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jeudi 22 décembre 2011

Entretiens

posté à 16h33, par Manu X
54 commentaires

Serge Latouche : « Vous vous sentez heureux à consommer toutes ces conneries ? »

Timing parfait : publier un entretien avec Serge Latouche deux jours avant Noël, c’est taper sur le crapaud au moment même où il est gonflé à bloc. Alors que le délire consommateur est à son apogée, il nous semblait précieux de donner la parole à un des théoriciens majeurs de la décroissance et de l’après-développement. Loin de l’imposture verte, du développement durable et du green-washing.

Contrairement aux attentes de Karl Marx, la société de consommation n’a pas encore produit son antidote. Les crises économiques, écologiques, sociales et culturelles s’empilent et s’entretiennent, librement et sans entrave. Dirigeant le système vers l’auto-destruction. Ce qui aura peut-être l’avantage de laisser une petite chance à l’alternative d’une société de prospérité sans croissance. Rencontre avec Serge Latouche, théoricien de l’après-développement.

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Généalogie et filiation intellectuelle

« La décroissance est le fruit de la rencontre d’un mot et de mouvements d’idées plus anciens. La revue Silence, l’une des rares revues écologistes en France, souhaitait faire un numéro sur ce thème au début de l’année 2002. Le mot faisait encore uniquement référence au titre en français de l’œuvre de Nicholas Georgescu-Roegen1.

Comme j’étais engagé depuis longtemps dans une critique du développement, et encore plus dans une dénonciation de l’imposture du développement durable, j’ai écrit pour ce numéro un article intitulé À bas le développement durable, vive la décroissance conviviale. Au même moment, une petite association qui regroupait les amis de François Partant et dont j’étais le président à l’époque, La ligne d’horizon, organisait un colloque. Nous étions une petite organisation mais nous voulions faire un grand débat, qui a finalement eu lieu en mars 2002, et qui s’appelait Défaire le développement, refaire le monde. Il y a eu un télescopage entre ces deux évènements, et le colloque est devenu l’acte fondateur du mouvement de la décroissance. À la fois comme mouvement de réflexion spécifique et comme mouvement social et politique.

Évidemment, il y avait en amont un long parcours de critique du développement avec cette association. Cette critique du développement concernait alors surtout le Sud. Nous étions tous des gens du Sud ou ayant travaillé dans le Sud. Nous constituions une petite internationale anti-développementiste, ou post-développementiste, comme le suggérait le titre de la publication : After development, What ? What concepts ? What symbols ? What images ? Bien sûr, en faisant la critique du développement, nous étions amenés à faire la critique de la croissance. Mais notre clientèle, c’était le Sud. Au Nord, il y avait déjà une critique de la société de consommation. Avec Baudrillard, notamment...

La sortie de ce numéro de Silence et la préparation du colloque ont marqué un tournant. Un déplacement, d’une pensée orientée vers le Sud à une réflexion globale. François Partant avait écrit La fin du développement, j’avais écrit de mon côté Faut-il refuser le développement ?. Enfin, Wolfgang Sachs, qui coordonnait cette internationale de disciples d’Ivan Illich, avait publié un ouvrage collectif intitulé Le Dictionnaire du développement.

Notre critique du développement n’était pas fondamentalement écologique. L’écologie était même totalement absente de ma réflexion personnelle. C’est venu beaucoup plus tard. On ne peut pas en dire autant pour tout le monde, pour Illich notamment, mais c’était secondaire. Nous n’avions pas en tête la catastrophe écologique. Le développement nous semblait avant tout profondément insatisfaisant. Contradictoire, même. C’était une critique culturelle. Nous analysions le développement comme processus d’occidentalisation du monde. Nous nous attaquions au paradigme occidental parce qu’il était uniformisateur, déculturant, ethnocidaire.

Ce qui a été caractéristique, à mes yeux, quand j’ai été amené à écrire des articles sur la décroissance pour plusieurs dictionnaires, c’est la spécificité provoquée par l’adjonction, à un moment donné, d’un mot à un courant. Un peu comme s’il s’agissait d’une mayonnaise. Il y avait l’huile, le jaune d’œuf, mais ça ne s’était pas vraiment mélangé... Le mélange s’est réellement produit quand on est passé à une réflexion plus globale en s’adressant aussi à des gens du Nord qui cherchaient une alternative à un système en crise : la société de consommation, de croissance. Nous avons dû réaliser la synthèse du courant dont nous étions issu - la critique culturaliste du développement, et plus largement la critique culturaliste de l’Occident - et de la critique écologique, celle de Nicolas Giorgescu-Roegen, ou encore le point de vue des écologistes du Club de Rome2. Cela a permis d’élargir le message, avec l’idée que nous vivons dans une société dominée par une économie de croissance, aussi bien au Nord qu’au Sud, et que nous devons en sortir. Parce que cette société de croissance n’est pas souhaitable, et parce qu’elle n’est pas soutenable. On peut partir indifféremment de l’un des deux points de départ de la réflexion. Ils sont finalement profondément liés.

La réflexion d’Ivan Illich a été très importante - mais il faut aussi mentionner ce qui peut la compléter ou la précéder. Je pense notamment à Jacques Ellul avec sa critique de la technique. À Bernard Charbonneau, ce personnage un peu insituable, lié à Ellul, dont il a fait la critique, et qui est à l’origine de l’écologie politique : la critique du développement et la critique écologique étaient déjà liées chez lui. André Gorz avait, lui aussi, fait cette synthèse bien avant nous en utilisant le mot écosocialisme ; j’étais en relation avec lui, mais je ne connaissais qu’une partie de son œuvre, principalement sa critique du travail. En creusant un peu, je me suis rendu compte qu’il avait déjà tout dit. Il utilise même parfois le mot décroissance. Avant de mourir, il a participé à l’un de nos numéros de la revue Entropia, et il a écrit plusieurs articles dans lesquels il manifeste clairement son adhésion à la décroissance.

L’autre source très importante pour moi, au niveau de la réflexion sous-jacente, de l’analyse de la dynamique de la société et de la philosophie sociale qui l’accompagne, c’est Cornélius Castoriadis. Bien qu’il ait peu écrit sur le sujet, il y a quelques textes dans lesquels il se montre radicalement critique face au développement. Avec sa conception de la société comme institution imaginaire, la croissance et le progrès deviennent des significations imaginaires sociales. C’est un point très important dans la construction de ma démarche critique. »

Renforcement des théories de l’après-développement face aux crises actuelles

« Elles ne se renforcent pas. Nous disions que l’on allait droit dans le mur. Eh bien, on y est. Nous ne sommes bien entendu pas les seuls à l’avoir annoncé... mais nous pensons par contre que notre projet est la seule alternative possible, comme l’ont écrit un certain nombre d’auteurs liés à la décroissance, sans se connaître d’ailleurs (il s’agit de Paul Aries et de Paolo Cacciari) : décroissance ou barbarie. En référence à ce mouvement, Socialisme ou barbarie3. Si la décroissance est un écosocialisme, alors nous nous plaçons dans le droit fil. Écosocialisme ou barbarie, je crois que c’est plus vrai que jamais...

