jeudi 17 décembre 2015
Textes et traductions
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« La clef de la compréhension du changement d’orientation de l’après-Mao et l’ascension économique de la Chine est ancrée dans l’ère de Mao », écrit Yiching Wu dans le récent ouvrage qu’il a consacré à la Révolution culturelle. Nulle tentative de réhabilitation, explique ici l’ami Charles Reeves, mais le désir de montrer la complexité et la multiplicité d’une lame de fond qui faillit bien échapper au contrôle sanguinaire du « Grand Timonier ».
L’ami Charles Reeve, auteur de cet article, a cosigné (avec Hsi Hsuan-wou) un ouvrage recommandé sur la Chine : China Blues - Voyage au pays de l’harmonie précaire, publié aux éditions Verticales en 20081.
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Dans un éditorial du New York Times publié le 27 mai 2015, « Corrupting the Chinese Language » (27 mai 2015), l’écrivain chinois Murong Xuecun écrit ceci : « Le nivellement par le bas de notre langue constitua un effort délibéré de rabaisser le discours public [...]. Cet emploi délibéré du langage pour embrouiller les choses vise un objectif clair : cacher la réalité de l’absence de démocratie en Chine et prétendre même que la démocratie existe. » L’auteur désigne le langage bureaucratique par l’expression « maolangue ». Il explique qu’elle fut utilisée à profusion pendant la Révolution culturelle : « La discussion intellectuelle, en même temps que la raison, fut jetée par la fenêtre. Dans cette atmosphère, les mots perdent leur véritable sens. Le parti peut alors se servir des mots pour noyer le poisson et mentir. »
Mais Murong Xuecun semble lui-même victime de la manipulation du langage dont il parle2. Il utilise l’expression « Révolution culturelle » dans le sens que lui donnent les autorités : en réduisant un mouvement social complexe à un mouvement politique contrôlé par Mao.
L’ouvrage de Yiching Wu, The Cultural Revolution at the Margins : Chinese Socialism in Crisis3 possède entre autres qualités celle d’amener le lecteur à s’intéresser à cette complexité. Après l’avoir lu, il devient difficile de parler de la Grande révolution culturelle prolétarienne (GCRP) en se référant seulement à sa version bureaucratique4. Le livre de Wu s’inscrit dans une tradition bien établie qui comprend des chercheurs indépendants, tant universitaires qu’extérieurs à l’alma mater, ainsi que quelques groupes politiques socialistes radicaux situés à Hongkong, en Europe et aux États-Unis et ayant, depuis des années, développé une critique de la GRCP. Cette vision dissidente défend la thèse suivante : le grand bouleversement social a certes été lancé par la bureaucratie du parti, mais il a progressivement suscité des tendances anti-bureaucratiques - finalement écrasées par l’armée appelée à la rescousse par Mao. Certains témoignages de jeunes Gardes rouges (GR) rebelles vont en ce sens5. Ils montrent que la version officielle de la terreur de la GRCP contre le « peuple chinois » camoufle le fait que les GR rebelles critiquant le système bureaucratique ont été les premières cibles de la répression par l’armée, à la fin des années 1960.
L’ouvrage de Wu constitue un ajout bien documenté, unique et bienvenu à la littérature existante sur le sujet. Les recherches approfondies menées par l’auteur, tant en Chine qu’ailleurs, rendent hommage aux étudiants et ouvriers qui souffrirent de la répression parce qu’ils avaient défendu une conception égalitaire et anti-bureaucratique du socialisme. Aspect terrible de la situation de l’époque : beaucoup d’entre eux moururent en pensant que cette conception était partagée par Mao lui-même.
La thèse de Wu peut se résumer en quelques citations : « La Révolution culturelle, écrit-il, commença principalement par une révolution menée d’en haut [...]. Mais à mesure que le mouvement se poursuivit, nombre de questions sociales et politiques anciennes refirent surface, profitant de la situation nouvelle où l’ordre avait quasiment volé en éclats. Plus d’une décennie et demie après la victoire de la révolution conduite par les communistes, le ressentiment populaire contre les privilèges des bureaucrates et les abus de pouvoir des cadres était général, et beaucoup de citoyens étaient trop contents de profiter du droit de se révolter récemment proclamé contre les autorités établies ». Et d’ajouter, plus loin dans le livre : « À mesure que la Révolution culturelle s’étendit, il devint clair que le pouvoir maoïste avait largement sous-estimé l’ampleur de la perturbation qu’entraînerait un mouvement de masse. Ce ne fut pas seulement la bureaucratie du parti qui fut assiégée ; la mobilisation de masse croissante remit aussi en cause un des aspects centraux du cadre établi de la Révolution culturelle, à savoir l’équilibre convenable entre révolte et production, entre révolution et ordre économique. »
Wu refuse d’adopter l’approche simpliste selon laquelle ce processus complexe était prévu à l’avance par Mao et ses proches conseillers. Le Grand Timonier se montra partagé à l’égard du mouvement populaire. Il était autant séduit par l’idée d’une « révolution permanente » que prisonnier de la conception léniniste du parti dirigeant. Mao ne croyait pas que la classe ouvrière pût être révolutionnaire par elle-même. Selon lui, elle pouvait seulement l’être sous la direction du Parti communiste. Il le dit lui-même : « Vingt millions de personnes peuvent être rassemblées en une minute, et peuvent aussi être renvoyées chez elles d’un simple signe de la main. Si le Parti communiste ne tenait pas le pouvoir, qui pourrait accomplir pareil exploit ? » Mao avait peut-être raison, mais seulement en partie. La GRCP en fut une illustration : une fois le mouvement engagé, il faudra faire appel à l’armée pour réprimer les rebelles dans le sang. Pour Mao et ses partisans, un mouvement collectif et auto-organisé ne pouvait conduire qu’à ce qu’ils considéraient comme un « danger anarchiste ».
