vendredi 3 octobre 2008
Le Cri du Gonze
posté à 11h04, par
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Alors, je passais l’éponge. J’acceptais que tu me négliges, pensant qu’un beau jour l’Internationale amoureuse entre nous refleurirait. J’allais même jusqu’à ne pas remarquer, fallait-il que je sois aveugle, que tu me trompais avec ceux que je détestais le plus, les tartuffes politiques, les tricheurs médiatiques, les champions intestinaux de la lutte partisane. L’amour, vois-tu, est œillères.
Ma chérie,
Ce que j’ai à te dire n’est pas facile. On n’est jamais très à l’aise au moment de rédiger les mots définitifs, ces mots qui, on le sait, vont envoyer bouler l’être aimé dans les affres de la tristesse et du manque. Alors, je cherche mes mots, je les trie avec soin, mais ça ne change rien au constat : je te quitte.
C’est en regardant l’enregistrement de ta dernière intervention publique que je suis arrivé à la conclusion que, vraiment, plus rien ne nous liait. Que nos trajectoires désormais étaient si antipodiques que chaque jour nous éloignait. Tu es dans l’autre camp, désormais, avec les loups.
Je pouvais accepter nos différences : après tout, nous ne sommes pas de la même génération. Je pouvais même accepter que notre relation reste cachée, que tu la masques. Certes, il était difficile de voir que le chef de l’état, ton adversaire, ce grand manitou du libéralisme assassin, invoquait plus souvent ma personne que toi, celle que j’étais censé inspirer. Il y a des constats qui sont douloureux, qui bouleversent, mais j’ai l’habitude de ce genre de désillusions, tu n’es pas la première à me délaisser.
Alors, je passais l’éponge. J’acceptais que tu me négliges, pensant qu’un beau jour l’Internationale amoureuse entre nous refleurirait. J’allais même jusqu’à ne pas remarquer, fallait-il que je sois aveugle, que tu me trompais avec ceux que je détestais le plus, les tartuffes politiques, les tricheurs médiatiques, les champions intestinaux de la lutte partisane. L’amour, vois tu, est œillères.
Mais, les œillères sont tombées, mes yeux se sont décillés : je ne peux plus accepter ce que tu es devenue. Tu foules aux pieds les valeurs que je chéris, celles de la sincérité politique, du combat pour une cause juste et sincère, de la lutte intègre.
Dimanche, je regardais ces images où tu arpentais la scène telle une vedette de télé achat, haranguant une foule veaux, prenant des postures de prophétesse bas de gamme, et mon cœur se serrait de n’y plus sentir que pitié et honte. Je regardais tes gestes si préparés, tes calculs de scène, tes postures de pantin médiatique, et je voyais fuir l’amour.
Les mots me manquent pour décrire le dégoût que m’inspire ce que tu as fait de notre relation. Pour toi je suis un badge utile, quelques slogans, une bannière rassembleuse. Mais, au fond de toi, je sais que tu me trahis chaque jour et chaque nuit, même quand tu invoques mon nom. Et que cela fait longtemps que cela dure. Je ne peux plus supporter ça.
Te voir si belle pour l’occasion m’a certes troublé. Tu avais perdu dix ans, ta fraîcheur et ton sourire ont remué en moi l’écho de nos premiers baisers. Mais très vite, j’ai compris que cela aussi, c’était factice. Une poupée cathodique passée au scalpel des Spin Doctors, catin des communicants, voilà ce que tu es devenue. La sincérité en toi, si elle a existé, n’est plus qu’un tas de cendres. Cendres de ceux que chaque jour tu trahis en dénaturant ce que je t’apportais. Cendres des miséreux que tu trompes, des ouvriers que tu salis, des ménagères à qui tu vends du rêve pasteurisé, le même que celle qu’elles bâfrent à longueur de journée dans Télé Loisir et devant la Star Ac. Je ne peux aimer une femme synthétique.
Ne m’attends pas dimanche, ni celui d’après,
Nous ne prendrons plus la route de Carmaux ensemble,
Nous n’arpenterons plus les Deux-Sèvres tels deux écoliers fugueurs découvrant la lutte des classes,
Nous n’irons plus au parc voir s’éteindre au loin les lueurs de la révolution à venir,
Je te quitte, mon aimée, tu es allée trop loin,
Ton Jeannot
Ps : En ce qui concerne les enfants, je garde l’Huma, je te laisse Libé, je ne m’entendais plus trop avec lui de toute manière, ce petit con tient trop de toi.