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lundi 21 décembre 2009

Médias

posté à 23h58, par Benjamin
18 commentaires

Peter Watkins, une bouffée d’oxygène dans la pollution audiovisuelle
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Dans son livre « Media Crisis », Peter Watkins analyse le lavage de cerveau médiatique, la pauvreté de la forme et l’inanité du fond de la plupart des productions contemporaines. Portant aussi la casquette de réalisateur, il applique dans ses films des principes inverses à ceux qui président à l’abrutissement des masses. Une efficacité cinématographique démente et un impact politique non négligeable.

« Il y a beaucoup de façons de parler de la télévision. Mais dans une perspective « business », soyons réaliste : à la base, le métier de TF1, c’est d’aider Coca-Cola, par exemple, à vendre son produit. […] Or pour qu’un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible : c’est-à-dire de le divertir, de le détendre pour le préparer entre deux messages. Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain disponible.  »
Patrick Le Lay, PDG de TF1, in Les Dirigeants français et le Changement (2004).

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Cette phrase du PDG de TF1 est désormais mythique. Ce qui ne l’empêche pas - bien au contraire - de fournir une parfaite illustration à l’analyse et à l’œuvre de Peter Watkins. C’est que l’auteur de Media Crisis n’a eu de cesse, depuis son premier film, de prouver par A + B, d’une manière parfaitement logique et lumineuse, ce qu’avoue sans fard Patrick Le Lay. Et qu’il s’est acharné sur les ressorts, tenants et aboutissants du grand cirque médiatique.
Mais Peter Watkins ne s’est pas contenté d’une posture de critique des médias : il a aussi mis les mains dans le cambouis, produisant une œuvre audiovisuelle majeure. Belle façon de mettre en pratique ses principes et de montrer qu’un autre type d’audiovisuel est possible.

Un incontournable de l’histoire du documentaire et de la critique des médias, donc. Un Anglais déjanté - surtout - qui a, tout au long d’une carrière loin d’être terminée, réalisé des docu-fictions plus étonnants les uns que les autres. C’est ainsi : chacune de ses productions a une histoire très particulière en même temps qu’une grande portée politique. De quoi bousculer les cadres et normes cinématographiques et télévisuels habituels.
Comme toute œuvre réellement subversive, dans le fond aussi bien que dans la forme, le travail de Peter Watkins s’est retrouvé marginalisé. Ses films ont régulièrement été censurés, empêchés de sortir en salle ou interdits de diffusion quand ils n’ont pas fait l’objet de tentatives de normalisation car jugés « inmontrables ».

Media Crisis : le Spectacle au microscope

Au fur et à mesure de ses réalisations – et des rejets qu’il a essuyés – Peter Watkins a affiné sa vision du monde médiatique. Puis il l’a livrée dans Media crisis, publié en 2004 aux éditions Homnisphères. La substantifique moelle de sa réflexion, donc.

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Un bouquin passionnant. Et pas vraiment simple, aussi. Pour être franc, j’ai même eu un peu de mal à le finir, un souci apparemment récurrent chez ceux qui s’y sont attelés… Mais cette complexité n’enlève rien à la validité et à la force des « théories » de Watkins - si tant est qu’on puisse encore les qualifier ainsi, au vu d’une réalité les validant à chaque instant.

Dans ce bouquin - entièrement disponible en ligne sur son site, ICI - Peter Watkins livre une critique constructive et sanglante de ce qu’il appelle les « MMAV », Medias de Masse Audiovisuels et du rôle de ceux-ci dans la société de consommation.
Les MMAV ? Dans l’ensemble, nous avons tous forcément une idée - au moins floue - de ce que c’est. La forme des productions de la télévision, de la radio et du cinéma n’ont plus rien de neutre, si elles l’ont jamais été. Ça saute aux yeux. Autant que cette évidence : on ne peut dissocier le média du message transmis, non plus que le fond de la forme.
Pourtant :

Dans sa très grande majorité, remarque Peter Watkins, la société refuse toujours de reconnaître le rôle de la forme et des processus de diffusion et de réception des productions des MMAV. Ce qui signifie que les formes de langage qui structurent les messages des films ou des programmes télévisés, ainsi que les processus tout entiers (hiérarchiques ou autres) de diffusion à l’attention du public sont complètement négligés et ne font pas l’objet de débat. Consécutivement à ce manque de débat critique public, plus de 95% des messages diffusés par les MMAV sont structurés selon le principe de la Monoforme.

Ce « manque de débat critique public  » est l’un des chevaux de bataille de l’auteur de Media Crisis. Non que les téléspectateurs souhaitent des émissions de mauvaise qualité : ce sont les professionnels des médias qui le leur imposent. Et ce bien que personne n’a jamais demandé aux spectateurs leur avis. C’est même un véritable tabou, provoquant les ricanements du monde audiovisuel. Faire participer les téléspectateurs aux grilles de programme ? Et puis, quoi encore ? Pourquoi pas leur proposer de se mêler du processus de création du film tant qu’on y est ?
Dans ce manque de débat public, le formatage induit par les MMAV joue aussi un rôle essentiel. Comment le spectateur pourrait opter pour autre chose, lorsqu’aucun choix ne lui est laissé et qu’il est gavé de saloperie depuis sa naissance ? Quand un véritable lavage de cerveau s’ingénie à réduire tout sens critique, à donner constamment le goût des mauvaises choses et de la facilité intellectuelle, sans jamais - ou presque - proposer la moindre alternative valable ou crédible ?

Ce formatage, c’est celui de la monoforme. Une part immense de ce qui est produit (films cinématographiques, émissions de télévision, journaux télévisés, feuilletons, soap-opéras,comédies, reality-show et documentaires), y est soumise. « Il en résulte une forme de langage caractérisée par : un espace fragmenté, des rythmes répétitifs, une caméra en mouvement perpétuel, un montage rapide et saccadé, un bombardement de sons denses et agressifs, et un manque de silence ou d’espaces de réflexion. »1
Chacun voit parfaitement le genre de films dont il est ici question. Sans forcément se rendre compte que la diffusion des techniques auxquelles Peter Watkins fait référence s’étend à quasiment toute la production audiovisuelle contemporaine, dans quelque pays que ce soit. En soi, cela pourrait ne pas être un grand mal, mis à part l’uniformisation qui en résulte. Ce serait oublier que ces processus ne sont pas neutres, mais qu’ils se placent au service d’une idéologie politique libérale et d’une véritable entreprise d’abrutissement.

Plus fondamentalement, ce que les professionnels des MMAV ont accompli durant les 20 ou 30 dernières années, c’est la diffusion et l’implantation efficace d’un « climat » psychologique qui a servi de levier à l’idéologie consumériste, écrit Watkins. […] En d’autres termes, l’objet même du consumérisme, qui sature le rendement des MMAV, est renforcé à de nombreux niveaux inconscients, par un processus caché et hiérarchique - avec son propre discours sociétal souterrain, où il apparaitrait que nous sommes incapables (ou non désireux) de vouloir l’identifier ou de le reconnaître.
Ce climat, soigneusement inculqué, injecté au plus profond de notre psyché par les formes saccadées et fragmentées du langage des MMAV et par l’industrie du cinéma commercial à l’échelle globale a entraîné chez nous une sérieuse diminution de notre capacité de concentration, un manque de tolérance pour des processus soutenus ou pour n’importe quelle forme de communication qui exigerait d’y consacrer plus de dix secondes, une amnésie de plus en plus généralisée face à notre histoire (surtout chez les jeunes générations), un besoin perpétuel et accru de changements. Tout cela a permis de façonner une société manifestement plus privatisée, où règnent l’insécurité et une agitation constante. Une société où la pensée compétitive, l’égotisme, le gain personnel, et l’indifférence envers la violence et la souffrance deviennent de plus en plus « la norme » et où disparaissent la pluralité authentique et l’interaction communautaire.