Dans son ouvrage, Wu consacre une place considérable à montrer pourquoi et quand la GRCP échappa au contrôle du groupe de Mao et menaça la survie du parti. Au bout du compte, ce fut la perte du contrôle du mouvement des Gardes rouges qui força le groupe de Mao à changer de tactique. Incapables de naviguer entre leurs objectifs et des mesures ambiguës, Mao et Cie firent le choix qui garantissait leur survie, en faisant appel à la seule institution qui était demeurée intacte, l’armée – destin ironique pour un « État communiste ».
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Dans le troisième chapitre de son ouvrage, « From the Good Blood to the Right to Rebel »6, Wu expose la « théorie de la lignée », inventée par le parti pour justifier sa reproduction en tant que nouvelle classe dirigeante. Pour le Parti communiste chinois, cette idéologie constituait une sorte de dogme selon lequel l’appartenance à la « classe révolutionnaire » relevait d’un « caractère naturel » qui se transmettait automatiquement à la génération suivante : « L’origine familiale d’un individu déterminait sa situation de classe, laquelle déterminait son statut politique. » Comme le fait remarquer l’auteur, beaucoup de Gardes rouges pensaient qu’« étant rouges de naissance ils étaient plus révolutionnaires par nature » et que « le statut politique devait être héréditaire ». En justifiant l’exclusion de toute activité politique de ceux qui avaient des « origines sociales défavorables » ou dont les parents étaient des « mauvais éléments », cette théorie exerça une forte influence au début de la GRCP. Wu montre que les premières mobilisations de Gardes rouges réunirent les enfants de la nouvelle nomenklatura. Ils tentaient d’assurer leur avenir en attaquant les descendants de l’ancienne classe dirigeante, individus aux « mauvaises origines sociales » qui pourraient menacer leur nouvelle hégémonie. Au début du mouvement des Gardes rouges, être membre de la nouvelle classe dirigeante était le « critère d’appartenance le plus important ». Et « l’apparition de la ’théorie de la lignée’ coïncida avec l’explosion du mouvement des Gardes rouges ».
- Manifestation d’étudiants sur la place Tian’anmen, 1966
La phase initiale de la GRCP et la violence terrible des premières campagnes des Gardes rouges, notamment durant l’automne 1966, reflétaient ces tendances particulières. La majeure partie des destructions de sites historiques, religieux ou culturels se sont produits durant cette période. De même que la plupart des persécutions contre les individus à qui l’on reprochait leurs « origines de classe défavorables ».
Au début, Mao et son groupe tolérèrent et soutinrent le chaos. Mais ce dernier finit par susciter l’opposition populaire, surtout dans les grandes villes. Bientôt, c’est l’appareil du parti lui-même qui se sentit menacé par ces persécutions. À l’origine, le groupe de Mao voyait dans ces luttes le moyen d’éloigner les « vieux éléments » du parti. Mais il comprit ensuite que la « théorie de la lignée » était devenue, pour une fraction de la bureaucratie, une tactique destinée à se protéger et donc, finalement, à s’opposer aux réformes du parti qu’il préconisait.
Wu utilise abondamment les textes qui furent produits pendant le GRCP, afin d’asseoir son analyse. Pour discuter de la « théorie de la lignée », il concentre son attention sur l’essai de Yu Luoke, On Class Origins, publié à la fin de 1966. Ce texte exceptionnellement populaire fut diffusé à plus d’un million d’exemplaires et fit l’objet d’un vaste débat au sein du mouvement. Yu Luoke critiquait la « théorie de la lignée », affirmant que la nouvelle classe privilégiée bénéficiait d’un traitement favorable alors que le reste de la population était privé de ses droits fondamentaux. Lui et ses partisans exigeaient que « tous les jeunes révolutionnaires d’origines de classe diverses soient traités égalitairement ». Il affirmait aussi que la « théorie de la lignée » servait à légitimer les privilèges. Pour Wu, « ce qui semble n’être [dans le texte de Yu Luoke] qu’un discours libéral sur les droits humains innés acquit le sens supplémentaire d’une critique de classe ».
