir en ligne : La lettre de mh,



  • « je trouvais ça fou : à l’époque, tous les grands créateurs étaient du côté du peuple. »

    Tandis que maintenant ils soutiennent Sarko. Montagné, Johnny , Clavier, Bigard, Barbelivien, Macias ...que des pointures !



  • « remonter au niveau anthropologique » ? Tout à fait d’accord, mais le capitalisme va vous écrabouiller tout ça bien gentiment. Pas question pour lui de remonter nulle part, on n’est pas des saumons, et il ne connaît que la marche avant. Vous pouvez lui opposer à peu près tout et n’importe quoi, votre bonne conscience, votre mauvaise conscience, votre humanisme, vos utopies, vos constats des catastrophes, vos cris d’alarme, votre bon sens et l’âge du capitaine, qu’importe ! Il récupère, détourne, déforme, trahit, abuse, accapare, violente, massacre, élimine tout sur son passage. C’’est Attila, le capitalisme, après lui l’herbe ne repousse plus. Je dis ça en pensant aux années 60 qui virent le mobilier breton remplacé par le formica. C’était formidable le formica ! Personne ne s’en souvient et c’est bien dommage, car on ne mesure pas à quel point le progrès technique est dérisoire.

    • vendredi 10 avril 2009 à 17h22, par Lémi

      « C’est Attila, le capitalisme, après lui l’herbe ne repousse plus » :

      24 juin 1451 : Attila se fait éclatouiller en beauté aux Champs Catalauniques.
      Mars 2005 : naissance du Nouvel Attila, journal littéraire de très bonne facture.
      CQFD : le capitalisme finira bien par morfler, il faut être patient c’est tout...

    • vendredi 10 avril 2009 à 19h00, par Luc Nemeth

      bien qu’en accord sur de nombreux points avec cet article je suis d’accord aussi avec Crapaud rouge là où il tique, à propos de l’illusion qu’il y aurait à vouloir remonter au niveau anthropologique. Car, à de rares exceptions près : on peut... toujours, remonter au niveau anthropologique, dès lors qu’un comportement humain existe. D’ailleurs c’est bien là ce que font les gens-de-droite avec leurs phrases qui commencent par des « vous pouvez pas nier que », qui sont autant d’appels à une prétendue nature humaine. Et sur le terrain savant ce fut bien là ce qui en son temps causa la perte, de ce qu’on appelait la « psychologie des instincts ». Un individu restait-il dans son coin ? Pas de problème, on appelait çà : l’instinct de solitude. Préférait-il au contraire la compagnie -même des pires, de ses semblables ? Pas de problème : c’était l’instinct grégaire ! Et peu à peu on avait fini par identifier à peu près autant d’instincts-sic, qu’il y avait de comportements observés...

      • vendredi 10 avril 2009 à 22h56, par Crapaud Rouge

        En un sens, on peut toujours, en effet, « remonter au niveau anthropologique », comme le font E. Todd et quelques autres penseurs qui finiront bien par inspirer des hommes, (et des femmes !) politiques. Mais ça restera au niveau de la pensée, des conceptions et des modèles. En pratique, et bien que l’histoire se répète, on ne revient jamais tout à fait en arrière. Or, ce que l’on constate, c’est que les liens sociaux n’ont cessé de se distendre par l’effet du progrès technique, en particulier par les réseaux : le train, l’électricité, le téléphone, la bagnole et maintenant internet ont « facilité les communications », mais au détriment des liens naturels qui, eux, n’en avaient pas besoin. Maintenant, vous pouvez discuter depuis Paris avec un Pékinois, mais vous ne discutez jamais avec votre voisin de palier. Les liens qu’on entretient ne sont plus liés au lieu où l’on vit, mais aux moyens dont on dispose pour communiquer et se déplacer : ils sont eux aussi « délocalisés ». L’être ensemble dont se targuait Sarko n’est que celui de la foule, anonyme et sans saveur. Ce qui manque, c’est « être ensemble » au sens de vivre ensemble dans le même lieu : je crois qu’on ne sait plus faire. A cet égard, l’estimation de l’intensité des fêtes collectives est un excellent thermomètre, qui indique malheureusement une température toujours inférieure à zéro.