Un point aussi développé dans un article publié dans Le Monde Diplomatique à l’occasion de la sortie du film La Commune en 2000. Un papier reprenant notamment cette citation du réalisateur : « La télévision a imposé des structures narratives totalitaires à la société sans que nul ait eu le temps de réagir, à cause de sa rapidité, de son arrogance et de son côté mystérieux. C’est ça, la « monoforme » : un torrent d’images et de sons, assemblés et montés de façon rapide et dense, une structure fragmentée mais qui donne l’impression d’être lisse. (…) En dépit des apparences, la « monoforme » est rigide et contrôlée, elle ignore les possibilités immenses et sans limites du public que les médias estiment immature. »

En fait, le livre mériterait un billet en soi. Mais ce n’est pas mon propos. Et puis, je ne vais quand même pas vous mâcher tout le boulot : on pourrait m’accuser de « monoformisme »…2

Mise en pratique : la réalisation selon Watkins

Pour la partie vraiment cinéphile et plus « technique » de l’affaire, je laisse la parole à ceux qui le feront bien mieux que moi3. En revanche, je vais revenir sur une critique politique qui s’exprime notamment dans la réalisation de « docufictions », en lesquels Peter Watkins met en application ce qu’il préconise. Des œuvres totalement hors formats, dans leur durée - qu’il s’agisse des 5 h 45 de la version originale de La Commune ou des 14 h 30 du Voyage, un film pacifiste tourné dans une douzaine de pays (nul besoin de préciser que peu de télévisions sont prêtes à montrer des films pareils…) - comme dans leur montage et leur réalisation : les plans longs, qui laissent toute sa place à la réflexion du spectateur, sont privilégiés.

Le concept de « docufiction » prête d’ailleurs lui-même à réfléchir. Chez Watkins, il s’agit d’entremêler réalité contemporaine, reconstitution historique et implication des « acteurs ». Le réalisateur filme aussi régulièrement avec des cameras à l’épaule, pour donner une plus grande impression de réalisme.
Les acteurs sont pour la plupart des amateurs, que Peter Watkins implique dans le processus créatif du film en les faisant réfléchir à leur propre histoire - c’est essentiel : le public se trouve « devant et derrière », partie prenante de la création du film et actif dans sa manière de le regarder. Ainsi de Culloden (1964), film qui recrée les conditions de cette bataille (un massacre, plutôt) au cours de laquelle un millier de highlanders écossais se sont fait écrabouiller par les régiments britanniques d’élite : le tournage s’est effectué sur le champ de bataille et les acteurs (pour une bonne part, des descendants des combattants loqueteux, opprimés, mal organisés et très inférieurs en nombre qui se sont fait étriper pendant cette boucherie) ont recréé leur propre histoire.

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En faisant travailler ces acteurs non professionnels, il s’agit de jouer sur leur conscience politique. De déclencher leurs réactions à chaud. De les aider à oublier la camera. Et de se rapprocher ainsi au maximum de la réalité, de toucher à une authenticité que ne pourraient pas rendre des acteurs professionnels. Dans les films de Peter Watkins, chacun conserve souvent son propre rôle, à peine travesti par les besoins scénaristiques. Ce qui explique pourquoi les spectateurs peuvent se retrouver soufflés par l’impression de réalisme.
Dans La Commune, le réalisateur a été jusqu’à recruter des acteurs amateurs en fonction de leurs opinions conservatrices, avant de les habiller en soldats versaillais, de les réunir dans une pièce et de les inviter à discuter. En résultent des débats et des prises de position puant le naturel (du genre : « Il faut de l’ordre dans la société, c’est évident, sinon ça ne peut pas marcher… »). Dans le même temps, le spectateur est constamment renvoyé à sa propre condition, que ce soit par des adresses directes ou au travers de procédés ana-ou-u-chroniques (qui n’ont pas eu lieu). Dans La Commune, c’est notamment le rôle de deux journalistes-acteurs, qui interviewent les communards tout au long du film.

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Un processus si efficace que les acteurs et certains passionnés du film se sont organisés en une association, Rebond pour la Commune, dont le but est de faire perdurer le processus réflexif du film. Une démonstration parfaite que, à l’inverse des productions prédigérées dont on ne se souvient pas cinq minutes après la fin, Watkins arrive à susciter un véritable processus de réflexion. Un réel boulot politique, quoi. Mais aussi un vrai danger pour les tenants de l’ordre établi.

Dans le même ordre d’idées, Peter Watkins a également eu recours à des acteurs amateurs authentiquement réactionnaires dans Punishment Park. Le réalisateur y imagine un tribunal américain, constitué de ces conservateurs membres de l’establishment WASP et chargé de juger de jeunes militants pour les droits civiques, gauchistes, objecteurs de conscience et féministes à la fin des années 60. Alors que l’état d’urgence a été décrété dans le pays, ces gens sont accusés de s’être rebellés ou d’avoir manifesté pour leurs idées. Et ? Ils ne se démontent pas et défendent leurs opinions jusqu’au bout. Ce qui donne lieu à des débats politiques passionnants. Résultat : oubliant que n’est « qu’un » film, le spectateur se retrouves vite debout, ses petits poings serrés de rage, haranguant la télévision pour répondre à ces immondes salopards4 .
Une fois jugés, les rebelles du film ont le choix entre une peine de plusieurs années de prison ou être relâchés dans « Punishment Park ». Cette dernière option donne lieu à une chasse à l’homme sauvage : les récalcitrants sont abandonnés en plein désert, sans eau, et doivent parvenir à un endroit donné, situé à environ trois jours de marche, alors que des flics barbares, armés jusqu’aux dents et tout émoustillés par l’odeur du sang de beatnik sont lancés à leur poursuite en jeep. Pas de « happy end » téléphoné dans ce film, mais de vrais accès de rage de la part de ceux qui jouent les flics, au cours de scènes si troublantes qu’il faut faire un effort pour se souvenir que ce n’est pas la réalité. Certains, d’ailleurs, prenant le film en cours de route ou pas assez renseignés sur les procédés bizarres de son réalisateur, ont cru jusqu’au bout que tout cela était vraiment arrivé.

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Watkins - enfin - est un champion de la censure5. À tel point que les attaques contre ses films donnent la trame de ses déplacements géographiques : cet Anglais a l’habitude de prendre le chemin de l’exil après le mauvais accueil porté à ses opus. Chronologiquement, il a vécu en Suède, puis aux États-Unis au début des années 70 ; la critique déchainée contre Punishment Park l’a vu partir pour la Norvège, puis le Danemark ; après un passage en Lituanie, il est désormais installé en France.