D’autres textes prolongèrent la perspective de Yu Luoke, par exemple celui écrit par les Gardes rouges de Pékin membres de la « Faction du 3 avril ». On y lit ceci : « Même si la révolution socialiste chinoise a aboli l’exploitation basée sur la propriété privée, la propriété économique et le pouvoir politique sont néanmoins concentrés entre les mains des détenteurs du pouvoir bureaucratique. » Arrêté au début de l’année 1968, Yu Luoke fut accusé d’avoir voulu créer une organisation politique. Après plus de deux ans de prison, il fut exécuté par l’armée. Pour Wu, la critique de la « théorie de la lignée » avait entraîné une critique sévère des inégalités sociales et conduit à une « nouvelle analyse politique du socialisme chinois ». Elle constitua la première tendance dissidente importante de la GRCP.
La Révolution de janvier à Shanghai est un autre épisode essentiel de la GRCP. Wu l’étudie en détail dans le chapitre IV, « Revolutionary Alchemy ». L’effondrement du parti dans cette grande métropole au début de 1967 constitua en effet un tournant majeur. Ce fut aussi le moment où l’engagement de la classe ouvrière dans la GRCP devint dominant.
Pourquoi le parti s’effondra-t-il à Shangai ? À cause de la radicalisation des Gardes rouges ? Ou bien, de la résistance de la vieille classe ouvrière, accusée par les idéologues de la GRCP de sombrer dans l’ « économisme » ? Difficile à dire. Reste que l’agitation se propagea des étudiants aux ouvriers et conduisit rapidement à la création du premier groupe de Gardes rouges dans la classe ouvrière. Il devint alors clair que la direction maoïste avait largement sous-estimé l’ampleur des perturbations provoquées par le mouvement de masse. Ce fut particulièrement vrai des perturbations économiques.
Dans ses directives initiales, le groupe de Mao n’avait pas défini la place que devraient occuper les ouvriers. Il avait par contre toujours souligné le fait que la GCRP devrait entraîner une amélioration et un accroissement de la production. Comme le souligne Wu, « le soulèvement des rebelles ouvriers de Shanghai posa un défi significatif à ce projet. Ayant commencé comme une révolution parachutée d’en haut, la Révolution culturelle eut plus de facilité à servir de détonateur à la masse d’énergie réprimée qu’à contrôler l’ampleur de l’explosion ». Cela devint évident à Shanghai. À partir de cette date, le « contrôle » devint le problème central pour le groupe de Mao.
Parmi les raisons de cette propagation aux ouvriers, Wu signale également les transformations en cours parmi ces derniers. En effet, depuis la fin des années 1950, les salaires avaient baissé à Shangai, les conditions de travail s’étaient dégradées et le travail précaire avait augmenté. Dans le même temps, la productivité avait fortement augmenté. Bref, toutes les conditions d’une révolte étaient réunies, surtout chez les ouvriers jeunes et précaires : « Le clivage politique entre les ouvriers rebelles et conservateurs suivit souvent la ligne de partage entre les ouvriers non-qualifiés et les apprentis d’une part et les ouvriers qualifiés de l’autre. »
La question du hukou (certificat de résidence donnant accès aux droits et avantages accordés par l’État) était alors – et demeure aujourd’hui – un outil essentiel pour contrôler et régenter la classe ouvrière chinoise. Au milieu des années 1960, les ouvriers migrants formaient déjà la majorité de la force de travail dans bon nombre des plus grandes usines d’État de Shanghai. La révolte contre cette condition précaire occupa une place centrale. Beaucoup de groupes de Gardes rouges rebelles furent constitués d’ouvriers précaires. À l’inverse, la vieille classe ouvrière, organisée par les syndicats dans les usines, se vit accorder des avantages par la bureaucratie. Il s’agissait d’obtenir son soutien dans la mobilisation et la résistance à la GRCP. C’est ce que le groupe de Mao appela l’« économisme ». De novembre 1966 à janvier 1967, période dite de la « grande crise » dans la GRCP, de nombreuses organisations d’ouvriers rebelles furent créées et la lutte s’étendit du domaine économique au domaine politique et à la société en général. Les Gardes rouges ouvriers rebelles qui s’opposaient aux inégalités sociales posèrent de plus en plus de questions sur la dignité et l’autonomie des travailleurs. Révoltes, grèves, perturbations, batailles, confusion et chaos paralysèrent quasiment Shanghai, et l’agitation se propagea dans les communes voisines de la grande métropole. L’activité indépendante et l’auto-organisation se développèrent.
C’est alors que Mao et son groupe commencèrent à accuser le vieil appareil local du parti et les « ennemis de classe » de faire preuve d’irresponsabilité, de promouvoir l’« économisme » et de s’opposer à la GRCP. Pendant ce temps, le parti en tant qu’institution, s’effondrait localement. Plus menaçant encore pour toutes les factions de la classe dirigeante, les Gardes rouges rebelles de Shanghai se mirent à voyager dans d’autres régions de la Chine pour échanger et propager leurs « expériences révolutionnaires ».