        • samedi 11 avril 2009 à 08h55, par Lémi

          @ Luc Nemeth
          Je ne connais pas assez le sujet pour en parler vraiment, je n’ai pas lu les livres dont Mona parle et même Todt reste scandaleusement ignoré dans ma pile de bouquins à lire... Pourtant, je crois que cette incitation à remonter plus loin ne relève pas d’une injonction impérative qui constituerait la solution miracle, plutôt d’un encouragement à englober dans les débats des choses qui étaient ignorées auparavant. On ne peut nier la faillite du politique aujourd’hui. Peut être justement parce qu’il néglige l’humain, la vie et se concentre sur le contingent. (perso, c’est pour ça que les situs me fascinent, parce que leur approche politique était indissociable de la Vie). En un sens, j’y verrais seulement un appel à creuser des questions capables de redonner du sens à la politique.

          @ Crapaud rouge
          Tout à fait d’accord. Le leurre technologique, sous couvert d’incitation à la communication, de progrès social, souligne chaque jour davantage la faillite du vivre ensemble. Il y a là aussi une critique à élaborer (sans tomber dans le piège du poujadisme anti-progrès) et cela inspire généralement peu (à la notable exception du groupe Pièces et Main d’oeuvre).

          « L’être ensemble dont se targuait Sarko n’est que celui de la foule, anonyme et sans saveur. » : oui, un bon citoyen est un veau incapable de communiquer au sens vrai du terme, surement pas quelqu’un doté d’une personnalité. On annonce d’ailleurs des tests de personnalité obligatoire à partir de 6 mois : seront mis sous Ritaline et placés en classe de rééducation civique intensive les marmots ayant fait preuve d’une personnalité trop exubérante. (perso, je te passerais tout ça au karcher et qu’on en parle plus.)

          • samedi 11 avril 2009 à 11h44, par L. Nemeth

            je ne suis pas sûr, Lémi, que les situs aient voulu « redonner du sens » (?) à la politique, mais bon, j’en resterai à ce qui me heurte un peu, dans toute approche de type anthropologique : le risque existe toujours de faire le jeu de l’adversaire, en présentant celui-ci comme une réalité incontournable -parce que s’appuyant sur une prétendue nature humaine. Mais précisément, à la différence des espèces animales, l’espèce humaine écrit sa propre histoire : sinon, en allant contre la Nature, du moins, en s’affranchissant largement des contingences. Bref, et pour le dire autrement : si la nature de l’homme est d’être un animal social (quoi qu’en disent, même les plus endurcis des porteurs de Rolex), la construction sociale qui en découle ensuite n’est qu’artifice -au sens le plus élevé du terme. De mon point de vue ce sont même les situs qui d’une phrase, que je vous cite de mémoire, ont été parmi ceux qui ont le mieux exprimé ce caractère de construction : « ce qu’on appelle aujourd’hui naturel est à peu près aussi naturel, que le fond de teint naturel des parfumeurs ».

            • dimanche 12 avril 2009 à 21h58, par Lémi

              @ Luc Nemeth
              Pour les situs, je ne parlais que de mon expérience. A un moment, ils m’ont aidé à ouvrir la boite de conserve politique sur laquelle je m’escrimais en vain (et m’escrime encore), mais c’est juste une expérience personnelle liée à mon cerveau dégénéré. Comme toi, je pense pas qu’ils aient « voulu redonner du sens » à la politique, loin de là.

              « Bref, et pour le dire autrement : si la nature de l’homme est d’être un animal social, la construction sociale qui en découle ensuite n’est qu’artifice » : c’est bien ça, il me semble, que l’approche anthropologique pourrait mettre à jour, cet artifice que l’on nous présente comme naturel. Creuser dans l’amas de constructions posées comme inquestionnables. C’est bien sûr digne des écuries d’Augias comme boulot, mais c’est finalement un premier pas pour remettre en cause réellement la base d’une société qui n’a rien de naturel. Après, je le répète, ne connaissant pas assez les auteurs cités et leur approche, je reste prudent...

              • mardi 14 avril 2009 à 11h05, par Luc

                @Lémi

                Le travail qui consiste à mettre à jour ce qui se donne pour « naturel » -mais ne l’est pas du tout- a été amorcé il me semble par des anthropologues (j’ai en tête le nom de Pierre Clastres), qui prenaient pour objet d’étude la société, avec tout ce qu’elle comporte de comportements durables ; et leurs travaux ont été bien reçus par le public auquel ils s’adressaient en priorité. Mais là où je suis plus réservé c’est lorsqu’il s’agit d’appliquer cette même approche à des réalités plus aléatoires, comme par exemple une élection présidentielle. Sachant qu’en France en 2007 le vainqueur n’a obtenu que 53% des suffrages exprimés, et qu’il aurait très bien pu perdre s’il avait eu face à lui un(e) adversaire crédible : nul doute que dans cette seconde hypothèse on aurait alors pu trouver des arguments de type anthropologique, venus expliquer le résultat inverse... Mon impression est que ces arguments, si parfois ils « sonnent juste » (la même remarque vaut aussi et à peu de choses près pour ceux de la prétendue psychologie des peuples), servent surtout à se faire « plaisir », ne font jamais que fonctionner comme une pseudo-explication, et qui au mieux décrit, plus qu’elle n’explique.

