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vendredi 18 juin 2010

Le Charançon Libéré

posté à 13h56, par JBB
22 commentaires

De quoi se nourrit l’identité nationale
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Faire ses courses en tricolore ? C’est peu ou prou l’idée de Frédéric Lefèbvre, qui propose la création d’un label en forme de « petit drapeau français » pour les produits de notre terroir, qui sont « un peu l’âme de notre pays ». Anodin ? Pas sûr… Qu’on te vende de l’identité nationale en même temps que les fruits et légumes montre plutôt que le régime patriotique se décline à toutes les sauces.

Quand il ne s’habille pas en Prada1, il paraît que le diable se niche dans les détails.

Je veux croire - quant à moi - que le démon fourchu peut à la fois revêtir un uniforme de garance tricolore et imprimer sa marque aux objets les plus anodins - et jusqu’aux aliments.

Rien d’étonnant, donc, à ce que le débat patriotique déborde jusque dans les rayons des supermarchés.

Tant ceux qui nous gouvernent essayeront bien - d’ici peu - de nous faire consommer « la patrie », en sus que de nous la marteler à l’oreille, en tous temps, lieux et occasions.

Que veux-tu ?

Il serait pour eux dommage de ne point marier deux religions relevant d’une même essence, église de la très sainte consommation et chapelle de l’immaculée nation.

Tu payes, tu crois, tu manges et tu marches au pas.

Quel régime…

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L’inénarrable Frédéric Lefèbvre, porte-parole de l’UMP, vient ainsi de lancer un vibrant appel national - il est vrai, encore peu relayé.

Proposant, dans une vidéo visible sur le site de l’UMP, de créer un label patriotique pour les produits du terroir.

Et suggérant du même élan la signature d’une ridicule pétition (longuement) intitulée « Si vous souhaitez soutenir la création d’une mention valorisante »produits du terroir« pour les produits de qualité, transformés, d’origine française, signez la pétition du Mouvement Populaire » : 3 891 signatures en quelques jours, le sujet n’enflamme pas vraiment les foules…

Lui a imaginé un petit drapeau tricolore à apposer sur les fruits, les légumes et les produits de bouche.

Ce qui permettrait au consommateur faisant ses courses de tout de suite choisir son camp : bon Français n’achetant que des produits 100 % de chez nous ou gros connard engraissant l’ennemi, l’étranger et l’anti-France.

Rien de très neuf dans l’idée, c’est vrai - « Achetez français ! », clamait le Parti communiste il y a un bail.

Mais Frédéric Lefèbvre sait lui donner un vrai lustre martial : « Alors, l’idée, c’est qu’il y ait un petit drapeau français, qui identifie qu’on est bien en face d’un produit du terroir français. Et je crois que le consommateur se jettera sur ces produits-là, parce qu’il est bien conscient qu’on a une agriculture qui a une vraie identité, qui veut la qualité, qui se bat pour la qualité. Et puis, chacun est conscient, tous les Français sont conscients que notre agriculture, c’est un peu l’âme de notre pays. Et qu’on doit la défendre. »

Le consommateur se jettera sur ces produits-là : la patriotique course des caddies s’annonce dantesque, « la race des gens du terroir, des gens du cru » (Brassens ®) devrait salement faire chauffer la carte bleue…

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Puisqu’il me faut bien un brin argumenter, je voudrais te faire remarquer qu’on retrouve, en cet extrait choisi (si on peut dire…), tous les termes habituellement usités par les joueurs de la grosse caisse nationale - « drapeau », « identité », « Français », « défendre », « âme de notre pays »

Et tu ne manqueras pas de noter que ce refrain n’a rien de très nouveau : «  la terre ne ment pas , chantait Pétain, elle (…) demeure votre recours. Elle est la patrie elle-même. Un champ qui tombe en friche, c’est une portion de France qui meurt. »

Tandis que Nicolas Sarkozy lui faisait écho en octobre 2009 : « La France a un lien charnel avec son agriculture, j’ose le mot : avec sa terre. Le mot « terre » a une signification française et j’ai été élu pour défendre l’identité nationale française. Ces mots ne me font pas peur, je les revendique. La France a une identité particulière qui n’est pas au-dessus des autres mais qui est la sienne et je ne comprends pas qu’on puisse hésiter à prononcer ces mots « identité nationale française ». »

Frédéric Lefèbvre ne fait que réadapter l’antienne agricolo-identitaire, donc.