Nous sommes coincés par la crise qui nous impose une austérité forcée, une croissance négative - ce n’est pas du tout la même chose que la décroissance choisie, ou société d’abondance frugale. Pour reprendre les termes utilisés par Tim Jackson, mon équivalent anglais qui défend une société de prospérité sans croissance, nous devons désormais faire face à une société de non prospérité avec une croissance négative. C’est ce qu’il y a de pire. J’entendais tout à l’heure l’un des candidats à la présidentielle clamer que la croissance est notre salut. Je pense pour ma part qu’elle n’est plus possible ni souhaitable, tout simplement parce qu’elle nous amène vraiment, très rapidement, à détruire notre système écologique.

Au début de mes conférences, je pars souvent d’une réflexion de Woody Allen : « Nous sommes à la croisée de deux chemins. L’un mène à la disparition de l’espèce, l’autre au désespoir absolu. » Et il ajoute : « J’espère que l’on va faire le bon choix ».
Le chemin qui mène à la disparition de l’espèce, c’est celui de la croissance. On le voit maintenant, avec le dérèglement climatique, la disparition de la biodiversité... c’est évident pour tout le monde, sauf pour ceux qui ne veulent pas le voir, à commencer par nos responsables politiques et économiques. Et l’autre chemin, qui mène au désespoir, est celui que nous connaissons depuis septembre 2008 et la faillite de Lehman Brothers. C’est la société de croissance, sans croissance. Et il n’y a rien de pire. Au moins, quand la société de croissance tourne comme sous les Trente glorieuses, il y a de l’emploi, des ressources budgétaires, pour financer la santé, la culture, l’éducation, et même prendre un peu soin de l’environnement. Là, on voit bien qu’il n’y a plus d’argent pour rien, qu’il faut tailler dans tous les budgets.

Pour revenir à la citation de Woody Allen : aucun de ces deux chemins n’est le bon. Nous devons donc trouver une troisième voie. Une société qui sort du logiciel de la société de croissance qui n’est autre que le logiciel du capitalisme. L’accumulation illimitée du capital n’est qu’un autre nom pour désigner la croissance. Nous devons créer une certaine philosophie des limites, comme toutes les sociétés humaines (sauf la nôtre) en ont connue. Toutes, ou presque, ont su mettre des barrières, des limites à la démesure humaine, à ce que les Grecs appelaient l’hubris. On a vraiment donné corps à cette démesure à partir du XVIIe siècle, quand on a décrété : « Greed is good ». Soit : L’avidité est une bonne chose. Ce message est encore enseigné dans les écoles de commerce aujourd’hui. Alors que c’est justement ce qui nous pousse à détruire le plus vite possible notre environnement ! »

Modèles alternatifs

« Toutes les sociétés humaines avaient domestiqué ou s’efforçaient de domestiquer la démesure, les passions tristes, la soif du pouvoir, la soif de richesses... et y réussissaient plus ou moins bien. Ce n’était pas toujours fameux : certaines d’entre elles se seraient effondrées pour avoir abusé de l’utilisation de leur écosystème, mais elles ne s’en tiraient pas si mal en général. On ne peut plus en dire autant pour nous. Une fois les bornes franchies, il n’y a plus de limite. Quelle était cette limite ? La saturation des besoins. À partir du moment où l’on est dans une société qui repose sur la création continuelle de nouveaux besoins, on voit bien qu’il n’y a plus de limite... S’il n’y a pas de limite à la création des besoins, alors il n’y en a pas à la production et à la consommation, ni à la destruction et à la pollution.

Certains États ont heureusement désormais décidé, en s’inspirant d’une philosophie ancestrale, de répudier cet objectif de croissance illimitée et de retrouver le bien-vivre, tout simplement. On le voit notamment dans ces pays qui ont conservé une importante population amérindienne, en Équateur et en Bolivie. Ces peuples nous disent : « Traditionnellement, l’objectif de nos sociétés, qui ne connaissaient pas le concept occidental de développement, était le Súmac Káusai, le buen vivir ». »

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Un espoir au Nord ?

« Il y a toujours des raisons d’espérer, comme de désespérer... Notre histoire est extrêmement riche. Nous avons fait l’expérience d’une erreur, mais nous pouvons la corriger. D’ailleurs, nous n’avons pas toujours été une société de prédateurs ; nous ne sommes pas que cela.
Toutes les philosophies, que ce soit l’épicurisme, le stoïcisme et même, dans une certaine mesure, le christianisme, ont des choses à nous apprendre. Tout n’est pas à garder, évidemment. Le christianisme, en particulier, n’est pas toujours exemplaire dans son rapport à la nature, en dehors de Saint François d’Assise. Par contre, la philosophie antique était basée sur la discipline personnelle, c’est-à-dire la limitation de ce que Spinoza appelle les passions tristes, et sur un système d’éducation et une conception de la Cité mettant au centre la justice. Une idée très forte de la justice, qui fixait des limites. Les gens ne les respectaient pas forcément, puisque les limites sont toujours faites pour être transgressées, mais au moins cette idée existait. Sans limite, il n’y a même plus de transgression possible.

Il faudrait aussi citer nombre de micro-expériences - avec différentes strates et des prises de conscience populaires parfois fortes. En Italie par exemple, avec deux ou trois référendum successifs contre la privatisation de l’eau, contre le nucléaire : une majorité de la population a suivi. À un niveau plus limité, certaines villes ou régions ont fait le choix de s’engager dans des expériences alternatives. Je pense au mouvement des villes en transition, des villes vertueuses, des villes lentes... Et à quantité d’initiatives à la base, comme les AMAP4, les SEL5, etc. Nombreux ceux qui ont pris conscience des enjeux, agissent dans ce sens, modifient leur façon de vivre. Avec l’espoir que cela fasse tâche d’huile, que cela devienne suffisamment fort dans le mouvement de crise profonde que nous connaissons.

Le titre de l’un des livres de François Partant était Que la crise s’aggrave6. Non qu’il souhaitait que cela aille plus mal. Mais la dynamique des contradictions de la société n’a pas obéi à ce que pensait Marx. Elle n’a pas permis de renforcer une classe porteuse d’un avenir universel. On voit bien que la manipulation, le lavage du cerveau et la colonisation de l’imaginaire sont tels que la société n’engendre pas spontanément son antidote. Elle engendre en revanche un poison dont elle crève. Mais si ce système, comme j’en suis convaincu, s’autodétruit, c’est un champ immense de possibilités qui s’ouvre pour une alternative. C’est ce sur quoi nous travaillons. Nous œuvrons à construire l’alternative à un système qui est en train de se casser la figure. On se heurtera quand même à des tentatives désespérées de défense du système, de défense de certaines formes du système. Cela ne prendra sûrement pas la forme d’une pseudo-démocratie pluraliste, mais plutôt celle d’un pouvoir ultra-violent et totalitaire, dont certains livres de science-fiction ont pu donner quelques illustrations. Je pense à Soleil Vert, par exemple. »

Convergences

« Les menaces se rapprochent. Je crois, tout comme François Partant, à la pédagogie des catastrophes. C’est malheureux, mais dans l’histoire de l’humanité, il est très rare que les bons choix aient été guidés seulement par une aspiration au mieux, par un idéal ou par de bons sentiments. C’est nécessaire, mais ce n’est pas suffisant. Il faut un coup de pied au cul : la menace de la catastrophe.