Le film le plus emblématique des complications faites à la diffusion des œuvres de Watkins est probablement La Bombe (The war game)6. Un docufiction né un peu avant 1965, quand la BBC a demandé à Watkins de réaliser un film sur ce qui se passerait au lendemain d’une attaque nucléaire en Grande-Bretagne. Le réalisateur a tellement bien fait son boulot que la BBC a refusé de diffuser le résultat… Plus de 40 ans après, on comprend encore pourquoi, tant le film fait froid dans le dos. Très documenté, il mêle si bien images fictionnelles et véritables informations qu’il laisse planer l’étrange sensation qu’on pourrait (encore aujourd’hui) parfaitement se prendre un bout de ciel bleu sur le rable sans le moindre coup de semonce.
La Bombe n’a jamais été montré à la télévision anglaise - soi-disant pour des raisons de qualité, mais Watkins a découvert par la suite qu’il avait en fait été abandonné à la suite de pressions du gouvernement. Mais la BBC a aussi fait tout ce qu’elle pouvait pour empêcher la diffusion de ce film pourtant récompensé par le prix spécial du Festival de Venise en 66 et par l’Oscar du meilleur documentaire en 67 (fait très rare pour une fiction).

Mais… ce billet s’étire tel une limace en chaleur, et je n’ai même pas développé le quart de ce qu’il y aurait à dire sur Peter Watkins. Le mieux est sans doute de voir ses films7, de jeter un coup d’œil à son site et d’y trouver l’un ou l’autre de ses auto-entretiens (il ne donne désormais plus jamais d’interviews, histoire d’être certain que ce qu’il a à dire ne sera pas dévoyé), ou de regarder cet entretien réalisé en 2001 par l’association Rebond pour la Commune.

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Qu’il dénonce la course aux armements, la guerre du Vietnam ou l’uniformisation des médias de masse, Watkins reste irréprochable, dans le fond comme dans la forme. Surtout, il donne envie de fusiller, en un même mouvement, ces salopards de conservateurs ricains et les versaillais, de danser la farandole au milieu des communards et de prendre les armes avec les Écossais. Bref, ça réveille salement.



1 Pour ceux qui veulent une définition un peu plus exhaustive de la chose, toujours par Peter Watkins : « La monoforme est le dispositif narratif interne montage, structure narrative, etc.) employé par la télévision et le cinema commercial pour véhiculer leurs messages. C’est le mitraillage dense et rapide de sons et d’images, la structure, apparemment fluide mais structurellement fragmentée, qui nous est devenue si familière. … De nos jours, la monoforme se caractérise également par d’intenses plages de musique, de voix et d’effets sonores, des coupes brusques destinées à créer un effet de choc, une mélodie mélodramatique saturant les scènes, des dialogues rythmés et une camera en mouvement perpétuel. Il existe plusieurs variantes de la monoforme : la structure narrative mono-linéaire classique, utilisée dans les films de cinéma, les sitcoms et les feuilletons policiers ; le mélange fluide de thèmes et d’images apparemment décousues, propre aux chaines de télévision musicales telles que MTV ; la structure saccadée et fragmentaire des informations télévisées du monde entier ainsi que de nombreux documentaires …. Ces variantes de la monoforme ont des caractéristiques communes : elles sont répétitives, prévisibles, et fermées à toute participation des spectateurs. Contrairement aux apparences, elles s’appuient toutes sur une utilisation très rigide et contrôlée du temps et de l’espace. Ces normes sont développées par et pour les médias et non pour servir l’énorme potentialité de désirs existant chez les spectateurs. Il est fondamental de comprendre que ces variantes de la monoforme sont toutes fondées sur l’hypothèse convenue que les spectateurs sont immatures, et qu’ils ont donc besoin de dispositifs de présentation familiers pour être « accrochés » (i.e. Manipulés). C’est pourquoi tant de professionnels des médias s’appuient sur la monoforme : les ingrédients tels que la rapidité, le montage-choc, le manque de temps et d’espace, garantissent que les spectateurs n’auront pas le loisir de réfléchir à ce qui leur arrive. »

2 Même si c’est quand même à signaler : Watkins critique également l’ensemble du système éducatif et l’enseignement aux (et des) professionnels des médias, qui n’apprennent plus que la manipulation de masse et la constante reproduction d’un ordre débilitant. Le médium est le message, le fond et la forme sont liés, la structure a clairement un impact sur la réception. Il revient également sur l’idée que nous « exprimons une réticence inconsciente à critiquer une source de plaisir et de relaxation ». Et enfin, le plus important, « le « changement » réellement prôné par les MMAV est le changement permanent et fragmenté véhiculé par la Monoforme qui garantit que nous n’aurons jamais le temps nécessaire pour réfléchir, ou penser de manière critique – seulement le temps d’avaler le message destiné à flatter nos désirs artificiels et notre soif de consommation. »

3 Par exemple dans ce papier.

4 Je ne résiste pas au plaisir de livrer ici l’analyse parfaite, par l’immense Hunter S. Thompson, du comportement de ce type d’enfoirés. L’auteur de Las Vegas Parano les surnomme les « requins marteaux », espèce dont John Wayne serait un parfait représentant :

« Ce pays est si fondamentalement pourri qu’un sale bigot comme John Wayne y est un grand héros national. Thomas Jefferson aurait été horrifié par un monstre tel que Wayne, et Wayne (eût-il pu effectuer le saut dans le temps) aurait été fier de pouvoir frapper à coups de crosse un « sale radical » comme Jefferson.

John Wayne est le dernier symbole avarié de tout ce qui a foiré dans le rêve américain il est notre monstre de Frankenstein, un héros pour des millions d’individus. Wayne est l’ultime « Américain », voire l’Américain final. Il bousille tout ce qu’il ne pige pas. Les ondes cérébrales du « Duke » sont les mêmes que celles qui parcourent le cerveau du requin-marteau, une bestiole si stupide et si vicieuse que les scientifiques ont abandonné tout espoir d’y comprendre quelque chose, et le décrivent comme un « archaïsme » inexplicable. Le requin-marteau, disent-ils, n’a pas évolué depuis un million d’années. C’est une bête impitoyable, stupide, qui ne sait faire qu’une seule chose : attaquer, blesser, mutiler et tuer.

La science moderne ne dispose d’aucune preuve comme quoi le requin-marteau aurait eu des ancêtres, apparemment il n’a pas non plus de descendants. Sauf que, sur cette question, la science se trompe, du moins en partie. Comme bon nombre d’espèces, le requin-marteau a évolué en changeant d’habitat. Les plus évolués d’entre eux ont quitté leur habitat marin pour apprendre à marcher sur terre. Ils ont appris à parler américain malgré leur cervelle de moineau et certains d’entre eux ont migré à Hollywood où ils ont été fort prisés en tant que figurants (voire héros) et utilisés dans des centaines de films dits de « cowboys ».

Le nouveau requin-marteau faisait un cowboy parfait. Il était vicieux, stupide et ignorant de tout hormis de ses propres frousses et de ses propres appétits. Il tabassait à mort quiconque le mettait mal à l’aise, quelle qu’en soit la raison. Le requin-marteau faisait un guerrier parfait. Il défendait le drapeau. N’importe quel drapeau. Il a appris à comprendre des mots tels que « ordres » et « patriotisme », mais le secret de sa réussite était son goût immémorial pour le sang. C’est dans l’action qu’il se révéla. Mais il n’avait pas un sou de jugeote ; aussi fallait-il le guider.

