ARTICLE11
 
 

samedi 29 août 2009

Le Cri du Gonze

posté à 12h21, par Lémi
44 commentaires

Bande son de la révolution : un top 10 subjectif pour le Grand Soir (et le petit matin) / Salve 1
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Et si les révolutions du passé avaient échoué faute d’un fond sonore adéquat ? Si la clé de voûte d’une insurrection réussie se trouvait dans l’utilisation adaptée, « in vivo », d’un patrimoine musicale subversif ? L’idée, tentante (même si un tantinet capillaro-tractée), a guidé l’écriture de ce billet, éminemment subjectif. Deuxième salve samedi prochain, sous la plume d’Ubi.

Elle se fait attendre depuis un certain temps, je te l’accorde. C’est que la vieille dame est capricieuse, elle ne sort que quand toutes les conditions sont réunies et le terrain vraiment favorable. Manière de ne pas brader ce qu’elle représente, de se faire vraiment désirer. Mais au fond, ça ne change rien. Parce que, tu le sais : la révolution ne va plus tarder, maintenant.

Pour patienter, pour être prêt le moment venu, Article11 te propose un top 10 des musiques à beugler sur les barricades (ou à brailler dans ta chambre quand tu rêvasses aux mêmes). Pas de chapelles ni de prise de position, juste des pistes correspondant à mon humeur du moment et à une stratégie sonico-libertaire imparable1.


1 - « State of shock » / The Ex

« State of shock »

Ça ne va pas forcément plaire à tout le monde, cette consécration sur la première marche du podium d’un groupe d’obscurs bataves qui toujours refusèrent les paillettes et la facilité. Comparée au « Street Fighting Man » des Stones, par exemple, la portée historique de « State of shock » reste limitée. M’en fous, l’élan est là, tellement porteur, qu’une révolution digne de ce nom ne saurait se passer de cette énergie (pour les puristes, la version originale du morceau, en hollandais, se nomme « Koken Asfalt » ; encore plus remue-tripes, elle n’est pas très présente sur Internet ; ici, une version au son tout pourrave). Comme Fugazi, The Ex est un des rares groupes à avoir su concilier intégrité artistique absolue, ouverture d’esprit totale, refus de tout embrigadement et caetera, ceci sur la durée. Comme le disait peu ou prou Tarantino décernant la palme d’or cannoise à Michael Moore : « S’il est politique, mon choix ? Mais bien sûr qu’il est politique, je ne vois pas en quoi c’est critiquable. »

2 - « Kick Out the jams » / MC5

« Kick out the jams »

Il est temps de tout exploser autour de toi, fils de pute. Blam. Ça pose un début de chanson, mine de rien. En manière de rock politique, impossible d’aller plus loin que le Motor City 5 (en référence à Détroit, ville de l’industrie automobile où le groupe se forma - c’est aussi de là que viennent les stratosphériques Stooges et le non moins mirifique Al Bundy). Distorsion à fond les ballons, concerts explosifs, narcotiques en perfusion, le MC5, précurseur du punk (ceci dès la fin des années 1960, « Kick out the jams » date de 1969), ne tarda pas à se faire un nom. Mais c’est quand ils furent rejoints par John Sinclair, individu notoirement cinglé et politiquement ultra radicalisé (à la tête du mouvement des White Panters, pas des enfants de cœur) qu’ils se mirent à véritablement envoyer du steak niveau message révolutionnaire. Devenu leur guide/manager/gourou, Sinclair les entraina dans une radicalisation effrénée, qui connut son apogée lors de la Convention démocrate de 1968, laquelle partit méchamment en quenouille et vit le groupe livrer une prestation démoniaque. Les flics finirent par choper Sinclair pour possession de quelques joints et le condamnèrent à 10 ans de taule (dont il ne fera qu’une partie, grâce notamment à une mobilisation monstre2 des Grands du monde rock ; John Lennon consacra ainsi une chanson à l’affaire). Par la suite, le MC5 ne retrouvera jamais cette énergie sanglante des débuts. Reste que leur chanson phare est sans doute le plus bel appel à l’émeute qui ait jamais été enregistré. Ici, version live dont l’énergie fulminante fait largement oublier le côté brouillon/braillard.

3 - « Il est cinq Heures, Paris s’éveille » / Jacques Le glou

« Il est cinq heures »

Détournement du tube de Jacques Dutronc par Jacques Le Glou, obscur ami de Debord devenu plus tard producteur de cinéma, « Il est cinq heures, Paris s’éveille » fait partie d’une compilation mythique sortie en 1974 : « Pour en finir avec le travail ». Entre deux pastiches signés Debord et des textes de Vaneigem, on trouve cette petite pépite dudit Le Glou. On est ici en terrain connu, imaginaire soixante-huitard triomphant & mélodie pop franchouillarde en perfusion. Pas grave, la mayonnaise prend illico et l’effet est immédiat : ça te démange méchamment du pavé.