On voit ainsi très bien comment évolue en France l’opinion publique face au nucléaire. Il y a eu Tchernobyl, mais ça n’a pas suffi. Il y a maintenant Fukushima, mais il semblerait que cet avertissement, pourtant très sérieux, ne suffise pas encore. La prochaine catastrophe sera donc - malheureusement - la bonne. C’est ainsi que les choses évoluent. Il faut juste espérer un changement d’attitude avant qu’il ne soit trop tard. C’est d’ailleurs une expression que l’on retrouve dans le titre de nombreux livres sortis ces dernières années, dont celui de Dominique Belpomme, Avant qu’il ne soit trop tard7.

Je dois être un indécrottable optimiste : bien que je sache qu’il y a des mécanismes d’emballement - en particulier sur le climat - et qu’au delà d’un certain seuil on ne contrôle plus rien, je reste persuadé que l’on arrivera à s’en sortir. On ne s’en sortira peut-être pas tous, par contre. La vraie question est de savoir si, de catastrophe en catastrophe, seules quelques zones de la planète seront vivables pour quelques millions ou quelques centaines de millions d’individus qui auront alors vraiment compris la leçon et sauront bricoler une nouvelle société, ou si l’immense majorité de l’espèce humaine pourra se lancer dans une nouvelle aventure... je dois dire que je n’en sais rien, il faudrait être un prophète. Mais il faut s’y préparer. Plus tôt on s’attaque au problème et mieux c’est. Nous avons déjà perdu beaucoup trop de temps. »

Face aux sceptiques

« Groucho Marx disait : « Un enfant de cinq ans comprendrait ça ! Allez me chercher un enfant de cinq ans ! » Il faudrait amener, dans les grandes assemblées, à Durban notamment, des enfants de cinq ans qui comprennent déjà qu’une croissance exponentielle, infinie, est incompatible avec une planète finie. Nous dépassons déjà de 50% la capacité de régénération de la biosphère. Pour nous, les Français, c’est 300 ou 400%. Il faudrait trois ou quatre planètes pour supporter un tel modèle. Même un enfant de cinq ans comprend que cela ne peut pas durer. Nos chefs d’État et nos responsables économiques ne veulent pas le comprendre, prétendent qu’il y en a encore pour longtemps, que la science va trouver des solutions. La science ne peut pas créer à partir de rien, il n’y a que Dieu qui fasse ça. Ce ne sont pas les nanotechnologies qui vont nous sauver, elles risquent plutôt d’accélérer la destruction.

L’autre interrogation fondamentale est celle-ci : «  vous vous sentez heureux à consommer toutes ces conneries ? ». Il faudrait la poser à tous ces gens qui sont stressés, vivent comme des cons, foutent tout à la poubelle... Si nous n’étions pas intoxiqués par la pub, nous pourrions vivre autrement, sans retourner à l’âge des cavernes. On n’a pas besoin de postes de télévision. Il y a encore vingt ans, on n’avait pas besoin de téléphones portables. Ça n’existait pas. Nous sommes devenus toxico-dépendants. Il suffirait de faire un petit retour en arrière pour voir que l’on peut être parfaitement heureux avec beaucoup moins. La vraie richesse, c’est d’avoir du temps libre, de bons rapports avec ses voisins, sa famille, son épouse... C’est un message de bon sens que n’importe qui peut comprendre... »

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Pistes

Pour un bon argumentaire en faveur de la décroissance, vous pouvez lire Vers une société d’abondance frugale8, pensé à cet effet...

On trouvera également quelques pistes dans Décoloniser l’imaginaire9, avec notamment ce petit programme issu de propositions formulées en 1992 par l’INCAD (International Network for Cultural Alternatives to Development) :

- Effacer progressivement (à raison de 20% par an) toutes les dettes des pays du Sud souscrites en raison de projets de développement.
- Réduire le revenu par tête dans les pays du Nord pour le ramener à son niveau de 1960.
- Stopper par des moyens adéquats l’utilisation illimitée du pétrole.
- Réduire la quantité d’électricité utilisée de manière à annuler tous les projets de centrales nucléaires en une dizaine d’années.
- Déconstruire le modèle global d’éducation qui encourage et soutient les États-Nations et leur développement.
- Réhabiliter les systèmes d’éducation pratiqués par des communautés locales en harmonie avec leur environnement culturel et naturel.
- Engager une campagne massive d’information dans le Nord comme dans le Sud sur les méfaits du développement, et en particulier dénoncer le développement comme facteur de paupérisation de la majeure partie du monde.
- Transformer toutes les aides des agences de développement en coopératives décentralisées vouées aux acquisitions et à la régénération de la connaissance, à la prise en compte des modes de vie et des savoir-faire des diverses cultures du monde, pour la poursuite du dialogue interculturel...



1 Demain la décroissance. Entropie, écologie, économie, Lausanne, Pierre-Marcel Favre, 1979, renommé La décroissance. Entropie, écologie, économie dans une seconde édition revue et augmentée, Paris, Sang de la Terre, 1995 . Texte disponible en ligne ici.

2 Groupe de réflexion mondialement connu pour son premier rapport The limit to growth, traduit en français par Halte à la croissance ?.

3 Organisation révolutionnaire créée sous l’impulsion de Cornélius Castoriadis et de Claude Lefort, d’orientation marxiste anti-stalinienne, active de 1949 à 1967.

4 Associations pour le maintien d’une agriculture paysanne.

5 Systèmes d’échange locaux.

6 Parangon, 2002.

7 Fayard, 2007.

8 Vers une société d’abondance frugale : Contresens et controverses sur la décroissance, Fayard / Mille et une nuits, 2011.

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9 Décoloniser l’imaginaire, Parangon/Vs, l’Après-développement, 2002.

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COMMENTAIRES

 


  • Je m’en vais faire mes courses de Noël, et tant pis pour la planète et les suivants, je serai mort avant que nous ayons tout épuisé.



  • vendredi 23 décembre 2011 à 06h36, par un-e anonyme

    - Réduire le revenu par tête dans les pays du Nord pour le ramener à son niveau de 1960.

    - Déconstruire le modèle global d’éducation qui encourage et soutient les États-Nations et leur développement.