Le requin-marteau était le type que vous engagiez lorsque vous vouliez buter des Indiens. Il était également disponible pour casser du nègre. Puis, plus tard, pendre haut et court les Wobblies. On lui a fourni un badge et une matraque et, aux alentours de 1960 ou peut-être même 1860 , l’Éthique du requin-marteau a été le Rêve Américain. (…) »

5 Ou du moins : de la critique assassine. Il aurait d’ailleurs pu faire sienne la citation de Jonathan Swift, en exergue notamment de La Conjuration des imbéciles : « Quand un vrai génie apparaît en ce bas monde, on le peut reconnaître à ce signe que les imbéciles sont tous ligués contre lui. »

6 Film qu’il est possible de visionner sur Youtube, ici.

7 Disponibles en DVDs, ainsi que sur DailyMotion ou Youtube pour ceux qui ne peuvent pas se permettre de les acheter


COMMENTAIRES

 


  • mardi 22 décembre 2009 à 10h40, par Calagan

    Article intéressant. Sauf que personnellement je n’ai jamais apprécié le style de Watkins, qui me paraît d’une stupéfiante naïveté théorique : comme si le fait de faire « participer » les acteurs, de les faire réfléchir à leur propre histoire (que la plupart du temps ils ne connaissent que très vaguement) pouvait produire quelque chose qui dépasse l’intensité d’une discussion entre potes au comptoir d’un bar.
    C’est particulièrement éloquent avec la Commune, dont l’intensité dramatique est selon mon point de vue proche de zéro, avec un montage complaisant de plusieurs heures et des réflexions politiques qui nous ramènent, encore une fois, aux discussions entre potes : « y’en a marre de l’oppression », « on a pas de quoi manger » etc. (sauf que je préfère discuter avec mes potes qu’être scotché 6h devant un film qui ne m’apprend rien). Comment la Commune peut-elle aujourd’hui être représentée comme un psycho-drame collectif un peu mou, alors que ce qui s’y est joué est une incroyable capacité à s’organiser et s’associer, qui invoquait une riche culture politique dont on serait bien en peine de trouver les conditions de possibilité chez nous aujourd’hui. Représenter la Commune en utilisant des acteurs amateurs, en leur demandant de lire quelques livres et de « se mettre dans la peau de leur personnage », ceci en espérant obtenir quoi que ce soit d’autre que des types bien d’aujourd’hui englués dans les problèmes d’aujourd’hui en train de faire semblant de faire la révolution au XIXe siècle me semble aussi naïf que de penser que la télé réalité représente la réalité.

    Concernant les mass médias, il a évidemment raison : ce n’est qu’une immense machine à rendre con et à isoler (pour parler bref). Mais que l’on nous épargne les habituels poncifs sur Watkins censuré ou Watkins jamais passé à la télé : la télé la plus progressiste du monde ne monopoliserait jamais 6h (un 1/4 de 24h) de ses programmes pour un film aussi ennuyeux que la Commune. Entre 2 ou 3 Cassavetes et un Watkins, le calcul est vite fait… Je dis Cassavetes, je pourrais dire aussi 2 ou 3 Pierre Carles (personnage bien plus intelligent et radical que Watkins, me semble-t-il) …
    Enfin, cette vieille lune sur la participation du spectateur au spectacle proposé me semble là aussi d’une incroyable naïveté (ça l’était déjà dans les années 60). Pour participer au monde, il nous suffit de sortir dans la rue. Assister à un spectacle, c’est justement recevoir quelque chose de trop puissant pour être vécu quotidiennement. Et la plupart des œuvres sont mauvaises parce qu’elles ne dégagent pas grand chose, que l’intensité du quotidien leur est supérieure (enfin ça dépend pour qui : Julie Lescaut peut très bien vous mettre un claque après 12h de boulot ennuyeux). De plus, la posture du spectateur n’est jamais passive (comme le montre bien Jacques Rancière), puisqu’il juge, il renouvelle ses attentes par rapport à ce que lui propose le spectacle, il navigue dans les espaces de liberté et de respiration d’un film, il y prend ce qu’il souhaite et ce qu’il peut.
    Quand on s’imagine faire du bon cinéma en laissant toute liberté à l’acteur (qui donc ne fait que représenter le spectateur, ce dernier ne participant pas plus qu’avant), on a juste un humain maladroit devant une caméra, comme il se doit pour un film de vacances. Faire monter le spectateur sur scène pour le faire chanter avec le groupe, c’est s’attendre à avoir un type qui ne chante pas super bien, ou qui chante un truc qui n’a rien à voir… Je ne vois pas comment ça peut être autrement.

    Je suis un peu dur avec Watkins, surtout que le personnage est très respectable, mais je suis un peu fatigué de ce consensus mou autour de ces « grandes figures de l’underground » qui ne me paraissent pas aller bien loin dans leurs recherches esthétiques. Tout ça parce qu’on ne peut qu’être d’accord avec eux sur le plan politique (mais encore une fois, rien de nouveau : tout un tas de philosophes et de journalistes progressistes parlent des médias comme ça).

    Tout cela dit pour alimenter un possible débat

    Amicalement

    • mercredi 23 décembre 2009 à 05h50, par Alain

      C’est vrai que La Commune a des longueurs, que le jeu des acteurs n’est pas toujours bon et qu’il y a trop de redites (à moi aussi, le « on a pas de quoi manger » répété mille fois, ça m’a tapé sur le système).

      En revanche, j’ai beaucoup apprécié La Bombe et Punishment Park. Tu les as vus ? Qu’en as-tu pensé ?

      • samedi 26 décembre 2009 à 16h02, par Benjamin

        @ Alain,

        Ca m’étonnerait que Calagan les ait vus, ou il en aurait probablement parlé dans son commentaire. Personnellement c’est aussi mon sentiment. Je trouve La Commune plus difficilement défendable, moins efficace et pas totalement abouti (d’accord pour les longueurs et le reste de l’analyse que tu en fais), que Punishment Park et la Bombe qui m’ont toujours laissé pantois, aussi bien au niveau du fond que de la forme.
        « L’intensité » dont parlait Calaga,n me semble en effet bien plus forte dans ces deux films là, à voir avant La Commune (pour ceux qui auraient quand même encore envie de jeter un coup d’oeil à ce que fait Watkins...).

    • samedi 26 décembre 2009 à 16h00, par Benjamin

      Bon, le voilà bien alimenté, le débat.

      « La Commune » n’est pas le film – ou le document - ultime sur le sujet, on est d’accord. Il y a des longueurs (le début, particulièrement, met du temps à décoller), le « jeu » des acteurs (ou son absence) sont parfois fatigants, ça sonne faux par moments et on pourrait en effet attendre un peu plus de profondeur « théorique » autour de cet événement.

