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samedi 2 août 2008

En Sueur

posté à 11h04, par PT
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Les Jeux démarrent sur une belle histoire : ouf, l’esprit olympique est sauf...
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Ce n’est pas parce que l’Irak n’a rien à espérer aux Jeux qu’il ne faut pas l’y tolérer. Le Comité Olympique international l’a bien compris, qui a fait preuve d’une rare mansuétude pour intégrer in extremis une délégation irakienne peau de chagrin. Histoire que ça fasse beau dans le tableau.
On dit merci qui ?

J’aime autant vous prévenir : passez votre chemin, ce n’est pas ici que vous dénicherez du papier fielleux au prétexte que le grand cirque olympique déploie son chapiteau en terre dictatoriale.

C’est que je me suis rangé de longue date du côté du président belge du CIO, l’audacieux Jacques Rogge, qui s’épuise dans les journaux à nous expliquer ce qui tombe pourtant sous le sens : les JO sont une chance pour la Chine, la Chine est une chance pour les JO.

C’est du gagnant-gagnant. Et c’est très bien ainsi.

Signe tangible d’une bonne volonté éloquente, les pouvoirs chinois sont judicieusement revenus sur leur promesse d’autoriser à la presse internationale, invitée entre ses murs, un libre accès à internet durant la période des Jeux : en fin de compte, non, la Toile restera sous contrôle, certains sites dûment verrouillés.

C’est mieux comme ça.

Les plumitifs en goguette sont là pour contempler et rendre compte d’un show sportif à nul autre pareil. Œillères, œillères, bonnes gens, ne vous laissez pas détourner de la céleste lumière, suivez le guide ! Et que le spectacle commence…

Internet, d’ailleurs… Et puis quoi encore ? A part pour permettre à l’envoyé spécial, séparé de sa moitié pendant quinze jours, de cliquer d’une main tout en se gâtant de l’autre, le soir venu au fond de sa chambre obscure, franchement, on ne voit pas l’utilité.

On parle en connaissance de cause : les Jeux, pour le reporter dépêché sur l’événement, constituent une épreuve de fond. Il est fortement déconseillé de gaspiller l’énergie dont on manquera, c’est écrit, en bout de parcours. Le reporter a besoin de toute sa lucidité. Il est au cœur de la matrice. Témoin autant qu’acteur.

Le tout c’est de le savoir. Son hôte chinois veille à le lui rappeler en optant pour les mesures adéquates.

C’est du gagnant-gagnant. Et c’est très bien ainsi.

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De surcroît, je les sens bien, ces Jeux de l’ouverture et du progrès. C’est Jacques Rogge qui le dit. Juste avant le coup de feu, le grand Jacques, ancien champion de voile, a réussi un tour de force herculéen en retournant in extremis des vents foutrement contraires.

Grâce à Jacques Rogge, l’Irak participera finalement aux JO.

Oui : l’Irak.

Et croyez-le : ça l’aurait chiffonné, Jacques, que ça se passe autrement.

Au départ, le CIO avait fermé la porte à une présence irakienne, au prétexte que Bagdad s’était substitué au comité olympique local, infichu de régler les affaires courantes, organisation fantoche, décharnée. Olympisme et politique ? Beurk ! C’est bien connu : la vénérable institution olympique tolère peu les intrus.

La famille se compte suffisamment nombreuse pour se passer, merci bien, de l’ingérence politique – irakienne au surplus.

Dénonçant « une interférence inacceptable », le CIO fit tomber la sanction, sévère mais équitable (on est au CIO, on sait ce qu’est l’équité (quand même…)) : la délégation irakienne – sept athlètes en tout et pour tout – regarderait les Jeux à la télé (à sept devant une télé, en s’organisant bien, on voit l’écran nickel).

Révolte ? Colère ? Fronde irakienne ?

Nan.

Bagdad n’a pas cillé.

L’Irakien est têtu.

Il bougonne un peu quand le CIO lui réclame d’organiser avant l’hiver des élections transparentes et de reconstituer – c’est la moindre des choses – un comité olympique digne de ce nom.

L’Irakien ferraille, se défend tant bien que mal, confit dans un argumentaire nébuleux :

« Bon, OK, vous êtes sans nouvelles depuis 2006 de Ahmed Al-Samarrai, l’ancien président du Comité Olympique national. On entend bien : il a été enlevé par des hommes armés et depuis, pfuitt, évaporé, disparu… Mais qu’est-ce qu’on y peut, nous ? », s’indigne le CIO, au faîte de son courroux. « Réglez vos salades, après on discute ! »

Coup de théâtre : le 29 juillet, Bagdad cède. Flanche. Se couche. Tapis. Et annonce la tenue pour novembre prochain d’élections dans les règles de l’art.

Le CIO glousse d’un rire sonore et de bonne grâce lève aussi net la punition : « A vous Pékin, les gars ! »

« Ah ! Juste un truc : on peut se tromper, mais il nous semble bien que les inscriptions sont closes… »

Renseignement pris : le 29 juillet, effectivement, les inscriptions sont closes. Sauf en athlétisme. Où le lanceur de disque Haidar Nasir et la sprinteuse Dana Hussein sont repêchés par le bout du short.

Veinards !

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Qu’on vous dise : aux derniers Jeux Panarabes, Dana Hussein a picoré le 100 mètres en douze secondes et quatre-vingt-quatre centièmes.

Ce qui ne défrise même pas le record régional du Limousin…

(Vous pouvez vérifier.)

Bref, Dana courra à Pékin.

Loin derrière la meute.

Ça fera un joli conte olympique à narrer.

Ça donnera une vidéo amusante sur Dailymotion.

Dana la pouilleuse larguée par les Américaines bodybuildées.

Ce sera chouette.

Plus tard.

Quand les projos seront éteints.

Et les connexions internet rétablies.


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