    - Réhabiliter les systèmes d’éducation pratiqués par des communautés locales en harmonie avec leur environnement culturel et naturel.

    Ben mon cochon, en voilà un programme révolutionnaire !

    C’est du Pierre Dac, ou quoi ???

    • vendredi 23 décembre 2011 à 12h24, par un-e anonyme

      Bon, alors, je précise : c’est très exactement ce à quoi nous assistons aujourd’hui, ce programme : regression, communautarisation, et j’en passe !

      Misère de l’économie politique, même maquillée en « décroissance », ....

      manque juste « la destruction des Koulaks en tant que classe »... et on aura fait le tour !

      Ca vous branche ????

      • vendredi 23 décembre 2011 à 13h37, par Manu X

        Si tu lis attentivement ce que raconte le Monsieur, il dit effectivement que nous assistons actuellement à une forme de décroissance, puisqu’il est question d’une société de croissance sans croissance. Seulement c’est une décroissance subie, avec tous les travers que cela implique. L’idée étant ici de reprendre les choses en main pour sortir de ce schéma... plutôt ambiance l’An 01, de Gébé... en réduisant nos besoins, sans en faire une régression pour autant, si nous arrivons à déterminer ce qui est vraiment important pour nous et à privilégier ces choses pour leur donner plus de place, même, dès lors que l’on a intégré que la planète et les hommes ne pourront pas encaisser indéfiniment le traitement qu’impliquent nos modes de vie. Spécialement pour les plus riches, mais déjà aussi à notre modeste niveau pour la plupart d’entre nous...

        Concernant le communautarisme, je comprends que tu puisses te poser des questions à ce niveau en restant à la surface de ce que propose le courant « culturaliste » de la décroissance, représenté par Latouche. Mais l’idée n’est pas du tout de favoriser le communautarisme. Il te parle de ne pas imposer aux autres cultures notre vision des choses, avec comme exemple les projets de développement imposés par le FMI ou par la banque mondiale en Afrique ou ailleurs, qui creusent les dettes sans apporter de grandes améliorations dans la vie des gens, avec même une aggravation de la situation au final, à cause de la dette notamment. Il propose de ne pas rester centré sur notre vision des choses, tout en favorisant, je cite « la poursuite du dialogue interculturel ». Bref, rien n’empêche de promouvoir la richesse représentée par les cultures locales, leurs langues, leurs histoires, leurs légendes, leurs imaginaires... tout en ayant une âme internationaliste...

        • vendredi 23 décembre 2011 à 18h54, par un-e anonyme

          Je lis très attentivement ce que dit le Monsieur, merci, et je n’y vois qu’idéologie...

          • vendredi 23 décembre 2011 à 19h56, par Manu X

            ... ouep, un peu court comme réponse... je pense que tu devrais te pencher sur ce que proposent et tentent de mettre en place les initiatives de transition notamment, citées en exemple.. elles ne se réclament pas forcément de la décroissance même si elles essaient des choses qui vont clairement dans ce sens.. et je ne crois pas que cela se passe dans des conditions abominables pour les populations concernées... bien au contraire.. allez, fais pas la gueule, anonyme, toi aussi tu auras droit à un bisou du père Noël..

            • vendredi 23 décembre 2011 à 20h27, par un-e anonyme

              un décroissant, c’est quelqu’un qui dit moi j’ai choisi de vivre autrement
              et comme il a bien conscience que tout le monde peut pas faire comme lui, il vote Front de gauche.

              les autres, c’est des connards qui écoutent radio Ici et maintenant et qui votent pas.

              ( comme anonyme n° 2 )

              • vendredi 23 décembre 2011 à 23h22, par Dr Radium

                Le Front de Gauche a une attitude ambigue sur la question du nucléaire, due évidemment à la présence du PCF toujours aussi nucléocrate. Le NPA se prononce clairement pour la sortie du nucléaire. Donc, du point de vue d’en finir avec la fureur énergétique, si je devais voter, ce serait pour le NPA et pas pour le Front de Gauche.

                A part ça, l’anonyme, tu seras bien inspiré d’éviter d’insulter d’autres anonymes qui écoutent d’autres radios et ont d’autres choix politiques. On insulte les gens seulement quand on est face à eux, quand on a quelque chose dans le ventre.

            • samedi 24 décembre 2011 à 07h39, par un-e anonyme

              D’abord, des bisous, j’en veux plein, et pas qu’un seul... et merci, les initiatives alternatives, je m’y suis penché et impliqué, et depuis le début des années 70... il est vrai que les alternatives, type AMAP, ou autres, sont très porteuses de sens, mais elles ne sont qu’une autre façon de consommer (c’est déjà pas mal) et de rencontrer toutes sortes de gens sympas, au mieux, ou de barjots new-age au pire... et ne permettent pas d’aller plus loin que ça...

              Quant à ceux qui y voient l’éclosion de nouveaux rapports sociaux, économistes et/ou universitaires en mal de reconnaissance, et qui plantent là leur petits drapeaux et signatures, ils me font penser à ce Lapassade enseignant à la fac les mysteres de la transe Gnaoua du Maroc...

              Une franche rigolade, tout de même !

              Et pour ne pas parler du programme régressif proposé (oui, mais autogéré et volontaire !) et communautariste (mais anti-impérialiste !), il n’y a strictement rien à ajouter quant à l’imbécilité (et je reste gentil !) du projet et à son total manque d’imagination « décolonisée » !

              Amitiés....

              • samedi 24 décembre 2011 à 08h19, par un-e anonyme

                dans mes bras anonyme numéro 2,

                il y a certainement des universitaires verts qui sont comme des chefs de tribus

                il y en a, aussi, qui sont des gens qui réflèchissent, qui sont sans doute bêtement démocrates
                mais qui ne deviennent pas, sous prétexte qu’il faut du pognon, des ordures style Cohn-Bendit.

                Quand à Dr Radium, c’est certainement un hippie et effectivement, il y a une différence entre les hippies et un trampoline :
                un trampoline, on enlève ses chaussures pour sauter dessus.



  • Joli et intelligent cadeau de Noël que de nous offrir ce texte sur la décroissance et bien sûr c’est dans Article XI !
    Merci Manu.



  • Bonjour,

    Effectivement merci pour cet article, même si on aimerait de temps en temps entendre quelqu’un d’autre que Latouche sur la décroissance.

    C’est une opinion personnelle que j’exprime, mais Latouche semble parfois trop « Parisien » . La liste des exemples qu’il cite est à la limite du caricature. Exemple, la Bolivier, L’Equateur et le Buen Vivir qui frôle plus le pachamamisme et la démagogie politico-marketing.

    Il faut avoir passer les fêtes de Noël à Cochabamba et voir comment la « bonne croissance » bolivienne permet à tout le monde de consommer (chinois et brésilien) et de se gaver.