L’effondrement de la structure du parti, les perturbations de la production et le développement de l’auto-organisation furent des facteurs majeurs de préoccupation pour Mao. Ce bref extrait d’un article du Quotidien du peuple du 12 janvier 1967 le laisse à voir : « Cet économisme remplace la conscience révolutionnaire prolétarienne par la spontanéité bourgeoise. Et il remplace le centralisme démocratique prolétarien et le sens de l’organisation et la discipline prolétarienne par l’ultra-démocratie bourgeoise… » À propos des discours idéologiques, Wu souligne : « Un lien politique a été créé entre l’économisme et la “spontanéité bourgeoise”, l’“ultra-démocratie”, l’“ultragauche” et l’“anarchisme” ». À la faveur de cette situation politique qui changeait rapidement, « les actions et les concepts familiers furent redéfinis. Dans ce monde orwellien à la mythologie propagée par l’État, les luttes populaires furent transformées magiquement en complots contre-révolutionnaires. » Tel fut l’univers de la maolangue dont parle aujourd’hui Murong Xuecun.
Mao s’était approprié l’interprétation par Lénine de la Commune de 1871 et l’avait réduite au besoin de bâtir un nouvel appareil d’État. Après avoir repris ce concept pour mobiliser les « masses » en faveur des Gardes rouges, il se rendit compte que cette rhétorique favorisait aussi les tendances autonomes. Il changea alors son fusil d’épaule et insista sur la nécessité de rétablir l’ordre, l’ordre économique avant tout, au moyen des « comités révolutionnaires » créés selon le principe de la « triple alliance » entre les dirigeants maoïstes des GR, les cadres du parti et les officiers de l’armée. Wu cite Mao : « À l’époque, ni le parti ni l’État ne fonctionnaient. Seule l’APL (Armée populaire de libération) était capable de faire le boulot. » Les limites futures de la GRCP étaient donc clairement posées et sa liquidation prévue.
Dès lors, la guerre « fut déclarée contre toutes les sortes de tendances politiques déviantes ». Créée en février 1967 par certains des chefs Gardes rouges maoïstes et « une fédération sélective de groupes de masses de Shanghai incorporés pour en constituer la charpente (les éléments économistes étant exclus comme il fallait s’y attendre), la Commune de Shanghai vit le jour au milieu de conflits omniprésents. Marquant le début d’un recours plus agressif à la force, la Commune s’appuya lourdement sur l’Armée populaire de libération parce que sa survie politique fut continuellement menacée par l’opposition ». Les documents fournis par Wu montrent que Mao conduisit directement cette opération depuis Pékin, préoccupé qu’il était par ce qu’il appela les « tendances anarchiques » et par la nécessité de préserver l’autorité du Parti. La rhétorique de la Commune finit par être bannie de la maolangue : « L’armée et la police furent déployées. [...] On intima aux ouvriers de renforcer la discipline du travail et un moratoire national fut prononcé sur les salaires en retard, les primes et autres indemnités. Les ruraux qui se trouvaient dans les villes reçurent l’ordre de se présenter immédiatement dans leurs lieux d’origine [...]. Les organisations d’ouvriers temporaires furent déclarées hors la loi et leurs chefs arrêtés [...]. Dans tout le pays, les groupes transrégionaux et interprofessionnels furent interdits. » Ce fut, à n’en pas douter, le moment décisif de la GRCP : la restauration de l’ordre était devenue une priorité pour Mao.
Pour illustrer la complexité de la situation, Wu étudie en détail l’évolution des Gardes rouges dans une grande usine de Shanghai, celle des moteurs Diesel, où deux factions s’affrontaient. L’une était soutenue par le vieil encadrement, les membres du parti, les employés et les ouvriers à statut protégé ; l’autre, appelée Liansi, recrutait principalement ses partisans chez les jeunes ouvriers mécontents et précaires qui remettaient en cause l’autorité des cadres des ateliers. Considéré comme trop extrémiste, le groupe Liansi n’a pas eu le droit d’intégrer l’organisation centrale des Gardes rouges maoïstes qui était en voie d’absorption par la nouvelle autorité politique centrale. En réaction, ses membres tentèrent de créer leur propre réseau de contacts dans la ville, mais furent rapidement attaqués à l’intérieur de l’usine par des milliers de Gardes rouges maoïstes : « La répression du Liansi marqua la fin de l’opposition organisée dans la ville. »
« À la fin de février 1967, écrit Wu, la plupart des éléments clefs de ce nouveau paradigme – la prise du pouvoir par des organisations de masse approuvées officiellement, la formation de grandes alliances, la répression des activités économistes, l’intervention de l’APL et la création de nouveaux organismes de pouvoir – étaient désormais en place. » Néanmoins, les ouvriers rebelles conservèrent une énorme influence à Shanghai, et ce même après que l’armée se soit emparée des principales organisations de Gardes rouges et des Comités révolutionnaires. Le mouvement de Shanghai créa une situation particulière : « Un moment contradictoire pendant lequel éruption et endiguement, révolte et ordre, révolution et restauration furent simultanément et étroitement enchevêtrés. [...] Ce fut le début de la fin [...] de la politique de masse caractéristique de la Révolution culturelle. » En somme : « L’épisode de Shanghai constitua un moment stratégique où l’émergence d’une critique puissante du régime dans son ensemble fut anticipée. » Et Wu d’enfoncer le clou : « Il constitua en fait un des exemples réussis de restauration de l’ordre. »
- Une consacrée à la Commune de Shangai, 1967
Wu aborde également les éphémères hésitations des dirigeants : « Durant les premiers mois de la Révolution culturelle, la direction maoïste flirta brièvement avec l’idée que les masses pouvaient non seulement s’emparer du pouvoir mais aussi réorganiser radicalement la société selon les principes égalitaires de la Commune de Paris [...]. Les bureaucraties de l’État et du Parti ne devaient pas être réformées de l’intérieur ou d’en-haut ; elles devaient être détruites par l’action de la base. Or ces idées se volatilisèrent » après l’expérience de Shanghai. Ceci étant, les ambiguïtés et les revirements du groupe de Mao étaient de plus en plus difficiles à accepter et à intégrer par le mouvement réel. Le remplacement du « modèle de la Commune de Paris » par « le modèle de Shanghai », fondé sur la formation des nouveaux comités révolutionnaires et l’alliance avec les vieux cadres, fut particulièrement « difficile à appliquer dans de nombreuses régions du pays ». De même, le recours fréquent à l’armée pour protéger le parti devint problématique et entraîna plusieurs situations hautement conflictuelles. Dont l’incident de Wuhan de juillet 1967, lors duquel l’armée réprima certains des Gardes rouges du Hunan.