4 - « Anarchy in the UK » / The Sex Pistols

« Anarchy in the Uk »

Tout a été dit sur les Sex Pistols et « Anarchy in the UK », hymne pounk ultime sorti en single le 26 novembre 1976, inutile de s’attarder ni de justifier la présence de ce morceau sur cette liste. De toute manière, le rictus de Johnny Rotten est à lui tout seul un appel à l’émeute. Et puis réviser les classiques ne fait pas de mal. Simplement, rappelons cette sentence du même Rotten, celle qui résume toute la carrière du groupe et son ambition extra-musicale : « Nous ne sommes pas intéressés par la musique, nous sommes intéressés par le chaos. »

5 - « Attaque la Banque mondiale » / Miss Hélium

« Attaque la BM »

Ok : c’est basique. Bourrin, même. Mais juste : c’est foutrement efficace. Miss Hélium, groupe anarcho-tekno-punk traînant dans la mouvance free-parties et celle des squats, a déjà le mérite de rappeler que - quelquefois - il convient de débrancher son cerveau et de foncer dans le tas. Attaque la Banque mondiale / Attaque la Banque mondiale / Et brûle le fric, qu’ils chantent, et on saute sur place en rêvant d’organiser un immense autodafé de banquiers. Habitué à se produire gratis et à jouer en manif (enfin : avant de se mettre en pause, courant 2008), le groupe a mis ses gros beats-hardcores-qui-tachent au service de la cause et animé pas mal de mornes cortèges revendicatifs (si tu n’as jamais défilé en tricotant des gambettes derrière Miss Hélium, Nation-Bastille au son des brûlots du groupe et une bouteille de rosé dans chaque main, il te manque quelque chose).
« Miss Hélium, c’est une arme de guerre contre le système », revendiquait Tof, chanteur du groupe, en une interview sympathiquement accordée il y a deux ans à votre auguste serviteur. De un : on est d’accord. Et de deux : on l’attaque, cette banque ?

6 - « Know your ennemy » / Rage Against the Machine

« Know your RATM »

Je convoquerais illico Rage Against the Machine si je cherchais à donner de l’énergie (voire de l’intelligence stratégique) à une foule en instance de barricades. Pendant une dizaine d’années, Tom Morello (guitariste), Zack de La Rocha (scandeur de brulôts), les deux émeutiers principaux de RATM, accumulèrent les chansons hymnes et les albums rentre-dedans, mêlant allégrement métal, rap et funk pour former un mélange explosif. Cerise sur le gâteau, leur activisme politique était indissociable de leur musique (ils parvinrent ainsi à faire fermer la bourse de New-York pendant quelques heures le temps d’un concert improvisé sur son parvis). Chose rare, ils ne se contentaient pas de brailler, ils faisaient aussi marcher leurs cerveaux3. Comme ils le claironnent dans « Know your enemy », dénonciation au vitriol des sirènes du Rêve américain : "Il est temps de passer à l’action. Pas besoin de clé, on passera en force.4" On ne saurait être plus clair.

7 - « Les anarchistes » / Léo Ferré

Les nanards

Il y a des chansons qui sont hors classement, qu’on ne peut mêler à d’autres car elles sont incomparables, existent en dehors de toute galaxie musicale. Y’en pas une sur 100 et pourtant elles existent. « Les Anarchistes » de Ferré, logiquement, aurait dû faire partie de cette catégorie à part. Mais voilà, si j’avais commencé un classement hors-concours, il m’aurait quasiment fallu en faire un billet à part entière. Alors, paf, sacrilège, je t’ai mis dans cette liste l’hymne remue-cœurs du grand Ferré. A écouter religieusement, le matin venu, quand les insurgés prennent un peu de repos à l’ombre des barricades et cherchent à se ressourcer dans une ambiance sacrée. Avec, en tête, ces paroles toujours d’actualité : « Et puis, faudrait pas oublier que ça descend dans la rue, les anarchistes… »

8 - « Teenage Riot » / Sonic Youth

Teenage

Bordel, j’ai pas encore parlé une seule fois de Sonic Youth dans cette série Public Image Unlimited. C’est largement suffisant pour justifier la présence de « Teenage Riot » (« Emeute adolescente », très bon pendant au White Riot des Clash) dans ce top 10, même si le montage épileptique de cette vidéo (tirée du documentaire « 1991, The Year punk rock explode », bible de mes 16 ans) fout légèrement la nausée.