    En revanche, pas grand chose ,comme il le dit sur ce qui se passe ici, en France. Et pourtant, Latouche aurait pu intégrer à son analyse, par exemple les luttes et les pratiques des collectifs anti gaz de schiste : leurs critiques de la modèle de consommation énergétique par exemple... Sur la démarche de convergence qu’ils ont mise en place avec les collectifs anti-nucléaire (et bien d’autre) et qui s’illustre via des évémenents comme « Liberons l’énergie » ou « Convergence citoyenne »- sans dire évidement que « la révolution est en marche » - .

    Sur tout cela et sur bien d’autres choses : RAS.
    Latouche ne connait pas semble-t-il. Il y a un monde au sud de la Loire !

    Pour conclure, le manque d’analyses sur ce qui se passe au porte de Paris ajouter au Buen Vivir de la Bolivie et l’Equateur cité en boucle comme modéle alternatif, finisse par affaiblir le discours de Latouche. Et c’est bien dommage pour nous tous, parce que nous en aurions besoin.
    Alors au travail Mr Latouche !

    Décroissament
    JD



  • vendredi 23 décembre 2011 à 13h58, par @MorganeEssi

    Bien que d’accord avec beaucoup des constats de Latouche, je me dis que sa théorie de base n’échappe pas au culturalisme qu’il décrie tant.
    Sa définition de l’ « Occident » est loin d’être claire, une machine vivante dont les rouages sont des êtres humains ... cette vision est trop manichéenne : l’« Occident » serait le Mal absolu, et les cultures « traditionnelles » représenteraient le Bien. C’est cette fétichisation des cultures « traditionnelles » qui n’est pas exempte de culturalisme. Qu’est-ce qu’une culture traditionnelle ? Il ne prend pas le soin de le définir. Une tradition est un construit social, elle remplace probablement un état antérieur ! Il n’y a pas de culture figée, pure ou traditionnelle.

    Le dogme de la domination culturelle de lʼOccident nʼest pas nuancé. Latouche ignore volontairement lʼanthropologie. Il est de mauvaise foi, refuse le terme dʼacculturation et le remplace par la destruction. Il est contradictoire car il montre des phénomènes de réappropriation culturelle (or lʼéconomie, même grise, reste de lʼéconomie) mais continue à parler de destruction.

    Le risque avec cette posture, c’est un double racisme, anti-occidental ET à l’égard des sociétés qu’il appelle « traditionnelles ». Il n’y a qu’à voir les aberrations commises au nom de la conservation des cultures ...



  • vendredi 23 décembre 2011 à 20h16, par Garnier Jean-Pierre

    Là, vous avez fait fort en fourguant les masturbations intellectuelles de Latouche en guise de cadeau de Noël à vos lecteurs. On est en pleine régression idéologique.

    Dans un bouquin écrit avec Louis Janover, « La pensée aveugle Quand les intellectuels ont des visions », nous avions allumé, entre autres bouffons hexagonaux de la contre-révolution en marche, Serge Latouche qui s’esbaudissait alors sur le fait que les indigènes qui se tenaient à l’écart de la « civilisation industrielle » — le mot « capitalisme » écorche la bouche de ce réac diplômé — vivaient « autrement ». Nous avions fait remarquer qu’ils vivaient aussi « moins longtemps » (45 ans en moyenne, à l’époque). Fureur du Latouche a qui j’avais conseillé de moins se toucher, lors d’une réunion du comité de rédaction de la revue « L’Homme et la Société » dont il était le trésorier.
    Si l’on sort de nos frontières, on découvrira une fois de plus qu’il existe des penseurs d’une autre envergure qu’un Latouche, tels au États-Unis, John Bellamy Foster, rédacteur en chef de la Monthly Review, théoricien et militant marxiste — ce qui ne pardonne pas aux yeux de ce réac de Latouche-qui-se touche — de l’écosocialisme.
    Pour les lecteurs dotés d’un minimum de curiosité et d’esprit critique, je conseillerais la lecture d’un recueil d’articles publiés récemment en français : « Marx écologiste » (Éditions Amsterdam). Les autres pourront toujours s’empiffrer, pour les fêtes de fin d’année et après, de bouillie pour les chats concoctée par les
    Serge Latouche, Philippe Arès et autres zozos décroissants. Des anticommunistes propres sur eux maqués avec la « gauche de gauche » rose-verte à qui il servent de faire valoir et réciproquement.

    Jean-Pierre Garnier



  • vendredi 23 décembre 2011 à 20h19, par Ravi de la crèche

    C’est bien de lire ce texte parce que ça fait moins chier d’être pauvre en période de Noël, on se dit qu’on est décroissant.
    Novlangue.
    Cela rappelle un peu Sarko quand il a vu que son programme économique foirait il a convoqué l’autre là, Edgar Morin qui a expliqué que le bonheur c’était de se contenter de peu.
    Genre « à défaut de vous faire gagner plus, y a l’illuminé là qui va vous expliquer que moins vous gagnez et plus c’est super »
    Nihil novi sub sole, la réaction reste la réaction et il faut apprendre à la reconnaitre sous tous ses oripeaux.

    • samedi 24 décembre 2011 à 02h40, par Garnier Jean-Pierre

      Le pas ravi du tout de la crèche « globale » (à laquelle il manquait encore un santon « décroissant ») a parfaitement raison. Il se réfère à juste titre à un autre escroc intellectuel, l’impayable Edgar Morin qui, depuis plusieurs décennies ans, s’autoproclame « penseur marginal » alors qu’on peut le voir, l’entendre ou le lire partout où il faut être vu, entendu ou lu : 26 ans et 6 bouquins à nous bassiner avec la thématique foireuse et diversionniste de la « complexité ». Laquelle permet de ne jamais conclure, laissant aux « experts » inféodés à l’ordre capitaliste le soin d’expliquer que les choses sont toujours plus compliquées qu’elles paraissent.
      Pour en revenir à Latouche-qui-se-touche, inutile de lui rappeler que l’on ne l’a pas attendu pour faire la critique de la « société de consommation », cheval de bataille devenu canasson exténué, enfourché par les néo-petits bourgeois soixante-huitards des « Trente glorieuses » à l’époque où « la crise » n’avait pas encore pointé de bout du nez. Latouche ne fait que prendre le relai de feu le sociologue Jean Baudrillard qui ne se préoccupait pas plus que lui aujourd’hui des tonnes de kérosène gaspillées par les avions qui le transportent aux quatre coins du monde pour aller porter la bonne parole décroissante.
      En bon écolocrate, Latouche se montre incapable de lier consommation et production, préférant s’attaquer au « productivisme », idéologie apparemment tombée du ciel, ce qui est effectivement le cas, il est vrai, pour les idéologues et les politiciens qui font carrière grâce à elle (Daniel Cohn-Bendit, Alain Lipietz, Cécile Duflot, Dominique Voynet, etc.).
      En régime capitaliste, toute production est d’abord production de plus-value et a donc partie liée avec l’exploitation. Latouche le sait d’ailleurs fort bien, en bon économiste ex-marxiste qu’il est, mais il préfère, comme tant d’autres renégats de sa génération, l’oublier pour ranger Marx et tous les théoriciens qui articulent l’analyse de la dévastation en cours à une critique radicale du mode de production capitaliste, dans les poubelles de l’histoire. Pourtant, ce qui tient lieu à Latouche de pensée finira tôt ou tard par y rejoindre les autres détritus de la logorrhée néo-conservatrice.
      Une fois encore, je recommande à toux ceux qui refusent de se laisser berner par ce charlatan diplômé, le petit bouquin (133 p.) de John Bellamy Foster qui les aidera à y voir un peu plus clair en la matière. Et à ouvrir un débat en même temps qu’un nouveau front dans la lutte contre le capital au lieu de s’échiner à le rendre « durable », pour ne pas dire pérenne.