Quand cela se produisit, Mao commença par critiquer le rôle local de l’armée. Mais il avait conscience que le mouvement échappait à tout contrôle et que la restauration de l’ordre ancien serait nécessaire pour sauver le Parti. En septembre 1967, un an exactement après le début officiel de la GRCP, Mao rétablit l’autorité de l’armée et lança la politique de la « triple alliance, qui ramena de nombreux anciens bureaucrates au pouvoir ». Il devint dès lors évident que les Gardes rouges étaient affaiblis, jugés trop révolutionnaires par Mao, qui ordonna leur retour dans les établissements scolaires et limita leur activité à la politique locale.
Cette nouvelle orientation, ainsi que le recours à l’armée pour restaurer l’ordre, radicalisa les Gardes rouges rebelles partout en Chine. Wu insiste ainsi sur la formation et les idées d’une alliance d’une vingtaine de groupes de Gardes rouges au Hunan qui s’y opposèrent. L’alliance se donna le nom de « Shengwulian » [Alliance prolétarienne de la province] et attira un certain nombre de groupes de rebelles, essentiellement formés de représentants de catégories sociales marginalisées et brimées, ainsi que de soldats vétérans de la guérilla communiste. Ce fut l’agitation provoquée par ces groupes qui conduisit à l’ « incident de Wuhan » précédemment cité.
« Invoquant la Commune de Paris comme exemple historique de pouvoir populaire, explique Wu, ils [les partisans de Shengwulian] affirmèrent que ce qu’ils appelèrent la “nouvelle bourgeoisie bureaucratique chinoise” devait être détruite afin de créer une société véritablement égalitaire. » Le groupe, composé d’étudiants, d’intellectuels et d’ouvriers, ne se contenta pas de critiquer les nouvelles autorités installées par Mao. Il alla plus loin, posant les prémisses d’une nouvelle analyse politique de la société chinoise et de la nouvelle classe dirigeante bureaucratique. Le texte qui le fit connaître fut écrit par un lycéen, Yang Xiguang. Il s’intitulait Où va la Chine ?7, et il constitue « vraisemblablement le texte d’ultragauche le plus important produit pendant la Révolution culturelle ». Le texte, écrit Wu, « abordait un certain nombre de sujets cruciaux : une analyse des événements qui avaient mené à l’impasse du mouvement, les stratégies et tactiques employées et l’avenir social et politique de la Chine ».
Dans Où va la Chine ?, la GRCP n’est plus présentée comme une révolution sociale, mais comme un mouvement où « certains bureaucrates attaquent d’autres bureaucrates » : « Selon Yang, [la formation des Comités révolutionnaires] était le produit d’un compromis politique, et marquait une vraie défaite. » Le texte analysait la façon dont la politique bureaucratique de la Chine avait créé une nouvelle situation de classe - « Une nouvelle classe capitaliste s’est formée dans la société chinoise : une couche privilégiée. » Cette caractérisation du système chinois fut aussi développée par d’autres partisans de Yang Xiguang, l’un d’entre eux écrivant : « Même si l’infrastructure économique de la Chine reste d’une manière générale socialiste, sa vaste superstructure tout entière est devenue essentiellement capitaliste. » Des analyses immédiatement condamnées par les dirigeants de Pékin comme apparentées au trotskisme.
Yang avait aussi compris que les ouvriers venus des zones rurales étaient une force subversive nouvelle au sein de la classe ouvrière chinoise. Ils étaient en effet marginalisés, exploités et aliénés par le contrôle de l’État au moyen du système du hukou. Une vision clairvoyante puisque, à partir des années soixante, les ouvriers ruraux déplacés devinrent véritablement la colonne vertébrale du capitalisme chinois, constituant la majorité de la classe ouvrière après le démantèlement des anciennes entreprises d’État.