9 - « La rage » / Keny Arkana

La rage

L’ensemble a beau avoir la subtilité musicale d’un Mégalodon bourré, il n’en suinte pas moins le Coktail Molotov à dix kilomètres à la ronde. Infantilisée par des médias condescendants, Keny Arkana n’en reste pas moins davantage qu’une icône pour altermondialistes niais et trace sa route avec une intégrité éminemment respectable.

10 - « Breaking The Law » / Judas Priest

Judas

Parce que si la révolution ne sert pas au moins un tantinet à se fendre la gueule, on voit mal à quoi elle serait bonne. Et quel clip pourrait rivaliser avec celui de « Breaking the Law » des papis Judas Priest en matière de zygomatiques subversives ? C’est lourd, c’est gras, ça colle aux dents, c’est saturé en esthétique série B, c’est parfait.


Ps : La liste faite d’une traite pour ne pas trop gamberger, je me rends compte que manquent des fondamentaux absolus comme Les Clash, Dylan, les Bérus, NTM, les Stones, Brassens, les Frères Misères, les Ramones, Stupeflip... Il aurait fallu un top 50, pour le moins, mais tu comprendras que je repousse la chose à plus tard. A noter, je reste ouvert à toutes les suggestions, quitte à un jour refaire l’exercice en tenant compte de tes suggestions, lecteur adoré.



1 Furent évacuées de ce Top 10 subjectif les chansons barricadières historiques, du « Temps des Cerises » à « l’Internationale » en passant par la « Makhnovtchina », qui méritent à elles seules un billet distinct. Comme Article11 est une machine bien huilée, tu pourras lire (et écouter) dès samedi prochain les investigations du sieur Ubi sur le sujet.

2 A titre d’exemple, l’affiche d’un concert de soutien :

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3 Le chanteur d’un groupe d’ampleur planétaire interviewant Noam Chomsky - ici & ici -, ça a une certaine gueule, nope ?

4 Now action must be taken We don’t need the key We’ll break in


COMMENTAIRES

 


  • « Et si les révolutions du passé avaient échoué faute d’un fond sonore adéquat ? »

    Dur,dur ce que tu dis:Bella ciao:c’est du pipi de chat ?
    El paso del Ebro,bandiere rossa,nicaraguita des chansons pour picoler ?

    Ben,une chanson pour aller au carton qui me file la chair de poule ce n’est pas Motor city 5 mais plutôt « le temps des cerises ».

    Mais,je suis bon garçon,je veux bien tenir une barricade avec toi si tu écoutes ta musique pour toi même.Je suis d’accord pour Léo FERRE,mais en premier.

    • Joseph Heath, Andrew Potter, Révolte consommée, le mythe de la contre-culture, Naïve, 2005

      En lisant ça, on comprend fort bien que ce n’est pas du côté de ces « révoltés » de la contre-culture anglo-saxonne, qui passent au show bizz à la première occasion, qu’il faut chercher des inspirations révolutionnaires...

      • @ N°D-503
        « Dur,dur ce que tu dis:Bella ciao:c’est du pipi de chat ? » : ouaip, formulation de chapeau un peu maladroite, je te l’accorde, et même je la renie. Et, je le disais en note de bas de page, cette sélection arbitraire fait l’impasse sur les fondamentaux historiques que traitera Ubi la semaine prochaine. On s’est partagé le gâteau, en quelque sorte.
        « Je veux bien tenir une barricade avec toi si tu écoutes ta musique pour toi même. » : le walkman est-il un accessoire valable en manif ? Je suis dubitatif. Peut être que je peux me contenter de chanter à voix basse, alors, qu’on cohabite sans heurts...

        @ NaOH
        On m’a souvent parlé de ce bouquin, je finirais bien par le lire. Reste que je ne parle que de fond sonore, de ce qui donne une claque sonore énergique et bienvenue, pas de modèle politique ou théorique. Et puis, de toute manière, tout ça est très subjectif (c’est dit dans le titre), correspond à mes enthousiasmes au moment de l’écriture de ce billet. D’ailleurs, pour être franc, il est fort à parier que la liste serait totalement différente si je m’y collais dans une semaine. Pas de gourous ni de modèles, simplement des enthousiasmes (et il en faut, non, pour une révolution ?).

        • Pour moi, la question du fond sonore est précisément... une question de fond !
          Je précise tout de suite que les « claques sonores énergiques » je m’en passe, comme de toute agression, et qu’elles ne sont sûrement pas bienvenues.

          D’une part à titre personnel, parce que tout ça, pour moi, c’est de la soupe commerciale sans aucun intérêt. Qu’on me parle de Strange Fruits de Billie Holliday, des Fables of Faubus de Charles Mingus, ou du Survivant de Varsonie d’Arnold Schönberg, ok, mais je n’aurais certainement pas idée de vouloir imposer ça.
          Et d’autre part parce que c’est précisément imposé et que ça empêche toute expression personnelle (on ne lutte pas contre les dB). Enfin, si c’est pour se farcir aux manifs une ambiance super-marché, merci...