Sinon qu’il y ajoute le tintement du porte-monnaie, ainsi que le doux plaisir de l’esthète patriotique : entre un saucisson tricolore et un autre bêtement apatride et sans couleurs, le choix relèvera aussi d’une évidence visuelle…

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En parlant de saucisson : difficile de ne pas faire le lien avec le rassemblement (pas question de dévoyer le mot apéro ici…) organisé ce soir par une cohorte de bas-du-front, d’abord à la Goutte d’Or puis maintenant aux Champs-Elysées.

Eux aussi chantent les produits du terroir, symboles de l’identité française - même si, en l’occurrence, il s’agit aussi de s’appuyer sur des aliments censément repoussoirs pour l’islam.

Et Sylvie François, prétendue organisatrice de la manif et vrai prête-nom, l’explique dans un entretien donné à (cette saloperie de) Riposte Laïque : « Cher Monsieur, trouver du pinard et du saucisson à la Goutte-d’Or, depuis un certain temps, relève de l’exploit ! Je ne vous parle même pas de pouvoir en consommer au troquet du coin… La déferlante musulmane dans le quartier est en train de nous imposer la prohibition islamique des produits de nos terroirs, parce qu’ils ne sont pas conformes à je ne sais quelle règle religieuse ! »

L’argument2 n’est bien évidemment pas celui avancé par Frédéric Lefèbvre, mais le fond reste le même : la nourriture participe de notre identité nationale et il s’agit de l’instrumentaliser en tant que telle.

Constate, aussi, que ces « produits de nos terroirs » chantés par Sylvie François recouvrent parfois une définition bien aléatoire : c’est - au fond - au nom d’une même « tradition » qu’un vaste barouf médiatico-politique avait accueilli, en février dernier, le choix d’un fast-food (Quick) de ne plus vendre que des produits halal dans huit de ses 362 « restaurants » français.

On retrouvait d’ailleurs là la même trouble cohorte politique pour s’indigner qu’on puisse proposer de la bouffe-(de-merde)-halalo-compatibles, des membres résolument fascistes du Bloc Identitaire aux laïcards égarés par leur peur/haine de l’islam3.

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Produits du terroir contre produits étrangers/exotiques, là est finalement une autoroute - d’autant plus offerte qu’elle se camoufle aisément - pour ceux qui veulent alimenter la petite cuisine identitaire.

Et tu noteras ceci : que le débat sur l’identité nationale contamine tous les champs sociétaux, qu’il s’étende aux assiettes et aux rayons de supermarché prouve suffisamment combien il n’est pas de fond à la boîte de Pandore ouverte par ceux qui nous gouvernent.

En attendant que Frédéric Lefèbvre propose des sigles bleu-blanc-rouge pour marquer les livres bien de chez nous ou les albums musicaux du terroir4, je vais juste noter qu’il y a des (gros) coups de fourchette qui se perdent.

Tricolore, la fourchette, hein…



1 Mouarf-mouarf…

2 Battu en brèche par Rue89, qui a produit un papier pour prouver qu’on trouvait saucisson et alcool à la Goutte d’Or. Mais qui en doutait ?

