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vendredi 26 septembre 2008

Le Cri du Gonze

posté à 00h45, par Lémi
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10 excellentes raisons de canoniser Bérurier Noir : Une hagiographie sonore.
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Musicalement, c’étaient des bouses. Une boîte à rythme rudimentaire, des riffs de guitare binaires et épileptiques, des structures si répétitives qu’on avait l’impression de réécouter encore et toujours la même chanson, en boucle… Rien à foutre, en fait. La virtuosité, ils s’en battaient l’oeil. Eux carburaient à l’énergie rageuse et à la tectonique du squat. Alchimie parfaite.

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Pourquoi déterrer les Bérus ?

1. Parce qu’avec « Porcherie », ils ont écrit l’hymne anti-FN le plus efficace de la décennie, la rengaine qu’on devrait faire chanter dans les écoles et confronter aux débilos mous du slip à la Saez qui se targuent d’avoir repris le flambeau anti-faf mais bavotent gentiment leurs niaises comptines militantes devant des parterres bobos.
Ici, version live lors de leur concert d’adieu à l’Olympia en 1989.

2. Parce que les squats, ça n’existe plus, ou presque, à Paris et ailleurs en France. Et que les bérus ont incarné pendant longtemps ce que l’énergie des squats, le côté punky-communautaire pouvait avoir de plus réjouissant et intelligent. En se revendiquant de Dada, en pratiquant ce que Loran et François, les deux membres fondateurs nommaient un « Théâtre de force », en mêlant musique et théâtre, activisme et peinture, graphisme, cracheurs de feu et contestation, la troupe des Béru a pour un temps symbolisé l’ouverture et la créativité du milieu alternatif des années 1980. Un peu comme la Mano Négra, en moins mièvre.

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3. Parce que c’était le seul groupe à pouvoir beugler « l’Internationale » ou « Bella Ciao » sans que ça sonne réchauffé, qu’on se croie à la fête de l’Huma devant le stand Manu Chao Merguez bio, ou qu’on décroche illico le téléphone pour appeler SOS vieux croûtons staliniens.
Et que, derrière la naïveté revendiquée de chansons comme « Salut à toi », les bérus surent redonner un coup de neuf salutaire à l’exercice salement casse-gueule de la chanson militante. Des suiveurs ? Nada. Inégalables dans leur genre.

Bérurier Noir : « Salut à toi »

4. Parce que même quand ils étaient ridicules, il gardaient une dignité absolue. Qui d’autre pour chanter et faire reprendre en chœur : « Nous sommes des rebelles / nous marchons libres dans la rue / la jungle nous appelle / rejoins notre tribu » sans tomber dans la caricature débile et l’esbroufe lourdingue ? Rien qu’à l’écrire, on se sent déjà un peu débiles. Mais à l’écouter, on oublie la caricature. Enfin, presque...

Bérurier Noir : « Les rebelles »

5. Parce que même reprises par les Ogres de Barback et les Hurlements de Léo, les champions du rock musette un tantinet soporifique, leurs chansons gardent la classe.

Les Ogres de Barback & Les Hurlements de Léo : « Salut à toi »

6. Parce que plus c’est percutant, mieux c’est. Et qu’à égalité avec « Assassin de la Police » de NTM, on a jamais fait plus direct et provocateur que certaines rengaines des Béru, ouvertement anti-flics, anti-autorités, anti-fric, anti-tout. « Montreuil, 200 punks attaquent la police. Baston !!! » : rudimentaire, bas du front, diaboliquement motivant.

Bérurier Noir : « Baston »
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7. Parce que le type le plus décapant de la blougosphère, Sébastien Fontenelle, a nommé son bloug d’après la chanson « Vive le Feu » (je le subodore fortement, en tout cas).

Bérurier Noir : « Vive le feu »
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8. Parce qu’ils ont su mourir en beauté, avant de perdre ce qui les animait. Deux fois en plus (Une première fois en 1989, une deuxième après reformation - le temps de provoquer quelques émeutes comme aux Transmusicales en 2003 - très éphémère). Et que jamais ils n’auraient envisagé de parader comme les pendables Trust (de qui nombreux sont les crétins à les rapprocher) aux côtés de Ségolène Royal pour ce grand meeting farce au Zénith. Ouh que non. Et que si t’es pas convaincu, t’as qu’à d’aller lire la très impressionante interview disponible sur agitkom.net, ici dans lequel les bougres apparaissent d’une intégrité absolue, mais aussi beaucoup plus réfléchis et moins binaires que ne le veut la caricature qui leur colle aux basques.

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9. Parce que on cherche encore et toujours sur la scène punk-alternative ceux qui seraient capable d’approcher leur classe, de se faire emblème d’une génération sans tomber dans les travers de la reconnaissance et de la récupération. Les Wampas ? Tokyo Hôtel ? Pascal Obispo ? Pffff, c’est mal barré...

10. Parce que le régressif, c’est jouissif.

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ps : pour les amateurs, les bérus continuent à faire parler la poudre via un label plutôt recommandable et éclectique, Folklore de la Zone Mondiale.


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