          Il en irait tout autrement si les manifestants eux-mêmes s’y mettaient et poussaient des clameurs, ou des chants à faire tomber les murs de Jéricho... Je partage tout-à-fait l’avis de N°D-503 quant au répertoire, avec une préférence pour la langue française, à la place de l’horrible sabir anglo-saxon habituel, et tant qu’à faire de vrais textes de vrais poètes (ça ne manque pas !)...

          Plus généralement, même, cette idée de « manif festive » m’est très déplaisante : un licenciement collectif, par exemple, ne sera jamais une fête... enfin ça dépend pour qui...

          • le jour où je trouve un Supermarché qui passe Sonic Youth en fond sonore toute la journée, je veux bien y passer ma vie !!

            ... s’il y a bien un groupe qu’on ne peut pas qualifier de commerciale c’est bien eux. Archi-dominant dans la contre culture anglo-saxonne ça c’est certain, mais assurément pas de la soupe populaire ... bien au contraire, ce groupe fait partie de ces ovni musicaux qui ont plus oeuvré pour la musique que tous les pseudo-grands groupes qu’on nous assène à la radio. S’il y a bien un groupe qu’on ne nous impose pas, c’est eux .... ils s’imposent d’eux même ! Aucune radio ne prendrait le risque de diffuser un morceau de Sonic Youth, un vieux morceau de 10mn dont les 3/4 paraitraient inaudibles pour les écouteurs de soupe justement ... Et pourtant, dans la discrétion, sans faire parler d’eux, ils représentent un des plus gros piliers du rock actuel, un des plus influents, un des plus originaux et des plus intègres.

            ... après parler de révolution ... musicale assurément !!!

            • @NaOH

              Quand je parle de « claques sonores », cela reste très imagé, et désigne plutôt une forme d’enthousiasme inopiné à l’écoute d’un morceau ou d’un disque, quelque chose qui n’est pas vraiment descriptible et s’impose à vous. Ce n’est pas forcément une question de volume sonore ou d’agression, ça marche aussi avec Barbara ou Mingus (ou Billie Holiday, dont je parlais ici).
              Pour le reste, je vous trouve bien bougon. Ok pour ne pas suivre mes pistes, encore heureux d’ailleurs, moi-même je ne le fais pas, mais je trouve que qualifier l’ensemble de « soupe commerciale » c’est faire preuve d’une certaine mauvaise foi. Et puis, rejeter en bloc l’idée de manif festive, je vois pas trop l’intérêt, si ce n’est nous condamner à des manifs tristes comme des jours sans pain.

              @ Tonio

              « Le jour où je trouve un Supermarché qui passe Sonic Youth en fond sonore toute la journée, je veux bien y passer ma vie !! » : Je n’irais pas jusque là. Sauf si en même temps on peut grappiller dans les étals et rapiner des cubis. Et tout d’accord avec l’enthousiasme pour Sonic Youth même si leurs derniers albums sentent un peu la naphtaline...



  • Pas d’ordre pour le dés-ordre bon sang (pas le bleu, le rouge évidemment) ! Alors Ferré bien sur, « le temps des cerises » aussi, « le déserteur » pourquoi pas et tant d’autres. L’essentiel étant que Lémi nous ouvre la porte.

    • « Pas d’ordre pour le dés-ordre » : après réflexion, je ne peux que te donner raison. Le côté « je décerne des lauriers hiérarchisés » n’est pas vraiment ma tasse de thé, et voilà que je m’y vautre éhontément. Mea culpa donc, le ferais plus. D’ailleurs, je change d’avis comme de chemise, et il vaut mieux que j’arrête ce genre d’exercice : la prochaine fois que je descends en flamme Keny Arkana ou que je balance que le MC5 n’était qu’un ramassis de rednecks gouroutisés, je risque d’être confronté à mes contradictions par le premier exégète léminesque venu...



  • Je vote pour 4,7,8.
    Le reste pourrait être utilisé dans un camp de rééducation, un peu dans l’esprit de la torture festive de Guantanamo (il y aura dans ce camp des gens qui ont beaucoup fauté), et tant qu’on y est un peu d’ étude révolutionnaire de Chopin , une bonne valse de Ravel pour accompagner l’assaut final jusqu’à la rupture, tandis que The Meeting, l’hymne des black Panthers fermera la marche (si on est encore là pour l’entendre).