3 On trouvera un étrange exemple de cette dernière catégorie dans le billet qu’avait alors publié Jérôme Leroy sur Causeur, partisan du Parti de Gauche chantant ce temps rêvé où le Quick ne proposait pas de hamburgers halal. Le billet se terminait ainsi : « Oui, j’avais un Quick à Roubaix. Il semblerait que je l’ai perdu. Et il ne me reste plus, comme le dit quelque part Baudelaire dans Mon cœur mis à nu, qu’ à “dater ma tristesse”. » Une fin lyrique pour un billet de même. Lis-le pour saisir ce que certaines positions peuvent avoir de surnaturelle : une chaîne de fast-food devient emblème républicain sous la plume d’un écrivain « communiste » guidé par sa nostalgie d’une période idéalement laïque. Oui : accroche-toi au pinceau anticapitaliste, j’enlève l’échelle…

4 On y viendra, tant les produits culturels peuvent aussi, aux yeux de ceux qui relancent ce débat pourri, participer de l’identité nationale.


COMMENTAIRES

 


  • vendredi 18 juin 2010 à 17h58, par un-e anonyme

    A lire le très intéressant ouvrage Murs de Wendy Brown sur la dissociation de la souveraineté et de l’État-Nation produisant des discours identitaires dangereux.



  • vendredi 18 juin 2010 à 19h06, par Dominique

    C’est une proposition totalement imbécile, parce que cela existe déjà ! On a des AOC, AOP, des labels produits faits maison, produits de la ferme, produits du terroir, agriculture biologique, montagne, etc. Il faut être idiot pour ne pas différencier un camembert AOC et un camembert non AOC, ou bien être illettré au point d’avoir besoin d’un logogramme parce que l’on est illettré. Et il y a même la norme NF.

    Quant aux aliments non transformés et vendus à l’unité, l’origine est indiquée soit sur la barquette, soit sur le panonceau indiquant la nature et le prix : c’est une mention obligatoire. Je sais si mes fraises viennent du Chili ou du Vaucluse, il suffit de savoir lire. En outre, les commerçants ne sont pas complètement idiots (enfin, pas tous) : ils communiquent justement sur le fait qu’ils achètent leurs produits frais et de saison dans un environnement proche, faisant ainsi vivre l’agriculture locale. Frédéric Lefebvre ne doit pas souvent faire ses courses dans une épicerie ou un supermarché...

    Mais en saturant les boîtes de conserve et les barquettes de viande ou de plats préparés d’une foule de mentions obligatoires (la composition, l’origine, le côté recyclable, la nuisance pour les femmes enceintes ou les enfants) et de labels, on les rend illisibles tous ensemble. Ce que Lefebvre fait, c’est réinventer l’eau tiède !

    Voir en ligne : http://champignac.hautetfort.com

    • vendredi 18 juin 2010 à 20h06, par Pierre Enckell

      Et si on jette à la poubelle les emballages portant les petits drapeaux, ce sera une insulte au pavillon tricolore. Miam ! Que de gardes à vue en perspective !

      • vendredi 18 juin 2010 à 20h14, par Dominique

        Ciel ! vous ici, Pierre, dans ce repaire d’anarcho-autonomes tendance épicerie de Tarnac ?

        Voir en ligne : http://champignac.hautetfort.com

        • vendredi 18 juin 2010 à 20h51, par un-e anonyme

          Tu t’attaques à Jérôme Leroy, JBB ?

          mais c’est comme si tu t’attaquais à Clint Eastwood dans Gran Torino.

          reviens sur terre.

          • samedi 19 juin 2010 à 10h09, par JBB

            @ Dominique : tout juste. Je n’avais même pas songé que cette réglementation existait déjà totalement.

            « Ce que Lefebvre fait, c’est réinventer l’eau tiède ! »

            Ah, mais de l’eau tiède patriotique, ça change tout. Elle réchauffe encore davantage « l’âme de notre pays ».

            @ Pierre Enckell : oh que oui. Je parierais même que Michèle Alliot-Marie a déjà un texte de loi en préparation pour ce type de crime abject.

            @ Dominique : rhôôô…

            Epicier, nous ?

            @ anonyme : je n’attaque pas, je moque.