          • samedi 11 avril 2009 à 14h49, par Crapaud Rouge

            De Pièces et Main d’œuvre je viens de lire « De Toulouse à Gaza - Les nanotechnologies, ça sert à faire la guerre » : désespérant ! Sauf la fin, avec la citation du « chercheur déserteur » qui a fait comme Grothendieck. Avec les nanotechnologies, les scientifiques ne sont plus dans la recherche pure, « à haute valeur morale ajoutée », mais dans la basse ingénierie, fût-elle de haut niveau. Ils vont nous refaire à grande échelle ce qui est arrivé avec le téléphone portable, cette application qui bouleverse tout, au niveau anthropologique, et nous fut imposée sans débat ni contestation possible.

            Mais ce « niveau anthropologique » n’est-il pas déjà assez profondément bouleversé pour que tout le monde aille finalement dans le même sens puisque, dans tous les domaines et d’un bout à l’autre de l’échelle sociale, tout se passe comme si personne ne se rendait compte de rien ? D’où la question : de quoi faudrait-il prendre conscience ? Réponse dans cette question de l’article cité : « Vous dites que l’histoire désormais est principalement condensée dans « l’accélération technologique ». De nos jours, l’essentiel des évolutions de société se jouerait à ce niveau, ce serait le point déterminant de l’histoire ? », et réponse de la réponse : « Apparemment, il faudra aller au pire, pour savoir quel était « le point déterminant » de cette histoire. » Effectivement, car l’innovation, la cupidité, l’inconscience, la complexité, l’absence de pilotage, la nécessité immédiate, la concurrence, tout converge pour que le monde continue sur le chemin où l’Occident la lancé. Le point déterminant serait que l’élite prenne conscience qu’un point déterminant a déjà été franchi. A mon avis, ce point déterminant c’est que la société de plus en plus artificielle dans laquelle nous sommes plongée est en train de devenir « naturelle », c’est-à-dire le produit de la nature, mais entendue dans un sens plus large qui déborde l’anthropologie. Autrement dit, d’une certaine manière, ce ne sont pas nous, les humains, qui fabriquons « le système », mais la nature elle-même. (Laquelle ne peut pas s’autodétruire, elle reste « la nature » quoiqu’il advienne.) Et nous sommes dans ce système comme les animaux dans la jungle. Les sociétés de jadis étaient « contrôlables », - par le respect des traditions -, celles d’aujourd’hui ne le sont plus.

            • dimanche 12 avril 2009 à 22h10, par Lémi

              Oui, la lecture des livres de PMO est aussi nécessaire qu’anxiogène (je viens de lire celui sur les téléphones portables, efficace et glaçant)...

              Pour ta théorie, j’ai un peu du mal à suivre un point de ton raisonnement. Ok pour dire que l’on a d’une certaine manière perdu le contrôle, ça s’emballe et on n’a plus prise car on ne sait pas arrêter les machines. Mais en quoi serait-ce une évolution relevant du naturel ? En quoi cela prouverait-il que la nature a repris le dessus ? A mon sens, la nature aura repris le dessus d’ici bientôt, c’est sûr, mais il faut quand même attendre que l’on s’auto détruise joyeusement (chassez le naturel, il revient au galop chevauchant une ogive nucléaire...). Nous sommes bien comme des animaux dans la jungle, mais cette jungle est en plastoc, c’est nous qui l’avons fabriquée.



  • Un p’tit commentaire pour abonder dans le sens de ce que défend Mona Chollet dans cet article...

    Il ne me semble pas que l’on puisse associer uniquement à la droite cette importation du modèle du self-made man - ou du modèle berlusconien - si on identifie pas les imaginaires sociaux qui sont les vraies victimes de la pression médiatique et politique que Mona dénonce justement...