    • Chopin of course. Et ravel pourquoi pas. Mais je les voyais mal côtoyer Judas Priest. C’est un peu le problème avec ce genre de billets - comme pour une compil d’ailleurs -, il faut tâcher de faire cohabiter des univers musicaux qui n’en ont pas forcément envie. Ca castre un tantinet question exhaustivité et diversité.



  • dimanche 30 août 2009 à 09h32, par pièce détachée

    NaOH :

    « Il en irait tout autrement si les manifestants eux-mêmes s’y mettaient et poussaient des clameurs, ou des chants à faire tomber les murs de Jéricho... »

    On ne peut plus d’accord. Les références de Lémi sont très belles mais, tout ça braillé dans des manifs (ou autres) par des gens dont les trois-quarts au bas mot n’en comprennent pas une seule parole (et ceux à qui celles-ci s’adressent encore moins), ça donne quoi, à part un gloubi-boulga pour aiguillonner des déferlements inarticulés ?

    Gaston Couté, Colette Magny, Monique Morelli, certains trucs de Danielle Messia, de Brel, de Brassens ou de Nougaro, la polyphonie corse A Filetta, François Villon, etc., et même de vieux textes impeccables, rimés ou non, qu’on peut mettre en musique chouette et chantable par tous en cinq minutes... Une copine accordéoniste m’a incitée à pousser des goualantes en impro lors de la micro-brocante de notre association A.L.A.C.O.N. (ouaip, et qui c’est la présidente)... ben... Avec des paroles pleines de sens qu’on peut savourer à pleins poumons, on les menait tous où on voulait. L’eau du lavoir en a tremblé, et la Vierge au cœur de pierre en a fait pipi dans sa culotte du haut de son site panoramique classé.

    Juste pour dire qu’on a beau aimer — moi la première — Anarchy in the UK, ou Rage against the machine, ou le premier Nina Hagen (t’as la tête où, Lémi ?), ça ne fait pas un terreau chargé de chants fertiles où tout le monde se reconnaît ensemble. Entonner TV macht süchtig, j’adore, mais personne ne suit...

    • mardi 1er septembre 2009 à 17h30, par lémi

      « L’eau du lavoir en a tremblé, et la Vierge au cœur de pierre en a fait pipi dans sa culotte du haut de son site panoramique classé. » : J’aurais volontiers donné trois de mes doigts de pied pour pouvoir assister à la scène. Nul doute qu’elle en tremble encore intérieurement.

      Pour le reste, je comprends bien le fondement de vos « critiques », à toi et NaOH. Mais voilà, je suis tombé dans la marmite du punk-rock/punk/rock pendant mon adolescence et je ne m’en extirpe qu’un mois sur deux. Ce mois ci était occupé par lui, je ne pouvais donc élargir mon éventail démesurément (et suis donc passé à côté de chants plus « adaptables » à l’idée d’élan populaire casse-murs. Rappelons cependant que le pan « historique » de la musique révolutionnaire a été confié au camarade Ubi)... Et puis, beaucoup des noms que tu cites me sont inconnus (Monique qui ?), honte à moi, je tâcherais de réparer cet impair...



  • J’ai oublié de dire M E R C I,c’est un régal.Je fais des découvertes.
    Continue. ;-)

    • Merci, ca fait chaud au chœur. Et je compte bien continuer (seulement, je crois que je ferais plus attention en balançant des listes de ce genre. Elles ne peuvent jamais satisfaire personne - moi compris -, puisqu’y manqueront immanquablement les élu(e)s musicaux d’autres oreilles).



  • Bon, alors, chacun ses goûts, hein,( je vois pas comment commencer de manière plus intelligente en essayant d’atténuer la portée de mon blasphème) mais moi, Les Anarchistes, de Leo Ferré, ça m’a toujours fait énormément prodigieusement caguer, ce côté messe, on est entre soi, atrocement aggravé par la clameur qui saluait à chaque fois le début de la chanson dans la salle bourrée du fan-club de la F.A. Pour tout dire, Ferré je le trouve souvent lourdinguement pompier, y’a juste « Avec le temps » qui arrive à m’arracher une larme, c’est parce que j’accepte là de me vautrer dans la complaisance totale, faire gicler la glande du chagrin d’amour (y’en a toujours un à tiédier quelque part, en cherchant bien), la certitude atroce que oui, oui, c’est ben vrai, je vais vieillir et mourir, c’est quand même un événement tellement extraordinairement exceptionnel…
    J’aime bien mieux les petits jeunes en jean serré qui s’agitent et gueulent des conneries.

