lundi 28 septembre 2009
Sur le terrain
posté à 00h03, par
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Cela fait trois mois exactement que Manuel Zelaya a été évincé du pouvoir par un coup d’état à l’ancienne mode latino-américaine. Trois mois que le peuple est dans la rue, manifeste contre un pouvoir illégitime. Aujourd’hui, ils seront plusieurs centaines de milliers à arpenter Tegucigalpa en narguant la répression. Retour en images sur une révolte qui atteint son point crucial.
Aujourd’hui, lundi 28 septembre, journée plus que déterminante pour l’avenir politique du Honduras. Cela fait désormais trois mois pile-poil que l’ancien président du Congrès Micheletti squatte violemment le pouvoir suite à son Golpe de estado, et la Résistance compte bien faire entendre sa voix. Une journée de mobilisation sans précédent qui pourrait faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre.
Cloitré dans l’ambassade du Brésil, voire assiégé1, Manuel Zelaya, qui a par ailleurs dénoncé un projet de tentative de meurtre contre sa personne2, a lancé un appel à toutes les provinces du pays pour que ceux qui refusent le coup d’état convergent vers la capitale Tegucigalpa : « Nous lançons un appel patriotique (…) à la Résistance (…) pour que chaque localité dans chaque département se mobilise vers la capitale, pour que dès demain dimanche commence une grande marche pour la restitution. » Poursuivant, il a affirmé qu’il s’agissait de mener « l’offensive finale contre le gouvernement de facto. (…) Si l’appel au dialogue et à la paix n’est pas entendu, les garanties pour des élections libres et transparentes lors de la prochaine présidentielle seront perdues (…) et le peuple ignorera le processus électoral et ses résultats. »
Francesca, résidente au Honduras, citée dans un précédent article consacré au coup d’état, semble convaincue que le pouvoir fantoche de Micheletti va avoir recours à la force : « Il y aura très probablement une forte répression malgré la calme dans lequel les « marchas » se déroulent. » Surtout, elle tient à souligner le fait que le mouvement social est beaucoup plus important que ne le laissent transparaitre les médias, occidentaux en premier lieu. Questionnée sur le pourcentage de la population apportant son soutien à Micheletti, elle répond :
En ce qui concerne le nombre de gens qui donnent leur appui à Micheletti, la réponse varie. Si tu demandes au gouvernement de Micheletti, il t’affirmera qu’il a à ses côtés la moitié de la population. Si tu demandes aux partisans de la Résistance, ils te répondront que les maigres soutiens à Micheletti concernent une minorité associée à une classe sociale déterminée, avec un grand pouvoir économique et une longue tradition de pouvoir. Par contre, je peux te donner des chiffres qui me semblent parler d’eux mêmes :
24 septembre : 5 000 à 8 000 manifestants habillés en blancs défilent en faveur de Micheletti3.
15 septembre : Manifestation de la Resistencia ; plus de 600 000 personnes se mobilisent pour soutenir Zelaya4.
À l’évidence, la population penche très largement en faveur de Zelaya. Depuis trois mois, on le dit trop peu, d’immenses manifestations hurlent inlassablement au gouvernement illégitime combien le peuple refuse le coup d’état. Marches pacifiques, massives et déterminées qui rassemblent souvent plusieurs centaines de milliers de personnes. Celle de demain sera décisive. Pour l’instant, les violences policières et militaires n’ont pas suffi à enrayer la révolte5. Comme l’affirme (ici) José Luis Baquedano, un des dirigeants du Front de résistance au coup d’État : « Ils n’ont pas pu briser le moral du peuple. Notre résistance est active mais pacifique. »
C’est parce que cette mobilisation courageuse est très peu relayée ailleurs qu’Article11 choisit de diffuser d’autres photos des manifestations de la Résistencia, émanation d’un peuple hondurien qui refuse en grande majorité le coup de force et se bat pour que le Golpe de Estado s’évanouisse comme un mauvais rêve. Signées Roverto Barra (qui a également rédigé les courtes légendes accompagnant les clichés), elles reviennent sur les différentes phases de la résistance. Surtout, elles mettent en avant, mieux que n’importe quelle dépêche d’agence, l’ampleur et la dignité de la rébellion du peuple hondurien.
Sauf indication contraires, ces photographies ont été prises à Tegucigalpa, capitale du Honduras.
1 Christina Kirchner, présidente d’Argentine, a ainsi déclaré, faisant écho aux déclarations offusquées du personnel de l’ambassade du Brésil : « Ni lors de la dictature de Varela en Argentine, ni pendant celle Pinochet au Chili, on n’a pu observer une agression comparable à celle infligée à l’ambassade du Brésil. » A noter également cette information relayée par Indy Media Nantes (ici), 20mn et des sites locaux (ici, entre autres) : l’ambassade serait attaquée à coup d’armes sonores, voire chimiques.
A consulter, surtout, le très bon billet de Primitivi sur le siège de l’ambassade et les méthodes utilisées par la police dans sa chasse aux contestataires.
2 Voir cet article d’Info Sud Tele, sûrement le meilleur site pour s’informer véritablement sur la situation.
3 Source : Habla Honduras.
4 Source : CNN.
5 À noter, ce mauvais présage : il semble que des paramilitaires colombiens soient de la partie, voir ici la traduction d’un article de La Jornada.