      « Représenter la Commune en utilisant des acteurs amateurs, en leur demandant de lire quelques livres et de « se mettre dans la peau de leur personnage », ceci en espérant obtenir quoi que ce soit d’autre que des types bien d’aujourd’hui englués dans les problèmes d’aujourd’hui en train de faire semblant de faire la révolution au XIXe siècle me semble aussi naïf que de penser que la télé réalité représente la réalité. »

      Théoriquement, bien sûr, ce n’est pas faux. Seulement si on part du principe que Watkins n’a pas voulu produire un « documentaire » sur la Commune, mais travailler à une hypothétique « auto-reconstruction » historique autour du sujet, qu’il n’a pas voulu montrer la façon exacte (ou la plus proche de la réalité possible) selon laquelle ça s’est passé, parce qu’« objectivement » impossible, ni trop guider le « spectateur » comme l’acteur (comme c’est fait habituellement dans la plupart des films, séries ou documentaires se voulant « historiques »), mais lutter contre la transmission verticale et la subjectivité de toute production audiovisuelle en associant deux choses qui ne sont peut-être pas comparables (ce qu’il faisait déjà dans Culloden, du coup) : la subjectivité de la population de Paris en 2000, qui traite de la Commune, pour voir comment eux-mêmes se saisissent du sujet il semble pas s’être trop mal démerdé.
      Personnellement, je vois plutôt ça comme un exercice de style en quelques sortes.

      Après je comprends tout à fait qu’on puisse ne pas aimer son « style », mais c’est une autre question.
      Ceci dit le film reste enthousiasmant par pas mal d’aspects, et procure certaines émotions, réactions et réflexions « différentes » d’un documentaire ou d’un film classiques, et c’est ça qui me semble important au final.
      Même l’écart entre le documentaire lisse, poli et très « documenté » auquel on pourrait s’attendre et ce que livre Watkins reste intéressant : L’idée, je crois, était aussi de montrer le peu de culture politico-historique autour de cet événement, ce qui semble t’avoir sauté aux yeux en tant que « discussion de comptoir ». S’il avait pris des historiens et des sociologues « spécialistes » du domaine pour reconstituer les journées de la Commune la chose aurait probablement un tout autre aspect. Et il y aurait de fortes chances qu’on perde en enthousiasme ce qu’on aurait gagné en faits, données précises et culture « livresque ».

      Sur l’impact des médias de masse, on reste tout à fait d’accord.

      Quant au fait que ses documentaires ne passent pas à la télévision, la question est peut-être un peu plus compliquée que ça. Ce n’est sûrement pas qu’une question de temps : des films ou pseudo documentaires très longs (plus que « La Commune » : la série « Apocalypse » sur la Seconde Guerre mondiale, qui est passée récemment devait faire dans les 6h, alors que la version courte de la Commune ne fait « que » 3h30), en plusieurs parties, sont parfois diffusés. D’ailleurs La Bombe, par exemple, ne fait que 45 minutes, ce qui reste dans les formats « télévisuels » classiques. Punishment Park n’est pas particulièrement long non plus, la question n’est donc pas seulement là.

      « Enfin, cette vieille lune sur la participation du spectateur au spectacle proposé me semble là aussi d’une incroyable naïveté (ça l’était déjà dans les années 60). Pour participer au monde, il nous suffit de sortir dans la rue. Assister à un spectacle, c’est justement recevoir quelque chose de trop puissant pour être vécu quotidiennement. Et la plupart des œuvres sont mauvaises parce qu’elles ne dégagent pas grand chose, que l’intensité du quotidien leur est supérieure »

      Suis relativement d’accord sur ta conception de la « participation au monde », mais pas sur la « vieille lune sur la participation du spectateur au spectacle proposé » : pour moi, Watkins ne dit (et ne fait) rien de plus que montrer que « la plupart des œuvres sont mauvaises parce qu’elles ne dégagent pas grand chose, que l’intensité du quotidien leur est supérieure » justement. Si seulement le « spectacle » qu’on nous donne à voir nous poussait à réfléchir ou à réagir. Mais que dalle. L’intensité est quasiment nulle ce qui, à mon avis, est loin d’être le cas avec Watkins (c’est là-dessus qu’on diffère apparemment).

      Quant au fait que la posture du spectateur ne soit jamais passive... Elle ne l’est jamais totalement, c’est probable. En revanche on peut difficilement nier qu’il existe des degrés de participation, d’implication, d’activité plus ou moins importants. Et que la majorité de la production audiovisuelle contemporaine ne favorise pas le développement du moindre esprit critique.

      L’idée n’était pas ici d’ « encenser une des grandes figures underground » : je ne savais même pas qu’on pouvait considérer Watkins ainsi. J’ai rencontré bien peu de gens (même parmi certains qui s’intéressent pas mal au ciné, à l’audiovisuel et/ou à la culture underground) qui connaissent le bonhomme. Certains ont vu Punishment Park, mais en général sans savoir que c’était de lui, ni avoir vu ou fait le lien avec d’autres de ses films.
      L’idée, c’était plutôt de parler d’un réalisateur qui me semblait pas si connu que ça, et qui a quand même une démarche originale par rapport à beaucoup d’autres. Avec des points critiquables d’accord, mais qui provoque parfois des élans de motivation, et c’est surtout ça qui me paraît essentiel et défendable par rapport à ce gars.
      Après je suis pas particulièrement spécialiste de tout ça, surtout que tu sembles avoir réfléchi et t’être pas mal intéressé à ces questions de participation du spectateur. En tant que néophyte, je trouve l’œuvre de Watkins efficace et intéressante dans l’ensemble, et le personnage totalement respectable.

      Et puis il pousse toujours au débat autour de questions assez passionnantes, que ce soit concernant notre rapport aux médias ou quant à la participation (ou l’absence de participation) du spectateur et de l’acteur au spectacle. Et rien que ça, c’est toujours intéressant.

    • mercredi 17 mars 2010 à 15h50, par Bazarboy

      Ok je me suis arrêté au 5 premières lignes de ton commentaire
      Il faut que tu regardes « l’horloge universelle » c’est un documentaire qui donne la parole aux non comédiens qui ont joué dans la commune et - ne le prend pas trop sévèrement- tu verras que ce que tu dis dans tes 5 premières lignes c’est bullshit

      Cordialement

      Voir en ligne : http://bazarboy.canalblog.com

    • lundi 28 juillet 2014 à 17h32, par Quelqu’un

      C’est bien d’essayer de refaire le monde avec ses amis dans un bar mais malheureusement ça n’a aucuns impacts sur la société.
      Peter Watkins à peut être des défauts mais pas celui de vouloir dénoncer les médias, l’oppression selon moi.
      Il permet de nous faire réfléchir un peu plus encore et amène plus d’impact que lorsque qu’on se retrouve au bar (en général bien amoché.
      Sa démarche est tout à fait respectable.