    • Ça tombe bien, j’adore les blasphèmes. Mais je m’insurge... Il est vrai que certains fans de Ferré sont plus bigots dans leur adoration qu’une colonie de scouts trentenaires, et que ’’Les anarchistes« est loin d’être sa plus grande réussite (je voix bien ce que tu peux y trouver de »pompier" et grandiloquent). Reste que parfois, écouter Ferré me remue les tripes dans les grandes largeurs (horrible, cette expression...), pompier ou pas. Et puis, chanter Baudelaire ou Rimbaud, c’était tellement casse-gueule et ambitieux qu’il est déjà magnifique que ça tienne la route, voire la soulève. (En plus, il m’arrive sporadiquement d’être d’une miévrerie très Ferré-compatible). Enfin bon, on en reviendra toujours au même constat sur ce genre de débat : l’enthousiasme ne se décrète pas, il se ressent. Et puis comme on est tous les deux des fans des crétins beuglant des conneries en jean serré, cette divergence ne devrait pas finir en guerre sans merci... Salutations pimpantes.



  • merci !! ... playlist furieusement rock’n roll, n’en déplaise aux amoureux de la langue française ... de toute façon, la révolution ne se fera pas en langue française, mais j’espère bien en langue internationale et manque de bol c’est quand même l’anglais qui sera scandé sur d’éventuelles barricades. Alors je prends !! TOUT !

    histoire d’échanger un peu ... dans ma playlist, j’aurais mis Rookie de Boysetsfire ... groupe américain bien énervé, hyper engagé, un des rares à avoir été super virulent contre Bush. Et ce titre est un hymne ! Furieusement efficace.

    Certain crieront à la soupe populaire ... mais à l’époque ça ne l’était clairement pas : U2 - New Year’s Day ... je trouve que ça colle bien à l’idée :) (enfin tout l’album War finalement).

    ... et comme j’espère que la prochaine révolution sera écologique ... on ne peut pas se passer de Midnight Oil - Beds are burning ... terriblement à propos.

    Un bon Bad Religion ne fait non plus jamais de mal ... et Only Entertainment sonne plutôt bien dans ce contexte :)

    ... et pour rester dans l’anti-média, Step Down .... de Sick Of It All ... hymne hardcore s’il en est.

    ça fera déjà un bon début .... et personnellement, je serai super motivé pour lever le poing avec ça dans les oreilles ^^

    • Merci pour toute ces pistes. Connais pas Boysetsfire, irais y tremper mes oreilles dès que faire se peut. Je dois avouer que l’idée même de Bono me donne trop de nausées pour pouvoir replonger dans le U2 des débuts et en parler avec intégrité, je m’abstiens donc. Hasta luego, sur les barricades ghetto blasterisées par mes soins...



  • Ah, la belle et bonne intention de sonoriser la révolution :)
    La vieille dame est capricieuse, dis-tu (et j’en conviens).

    Mais qui peut dire si elle n’a pas tout bonnement cassé sa pipe ? Elle se fait désirer, oui.

    Mais si tu as des infos sur le fait qu’elle ne va plus tarder, maintenant, ça pourrait intéresser du monde, non ?
    Car enfin actuellement, il est permis d’en douter.

    Et le temps qui passe n’arrange pas trop ses chances de succès.

    On a peut-être plus besoin de stratégie que de musique, dans de telles circonstances ?

    Je te concède volontiers que l’une est plus ardue que l’autre...

    A part ça je lis souvent A11, discrètement, applaudissant parfois, en un silence assourdissant, de mes quatre mains de primate.

    • « Mais si tu as des infos sur le fait qu’elle ne va plus tarder, maintenant, ça pourrait intéresser du monde, non ? Car enfin actuellement, il est permis d’en douter. » : tous mes indics sont formels, c’est mort et remort, rien à espérer. Adoncques j’en conclus qu’elle ne devrait plus se faire attendre bien longtemps, puisqu’elle surgit toujours à l’improviste...



  • Bon je reviendrai pas sur les Clash mais c’est vrai qui manquent quand mm la ( mais bon c’est parce que je les ai tjs préféré aux pistols )... Y aurait aussi If the Kids are United des SHAM 69 ( qui est un plagiat d’ El pueblo Unido ), j’aurai mis eat the rich de MOTORHEAD et pour se motiver avant la charge sur les forces de l’ordre The Troopers d’Iron Maiden mais la c’est plus par second degrés et puis ça serait tellement drôle.
    Sinon y à Working Class Hero de John Lennon qui aurait sa place.
    Puis également SLOGUN d’SPK rien que pour la partie en français vers le milieu de la chanson. Enfin y en aurait tellement à rajouter ( Hank Williams, Woody Guthrie, Jello Biafra, Nino Ferrer etc )

    Ps : Pour les Anarchistes je préfère la version des Tulaviok.

    • C’est bien le problème de ce genre d’approches typées « Best of », on passe forcément à côté de mille choses. If the kids... par exemple, méritait cent fois d’être sur la liste (mais j’en ai parlé ici), tout comme Guthrie et sa guitare killeuse de fachos, ou les Clash ou...