             :-)

            Mais je suis prêt :



  • vendredi 18 juin 2010 à 22h24, par pièce détachée

    J’en veux, j’en veux encore ! À moi petits drapeaux : pesticides 100% français — engins agricoles 100% de nos régions — essence 100% du terroir — semences 100% de chez nous — granulés à poules 100% tricolores — barriques neuves « goût vieux chêne » 100% de nos forêts — petits drapeaux en PQ 100% âme de mon pays...

    @ Dominique : j’abonde ; et n’avoir pas à écrire un tel commentaire, ça m’arrange.

    • samedi 19 juin 2010 à 09h36, par JBB

      « j’en veux encore ! »

      Alors, si tu es sage, je t’emmènerai peut-être faire un tour dans mon vieil utilitaire 100 % du terroir de nos régions de chez nous…



  • samedi 19 juin 2010 à 00h40, par Joël H.

    le billet qu’avait alors publié Jérôme Leroy [...] chantant ce temps rêvé où le Quick ne proposait pas de hamburgers halal.
    Ne pas être d’accord n’oblige pas à déformer - et je ne suis pas sur la ligne de Jérôme Leroy : n’empêche qu’il ne regrette pas le temps où Quick ne proposait pas de hamburgers halal, mais celui où Quick ne servait pas uniquement des hamburgers halal.

    • samedi 19 juin 2010 à 09h23, par JBB

      C’est vrai.

      En même temps : comme il n’y a pas eu de position intermédiaire (moitié halal, moitié pas halal), cela revient un peu au même.

      Et puis : je ne déforme pas, j’ironise avec gentillesse.



  • samedi 19 juin 2010 à 16h05, par Isatis

    Dominique l’a souligné, tout ça existe déjà. Il y a aussi un vague truc à drapeau tricolore qui s’appelle « nos emplettes sont nos emplois », ben voyons.....

    En refléchissant bien, je me dis qu’il a une bonne idée cet abruti mondain. Notre agriculture ne produit quasiment plus que de l’agro-industriel exporté et des céréales pour les bêtes en élevage intensif. Les « bien d’chez nous » qui voudront se nourrir français crèveront de faim ou devront brouter l’ensilage de maïs OGM, les deux solutions sont mortelles, héhéhé. Débarassés de cette sale engeance ! Youpi...



  • lundi 21 juin 2010 à 11h00, par HN

    Quel abruti ce Lefèbvre. A chaque fois, il me surprend encore !

    Pourquoi ne pas contrôler les « souches » des produits qu’il veut labelliser tant qu’on y est ?

    Attention, Mr Lefèbvre, certaines espèces d’animaux n’ont pas toujours évolué sur notre « terroir » et doivent être marquées comme apatrides :

    Gallus gallus domesticus : la poule est d’origine tropicale !

    Attention au sanglier qui peut cacher des cousins éloignés dans sa cave (comme le phacochère par exemple avec sa tronche de métèque)...

    Le porc lui aussi n’est pas aussi français qu’il le prétend, étant originaire d’Asie.

    A propos de l’initiative soi-disant « laïque » de la « Riposte » du même nom, je voudrais émettre une objection quant à l’aspect laïque du « pinard », que Jésus a partagé en son temps avec ses potes en disant « Buvez, ceci est mon sang »...
    Il me semble qu’aujourd’hui on en consomme encore avec l’hostie durant la messe (enfin en tout cas, cette arsouille de prêtre s’en met une bonne rasade). Un breuvage du terroir serait plus juste : pourquoi pas de l’eau de Quézac ou du Vichy Célestin...



