ARTICLE11
 
 

jeudi 6 novembre 2008

Médias

posté à 00h04, par PT
5 commentaires

« Le Figaro Madame » dans la peau de la First Lady : toi aussi, deviens belle comme Carla
JPEG - 6.4 ko

Ses lectrices ? Des gourdes empotées que le destin des grandes de ce monde continue de faire fantasmer à gros soupirs. Une bonne raison pour « Le Figaro Madame » de concilier conseils pratiques et arrières-cuisines people en simulant un cours de gym aux côtés de la coach personnelle de Carla Bruni-Sarkozy. Du grand n’importe quoi, qui ne fait de tort à personne, et surtout pas à la « svelte » épouse du Président.

Toujours plus loin dans la coulisse. Dans la quête effrénée de vérité. Dans le registre, on peut noter que « Le Journal du dimanche » et « Le Figaro Madame » roulent roue dans roue sur les chemins de la vertu. Qu’on ne leur reproche pas, ça non, de ne pas exercer aux fins de mieux éclairer le monde. Ils s’emploient l’un et l’autre à jeter la lumière sur des pans entiers d’ignorances, capables d’ingénieuses trouvailles pour extraire le lecteur de la douloureuse paresse intellectuelle dont il se repaît.

Ainsi du « JDD », qui le mois dernier confiait à l’une de ses plumes les éminentes les soins d’un reportage documenté dans les pas de Super-Sarko, homme providence dont les exploits s’expliquent, nous renseignait l’article, par une hygiène de vie savamment dosée et quantité de menus efforts nécessaires quand, comme lui, on prétend à l’excellence. De la teneur des menus servis à la table élyséenne aux rythmes du sommeil présidentiel, Virginie Le Guay n’avait rien omis, la consciencieuse, tissant en creux le portrait d’un surhomme aux pouvoirs miraculeux.

Et ça faisait un bien fou.

Mais qui dit Nico dit Carla. Le tableau serait donc resté incomplet sans la contribution du « Figaro Madame », parti courageusement sur les traces de Carla Bruni1, aiguillonné par cette question brûlante, urgente, nécessaire : qu’est-ce qui rend si belle la première Dame de France ?

Là où la journaliste du « Figaro Madame » réussit son coup, c’est que son papier répond tel un écho fidèle à la récente livraison du JDD, s’occupant mêmement des sacrifices physiques consentis par la « svelte » Carla pour rester présentable. Si bien que les deux papiers, bout à bout, sont à déguster comme on le ferait d’un feuilleton.

A tout bon feuilleton ses héros récurrents : dans celui-ci, on retrouve l’intriguante Julie, coach physique de son état, dont il était déjà question dans l’article du JDD. « Une amie de Carla », expliquait l’hebdomadaire. Une « amie » sur laquelle la journaliste du « Figaro Madame » est tout heureuse, écrit-elle, d’avoir « réussi à mettre la main ». Exploit considérable, en effet : le 31 mai dernier, « Le Figaro Madame » avait opportunément consacré un entrefilet promotionnel au lancement de la petite entreprise de remise en forme mise sur pied par la dénommée Julie et son mari, Marc Imperiali. Du bon usage des archives et du droit de suite...

Sous couvert d’un jeu de rôles teinté d’un humour contestable, l’auteure de l’article nous dévoile donc les petits trucs et astuces de Carlita, qui pratique trois fois par semaine, à raison d’une heure par séance ; est une élève rêveuse mais assidue ; concentre ses efforts sur les fessiers, les abdos et le dos ; ne cède jamais aux caprices de stars ; porte bas de survêtement noir et t-shirt blanc quand elle s’entraîne ; transpire peu ; redoute l’exercice des fentes ; emporte partout en déplacement un objet de torture appelé Swissball ; excelle dans l’art du stretching.

C’est Véronique et Davina à la sauce XVIe (arrondissement).

Le journalisme people réinventé, manucuré.

Le trash-bas de gamme propre sur lui, qui ne porte préjudice à personne.

On a tort de prendre « Le Figaro » pour un journal seulement austère : il sait aussi s’afficher parfaitement cynique.



1 « Le Figaro Madame » s’est d’ailleurs fait une spécialité de la première Dame, « charmeuse fine racée » qui « boit au goulot avec élégance » ; en témoigne cette sirupeuse interview pondue pour la sortie de son dernier album.


COMMENTAIRES

 


  • Bon.
    Toi, tu analyses les poubelles.

    Nous, on lit tes résultats.

    Ce qui permet d’avoir une idée assez précise des poubelles

    Sans avoir à renifler.

    Total respect.

     ;-)



  • Je n’ai pas tout compris :

    Redoute l’exercice des fentes ? Kézako ?

    Transpire peu:ne mouille pas le survétement ?

    • L’exercice des fentes consiste en un mouvement de jambes hérité de l’escrime me semble-t-il (la fente avant si tu préfères). Mais il ne mouille pas le survête, non. Enfin pas celui de Carla. Faut-il s’en réjouir ? Ou l’en consoler ? « Le Fig Madame » ne répond pas à ces questions.