  • je voudrais pas avoir l’air.............. mais bon, la révolution c’est pour tout mettre par terre, non ?

    Après y a du boulot, faut trier et dé-ranger en mieux et puis......... créer des chansons, des musiques, des bruits, des choses bonnes pour chaque oreille ; pourquoi s’embarquer avec des bagages pendant le voyage ?
    On sera toujours à temps de nous régaler de nos p’tits préférés quand on pourra se reposer !

    Sinon, je suis bien contente de n’être pas seule sur le sujet Férré......... une version des anarchistes ci dessous, j’ai l’impression qu’elle est oubliée.

    Voir en ligne : http://www.youtube.com/watch?v=v-eK...



  • Bon c’est vrai qu’après avoir râler sur ce qui manquait faut quand même dire qu’il est bien ce top.
    Je tenais aussi à rajouter merci pour ce site et son contenu, c’est un plaisir de vous lire. Non parce que faut le dire ca aussi,hein !
    Après on peut râler que la révolution à pas besoin de bande son, j’aime po ca, c’est commercial et pas de la musique etc.. mais c’est justement cette multitude de gouts différents qui nous réunisses sinon on s’habille tous en kaki et à nous les récitals endiablés des Chœurs de l’Armée Rouge ( en espérant la présence des Leningrad Cowboys ).
    Et oui on a le droit de sonoriser la révolution à nous les camions blindés surmontés de baffle et braillant tous et n’importe quoi des bigoteries anar’ en passant par le Hip Hop, le reggae, le ska, le punk, le rock’n’roll ( liste non exhaustive ) enfin bref tous ce qui existe et qui nous fait vibrer !
    Et comme le disait Friedrich :« Sans la musique, la vie serait une erreur »
    Encore un grand bravo et plein de merci pour votre site.

    • lundi 31 août 2009 à 13h53, par pièce détachée

      Ah oui ! Tout d’accord pour la mise au point.

      Surtout s’il y a Hank Williams, Guthrie, Nino Ferrer et ? et ? Les Leningrad Cowboys. Et le No Smoking Orchestra d’Emir Kusturica. Et Ze Article XI Bigue Bande.

      • On dirait une playlist de Philippe Manoeuvre....
        Mais des gouts et des couleurs....
        Allez on rajoute (de force !) :

        Ya Rayah - Dahmane Harachi

        Ouach hna oumma hnna - Nass El Ghiwane

        Les Salauds - Sarclo

        Comment, vous connaissez pas ??? Sarclo, le suisse....
        « Battez les salauds pendant qu’ils sont chauds....pour gueuler, c’est jamais trop tôt !... »

        Salud y pesetas....

        • @ Grease Cat
          Tes compliments ne tombent pas dans l’escarcelle d’un sourd. Et puis, surtout, je suis très fan de ta tirade (exactement ce que j’aurais voulu écrire plus haut en réponse à un commentaire vilipendant l’idée de manif festive, si jamais j’avais eu un minimum d’inspiration) pro révolution sonorisée :

          « Après on peut râler que la révolution à pas besoin de bande son, j’aime po ca, c’est commercial et pas de la musique etc.. mais c’est justement cette multitude de gouts différents qui nous réunisses sinon on s’habille tous en kaki et à nous les récitals endiablés des Chœurs de l’Armée Rouge ( en espérant la présence des Leningrad Cowboys ). Et oui on a le droit de sonoriser la révolution à nous les camions blindés surmontés de baffle et braillant tous et n’importe quoi des bigoteries anar’ en passant par le Hip Hop, le reggae, le ska, le punk, le rock’n’roll ( liste non exhaustive ) enfin bref tous ce qui existe et qui nous fait vibrer ! Et comme le disait Friedrich : »Sans la musique, la vie serait une erreur".

          Tout pareil...

          @ Pièce Détachée

          Le Article11 big band (dans lequel je triangulise) se fera un honneur d’animer le bal...

          @ Remugle

          « On dirait une playlist de Philippe Manoeuvre... » : Coup bas...
          Mais je l’admets, la liste manque un peu de diversité. Comme je le disais plus haut : C’est un peu le problème avec ce genre de billets - comme pour une compil d’ailleurs -, il faut tâcher de faire cohabiter des univers musicaux qui n’en ont pas forcément envie. Ca castre un tantinet question exhaustivité et diversité."