    • mercredi 24 septembre 2014 à 15h41, par simsimone

      Mais alors que penser de « l’acteur » dans le documentaire ? Il a souvent cette place que tu reproches aux « acteurs » de la Commune : il est utilisé dans l’histoire/fiction/documentation/trace de réel pour ce qu’il est, ou en tout cas ce que le réalisateur connait de lui et ce qu’il veut en montrer. Est-il ininteressant ?
      Cet « acteur » de documentaire n’acquiert pas tant de l’interet sur le plan de l’actor-studio, sur sa capacité à mimer des émotions, à fabriquer un personnage tel que l’on a pris l’habitude de l’intégrer dans notre lecture du cinéma. Son réalisme, c’est à dire sa capacité à développer de la richesse et de la cohérence dans son personnage se situe plutôt dans la rencontre entre ce que l’on imagine de lui et ce qu’il nous montre à l’écran.
      L’idée de Watkins dans la Commune est effectivement ce que tu appelles filmer une discussion de comptoir. D’utiliser ce que des citoyens d’aujourd’hui ressentent comme rapports à la vie sociale et politique pour parler de ce que des citoyens de 1871 ressentaient comme rapports à la vie sociale et politique. De documenter sur des gens qui jouent à théatraliser et discuter sur un évènement historique. Il devient aussi intéressant de regarder ce qui fonctionne dans leur jeu que ce qui ne fonctionne pas. Car on ne filme pas le jeu ici : on filme ce qui relie ou pas des citoyens à leur histoire. On film aussi comment on peut imaginer un film comme une société : c’est à dire pas forcément hiérarchique. Dire que cette absence de professionnalisme dans le jeu rend le film ininteressant revient à considérer qu’un film anthropologique n’a pas grand intérêt.
      Si il n’y a pas d’intensité dramatique dans la Commune c’est aussi parce que ça n’est pas recherché. Watkins cherche une forme audiovisuelle différente de celle qui selon lui conduit à la crise qu’il dénonce. Une forme moins manipulatrice, moins violente, moins formatée. L’intensité dramatique est un ressort d’une forme qui souhaite que tout le monde comprenne ( ressente, surtout ) la même chose au même moment. Watkins considère que l’audio-visuel, en monopolisant la vue et l’ouie dans une temporalité imposée et stricte, contient ce danger de manipulation à un degré dont peu de gens ne se rendent compte. Si l’on compare à la littérature, la sculpture ou la peinture, on se rend bien compte que l’idée, l’émotion, l’histoire ou le concept que l’on veut faire passer surgit chez le spectateur dans un temps sur lequel il a une prise et qui constitue la participation à l’oeuvre dont parle Watkins : on est pas vampirisé par la necessité de comprendre à un instant T ce que l’artiste nous propose, notre compréhension devient une suite de retours temporels, visuels, cognitifs. La participation du spectateur c’est sa capacité à prendre du recul par rapport à l’oeuvre, à en identifier le hors-champ, à établir ses propres connexions entre son expérience et le message qui lui est transmis. Ce qui rend le travail de l’artiste comme celui du spectateur d’autant plus riche de nuances et potentiellement d’autant plus précis si ce travail est bien mené. Là où c’est délicat, c’est qu’il ne s’agit nullement de décrété que « chacun y voit ce qu’il veut ». Un bon exemple illustratif pourrait être de parler de l’utilisation du plan séquence. En sortant de l’attention forcée mise en place par un montage trop directif, le plan séquence produit plus facilement une posture contemplative dans laquelle le spectateur va avoir le temps de s’extraire du cadrage cinématographique et naturellement réfléchir sur le hors-champ qui lui est proposé. Qu’il s’agisse d’une rencontre, d’un coucher de soleil ou du passage d’un livre, ce n’est pas nécessairement les instants qui vous ont semblé les plus fort sur le moment qui deviendront par la suite ceux qui vous intéresse le plus quand au moment que vous avez vécu. Et là est le piège d’un cinéma trop impliqué à fabriquer de l’intensité dramatique.
      Clairement un type comme Pierre Carles ne se rend pas compte qu’en utilisant la même forme journalistique que celle qu’il dénonce il ne fait qu’habituer les spectateurs à ne connaitre qu’une forme audio-visuelle basée sur la manipulation émotionnelle. Cette forme qui est sensiblement la même dans la publicité, le journalisme et la majorité du cinéma. Cette forme qui prône « l’intensité dramatique », la compréhension de tout par tous au même moment.
      Dans cette idée il me semble que Watkins souhaite un cinéma qui ne soit pas l’équivalent dans les salles obscures de ce qu’était un écrivain à travers ses livres. Que cela n’est pas possible car ces formes différentes portent en elle-même des impacts différents. Il serait plus juste d’envisager le cinéma comme un éducateur spécialisé par exemple. Comme une réalisation sociale. De chercher l’oeuvre dans la fabrication politique, au sens large. Car c’est toujours ce qu’il est alors que personne ne s’en rend compte. Que se cantonner au style, à la force narrative, à la mise en scène, au jeu d’acteur, sans se poser ces question c’est de toute façon fabriquer une politique inconsciemment, alors que ces outils doivent être adéquats au message que l’on véhicule.



  • mercredi 23 décembre 2009 à 03h14, par pièce détachée

    Contrairement à Calagan, je ne connais pratiquement pas le travail de Watkins, mais après avoir lu cette présentation, je me méfie aussi.

    Que le concept de docu-fiction fasse réfléchir, c’est ce qu’on peut souhaiter de mieux à quiconque en a vu un seul — qu’il soit de Watkins ou non, diffusé ou non à la télé (les plus pernicieux étant peut-être ceux d’Arte). Comme l’écrit Benjamin, « il s’agit d’entremêler réalité contemporaine, reconstitution historique et implication des « acteurs » », de mêler « images fictionnelles et véritables informations » — et le très dangereux problème est bien là, dans le mélange des genres et la manipulation des images (tiens, et si Article XI tentait d’inoculer Chris Marker à ses jeunes lecteurs innocents ?).

    Vouloir faire « vrai », « authentique », au point de filmer « avec des caméras à l’épaule, pour donner une plus grande impression de réalisme », de tourner sur les lieux même de tel massacre, de recruter des acteurs dont les opinions coïncident avec celles des personnages, c’est, au mieux dans le dangereux, faire l’imbécile décalcomaniaque. Et vouloir « recréer » l’Histoire « vraie », il me semble que ce ne peut être qu’une imposture, aussi bien intentionnée soit-elle. « Se rapprocher au maximum de la réalité », c’est en toute honnêteté strictement impossible (lire Tolstoï, Guerre et Paix, et / ou aller musarder ici). Ce qu’on peut faire par contre, c’est se demander comment on hérite de l’Histoire, et pour en faire quoi — à part laisser les spectateurs « soufflés par l’impression de réalisme », ce que fait beaucoup mieux la seule affiche de n’importe quel péplum.

    Je ne vois pas non plus en quoi les descendants des protagonistes de faits réels seraient en tant que tels les plus aptes à transmettre, par un travail d’acteur surgi miraculeusement des liens du sang (sans parler des querelles de famille), ce que leur héritage a d’universellement humain. Quant à embaucher un « authentique réactionnaire » pour jouer les réacs, et ainsi de suite (« chacun conserve souvent son propre rôle à peine travesti pour les besoins scénaristiques »), il me semble que c’est l’étranglement total de ce que peut être le travail même d’acteur, professionnel ou non. Beaucoup plus fâcheux pour Watkins dans son optique même, c’est l’étranglement aussi de la mémoire elle-même, qui elle non plus ne peut pas se mettre en œuvre sans distance par rapport à son objet : son but n’est pas, ne peut pas être, de « se rapprocher au maximum de la réalité » (après Guerre et Paix, lire par exemple le silence hurlant des rescapés des camps nazis).

