jeudi 9 octobre 2008
Le Charançon Libéré
posté à 11h29, par
21 commentaires
Nabil, adolescent de 16 ans condamné pour trafic de stupéfiants et conduite sans permis, fait sans doute partie de ces « mineurs multi-récidivistes » souvent pointés par Nicolas Sarkozy et Rachida Dati. Retrouvé hier pendu dans sa cellule, celui qui n’était même pas un jeune homme ne représente plus guère de danger pour la société. On ne peut en dire autant de la Garde des Sceaux…
Je veux vous proposer quelque chose.
Une petite expérience que nous allons conduire ensemble en quelques minutes.
Ni trop difficile.
(Quoique…)
Ni trop dangereuse.
(Quoique…)
Juste un jeu rigolo, très à la mode en ce moment dans un certain milieu.
__3__
Prêts ?
Parfait.
Enlevez une de vos chaussures.
Et dénouez-en le lacet.
(Pour les femmes en talons, les chômeurs en chaussons et les bobos en sandalettes, je sais la chose impossible. Remplacez le lacet par les écouteurs de votre lecteur MP3 ou par le câble d’alimentation de votre ordinateur : cela marche aussi.)
Une fois la cordelette en main, faites un noeud coulant.
(Ceusses qui ne sauraient comment faire sont invités à se conformer aux images ci-dessous : la marche à suivre est parfaitement décrite.)
Ces photos ont été piquées sur le site Chtipecheur. L’auteur précise qu’il s’agit du « véritable noeud du pendu (…) mis au point par jack Knight, bourreau à Londres au XVIIe siècle ». Il explique aussi que « ce noeud forme une boucle coulissante. Cette dernière reste ouverte tant que la charge ne se balance pas dans le vide. La taille volumineuse du noeud permettait de rompre le cou du condamné afin de rendre les exécution plus rapide. De sinistre réputation, il n’en reste pas moins utile pour sa solidité à toutes épreuves. »
__3__
Ça y est, vous avez réalisé le noeud coulant ?
Excellent.
Il ne vous reste plus qu’à en attacher l’extrêmité libre à la clenche de la porte ou au rebord de la fenêtre (l’idéal étant de la nouer à des barreaux quelconques, mais tout le monde n’en dispose pas à domicile…).
De passer votre tête dans le noeud, dos à la porte ou à la fenêtre.
Puis de vous laisser glisser vers le sol, jusqu’à ce qu’une pression commence à s’exercer sur votre cou.
Vous y êtes !
Libre à vous de poursuivre l’expérience jusqu’à son terme.
Ou pas.
Facile, n’est-ce pas ?
Oui.
Même si la chose, pendaison de fortune pour ceux qui n’en ont pas, demande une dose massive de désespoir et de courage.
__3__
A l’heure où on nous rabat les oreilles de la détresse des traders, financiers et banquiers paniqués par la crise, on notera utilement que pas un seul ne s’est encore rendu à une telle extrémité.
Et que les cous rompus et corps asphyxiés ne se ramassent pas encore à la pelle sous les télex et panneaux d’affichage des cours de la bourse.
Il en va autrement dans les prisons françaises.
Ou les suicides de fortune s’enchaînent comme les gros prix à la Roue du même nom.
Depuis le 1er janvier de cette années, l’Observatoire des suicides dans les prisons françaises répertorie ainsi un minimum de 27 suicides par pendaison sur un total de « 68 suicides et morts suspectes connus pour l’année 2008 ».
Parmi lesquels de très jeunes gens, cueillis dans la fleur (fanée) de l’âge.
Ainsi de Julien, adolescent de 16 ans, à l’établissement pour mineurs de Meyrieu, le 2 février.
D’un homme de 23 ans dans le quartier disciplinaire de Nanterres, le 27 mars.
D’un homme de 21 ans à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis, le 9 août.
De Raymond Cortes, 22 ans, au centre pénitentiaire de Pontet, le 12 septembre.
Ou, depuis hier, de Nabil L., adolescent de 16 ans condamné à six mois de prison ferme pour trafic de stupéfiants et conduite sans permis et retrouvé pendu dans sa cellule du quartier des mineurs de la maison d’arrêt de Metz-Queuleu.
Ce qui porte à quatre le nombre de suicides enregistrés en cinq mois par un établissement présenté comme « modèle » par la Garde des Sceaux.
Un triste record.
Qui a bien failli être amélioré, selon l’AFP : Trois tentatives de suicide ont en outre été enregistrées à Metz-Queuleu ces dix derniers jours. « Dans les trois cas, il s’est agi de mineurs qui ont tenté de se pendre mais que les surveillants ont réussi à décrocher à temps », indique Jean-François Krill, délégué de l’Union fédérale autonome pénitentiaire.
__3__
Plutôt que s’esbaudir de l’indécence de la Garde des Sceaux, voyant comme « modèle » le plus immonde des mouroirs pour adolescent.
Que s’interroger sur la présence derrière les barreaux de très jeunes gens tellement peu à leur place en prison qu’ils préfèrent mourir plutôt qu’y pourrir.
Et que noter l’absolue défaillance d’un système pénitentier français, si engorgé et inhumain qu’il finit par rétablir de lui-même la peine de mort.
On se contentera de constater que le lacet n’a jamais si bien mérité son nom.
Qui avant d’être « cordon ferré qu’on passe dans des œillets pour serrer un vêtement ou une chaussure » était ce bout de corde avec lequel on prend le petit gibier au piège.
Perdrix, lièvres ou gibiers de potence, du pareil au même.