  • lundi 21 juin 2010 à 11h24, par tiétienne 3000

    le plus fou là-dedans, c’est la récupération et le mensonge qui durent. ça fait belle lurette que « sauvez la patrie » n’est plus utilisé que par ceux qui vendent le pays aux spéculateurs de l’agro-industrie et des supermarchés alors que le pays, nom de dieu, il est à nous, c’est notre bien public, notre bien commun ! les ennemis du pays, sont ces notables qui bétonnent le bien commun et qui cherchent à nous faire baver sur la propriété privée pour nous éloigner de notre terre à tous.
    ce serait pas mal, cher lecteur et rédacteur, qu’on le défende le pays et qu’on leur laisse pas nous enfumer avec leur récupération de mots. c’est certes bien amusant, pour moi le premier, d’exciter les cochons en ce torchant avec leur drapeau sur lequel ils font leurs prières de vilains, mais, le pays ils nous l’ont volé et ont en plus volé l’idée que le pays il est aux gens qui y vivent. La grosse usurpation, c’est de nous présenter de la défense de la patrie alors que c’est de l’écorchage du pays qu’il s’agit ... y’a encore du boulot avant de virer les notables pour sauver le pays...



  • lundi 21 juin 2010 à 12h01, par Safwan

    Visiblement, la France sait encore produire des idiots AOC. C’est vrai que nous avons, dans le domaine, une longue tradition. Lefevre mange t-il du foin d’origine contrôlée ?

    La France ne produit plus de Rousseau, de Hugo, de Chateaubriand. Les gardiens du temple désert pleurent sur le confit de canard du terroir.

    La « beauferie » reste quand même notre produit vedette et sur cette niche au moins, personne ne viendra nous faire concurrence. Si Lefevre est l’image d’Epinal du Français, il y a de quoi s’inquiéter sur ce qu’est devenue la France.

    Salutations.

    Safwan.



  • lundi 21 juin 2010 à 14h07, par Miguel Enfoiros

    J’avais compris que le débat sur l’Identité Nationale s’était clos avec les régionales et le beau score du FN. Eric Besson se fait discret, Hortefeux est condamné pour appel à la haine raciale (ce qui n’émeut ni BHL ni Jeff Copé, deux exemples de proprets donneurs de leçons humanistes), bref, on retombe dans le « marasme bien-pensant » et « l’idéologie islamobolchévique, mondialiste, mélangiste et multiculturel »... Mais c’était sans compter sur Frédo le Terrible, qui ne rate jamais une occasion d’étaler publiquement l’excrément conceptuel qui lui sert d’opinion. Les nationalistes fourbissent leurs armes - on se demande toutefois ce qu’ils penseront du petit drapeau de Lefebvre, planté sur de la viande produite en France mais également rendue halal ou casher. Frédo y verra-t-il encore « l’âme de notre pays », ou y apportera-t-il un bémol aussi opportuniste que raciste ? On pourrait déjà lui décerner un « label pur porc », lui qui semble toujours tellement en manque de reconnaissance.

    Quant aux Identitaires, nous leur avons concté une petite recette, pour les consoler de l’annulation préfectorale de leur petit raoût prétendument « laïc »...

    Voir en ligne : http://consanguin.blogspot.com



  • mardi 22 juin 2010 à 13h39, par Dr Maboul

    A ce propos (normes alimentaires), je vous ferais remarquer qu’il n’y a aucune norme française officielle et légale (NF de l’afnor) pour le halal (alors que l’afnor en promet une depuis au moins deux ans).

    Et comme le fidèle, trompé par le vendeur sur la licité de la viande (halal veut dire licite et haram illicite et y’a un terme pour « entre les deux » mais j’ai oublié), n’est pas responsable (de sa trahison devant dieu) puisqu’il ne savait pas. C’est pas très grave il va toujours au paradis, ouf.

    Ce qui fait dire à certains imams que 90-95% de la viande estampillée halal en France, ne l’est pas.

    Ainsi tout ce qui aurait été servi à ce pic-nic de la Goutte d’Or aurait pu prendre la dénomination de halal, sans problème (même la cochonnaille), je suis sûr que le pic-nic n’aurait pas été interdit en préfecture (et surtout « riposte laïque » aurait adoré !).
    Et bientôt, tous les futurs produits de la norme à Fredo seront aussi déclarés halal (lui aussi il va adorer) !