      Jean-Pierre Garnier

      • Bonsoir Jean-Pierre et Ravi,

        Alors, je suis très loin de connaître suffisamment bien tout ce qu’a pu faire le personnage pour le juger avec autant d’assurance, mais je veux bien que vous m’expliquiez ce qui vous semble réactionnaire dans ce qu’il dit ici. Et à quel moment il vous semble défendre le capitalisme ou les idées des néo-cons. Il reconnaît lui-même une bonne partie des critiques formulées ici (sur sa prise de conscience écologique plus que tardive et sans doute encore assez incomplète, sur le fait qu’il prenne juste le relais de Baudrillard, entre autres.. à raison ou à tort ensuite, c’est une autre question..), je comprends tout à fait les réserves sur son culturalisme et le manque d’exemples en dehors de la Bolivie et de l’Equateur. Mais quand j’ouvre au hasard son bouquin « décoloniser l’imaginaire », et que je tombe là-dessus : « Cela suppose une toute autre organisation dans laquelle le loisir est valorisé à la place du travail, où les relations sociales priment sur la production et la consommation de produits jetables inutiles voire nuisibles. Une réduction féroce du temps de travail imposé pour assurer à tous un emploi satisfaisant est une condition préalable. », j’y vois plus un appel au droit à la paresse de Lafargue qu’autre chose.. mais peut-être discernons-nous seulement ce que nous voulons voir en plaquant nos idées sur un discours qui peut donner lieu à différentes interprétations.. si vous avez des exemples plus précis pour étayer ce que vous dites je suis vraiment preneur...

        En attendant, je garde en tête le conseil de lecture pour compléter..

        • samedi 24 décembre 2011 à 14h06, par rchandises ».

          Bonjour, camarade Manu X,

          Pour démonter les élucubrations de Latouche et en démontrer l’inanité, il faudrait au moins un article entier. Non parce que sa pensée est « complexe » — elle est au contraire d’un simplisme achevé —, mais parce qu’il faudrait résumer les multiples ouvrages et articles déjà consacrée à dégonfler la baudruche idéologique de la « décroissance ». Après les avoir traduits, en plus, compte tenu de l’ignorance crasse dont ils font encore l’objet dans l’hexagone, si l’on excepte des gens isolés tels l’économiste François Chesnais ou les sociologues Alain Bihr et Michaël Löewy qui, à la différence de Latouche et consorts, ne pensent pas que la crise écologique soit soluble dans le capitalisme.
          Je me contenterai, faute de place, de citer quelques extraits d’un topo de lui pêché sur le site « Citoyen UE » — tout un programme ! — accompagné de mes commentaires. On verra que Latouche, comme à l’accoutumé, navigue entre truismes et contrevérités

          « Il existe une quasi-unanimité à gauche (et même au centre ) p o u r d é n o n c e r le s méfaits d’ u n e m o n d i a l i s a t i o n li b é r a l e , v o i r e u l t r a - l i b é r a l e . »
          [Latouche aurait pu s’aventurer à gauche de la gauche officielle, parages qui, il est vrai, lui semblent complètement étrangers. Il aurait pourtant découvert que la « critique consensuelle » qu’il dénonce n’y fait nullement l’unanimité puisqu’elle est elle-même critiquée par des gens qui ne confondent pas anti-libéralisme et anti-capitalisme.]

          C e t t e a s p i r a t i o n n a ï v e à u n r e t o u r d u développement t é m o i g n e à l a f o i s d’ u n e p e r t e d e m ém o i r e e t d’ u n e a b s e n c e d’ a n a l y s e s u r l a s i g n i f i c a t i o n h i s t o r i q u e d e c e d é v e l o p p e m e n t . »
          [Encore faudrait-il ne pas évacuer, comme s’y emploie Latouche depuis des années, le caractère capitaliste dudit développement].

          « I l n’ y a p a s d a n s c e t t e a p p r o c h e d e r e m i s e e n q u e s t i o n d e l’ imaginaire économique. »
          [Il n’y a surtout pas de remise en cause du capitalisme et de l’imaginaire qui l’accompagne]
          et de l’o c c i d e n t a l i s a t i o n du monde »
          [Tropisme géografico-culturaliste qui tient lieu d’explication. Le capitalisme est né et s’est développé d’abord « à l’ouest ». Et alors ? À l’ouest de quoi ? En plus, c’est l’église catholique qui, bien avant le développement du capitalisme, a mis sur orbite la notion d’« Occident » que Latouche reprend à son compte]

          « L’é c o n o m i c i s a t i o n e t l a technicisation d u m o n d e s o n t poussées à leur p o i n t u l t i m e . O r , c’est cela même q u i c o n s t i t u e la source de tous l e s méfaits d o n t on accuse la mondialsation. »
          [Il ne faut jamais laisser aux économistes la responsabilité de critiquer l’économisme. Surtout quand ils prétendent en plus philosopher. Marx avait écrit l’essentiel sur le sujet dans un ouvrage en plusieurs tomes sous-titré « Critique de l’économie politique », plus connu par son titre « Le Capital ». Qu’en a retenu Latouche qui, au lieu de se toucher, ferait mieux de le relire.]

          « C’est le développement réellement existant »
          [après le « socialisme réellement existant », concept inepte servant à désigner le socialisme réellement inexistant du capitalisme d’État, voici venir le « développement réellement existant » d’un capitalisme qui n’existe pas... aux yeux de Latouche]
          « c e l u i q u i d o m i n e l a p l a n è t e depuis d e u x s i è c l e s , q u i engendre les p r o b l è m e s s o c i a u x e t environnementaux a c t u e l s. »
          [Les rapports de production fondés sur l’exploitation et la domination de l’homme et de la nature passent donc à la trappe.]

          « L e d é v e l o p p e m e n t n’ e s t q u’ une entreprise v i s a n t à transformer les rapports d e s h o m m e s entre eux et a v e c la nature en marchandises ».
          [truisme : Marx et tous les penseurs s’inscrivant dans droit fil de sa pensée — au lieu de la détourner comme le firent les « marxistes » d’appareils étatiques ou partidaires, que Latouche semble seuls connaître — l’avaient dit bien avant lui].