    Plus que l’influence d’un matérialisme qu’on pourrait associer à une période historique particulière (les 30 glorieuses), pourrait-on envisager que la déconnexion entre l’évolution démocratique (est-il besoin de rappeler les errements qui conduisent au coup d’Etat gaulliste de 58...) et le développement économique (vers le libre-échange à l’échelle continentale) de la France d’après-guerre explique le peu de considération d’une élite politique et économique pour ce que produisent dans le quotidien les « forces vives » de la nation que représentent les associations, les syndicats et les partis politiques dans leur base militante, à savoir la culture et l’éducation populaire.

    Cette contradiction entre un modèle économique libéral et une évolution démocratique conservatrice non assumée est le véritable drame historique que traverse la France (et le monde...) depuis l’après-guerre, et elle explique la lente déconnexion entre les partis de gauche (vers un post-modernisme élitiste) et la réalité multiple et complexe du corps social : déconnexion avérée dès la guerre d’Algérie, poursuivie sans complexe pendant mai 68 et couronnée (paradoxalement) par l’arrivée au pouvoir de Mitterrand en 81.

    Il faut savoir être gré à la droite et à son champion du moment, Nicolas Sarkozy, d’avoir su rappeler opportunément aux « partis progressistes » leur propre abdication aux idéaux qu’ils prétendent encore défendre, en particulier sur la question de l’immigration.

    Ce que j’essaie de dénoncer, peut-être de manière ampoulée, concerne la remise en cause du lien entre les institutions de l’Etat et tout le réseau associatif qui, avait obtenu depuis 1945 la reconnaissance et les moyens nécessaires pour défendre les pratiques et les valeurs portées par l’éducation populaire ( : mouvements féministe, écologiste, culturel et socio-culturel, d’action sociale et de santé, planning familial...) et animateurs de la culture populaire dans ce qu’elle a de plus noble.

    Quand on s’aperçoit que la gauche elle-même ne monte pas au créneau pour défendre actuellement ces modestes remparts qui assurent encore à notre pays cette respiration démocratique à échelle locale que le monde nous envie encore...

    On en viendrait à penser que cette manipulation des imaginaires est plutôt le fait de nos élites (politique, économique et sociale) contre une population métissée (à l’échelle de l’Europe comme à celle du monde...) dont ils et elles sont, malgré tout, l’émanation « refoulée »...

    • « Il faut savoir être gré à la droite et à son champion du moment, Nicolas Sarkozy, d’avoir su rappeler opportunément aux »partis progressistes« leur propre abdication aux idéaux qu’ils prétendent encore défendre, en particulier sur la question de l’immigration. » :
      Certes, l’action de la droite révèle l’incurie de la gauche. C’est indéniable. Mais après ? Puisqu’il n’y a pas de réaction ou de construction d’une critique politique crédible et collective, qu’en tirer de plus qu’un simple constat ?

      « On en viendrait à penser que cette manipulation des imaginaires est plutôt le fait de nos élites (politique, économique et sociale) contre une population métissée (à l’échelle de l’Europe comme à celle du monde...) dont ils et elles sont, malgré tout, l’émanation »refoulée« ... » :
      Je suis d’accord, la droite n’est pas la seule responsable de ce processus, même si elle en est l’avant garde active. C’est l’ensemble des élites, et pas seulement politiques, qui est à blâmer pour ce glissement vers une société du vide.
      Par contre, si je pense que les populations métissées sont bien une cible de ces élites, ce n’est pas la seule. C’est tout ce qui ne s’inscrit pas dans le cadre capitaliste, qui ne vit pas que par et pour la société de consommation (au sens large du terme) qui est montré du doigt, voire démantelé peu à peu, en douce. Le tissu associatif en fait partie, mais ce n’est qu’une partie du problème.

      Ps : « Ampoulé » ? Perso, je trouve pas.

      • Pour revenir à l’entretien avec Mona Chollet et à cette colonisation des imaginaires, et au rôle de la télévision dont parlait Pasolini, j’ai un souvenir trés précis de mon adolescence : l’époque où « Dallas » et Dynasty« sont apparus sur les écrans. Auparavant, les feuilletons, ce n’était pas forcément reluisant d’intelligence, mais ce qui était mis en avant, c’était soit la classe moyenne française et le bonheur pavillonnaire, soit des figures du passé , redresseurs de tort au grand coeur type Jacquou le Croquant. Il me semble que l’irruption de cette mise en scène des riches bling bling sur les écrans (les audiences étaient impressionnantes), magnats du pétrôle de surcroit, a été l’un des fers de lance de la décennie Thatcher Reagan et d’un regard sur les riches »tellement comme nous qu’on pourrait être comme eux...) Ça mériterait une analyse plus approfondie, d’autant plus que la télévision avant ces feuilletons était déjà déculturante, mais pour moi ça a marqué une nouvelle étape (comme l’arrivée de la téléréalité).