    Mais ça pourrait tout à fait aussi être casher puisque là non plus : pas de norme officielle (mais un organisme de certification non reconnu).

    Je crois que l’abatteur de l’animal dont on extrait la viande doit être de confession musulmane pour faire du halal et juive pour du casher, mais à part en Alsace-Moselle, il me parait très difficile de faire une restriction sur la religion de l’abatteur dans la loi française. La discrimination et le prosélytisme religieux n’étant « autorisés »(tolérés) en France (France de l’intérieur, c’est-à-dire hors Alsace-Moselle) que pour les cathos... (En Alsace-Moselle on peut aussi faire du prosélytisme religieux protestant ou juïf, c’est halal ; mais pas musulman, ça c’est haram ; pareil pour les athées évidemment, surtout que le délit de blasphème est toujours d’actualité.)



  • mardi 6 juillet 2010 à 00h34, par Jérôme Leroy

    Je découvre assez tardivement ton article et la note me concernant. J’aimerais donc apporter quelques précisions le plus courtoisement possible, ce qui me demande un certain effort étant donné les sous-entendus particulièrement insultants qui sont les tiens :
    1° Je ne suis pas partisan du parti de gauche, je suis adhérent au PCF (il est donc inutile de mettre le terme communisteentre guillemets, quand bien même l’antistalinisme rabique dont tu fais preuve si souvent te pousserait à ce genre de facilité. Il faut savoir résister à ce genre de tentation. Je pourrais sinon te taxer assez vite d’anticommuniste primaire, aussi vite que tu sous-entends chez moi une imaginaire islamophobie.
    2° Je n’ai rien à voir de près ni de loin avec Riposte Laïque ou autres faux nez d’une bonne vieille peur raciste. Cette idée provoque chez moi une nausée juste un peu plus forte que tes présupposés.
    3° L’article dont je suis l’auteur et auquel tu renvoies si obligeamment comme une pièce à charge, pour qui aurait envie de le lire vraiment au lieu de te croire sur parole, ne fait que déplorer qu’une aliénation supplémentaire, en l’occurrence une crispation ethnico-religieuse, soit tombée sur la tête de ces mômes qui ont été mes élèves pendant vingt ans.
    4° Il est déplorable qu’un fast food soit un des derniers lieux de sociabilité dans un quartier, bien entendu. Il est encore plus déplorable, je le maintiens, qu’il mène une politique communautariste pour des raisons froidement commerciales, politique qui enferme un peu plus ses usagers dans une « fausse conscience » qui les éloigne encore un peu plus de la seule chose qui pourrait les libérer : une conscience de classe.

    • mardi 6 juillet 2010 à 09h42, par JBB

      Yep

      Je ne pense pas avoir été particulièrement insultant. Disons plutôt : moqueur.

      Tu peux me taxer de caricature. Mais tu comprendras qu’il y a chez toi - puisque je te lis assez souvent et que je crois pouvoir parler un brin en connaissance de cause - des positions qui me hérissent sévèrement le poil. Par exemple, quand tu réclames la ré-instauration du service militaire ou quand tu rebondis juste derrière un énième billet haineux billet d’Elisabeth Lévy pour réclamer, toi aussi, un référendum sur la burqa.

