samedi 4 octobre 2008
Le Charançon Libéré
posté à 10h51, par
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Hors de prix, les expulsions de clandestins ? Oui, si l’on en croit la loi de finances 2009, qui chiffre le coût des billets d’avion à 39 millions d’euros et celui du fonctionnement des centres de rétention à 29 millions. Une facture conséquente, pourtant bien loin du coût réel de la chasse aux clandestins. Estimée à 3 milliards d’euros, celle-ci représente un effroyable gâchis, autant humain que matériel.
C’est comme ça : les clandestins aiment l’altitude.
Et quand ils ne se précipitent pas à tour de rôle du haut de balcons ou de fenêtres quelconques, tout point situé au-dessus du deuxième étage constituant pour eux une roche tarpéienne acceptable.
Ils se bousculent pour monter dans les vols charters du ministère de l’Immigration et de l’identité nationale.
Et embarquent à qui mieux-mieux pour des voyages organisés vers de lointains pays.
Ils auraient tort de se priver.
Tant les conditions qui leurs sont faites sont alléchantes : l’aller simple pour que dalle, tarif comprenant les coûts de matraque, les humiliations et les injures, mais excluant à l’évidence les plateaux-repas en vol et l’accès au duty-free à bord.
On ne peut pas tout avoir, hein…
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Ces billets gratuits ne tombent pas du ciel.
Mais sont payés comptant par le ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale, lequel fait à l’évidence un usage intelligent et raisonné des deniers publics.
Il suffit pour s’en convaincre de consulter la loi de finances 2009.
Laquelle estime, rapporte Le Monde, le coût moyen d’une expulsion à 2 186 €, montant calculé d’après les prix des billets et celui des locations d’avion.
Soit un aller simple à un tarif très raisonnable.
Comme l’est indéniablement le coût global de ces honteux charters, établi sur la base de 26 000 expulsions annuelles et qui atteint tout juste les 42 millions d’euros.
Autant dire une misère.
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Titré Le budget 2009 prévoit 42 millions d’euros pour les expulsions de sans-papiers, l’article du Monde, qui évoque aussi le montant de la dotation prévue pour la rétention administrative en 2009 (28,8 millions d’euro), pourrait laisser penser que la mise en musique de la politique d’expulsion ne coûte pas grand chose à l’État français, si ce n’est indignité et déshonneur.
Alors que non.
Pas du tout.
Puisqu’en sus de l’immense coût moral, celui des destins brisés et de l’extension ad nauseum du domaine de la douleur et du désespoir, cette politique d’expulsion constitue un gouffre financier, puits sans fond de dépenses inutiles.
De quoi reconsidérer toute volonté publique d’expulsions massives en ces temps de récession, même du côté de l’UMP.
Une évidence que le chercheur Damien de Blic, l’un des seuls à avoir tenté de chiffrer précisément le coût de la chasse aux clandestins, avait établi en mars 2007, dans un rapport intitulé Sans-papiers : l’autre « chiffre » de la politique d’expulsion.
Il y faisait ce constat :
« Pour sa seule partie émergée, la politique d’expulsion de sans-papiers mobilise l’équivalent de plus de 10 000 emplois à temps plein. Mais cette politique a aussi besoin de moyens beaucoup moins visibles, parce qu’empruntés à des services normalement destinés à d’autres emplois : fonctionnaires affectés au centres de rétention, policiers assurant les interpellations, les gardes à vue et les transferts divers, escortes internationales vers les pays de retour, toutes les activités sans lesquelles les nombres fixés d’éloignement seraient tout simplement impossibles à atteindre. On peut ainsi raisonnablement estimer que c’est l’équivalent d’au moins 15 000 emplois à temps plein qui est consacré à l’expulsion des sans-papiers. »
Et estimait cet impressionnant gâchis humain et matériel à la modique somme de 3 milliards d’euros :
« Si l’on suppose que le nombre de 28 000 expulsions sera atteint à la fin de l’année 2007, il aura fallu pour réaliser deux de ces expulsions l’équivalent de l’emploi annuel à temps plein d’un fonctionnaire. Si l’on traduit ces emplois sous une forme monétaire, ce sont donc au minimum 3 milliards d’euros qu’auront coûté au total les expulsions réalisées depuis 2003 : l’équivalent du budget annuel du ministère de la culture ou encore deux années de fonctionnement de la ville de Marseille. C’est aussi le déficit de la caisse national d’assurance vieillesse prévu pour 2007. »
Un coût démesuré, suffisant pour discréditer la politique d’expulsion des clandestins :
« Compte tenu par ailleurs du coût humain individuel – lui inestimable – pour tous ceux qui auront été arrachés au territoire français et à toutes les attaches qu’ils ont pu y nouer, la démesure et l’absurde d’une politique fondée sur des chiffres qui ne semblent finalement servir qu’une opération de communication apparaît ici dans toute son évidence. »
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Une démonstration salutaire, dont il n’est bien sûr pas question dans la loi de finances 2009.
Il ne manquerait plus que les contribuables sachent à quoi servent réellement leurs impôts, hein…