          • mardi 1er septembre 2009 à 20h03, par un-e anonyme

            @lemi...bon, c’est pas volontaire le coup bas, mais ça doit etre mon age...
            Pour info, j’ai le souvenir de l’automne 1988 où l’on preparait les zénormes manifs infirmieres (c’est mon metier - infirmier...).
            Nous étions, comme toujours dans ces moments-là, réunis par de fortes affinités rebelles et emerveillés de la puissance du collectif....dans nos soirées fievreuses à rediger tracts et motions, on écoutait beaucoup Janis Joplin, on buvait beaucoup, c’est bon pour la santé, et on se passait en boucle de la musique baroque, avec Jordi Savall à la viole de gambe...putain, on était rafinés dans ces temps là !...
            Salud y pesetas



  • Et Colette Magny dont la révolution passait aussi (surtout) par le bouleversement de l’écriture, de la musique, de la voix ? Colette si radicale que ni la radio ni la télé ne la passaient (à part Melocotton), dont les cris anticipèrent ceux des punks, avec une autre musicalité !



  • Je ne voudrais pas dire mais vous auriez quand même pu mettre Jean Ferrat, non ?

    Voir en ligne : http://reversus.fr



  • J’ai pas lu l’article mais utiliser le mot capillotracté dans la bande annonce j’apprécie bc.
    Article 11 un site en devenir !



  • Ben tu vois, Lemi, contrairement à ce que tu disais sur ton précédent post, en com, on est surement assez en accord, musicalement parlant... Maintenant, la révolution peut se faire silencieusement, tant qu’elle se fait... Suis quand même pas persuadé qu’un fond sonore soit indispensable à ça, si la révolution deviens une superproduction cinématographiée, avec bande son à acheter à la sortie, il est indéniable qu’elle est déjà condamnée (joke)...

    Pour moi, en dehors du remue-méninge que peut représenter la musique, c’est avant tout un bonheur qui me suit quasiment tout au long de la journée... et quel qu’en soit le style.

    Bon, je prends ton sujet pour ce que je pense qu’il est : une expression d’un goût musical prononcé... et le plaisir de partager un moment musical bien moins con que ce que nous balancent les « radios libres » !

    Je n’aurai pas été jusqu’à sortir un top 10, mais ton choix est excellent, et, s’il n’engage que toi, force m’est de constater que les morceaux que tu met, Ferré compris, font parti de ceux qui tournent régulièrement chez moi...

    Voir en ligne : http://taz-network.ning.com/



  • vendredi 4 septembre 2009 à 12h20, par un-e anonyme

    Bonjour,
    j’ai été surpris par une remarque sur Kusturica à propos de Michael Moore, que j’aimerais bien que tu nous dises où tu l’as trouvé à l’occase.

    Après une petit recherche sur le web, il me semble bien que Kusturica n’a pas décerné la palme d’or à Michael moore pour 9/11, puisqu’il ne faisait pas parti du jury en 2004.

    Sa composition était alors :
    Président du Festival : Quentin Tarantino (USA), du 12 mai au 23 mai 2004. Membres du jury : Emmanuelle Béart (France), Edwidge Danticat (USA), Tilda Swinton (Royaume-Uni), Kathleen Turner (USA), Benoît Poelvoorde (Belgique), Jerry Schatzberg (USA), Hark Tsui (Hong Kong) & Peter von Bagh (Finlande).

    Salutations

    Voir en ligne : http://www.cineartistes.com/festiva...



  • dimanche 6 septembre 2009 à 01h03, par tapir rouge

    Merci beaucoup !
    Entre Gotingen de Barbara et State of Schock, je suis vraiment heureux de connaitre ce site et cette chronique musicale, et tout ce site

    merci encore de quoi nous faire croire que les petits matins existent



  • Les révoltés reprennent toujours les chants précédents, le patrimoine comme tu l’appelles. Ce sont leurs racines. Mais il commence à y avoir vraiment révolution quand on se met à inventer des chants nouveaux, des slogans nouveaux, quand on s’envole au-dessus du nid de coucous. « Du passé faisons table rase ». À un moment, tous les chants d’autrefois, toutes les musiques d’hier, quelles que soient leurs qualités et leur présence justifiée dans un Top 10 ou 50, paraissent ringards, inadaptés à la situation.

    Dans « Slogans pour les prochaines révolutions », un petit bouquin à savourer, Langlois le dit fort bien :
    « Le vrai révolutionnaire ne sait pas ce qu’il va créer »,
    « Prononce des mots qui ne sont jamais sortis de la bouche de personne »
    « Retire les écouteurs de tes oreilles. Entends le bruit de la révolution qui gronde »,
    « Linguisons, langageons, vocabulisons, parlibérons-nous ! »,
    « Nique ta gramaire ! »,
    « La révolution fait bander mieux que le Viagra »,
    « Poètes à vos luths de classe ! »,
    « Si vous avez du mal à dire non, dites merde ! ».

    Mais surtout « Principale question : Quand fait-on la révolution ? »

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