      Je ne crois pas que tu sois islamophobe, ni - en quelque façon que ce soit - partisan de Riposte Laïque . J’ai écrit ceci : « laïcards égarés par leur peur/haine de l’islam », en avançant que tu en étais emblématique. Ici, le mot laïcard ne renvoie aucunement à ce mouvement dévoyé et taré qu’est Riposte Laïque, et il ne s’agit aucunement de faire un amalgame sur ce point.
      Pour être honnête, je pense que le problème est ailleurs. En l’occurrence, il s’incarne en deux points :
      De un, tu colles une grille de lecture inadaptée, datée d’il y a un bail, sur des problématiques contemporaines, sans vouloir reconnaître que ça n’a plus guère de sens (tout lire au prisme de la laïcité pouvait être logique il y a quarante ans, ça ne l’est plus aujourd’hui). C’est particulièrement frappant en ce billet que je mets en lien, celui sur le Quick hallal : il y a cette nostalgie revendiquée, cette évocation d’un âge d’or passé, tous deux parfaitement perceptibles.
      De deux, tu négliges totalement (et je pense : de façon irresponsable) de tenir compte de la nature du média où tu t’exprimes. En l’occurrence, tu écris (entre autres) sur Causeur, site emblématique de la réacosphère. Quand ils se retrouvent entre deux charges hystériques d’Elisabeth Levy ou du charpentier machin-truc, gens à la prose fleurant bon la haine et l’appel au conflit ethnique, tes billets sur le Quick ou la burqa prennent une tonalité différente. Ils ne sont qu’une pierre supplémentaire à leur jardin, plus modérée mais tirant -in fine - dans le même sens. Et le jardin de ces gens-là, c’est l’extrême-droite.
      Tu parles d’ailleurs de « nausée » pour RL. J’en déduis que tu ne lis pas tous les billets publiés sur Causeur. Parce qu’il en certains qui te devraient, sinon, te faire semblablement vomir.

      Reste la question du fast-food. Là, je pointais ce qui m’apparaissait comme un rigolo paradoxe, cette idée que ta nostalgie pour une autre époque puisse s’incarner dans la restauration rapide. Tu avoueras que c’est quand même poilant. Et que savoir si une multinationale de la malbouffe vend de la merde ou de la merde hallal, on s’en tripote les ribougnolles. Bien sûr que Quick va s’adapter à sa clientèle, c’est l’essence même de son existence. Mais sans rien changer : hallal ou pas, ça restera exactement la même merde, avec le même goût, les mêmes prix et les mêmes façons de traiter leurs salariés comme des chiens. Alors…

      • mardi 6 juillet 2010 à 10h29, par Jérôme Leroy

        1°L’article sur le referendum sur la Burqa, on peut le vérifier sur pièce, était évidemment à prendre au second degré. Il se termine de la manière suivante :Alors pour dissiper tous les doutes, je propose que le libellé de la question soumise à nos compatriotes soit le suivant :
        “Etes vous favorable à l’interdiction totale de la Burqa et pour un smic à 2500 euros ?” Il aurait été plus simple de mettre tout de suite le smic à 2500 euros pour faire disparaître la burqa, mais bon, je ne vais pas sombrer dans l’utopie, non plus…

        2° Ma grille de lecture est marxiste et républicaine, marxiste DONC républicaine étant donné les conditions historiques qui sont les nôtres. Elle me semble toujours aussi efficace pour éviter d’autres lectures erronées (qui ne sont certes pas les vôtres) et qui consistent, à force d’absence de recul critique sur ce qu’est un dominé, à confondre le Hamas avec un mouvement de libération de quoi que ce soit et à laisser mes camarades du PPP gazaoui et du Hadash israélien dramatiquement seuls face à des théocrates.

        3° En revanche, ton objection sur Causeur mérite examen. Ce que je sais, c’est que j’y ai une totale liberté de parole. Je ne la trouve pas ailleurs, hélas ou tant mieux, va savoir. J’ai pu, par exemple, à peine quelques jours après l’affaire de Tarnac, prendre la défense de Coupat, et le faire en compagnie d’un autre contributeur, Bruno Maillé. Reste que nombre de commentateurs et certains contributeurs ont des positions radicalement opposées aux miennes. La question est de savoir si on parle avec tout le monde. Pour ma part, et tant que la guerre civile n’est encore qu’un vilain fantasme, je pense que oui. On ne sait jamais, on peut convaincre, ça s’est déjà vu. Et ce site ne peut être emblématique de la réacosphère : la preuve, j’y écris.