        • samedi 11 avril 2009 à 18h39, par Crapaud Rouge

          Bien vu ! Ce genre de feuilletons participent de l’intox globale en permettant aux foules, sinon de s’identifier aux riches, du moins de les excuser. Finalement, comme tout le monde à envie d’être riche, (moi le premier, je joue à Euromillions.........), et comme l’autorité morale des Églises joue en faveur des pouvoirs en place, il ne reste plus aucune motivation pour la contestation. Sauf pour des minorités, of course, mais qui sont marginales par définition, et servent de repoussoir par manipulation.

      • Pour commencer, d’accord avec vous sur la multiplicité des cibles visées par le capitalisme. Le métissage n’est pas seul mis en cause. Mais il me semble que d’aborder le problème seulement du point de vue économique rend mal compte de l’unité - par delà les raisons de lutter que chacune exprime - des mouvements culturels et sociaux portés et soutenus par les réseaux associatifs et qui attise la contestation dans notre pays.

        C’est la conviction de porter une certaine éthique de la « gouvernance » démocratique - collective sans collectivisme - qui devrait conférer sa légitimité à ce mouvement des mouvements face à l’apologie spectaculaire qui est faite du pouvoir solitaire exprimée dans les actes de notre cher « hyper-président », aussi démesuré qu’un hyper-marché...

        PS : pas mal non plus ;-) !



  • Excellente illustration photos. And text as good as usual...



  • Il y a beaucoup d’idées dans cette excellente interview.

    Sur le plan politique, les « valeurs » de l’argent roi, l’aliénation de la réussite sociale du bling bling et du people existaient bien avant le nain (Messier, Tapie, etc...). La première différence c’est que le nain a été des candidats de droite, avec ses ministres, celui qui s’est le plus identifié à ces « valeurs », et s’est le plusmontré.

    La deuxième différence c’est que là où les autres politiciens de droite-on compte dedans les « socialistes »- ont dit « il y aura des gagnants et des perdants mais nous partagerons avec les perdants », le nain a dit : « je ne m’intéresse qu’aux gagnants, malheur aux perdants, mais avec moi tout le monde pourra devenir un gagnant » et il fait toujours du storytelling-des histoires absurdes que beaucoup de gens ont cru- en ce sens.

    Donc le seul mérite du nain et de sa machine médiatique aura été de s’être trouvé en phase avec l’aliénation à ces « valeurs » d’une partie de la population qui avait été sous estimée en nombre.

    Pour l’imaginaire de ces gens là et pour l’anthropologie...hum...je crois que c’est De Gaulle qui avait dit « lourde tâche et vaste programme » ?

    • dimanche 12 avril 2009 à 18h12, par Image In

      Article très intéressant.

      Nous parlons bien d’un « triomphe » heureusement !

      Mettons « triomphe » et « réussite » sur un même plan :

      Un triomphe est bien plus éphémère qu’une « réussite » ! OUF !!!!!

      Cela nous fera des vacances !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!



  • samedi 18 avril 2009 à 15h03, par le tapir

    Je trouve que les hypothèses et les conclusions de M. Chollet se rapproche de ce que Serge Gruzinski (un historien du monde méso-américain) a appelé la « colonisation de l’imaginaire ». Le lent processus de dé-culturation/acculturation entrepris par la colonisation de l’Amérique. La manière dont une société a contraint une autre société à agir et partant à penser comme elle.

    Les Espagnols et Portugais n’ont pas seulement conquis par les armes (et la maladie), ils se sont efforcés (peut-être inconsciemment) à vider de son sens les structures sociales des sociétés américaines, en remplaçant certains éléments du système comme la religion. Ainsi la justification de toute la structuration perdait sons sens. Les élites n’avaient plus de raison de dominer, mais pourtant elles continuaient de le faire grâce aux conquérants, cependant cette domination sans sens devenait insupportable, et même plus, incompréhensible car totalement absurde pour les Indiens.

    Je n’ai par contre trouver qu’un compte rendu dans une revue scientifique du bouquin :
    Journal de la Société des Américanistes, 1989, p.230-234.

    http://comitedereflexion.wordpress.com/

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