Où va la Chine ? signala ainsi l’émergence d’une interprétation différente de la Révolution culturelle et de la nature de classe du régime chinois lui-même. Malgré les insuffisances du texte dues aux circonstances historiques (par exemple, le portrait naïf de Mao, toujours présenté comme un dirigeant révolutionnaire), la pertinence de son analyse extrêmement précise mérite l’attention qu’y consacre Wu.
Comme l’écrit ce dernier, « les époques troubles favorisent une profusion de possibilités nouvelles ». La GRCP fut ainsi une période d’agitation sociale qui créa des espaces pour l’auto-organisation de certains secteurs de la population exploitée. Dans ce sens, ce fut un moment unique dans l’histoire du socialisme chinois : « Il ne fait aucun doute que la liberté de s’organiser dont jouit brièvement la population urbaine de la Chine pendant la Révolution culturelle fut sans précédent dans l’histoire de la République populaire de Chine. Le mouvement de masse qu’il déclencha rendit possible une résistance populaire à l’État-parti. »
On l’a dit : le parti étant menacé d’effondrement, le groupe de Mao fit appel à l’armée pour écraser la révolte. Une révolte d’ailleurs qualifiée de mouvement anarchiste. Wu reproduit ainsi la déclaration parue dans le Quotidien du peuple du 1er janvier 1968 : « L’anarchisme est absolument terrible. Politiquement, il nie tout ; dans la production, il permet aux gens de faire ce qui leur plaît ; il divise les organisations et sape la morale et la discipline. Ceux qui se sont écartés de la voie correcte ont créé l’anarchie au nom de la “révolte” ou de l’“auto-émancipation”, et il n’ont même pas honte de l’avoir fait. » De son côté, Richard Kraus, sinologue cité par Wu, écrivit que cette période a connu « les aspects les plus violents de la Révolution culturelle, lesquels furent toutefois beaucoup moins visibles que les rassemblements spectaculaires de la période de l’apogée des Gardes rouges »8.
Étant donnée la structure spécifique du capitalisme d’État en Chine, tout grand mouvement social y conduit à une confrontation avec l’État-parti. C’est l’une des leçons de ces années qui continuent d’effrayer la classe dirigeante chinoise. Comme le rappelle Wu, la répression brutale du soulèvement de Tian’anmen en 1989 fut décidée par Deng Xiaoping au moment précis où les dirigeants chinois comprirent que la participation des ouvriers changeait le contenu des protestations. C’est aussi la raison qui explique la version officielle de la GRCP diffusée aujourd’hui, où la majorité des victimes, les Gardes rouges rebelles, est présentée comme la force répressive, alors que la force qui exerça effectivement la répression, l’armée et le groupe de Mao, n’est jamais mentionnée. En 1970, comme en 2015, les maîtres de l’interprétation de l’histoire, ceux qui produisent la maolangue, sont ceux qui dirigent la société.
La crainte de voir le système de pouvoir communiste s’effondrer constitua un tournant dans la façon d’agir de la classe dirigeante chinoise. Il était temps d’arrêter la GRCP et les actions des Gardes rouges. Ils avaient pleinement joué le rôle qu’on attendait d’eux en haut lieu. À la fin de l’année 1968, Mao avait pris sa décision.
À ce moment-là, l’armée contrôlait déjà environ 80 % des comités révolutionnaires. Les chiffres fournis par Wu sur la vague de répression qui déferla entre 1968 et 1972 sont impressionnants : des milliers d’arrestations, de condamnations, d’exécutions, ainsi que le déplacement de centaines de milliers d’étudiants et d’anciens Gardes rouges vers les campagnes. L’auteur explique que cette période fut celle de la « militarisation du commandement ». Laquelle déboucha sur une nouvelle crise au sein de la classe dirigeante, avec la mort du maréchal Lin Biao, suivie d’une purge au sein de l’armée et du déclin de son rôle une fois menée à bien la répression.
Mais la normalisation violente ne mit pas un point final à l’agitation. Les mouvements de grève se poursuivirent et de nombreux jeunes Gardes rouges rebelles continuèrent à remettre en question la GRCP et à s’interroger sur la nature de la société. Wu s’intéresse tout particulièrement au texte du groupe Li Yizhe, De la démocratie socialiste et la légalité9, datant du début des années 1970, et à la brochure de Chen Erjin, On the Proletarian Democratic Revolution10, écrite avant la mort de Mao en 1974. Wu analyse ces deux textes comme le développement des positions du groupe Shengwulian. Ils mettent en effet l’accent sur les droits légaux et évitent d’attaquer la GRCP, perçue toujours comme un « vaste mouvement démocratique de masse ».
Toute cette agitation prend fin avec le célèbre mouvement du Mur de la démocratie, de novembre 1978. « Du point de vue organisationnel, il n’y eut pas un seul mouvement, écrit Wu. Il y eut plutôt de nombreux individus et petits groupes formés autour de diverses revues, affiches, brochures et tracts publiés illégalement. De même, un large éventail de sujets furent abordés et nombre de points de vue politiques s’exprimèrent ». Autrement dit, le mouvement social engendré par la GRCP avait été réprimé pendant que la production d’idées critiques resta, dans une certaine mesure, isolée de la masse de la population, même si ces idées exprimaient certaines de ses revendications.