        4° Le service militaire, à l’origine, c’est ce qui se rapprochait le plus d’une armée du peuple, gommant appartenance sociale, ethnique, religieuse. Dénaturé comme il l’était, il ne faisait que reproduire, en pire, les injustices de notre société. Il n’empêche, sur le principe, je maintiens que les soldats de l’An II qui sauvent la République comme les appelés de 61 qui empêchent le putsch des généraux, prouvent que le service militaire ne se limite pas à sa caricature à la Cabu. Et qu’un révolutionnaire conséquent est plus souvent, quand les choses se compliquent, à court de munitions qu’à court d’arguments.

        • mardi 6 juillet 2010 à 21h38, par JBB

          Hop, je réutilise les numéros :

          1) « on peut le vérifier sur pièce, était évidemment à prendre au second degré. »

          Soit. Je ne l’avais pas compris ainsi.

          2) Là, on se retrouve sur un point : il ne faut pas cautionner n’importe quoi. Et sûrement pas le Hamas. Par contre, j’achoppe largement sur un point : « marxiste DONC républicaine étant donné les conditions historiques qui sont les nôtres »
          J’avoue que je ne saisis pas bien le rapport, conditions historiques ou pas. En l’occurrence, d’ailleurs, je ne crois pas que le marxisme soit soluble dans le républicanisme, sauf à verser dans la sociale-démocratie. Tu noteras d’ailleurs, puisque tu parlais plus haut du PC, que lui-même ne se revendique plus de la lutte des classes ; pour une très bonne raison, il me semble : l’inscription dans la République et le régime parlementaire ne peuvent aller de pair avec une réelle volonté de remettre en cause ce système.

          3) « Ce que je sais, c’est que j’y ai une totale liberté de parole. »

          Ça, je n’en doute pas. Mais c’est aussi, peut-être, cette absence de censure qui devrait te poser question. Parce que tu joues sans doute pour eux le rôle de caution de gauche. Et parce que (peut-être) certaines de tes positions (encore une fois, sur la laïcité, le voile, l’autorité de l’Etat, etc.) se révèlent finalement causeuro-compatible.

          « La question est de savoir si on parle avec tout le monde. Pour ma part, et tant que la guerre civile n’est encore qu’un vilain fantasme, je pense que oui. »

          Je dois bien avouer que je reste aussi sceptique que la fosse sur le sujet. A mon sens, tu ne peux que perdre à la fin. Parce que le fascisme et ses dévoiements (en lesquels je place Causeur) ne se côtoient pas, ils se combattent. Parce que tu les sers - eux - davantage que tu ne les dérange. Et parce que, plongé dans la vie du site et les fréquentations qui vont avec, tu finiras par peu à peu dériver - d’ailleurs, si on se réfère à l’histoire, on trouve des milliers de gens (au départ de bonne foi) qui se sont passés de l’extrême-gauche (ou la gauche) à l’extrême-droite ; le parcours inverse est beaucoup moins courant. Ces gens-là finiront par te contaminer, te digérer, te réduire. Bref : te baiser.

          4) La dernière phrase est jolie. Sinon, évidemment, nous ne serons pas d’accord. Ne serait-ce que parce que, de l’an II à aujourd’hui, les conditions ont - quand même - pas mal changé. Et aussi parce que je ne crois pas à cette mythologie du service militaire égalitaire, et encore beaucoup moins à l’armée.

          • mercredi 7 juillet 2010 à 23h41, par Jérôme Leroy

            Il va en falloir des sucs gastriques, pour me digérer : quel que soit le support sur lequel je me suis exprimé, et il y en a eu de moins fréquentables que Causeur qui, je te le répète, n’est pas monolithique, j’attends encore que l’on me montre une phrase de moi qui entre en contradiction avec mes convictions anticapitalistes, antifascistes et antiracistes. La manière dont je les décline est de l’ordre de la tactique : prêcher des convaincus n’est pas mon truc.
            Et pour le risque de glissement ou de contamination, je veux bien avoir le dos large mais je n’aurais jamais le Doriot.

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