          « I l s’a g i t d’ e x p l o i t e r , d e mettre e n v a l e u r , d e t i r e r profit des ressources n a t u r e l l e s e t h u m a i n e s. Q u e l q u e s o i t l’ a d j e c t i f qu’ o n l u i a c c o l e , l e c o n t e n u implicite o u e x p l i c i t e d u d é v e l o p p e m e n t, c’ e s t l a c r o i s s a n c e é c o n o m i q u e , l’ a c c u m u l a t i o n d u c a p i t a l que l’on accumule ».
          [pour Latouche, comme pour tous les économistes décérébrés par la vulgate « marxiste » qui les a imprégnés durant leurs années de jeunesse, le capital n’est qu’un stock d’argent, de machines, de marchandises, et non un rapport de production fondé sur la dépossession des travailleurs et l’extorsion de la plus-value]
          « a v e c t o u s l e s e f f e t s positifs et n é g a t i f s q u e l’ o n c o n n a ît : c o m p é t i t i o n s a n s p i t i é , croissance sans l i m i t e d e s inégalités, p i l l a g e sans retenue d e l a n a t u r e . »
          [Latouche s’arrête dans la recherche des causes là où il faudrait commencer]

          « L e f a i t d’ a j o u t e r l e qualificatif « d u r a b l e » o u « s o u t e n a b l e » n e f a i t qu’embrouiller un peu p l u s les c h o s e s. »
          [Moins, cependant, que de parler de « développement » en mettant le capitalisme entre parenthèses. Latouche devrait quand même savoir qu’il y a de plus en de gens pour s’apercevoir que le développement dit durable ne vise qu’à faire durer le capitalisme.]

          « E n c e m o m e n t même c i r c u l e u n manifeste p o u r u n d é v e l o p p e m e n t soutenable s i g n é p a r d e nombreuses célébrités d o n t J e a n - C l a u d e Camdesus , l’ a n c i e n p r é s i d e n t d u FMI ! »
          [Latouche découvre la lune : cela fait plus de deux décennies qu’aux Etats-Unis les chercheurs « radicaux » ironisent sur le « greenwashing » mené par les firmes capitalistes avec l’aide de publicitaires et des médias où le « vert » mis à toutes les sauces permet d’ouvrir à la fois un nouveau marché sur le plan économique et occuper un nouveau créneau sur le plan idéologique].

          « Notre surcroissance économique »
          [c’est plutôt « leur » : ce « nous », conformément à l’écologisme dominant, est destiné à culpabiliser chacun de « nous » en dédouanant les classes possédantes et leurs suppôts au lieu de « nous » inciter à les combattre]
          « d é p a s s e d é j à l a r g e m e n t l a capacité d e c h a r g e d e l a t e r r e .
          S i t o u s l e s c i t o y e n s d u m o n d e consommaient c o m m e l e s Américains m o y e n s, les l i m i t e s physiques d e l a p l a n è t e s e r a i e n t l a r g e m e n t dépassées. »
          [truisme].

          « Bien loin d’être le remède à la mondialisation, le développement é c o n o m i q u e c o n s t i t u e la s o u r c e d u m a l. Il d o i t ê t r e analysé e t dénoncé c o m m e t e l. »
          [et surtout pas comme le processus et le produit de l’accumulation du capital].
          J’arrête ici, en conseillant la lecture d’un autre ouvrage : « La dynamique du capitalisme ». L’auteur, Pierre Souiry, membre du groupe « Socialisme ou barbarie », avait déjà fait le tour de ce que Latouche et ses épigones sont définitvement inaptes à cerner.

          Jean-Pierre Garnier



  • " De plus en plus, la financiarisation de l’accumulation, au centre du système, appuyée par les politiques néolibérales, a généré un régime mondial de « thérapie du choc ». Plutôt que « l’euthanasie du rentier » de Keynes, nous faisons face à la menace d’une euthanasie de presque tout le reste de la société et de la nature. Les conséquences de cela, comme l’a suggéré Naomi klein dans son livre, La Stratégie du choc, vont beaucoup plus loin que l’accumulation financiarisée sous-jacente associée à l’ère néolibérale et ont des effets beaucoup plus divers, qu’on peut décrire comme un « capitalisme du désastre »- rendu manifeste par les inégalités économiques et sociales croissantes, l’instabilité permanente, le militarisme radicalisé et la guerre et une destruction environnementale planétaire apparemment inéluctable. (54)

    Jamais le conflit entre l’appropriation privée et les besoins sociaux (y compris la survie) de l’humanité n’avait été si âpre. Par conséquent, le besoin de révolution n’a jamais été si grand. Au lieu d’un système mondial voué entièrement au gain monétaire, nous avons besoin de créer une nouvelle société visant à l’égalité substantielle et au développement humain : un socialisme du vingtième siècle "

    La financiarisation de l’accumulation, par John Bellamy Foster (version complète) :

    http://socio13.wordpress.com/2011/0...



  • dimanche 25 décembre 2011 à 20h57, par un-e anonyme

    Merci pour le compliment. Mais c’est quoi les « békés » ? Sous cette appellation,je ne connais que les descendants des colonialistes et esclavagistes aux Antilles françaises, aussi arrogants et bornés que leur ancêtres.

    Jean-Pierre Garnier



  • lundi 26 décembre 2011 à 22h25, par Garnier Jean-Pierre

    Vous n’avez pas éclairci le sens que donnez au vocable « békés ».
    Quant à Delanoë, il ne faut pas le sous-estimer. Avant d’être un apparatchik du PS, c’était le patron d’une boîte de communication. Comme beaucoup d’autres de la corporation, il a lu Guy Debord et sait que, dans la « société du spectacle », le paraître est devenu une manière d’être. C’est pourquoi, il est parfaitement en phase avec son électorat bobo.
    Ceux qui en tiennent une couche, ce sont plutôt les gens qui appartiennent à cette couche qu’est la petite bourgeoisie intellectuelle qui se méconnaît comme telle, même (et je dirais surtout) quand elle se revendique « rebelle ».

    Jean-Pierre Garnier

    • je n’ai pas éclairci le vocable « béké »
      pourtant je ne suis pas dans la provocation raciste.
      il convient parfaitement quand tu dis que ce qui est bon pour son copain capitaliste n’est pas seulement bon pour le pays, mais pour l’humanité toute entière .
      ( les bons côtés de l’esclavage )

      s’il est en phase avec son électorat bobo, c’est bien qu’il a des nègres
      et c’est pour ça que l’union sacrée fonctionne, comme tu le dis,
      quand il s’agit d’entrer en guerre, de voter la constitution européenne, plan d’« austérité » draconien etc...
      ( et autres négreries )

      s’il est communicant, moi je suis gynéco.