En septembre 1980, « le Congrès national du peuple a amendé la Constitution de la Chine en expurgeant l’article 45 qui accordait aux citoyens les « quatre grande libertés », à savoir la liberté de « parler librement, d’exprimer ses opinions, d’engager de grands débats et des affiches en grands caractères ». Ces mesures légales furent en fait prises après que les changements eurent déjà été imposés de force. L’amendement marqua la fin légale de ce qui avait déjà été supprimé dans la pratique. La GRCP était officiellement terminée comme l’était la « liberté de s’organiser dont avait joui brièvement la population urbaine de Chine ».
Au dernier chapitre, « De la révolution à la réforme », Wu résume les objectifs de sa recherche : « J’ai exploré la dynamique politique et idéologique de radicalisation de la Révolution culturelle à partir de la base ». Il souligne aussi le fait qu’il est selon lui impossible de comprendre la GRCP en dehors des questions de classe. Ce fut au cours de ce mouvement complexe que les rebelles chinois comprirent la nature de classe de la société chinoise. Et Wu cite l’historien britannique E. P. Thompson et sa conception anti-autoritaire de la formation de la conscience de classe : « les gens [...] font l’expérience de l’exploitation (ou de la nécessité de maintenir le pouvoir sur ceux qu’ils exploitent), ils identifient les intérêts antagoniques, il commencent à se battre à propos de ces questions et au fil de la lutte, ils se découvrent eux-mêmes en tant que classe »11.
Wu termine son livre en soulevant plusieurs questions importantes, lesquelles sont profondément liées à la situation actuelle. Il critique ceux qui abordent l’histoire chinoise en se basant sur un postulat de discontinuité. Même s’il y eut de violents affrontements au sein de la classe dirigeante, la répression des mouvements populaires de la fin des années 1970 qui menaça le pouvoir du Parti « posa les fondements politiques de l’ère post-Mao ». Plus précisément, elle conduisit aux réformes de l’ère Deng et à la transformation de la classe dirigeante et de la structure de l’exploitation de classe. « La clef de la compréhension du changement d’orientation de l’après-Mao et l’ascension économique de la Chine, écrit Wu, est ancrée dans l’ère de Mao ». Après la GRCP, la classe dirigeante comprit la nécessité de transformer les ouvriers de rebelles en consommateurs, c’est-à-dire de les intégrer dans le système de la production matérielle tout en les maintenant à l’écart de l’activité politique, et de créer ainsi un nouveau consensus social. Pour reprendre les propos de Xue Muqiao, un des idéologues de l’ère Deng de 1980 : « La réforme économique est bonne pour le développement, qui est lui-même bon pour maintenir le pouvoir du Parti ». Ce fut et reste le but politique principal en Chine.
À propos de la nature du système, Wu écrit : « Au contraire du capitalisme tel qu’on le conçoit habituellement, la couche bureaucratique n’est pas propriétaire à titre privé des moyens de production. Au sens strict, comme certains rebelles dissidents l’ont compris depuis longtemps, ce qu’elle possède c’est l’État. L’extraction économique [du surplus] est obtenue grâce au monopole d’État de la puissance coercitive, sans la médiation des relations de marché. La main d’œuvre n’y prend pas la forme marchande […]. Le résultat, c’est que la propriété collective ou publique est en grande partie une fiction légale ». Wu est ici assez proche de la pensée du groupe Shengwulian, pour qui l’infrastructure économique en Chine était considérée comme socialiste parce que le secteur d’État dominait.
Sur la question de la forme marchande de la force de travail, les propos de Wu sont fort discutables. Si la force de travail n’est pas une marchandise, quelle forme revêt-elle donc ? Selon Marx, c’est le caractère double de la force de travail, à la fois productrice de valeur d’usage et valeur d’échange, qui donne au travail sa nature marchande et caractérise les relations sociales de production spécifiques au capitalisme. Et c’est ce caractère double qui permet l’extraction économique du surplus sous la forme de surtravail. Cela reste vrai même si cette extraction ne se fait pas dans le cadre du marché, comme c’est le cas en Chine où l’État est légalement le propriétaire du capital social. La prise du pouvoir par le parti communiste et l’usage généralisé de la coercition politique ont simplement remplacé le mécanisme du marché comme moyen d’extraction du surplus.
La question de la « transition » n’est pas séparée de la précédente. « La transition historique de la Chine du socialisme d’État au capitalisme postsocialiste n’a pas été le produit de l’intervention d’une bourgeoisie de propriétaires privés comme dans le cas classique », explique Wu. Au contraire, « la révolution capitaliste chinoise a, en fait, été conduite en grande partie par des forces de la classe dirigeante conjointement avec une classe d’entrepreneurs privés qui jaillit du bas de la société tout en restant dépendante de l’élite politique et souvent introduite par cooptation dans la structure de pouvoir existante ». On pourrait argumenter que c’est précisément l’existence d’une société de classe avec une force de travail marchandise qui permet d’expliquer cette transformation. Sans quoi il faut penser, comme semble le faire Wu, que la force de travail prend la forme marchandise à la suite de transformations produites dans la sphère du champ politique.