  • vendredi 7 novembre 2008 à 02h46, par pièce détachée

    Bien sûr que l’article du Figaro Madame « répond tel un écho fidèle à la récente livraison du JDD » sur les secrets-minceur de Sarkozy. D’une part :

    — t’es un homme et tu ressembles même pas à Sarkozy ; alors casse-toi, pauv’con ;
    — t’es une femme et tu ressembles même pas à sa femme ; alors casse-toi, pauv’conne.

    D’autre part, le JDD comprend un supplément, Version Femina, dont beaucoup de photos de mode et de “beauté” sont reprises... du Figaro Madame. Ce supplément inondant est d’ailleurs partout, déversé qu’il est avec de nombreux quotidiens régionaux (le mercredi avec L’Hyène Républiconne, le dimanche avec Le Vénal du Centre, etc.) ; et la juxtaposition de cette Version Femina “populaire” du Figaro Madame avec le concours du plus gros potiron électoral de Conseiller Régional, ou le fait divers du chasseur qui s’est tiré dans les couilles en pissant, atteint souvent des sommets...

    ... j’allais écrire « des sommets de cacophonie ». Mais non, il n’y a là nulle cacophonie : aux hommes, la poigne sur les autres, leur fusil, le gibier. Aux femmes, la poigne sur le gibier qu’elles sont à elles-mêmes ; la police faite corps ; l’obsession exténuante de tortionnaires acharnées à rogner, limer, lisser, gommer, mettre au cachot leur propre chair et faire suer leurs propres désirs, au point d’en « perdre de vue le monde » (Eve Ensler).

    Le but est bien là : pendant qu’elles se torturent ainsi, les femmes ne pensent pas. Elles sentent, c’est bien connu. Mais quoi ? Le regard zappant des collègues qui ne les écoutent pas, pendant une conférence où il faut parler en tailleur “féminin” ; l’odeur et la poissure du sang de sanglier, que les hommes aiment manger battu en omelette à peine cuite en pelotant des fesses à grand renfort de mie de pain. Le milieu change, mais c’est toujours la torture, qui empêche absolument, brutalement, de penser, d’épanouir.

    C’est déjà ça de pris pour Sarkozy, héritier ici d’une tradition qui, comme la femme, remonte à la plus haute antiquité (merci Vialatte). Et pourquoi croyez-vous qu’il s’est adjoint Bruni ? Une breloque bling-bling de plus ? Certes oui. Mais aussi, et par le fait même, un modèle — faut-il rappeler qu’elle est, pour le protocole, « la première dame de France » (même si l’équivalent anglais euphémistoïde First Lady fait moins “Bernadette Chirac”) ? — ; un modèle, pour toute cette pâte de chair et de cerveau à faire fondre dans des dissolvants, dans des crèmes-à-tuer-le-temps. Et ça marche, l’inondation Version Femina : l’an dernier, Le Vénal du Centre titrait en deuxième page : « Quatorze pots de crème anti-rides dérobés hier à la pharmacie de Varzy. » (« dérobés »... Quel style, quel panache...) On le voit : à côté d’autres substituts du bonheur — qui se dérobe, lui aussi —, l’anti-rides plafonne au palmarès des braqueurs de pharmacie.

    Non, Le Figaro Madame n’est pas plus « parfaitement cynique » que n’importe quel autre magazine “féminin”. Non, ce n’est pas « du grand n’importe quoi, qui ne fait de tort à personne ». Le redoublement Sarkozy + Bruni ne fait que mettre en spectacle pommadé cette consigne de Karl Lagerfeld à ses recruteurs de mannequins, envoyés à Auschwitz les jours de mise en conformité avec le gabarit des fours : « Pas d’os trop larges, parce que là on ne peut pas rogner » (pour le cerveau, je ne vous dis pas). Nul besoin d’y voir un complot (relire Bourdieu), mais c’est on ne peut plus cohérent, et ça fait d’autant plus de tort à beaucoup, hommes et femmes, jour et nuit, en toutes circonstances, qu’on en est moins conscient(e).

    La citation de Lagerfeld est de mémoire. On trouvera l’original, enrobé d’épices délicieuses qui arrachent grave, chez la Reine de Beauté Mona Chollet. L’article est assez long mais, même pour les feignant(e)s incultes drogué(e)s aux SMS débiles qui fréquentent Article XI, c’est très drôle à lire, et l’on y constate que toutes les « lectrices » (tiens donc... aucun « lecteur » ? hreum...) de la presse “féminine” ne sont pas des « gourdes empotées ». Pour le plaisir qu’on y trouve, et pour son œuvre de salubrité publique, on devrait offrir à Mona des cuissardes d’égoutier de chez Christian Louboutin, et même une paire de rechange de chez Manolo Blahnik.

    Et si jamais Article XI échange le glamour de Charles Bukowski & Georgia Peckham-Krellner (encore merci, Dan) contre le gadget bi-matière Sarkozy & Bruni, je m’abonne à Femme Actuelle et je me couche pour mourir.

  • Répondre à cet article