      • mardi 27 décembre 2011 à 07h51, par Garnier Jean-Pierre

        Pas très claires tes réponses. Ce doit être un problème d’expression.
        À propos de Delanoë, « communication » et « communiquant » sont des vocables propre aux spécialistes de l’enfumage publicitaire ou propagandistique. Ce qu’était Delanoë quand il travaillait dans le secteur privé et qu’il est toujours comme maire de Paris. Il existe à l’université un enseignement des « sciences de l’info-com », qui n’ont de sciences, d’information et de communication que les appellations. Je ne vais quand même pas les mettre entre guillemets pour le rappeler.

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        • mon expression est imagée, elle est créole.

          ma position elle, elle est claire :
          Delanoë, dehors !

          annulation immédiate de la concession à LVHM.

          Vive la commune !

          • Votre expression n’est pas imagée, elle est abscons. Dans un autre contexte, elle pourrait être amusante, là, elle est pénible.

            • je souhaite qu’elle soit le plus pénible possible jusqu’à ce que ça rentre dans le crâne de ceux qui vivent avec leurs télés.

              • mercredi 28 décembre 2011 à 18h04, par Garnier Jean-Pierre

                Là, ça dégénère ! Ton contradicteur voulait simplement dire que l’expression « bekes », telle que tu l’as utilisée, est pénible à comprendre. Si elle était « imagée », il n’y aurait pas besoin d’explication de texte. Tu espères ainsi faire « rentrer dans la tête de ceux qui vivent avec leur télé » certaines vérités. Or, tu te trompes : tu risques plutôt de leur casser les pieds. En outre, ton contradicteur, lecteur de Article 11, ne fait certainement pas partie des patates sur canapés vautrées à demeure devant leur télé,

                Pour ma part, au risque de passer pour un vieux ringard, pas « créole » de surcroît, mais gallocentrique, je m’en tiendrai à ce précepte de Boileau que je me suis toujours efforcé d’appliquer :
                « Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément ». D’autant qu’il y a de multiples manières d’énoncer clairement les choses.

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  • Pas vraiment homo, je prendrais quand même bien Jean-Pierre Garnier dans mes bras.

    Que Serge Latouche dise parfois des choses intéressantes, je veux bien l’admettre. Par exemple, il doit penser qu’il vaut mieux être joyeux et en bonne santé que triste et malade. Or, des années de réflexion et la fréquentation des philosophes m’ont amené à de semblables conclusions. Voilà donc en quoi je rejoins Serge Latouche.

    Pour le reste, il m’a semblé qu’il manquait quelques gros mots dans les propos de notre gentil utopiste : capitalisme, exploitation, valorisation, dévalorisation, Etat, guerres, etc.

    Un oubli sans conséquence, je veux bien l’admettre, mais qui gâche un peu la démonstration, vous en conviendrez.

    Aussi, pour compléter le catalogue de la décroissanterie latouchienne, je vous propose, un peu au hasard, la lecture d’un livre de Robert Kurz : Vies et mort du capitalisme. Un chouïa plus ardu, certes, mais plus nourrissant que les décroissants périmés.



  •  × Réhabiliter les systèmes d’éducation pratiqués par des communautés locales en harmonie avec leur environnement culturel et naturel.
    C’était ce qui existait avant 1800 si j’en crois quelques passage du livre de l’historien Anglais G. Robb. Ce qui a été détruit peut il se reconstruire ?

    • Te revoilà !
      suppôt de Delanoë ou suppôt d’Anne Hidalgo ?

      comme dirait ton patron dans Challenges, faut éviter le syndrome de la ville musée !

      • « des communautés locales en harmonie avec leur environnement culturel et naturel ».
        Je m’explique : avant 1789 la france etait une juxtaposition de millier des communautés locales en harmonie( forcé) avec leur environnement culturel et « naturel ». Ce qui a tout changé dans les périmètres (culturel) c’est la facilité des transport des humains et des brassage de population ; A quoi pourrait donc ressembler dans l’état actuel ou nous vivons une evolution « moderne » vers des « communautés locales en harmonie avec leur environnement culturel et naturel ». le périmètre culturel serait a redéfinir de quel façon ? que reste t il de ces périmètres culturels ?



  • Jean-Pierre Garnier, si jamais tu repasses par là : tu tiens à rappeler que les propos de Latouche, pour le peu qu’ils auraient selon toi de sauvable, on les tenait déjà il y a cinquante ans, et en mieux, que ses analyses sont incomplètes, soit pour des raisons d’insuffisance intellectuelle, soit pour des raisons de mauvaise foi (Latouche serait un réac, un idiot objectif, un crypto-capitaliste, un chien courant, un laquais de l’Occident, etc.) Et qu’en conséquence de tout ça, il n’apporte aucune solution, voire pire : il en apporterait de fausses ! Très bien. Tu te rends compte, j’espère, que tous ces reproches que tu fais à Latouche, et sur lesquels je te rejoins en partie parce que ce sont largement des évidences de bon sens élémentaire, on peut te les faire aussi ? Que ton discours a un siècle, que les gens comme moi, qui ont grandi en milieu communiste en connaissent chaque recoin, chaque tournant, chaque bloc idéologique et jusqu’aux expressions toutes faites que tu emploies, et qui tiennent parfois de la caricature autogène. J’ai parfois l’impression d’entendre l’acteur d’un film de Jean Yanne. Maintenant, ce n’est pas parce qu’une chose ou un style a été rebattu jusqu’à devenir insupportable qu’il ou elle est illégitime. Mais tes constats, tout le monde les connaît, et on n’a certainement pas besoin d’aller chercher John Bellamy Foster pour comprendre le rôle de la haute finance, la spéculation sur la misère, le phénomène de la stagnation, les surplus non réinjectables, etc. Qu’est-ce que tu PROPOSES, voilà la question. Parce que le baratin, moi, je m’en tape. Quelles sont les SOLUTIONS que tu proposes ? Qu’est-ce que tu SUGGERES ? ICI ET MAITENANT ?

    • vendredi 31 août 2018 à 04h57, par renoult.jonathan

      Jean-Pierre Garnier — dont j’ai apprécié, avec quelques autres, les commentaires — n’est visiblement pas repassé. Je me permets de rebondir bien tard, découvrant aujourd’hui cet entretien.

      D’une part, c’est par conscience de notre propre héritage idéologique (dont il faut rester critique) que l’on reproche à Serge Latouche d’oublier ou de déformer le sien — probablement le même que le nôtre.

      D’autre part, si la demande de «  solutions  » est tout à fait compréhensible, elle ne peut justement se faire dans un tel climat de confusion idéologique. Je cite cette belle phrase de Georges Didi-Huberman  :

      «  Un paradoxe, à la différence d’un problème, ne se «  résout  » pas. Mais il se «  tranche  ». Il implique un acte de coupure qui assume toute sa signification — sa responsabilité — politique.  »

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