    Et puis, dans un travail cinématographique sur la mémoire collective et ce qui la rattache au présent, il me semble qu’il y aurait mieux à faire avec les acteurs que « de les aider à oublier la caméra » (aider à oublier ? dieux du ciel...). Par exemple, montrer tout au contraire cette caméra et la faire changer de mains, définir dans le film la place de celui qui filme et les choix assumés du montage, bref, aider à se déplier cette mémoire, sa parole, son désir, sa chair vivante, au lieu de plaquer la face du même-chacun dans la glaise de sa propre identité pesante, enchaînée au champ glaiseux de ses mêmes-ancêtres...

    S’agissant d’« entremêler la réalité contemporaine » dans tout cela, si le travail sur ladite réalité se réduit à attifer à l’ancienne nos contemporains néo-versaillais — ce qu’ils font très bien tout seuls lors de leurs fêtes privées — pour les faire paraître plus saisissants dans leur propre rôle « puant le naturel », nous revoici plaqués face contre terre dans cette glaise du même au même : le naturel qui pue = le naturel qui pue. Bravo ! L’avenir de cette démonstration brillante n’apparaissait pas clairement chez Ensor, chez Goya, chez Zoran Music, qui sont pourtant de grands costumiers.

    Bien, bien... Tant que la réalité contemporaine ne fait pas, sous forme de supermarché, pompe à essence, sex-shop, que sais-je, irruption dans le champ (de tournage) du champ (de bataille), tout va pour le mieux.

    Le débat continue. Grâces en soient rendues à Benjamin. Ça devenait lassant, ce site où tout le monde dit qu’il est bien d’accord.

    Oups !

    • mercredi 23 décembre 2009 à 05h44, par Alain

      En fait, l’intérêt de demander aux acteurs (amateurs) d’incarner des personnages proches de leur propre idéologie, en leur disant d’improviser, de donner leur avis, bref, de se lâcher, l’intérêt, dis-je, n’est pas artistique : il est documentaire. À certains moments, ce ne sont plus les personnages que Watkins filme, mais les personnes. C’est plus pertinent que d’aller filmer une conversation de bistrot, car les personnes/personnages en question se trouvent dans une situation très particulière : ils sont fatigués, ils travaillent leur rôle depuis plusieurs semaines, intensivement, chaque jour. Cela permet de faire émerger une authenticité inédite. Par exemple, dans La Commune, lorsque Watkins enregistre les prises de position conservatrices, voire réactionnaires, des soldats versaillais, il montre aussi toutes les hésitations desdits soldats, tiraillés entre leur conservatisme et leur morale – on assiste à ce moment là à une véritable prise de conscience, on en sent même un ou deux prêts à déserter. Cette scène-là est réussie, je trouve.

      • samedi 26 décembre 2009 à 18h21, par Benjamin

        @ pièce détachée,

        Jamais rien vu de Chris Marker, mais nul doute que les « jeunes lecteurs innocents » d’Article XI (pléonasme) s’y laisseraient prendre comme le Père Noël par Coca et consorts.

        A lire ta réaction, j’ai la forte impression de m’être très mal exprimé concernant Watkins : je n’ai pas l’impression qu’il cherche à rendre quelque chose qui soit « objectif » ou « historique », bien au contraire. La proximité d’avec la réalité se fait bien plus au travers de la façon de jouer des acteurs, justement parce qu’ils sont amateurs et prennent parfois le sujet à cœur, que dans le scénario, la réalisation ou le montage. Au contraire, il fait tout pour rappeler qu’il donne à voir un film, quelque chose de « construit », que en soit en montrant ou en faisant parfois intervenir les techniciens (prise en otage du preneur de son dans Punishment Park), ou encore en mélangeant son semblant de « reconstitution » avec des éléments anachroniques (journalistes de télévision interviewant les communards). Et « l’impression de réalisme » dont je parlais concerne plutôt le jeu et les sensations transmises par certains des acteurs dans quelques unes de leurs réactions plutôt que l’ensemble du film.

        Dans le même ordre d’idées, et toujours selon mon point de vue les acteurs non professionnels ne vont pas en effet trouver en un instant une part de génie théâtral qu’ils n’avaient pas jusqu’ici. Au contraire même : comme on le disait au-dessus, ça provoque certaines lourdeurs. En revanche le revers de la médaille ce sont les réactions qu’ils ont à certains moments sur des sujets qui les touchent. Et à ce moment-là l’enthousiasme ou la rage qu’ils ressentent passent – à mon sens – encore mieux que lorsqu’ils sont « joués ». C’est peut-être « l’étranglement total de ce que peut être le travail même d’acteur, professionnel ou non », en effet. Mais ça provoque du coup une sorte de « proximité émotionnelle » intéressante avec le joueur, qui me semble rarement atteinte avec un jeu « traditionnel ». Cette « proximité émotionnelle » (peut-être ressentie à tort d’ailleurs) semble également une bonne raison de faire jouer des descendants, ou des gens un minimum impliqués dans ce dont on parle, sans quoi (à moins d’un jeu d’acteur exceptionnel) on n’a juste aucune chance de transmettre quoi que ce soit, en effet. Et encore moins leurs émotions, leurs réactions (qui, sans être universelles, peuvent au moins être comprises par une grande part des humains) que concernant leur héritage qui, lui, a beaucoup moins de chances d’être transmis à qui que ce soit de non-impliqué. En gros plutôt que l’universalité du combat je pense que c’est plutôt celle des émotions que Watkins essaie de faire passer.
        C’est probablement ce en quoi la présentation que j’en ai fait pèche : pour moi Watkins – dans son oeuvre historique – travaille justement plus sur « comment on hérite de l’Histoire » que sur la reconstitution historique en soi.

        « dans un travail cinématographique sur la mémoire collective et ce qui la rattache au présent, il me semble qu’il y aurait mieux à faire avec les acteurs »

        Sûrement, mais disons que le mérite de Watkins est déjà de faire un pas dans cette direction. Différemment, et en évoluant au fur et à mesure de chacun de ses films, bien sûr.
        Avec les soucis matériels qu’implique ce genre de cinéma : par manque de moyens La Commune a du être tournée en seulement deux ou trois semaines, alors qu’il y avait quasiment un an et demi de préparation derrière le film. Là, nul doute qu’il y aurait eu de quoi faire sur le « processus » entourant le film...

        En tous cas merci de continuer à faire vivre le débat en effet, et compte sur moi pour continuer à parler de ceux qui posent ce genre de questions : ça me paraît bien loin d’être tranché.

        (je file immédiatement me mettre sous perfusion de Chris Marker, vu que ce dernier a l’air de te faire réagir...)

        @ Alain,

        Comme tu auras pu le lire plus haut, tout à fait d’accord avec toi sur ce point. Une autre scène que j’aime beaucoup, en dehors des débats de Punishment Park, est celle particulièrement saisissante où le flic pète complètement un plomb, à la fin du film. Toute la rage impuissante et destructrice de l’ « autorité » bafouée ressort parfaitement à ce moment-là.