Le communiste de conseil néerlandais Anton Pannekoek avait l’habitude de dire que l’histoire est importante en ce qu’elle nous aide à comprendre le présent et à imaginer un autre futur. Dans son livre, Wu réussit à fournir une perspective historique à la GRCP et à la relier au présent. Sa contribution est remarquable. La compréhension de la situation chinoise nécessite ce type d’ancrage. On observe ainsi plus de continuité entre l’ancienne et la nouvelle classes dirigeantes qu’on ne l’admet habituellement. La nature violente, cynique et corrompue de la classe dirigeante chinoise plonge ses racines dans son passé révolutionnaire, dont la « théorie de la lignée » et les politiques des années 1960 qui en ont découlé. Aujourd’hui comme hier, les réformes que le régime promet auront peu de chances de se réaliser, précisément parce que la classe dirigeante est structurée et fonctionne de telle sorte qu’elle ne peut pas se réformer. Ceux qui font les promesses font partie du problème. La structure de la société chinoise et du cadre de l’exploitation du travail, sont le produit d’un développement historique spécifique. La classe dirigeante ne s’écarte pas d’un mode de gouvernance autoritaire : répression ouverte combinée aux vieilles méthodes de contrôle social, à l’image du hukou. Ce fut le cas pendant la GRCP, ce fut le cas lors de la révolte de Tia’anmen en 1989 et c’est toujours le cas à l’occasion des grèves et des soulèvements de paysans actuels.
La faiblesse structurelle de l’économie chinoise est désormais évidente même aux yeux des observateurs les plus superficiels. Comme dans les autres pays capitalistes, sa nature déséquilibrée est condamnée à créer le chaos, des situations de crise aiguës et des catastrophes écologiques et sociales de grande ampleur. Étant donnée la place qu’occupe cette économie dans le système mondial contemporain, les conséquences de ce déséquilibre seront énormes. Mais le livre de Wu nous rappelle avant tout que le peuple chinois n’est pas toujours une masse passive et soumise, qu’il possède une ancestrale culture de révolte et d’auto-initiative. Comme le passé récent le prouve, il est capable de se mettre en mouvement pour subvertir les formes bureaucratiques d’oppression et s’organiser pour créer une société égalitaire. Si cela demeure une perspective terrorisante pour la classe dirigeante chinoise et ses amis, c’est pour nous un important signe d’espoir.
2 Deux livres de Murong Xuecan sont publiés en français (traduction d’Hervé Denès) : Danse dans la poussière rouge, collection « Bleu de Chine », Gallimard, 2013 et Il manque un remède à la Chine, collection « Bleu de Chine », Gallimard, 2015. Une interview de Murong Xuecun, « Un jour ou l’autre, le pouvoir chinois m’accusera d’un crime », Le Monde, 4 juillet 2015.
3 Harvard University Press, 2015. Traduction : La Révolution culturelle à la marge – le socialisme chinois en crise.
4 Un récent exemple : Hongsheng Jiang, La Commune de Shanghai, La Fabrique, Paris, 2014, avec une Introduction d’Alain Badiou. Jiang affirme que pendant la GRCP « la démocratie fit de grands pas parmi les ouvriers ». Il présente également la « bande des quatre » comme « de grands héros prolétariens » et rend hommage « au plus grand dirigeant chinois Mao Zedong. » Dans son Introduction, Alain Badiou décrit la GRCP comme « la mobilisation démocratique la plus mémorable que le monde ait jamais connu ». Pour une critique de ce texte et de ses implications, voir ce texte.
5 Par exemple, Gordon A. Bennett et Ronald N. Montaperto, Mémoires du garde Rouge Dai Hsiao-ai, traduit de la version américaine par Robert Latour et Robert Genin, Albin Michel 1971 ; Ken Ling, La vengeance du ciel : un jeune chinois dans la Révolution culturelle, traduit de la version américaine par Pierre Barroux, Hervé Denès et Albert Schmidt, Robert Laffont, 1981. Hua Linshan, Les années rouges, Le Seuil, Paris, 1987, constitue un important témoignage sur le rôle des gardes rouges du Guangxi.
6 Traduction : Des bonnes origines au droit de se révolter.
7 -Reproduit dans l’ouvrage collectif de la bibliothèque asiatique, Révocul dans la Chine pop, 10-18, oct. 1974, pp. 395-426.
8 Richard Kraus, The Cultural Revolution : A Very Short Introduction, Oxford University Press, 20121, p. 16.
9 —Publié en Français sous le titre : Chinois si vous saviez, Christian Bourgois éditeur, Paris, 1976..
10 Sur la Révolution démocratique socialiste, texte non traduit en français.
11 E. P. Thompson, « Eighteenth-Century English Society : Class Struggle without Class ? », Social History 3, n° 1, 1978, p. 149.