  • jeudi 24 décembre 2009 à 16h35, par damien

    Que ce soit Watkins ou un(e) autre, ce qui me semble important (au delà du « message ») c’est que l’œuvre soit censurée, dans ce cas précis, où celle-ci dérange l’intelligentsia. C’est déjà un signe d’émancipation d’une pensée sclérosée ;-)

    • samedi 26 décembre 2009 à 16h11, par Benjamin

      Ou alors (et certaines chaines se sont parfois cachées derrière cet argument) ça peut être un problème de qualité. Ou plus précisément (la télévision qui donne des leçons de « qualité » à Watkins, ce serait vraiment l’hôpital qui se fout de la charité) de « format » incorrect.

      Mais même la question des formats et techniques utilisés reste une forme de barrière qu’on peut remettre en question.

      Il y a évidemment un côté « censure » derrière les choix des chaines de télévision, dés que le réalisateur critique le fonctionnement des médias : suffit de voir le mal que Pierre Carles a eu à se faire distribuer, ou juste à faire accepter certains sujets (dont « Pas vu pas pris », bien sûr...).



  • vendredi 25 décembre 2009 à 12h21, par un-e anonyme

    quelle blague, pourquoi s’obstiner à chercher une lumière d’espoir au travers d’un media qui rend si débile ? Mets ta téloche à la poubelle, et voilà. Personne n’impose quoi que ce soit au spectateur, c’est bien lui qui décide de poser ses fesses et son regard vide devant le millionaire non ? y’a un truc maso dans cette affaire que je ne m’explique pas. C’est vraiment désespérant, tous ces débats sans fin sur ce média. Nous serions 5% parait-il à ne pas regarder la télé du tout, et parait-il idem à parler à nos voisins .. qui regardent la télé et nous répondent des trucs incompréhensibles du coup on ne leur parle plus !! :o) Bon, ok, tu perds la finale des 5Nations, les 2 ou 3 docu. vraiment interessant qu’Arte diffuse ts les ans, les guignols ou ce qu’il en reste, mais bon, ça vaut le coup vraiment, car quel que soit ton niveau d’analyse, ton intelligence ou ta culture, si on te répète 1000 fois par jour que ton voisin est ton ennemi, tu finiras par le croire. Il y a une constante chez ts les êtres humains qui est totalement indépendante de l’intelligence : 20 jours en isolement total, c’est la folie assurée. Nous ne sommes pas indépendant vis à vis de l’information que nous digérons (ou pas ...). S’agit pas de rester coincé au fond d’une grotte, s’agit de garder le regard clair. En l’état actuel de ce néanmoins merveilleux média, le mieux est de jeter vos téloches, ... c’est pas gagné. Cdt,
    v/

    • samedi 26 décembre 2009 à 16h29, par Benjamin

      Ouep, jeter la téloche c’est fait depuis un bout de temps. Pour la grande majorité qui l’a encore, en l’état actuel des choses, ça reste la première mesure d’hygiène mentale à adopter.

      Ceci dit c’est pas une raison pour balancer les réalisations qui valent le coup avec l’eau crasseuse du marigot télévisuel : sans vouloir « sauver la télé » ou « chercher une lumière d’espoir au travers d’un média qui rend si débile », reste que la forme audiovisuelle peut servir de relais à des productions très intéressantes, et qui ne pourraient pas s’exprimer avec la même force par un autre moyen. Heureusement qu’on peut y avoir accès sans la télévision aujourd’hui. Et de toutes façons ce genre de « productions » y passait pas (ou très rarement).

      Donc lâcher la télé d’accord, mais du coup un grave problème se pose : qu’est-ce qu’on pourrait bien foutre des 4 à 7 heures quotidiennes que ça libèrerait...?

      • dimanche 27 décembre 2009 à 05h40, par defré

        « qu’est-ce qu’on pourrait bien foutre des 4 à 7 heures quotidiennes que ça libèrerait... ? »
        Pas forcément dans l’ordre : bouquiner, sortir, faire des câlins à ses mômes et/ou sa douce, aller au cinoche, avoir une discussion avec ses potes, etc :))

        Ceci dit, je ne vois pas bien ce qu’il y aurait à sauver dans la télévision. Il ne faut pas oublier que sa seule fonction est de distraire et que le seul critère qui soit pertinent pour juger de son adéquation à la société c’est l’audience engendrée et le fait que le publique soit captif (il ne faudrait pas que le spectateur change de chaîne pendant la pub’). Il ne sert pas à grand chose de produire et diffuser une émission que personne ne regardera et de ce point de vu, une partie de la production de Watkins illustre bien mon propos : la commune c’est pas regardable sauf si t’es chercheur en socio’ !

        Alors la télé est monoforme, certe. Mais c’est par ce biais qu’elle retient l’attention d’un maximum de personnes, c’est le principe du plus petit dénominateur commun.

        Est elle un média qui rend débile ? Malheureusement non, personne n’oblige les spectateurs à regarder des merdes plutôt que des émissions intéressantes ou même de se lancer dans la vraie vie. Le spectateur a toujours la possibilité d’exercer son libre arbitre, une télé ça s’éteint très bien. Ce genre débat me fait penser au critiques qui sévissaient envers la BD, la science fiction ou la masturbation (non là je blague, quoi que...).

        C’est le sens critique et la réflexion qui font la différence entre une « éponge » à programmes télé et une personne mais cette remarque est également valable pour les autres médias. On ne doit pas toujours croire ce qui est écrit dans les journaux, diffusé à la radio ou écrit dans les livres...

        • dimanche 27 décembre 2009 à 08h21, par Benjamin

          Et oui, une télé ça s’éteint.

          On peut même éviter de l’allumer, si on ne veut pas se faire happer par son côté addictif (à ne pas sous-estimer), ou si on n’a pas de temps de cerveau disponible à vendre.

          Ceci dit dans son bouquin Watkins revient sur deux choses :

          Quand est-ce qu’on a demandé au téléspectateur son avis sur la télévision et ce qui y est diffusé ? A partir du moment où les programmes sont imposés sans qu’il ne donne son opinion ni ne puisse s’exprimer quant à leur contenu on peut avoir plus qu’un léger doute sur le fait que ce serait ce qu’il regarderait s’il avait le choix.

          Enfin, comment espérer que des voix discordantes se fassent entendre (à part très marginalement) dans le concert de la monoforme à partir du moment où on y a été soumis depuis notre naissance, et où on n’a peu eu la possibilité de faire l’expérience de quoi que ce soit d’autre (“télévisuellement” parlant, j’entends) ?
          S’il y a une sorte de lavage de cerveau pour nous faire aimer ça, combiné à un manque d’éducation pour nous éviter de chopper le goût de faire autre chose peu de chances de ne pas aimer la merde dont on nous gave.

          En laissant tout le champ à la responsabilité individuelle on a risque d’oublier que ces choix sont aussi construits, et qu’on n’est pas tous armés de la même manière pour y faire face.



  • vendredi 23 avril 2010 à 20h16, par un-e anonyme

    Merci pour cet excellent article autour de Peter Watkins qui aide à comprendre et à s’interroger sur l’œuvre et l’engagement de l’homme.
    un autre très bon lien ici :
    http://www.youtube.com/user/aboleia...
    Déclaration du cinéaste Peter Watkins à propos de la société 13 production qui produit « la commune » et qui appartient à Lagardère.
    Aboleia

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