vendredi 19 mars 2010
Le Charançon Libéré
posté à 22h38, par
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Ça nous pend au nez : le plan de rigueur est pour demain. Les Grecs y ont eu droit, les Portugais, Islandais et Espagnols itou, on n’y coupera pas. Un espoir, pourtant : à en croire le socialiste Benoît H., il est possible de repousser l’inexorable en votant PS ce dimanche. Sauvés ? Hamon salaud, non : nos camarades d’infortune européens nous déconseillent fortement le remède.
Je viens de découvrir une intéressante déclaration d’un certain Hamon, Benoît de son prénom, caution de gauche du Parti socialiste dans le civil, tout pareil dans le boulot.
Et je ne doute pas que celle-ci, nonobstant son côté un peu datée (elle remonte à dimanche dernier, tu me pardonneras ce désastreux manque de réactivité), suscitera ton intérêt comme elle a éveillé le mien.
Au soir du premier tour des élections régionales, donc, Hamon Benoît a pronostiqué, rapporte Libération, l’imminence d’« une cure d’austérité sans précédent ».
Et a émis l’hypothèse que le gouvernement allait mettre celle-ci en œuvre dès le deuxième tour terminé, emballé-c’est-pesé-une-bonne-chose-de-faite.
Et ?
Ben… c’est tout.
Je voulais juste te signaler que j’étais d’accord avec B. Hamon.
Et te faire remarquer que je pense itou que l’austérité qui vient sera mémorable, féroce coup de bâton qui va t’en faire baver un max et te laisser exsangue.
Voilà.
Ah…
Que je te dise, aussi : Hamon B. a ajouté un petit truc, ensuite.
Il a appelé, rapporte toujours Libération, les électeurs à « amplifier » le score de la gauche au second tour pour constituer des « boucliers sociaux ».
Lesquels boucliers - tu l’auras compris - protégeront la population de la politique d’austérité que la droite va mettre en œuvre.
Comme des para-rigueurs, en somme.
Sur le même mode - si tu veux des comparaisons historiques malvenues - que ce Philippe P. ayant protégé, en des temps troublés, le peuple français des rigueurs de l’occupation germanique - heureusement qu’il était là…
Et ?
Rien…
Je me demande juste si Benoît H. parle grec.
Et s’il a saisi le sens de ce grand cri lancé par les électeurs hellènes à l’intention des socialistes : γαμημένη !
Façon de très affectueusement apostropher un gouvernement de gauche ayant si bien joué son rôle de bouclier contre l’austérité qu’il ne mérite d’autre petit nom que celui de « connard ».
Lui qui a su mettre en œuvre de violentes coupes dans les salaires des fonctionnaires.
Qui a augmenté en priorité les impôts les plus inégalitaires.
Et qui s’apprête aujourd’hui1 à faire appel au FMI (d’ailleurs dirigé par un célèbre bouclier socialiste, Don-(Juan)-Strauss-Kahn), le Premier ministre George Papandréou allant jusqu’à expliquer que l’institution ne va « pas demander plus » en matière d’austérité que les mesures déjà engagées2.
Et donc : Yαμημένη !
Je me dis aussi - tant qu’on y est - que Hamon B. n’entrave pas grand chose à cette clameur poussée, à l’attention des socialistes, par de nombreux électeurs espagnols : pendejo !
Que lui échappe tout autant le sens de cette violente exclamation adressée aux socialistes par bon nombre d’électeurs portugais : bicho-de-pé !
Et qu’il ne comprend pas plus cette brutale apostrophe qu’une écrasante majorité d’électeurs islandais vient, à l’occasion d’un récent référendum, de jeter à la face des socialistes : kunta !
Il saurait sinon que les Portugais, les Espagnols et les Islandais - tous victimes de très récents plans de rigueur mis en œuvre par des gouvernements socialistes n’ayant aucun scrupules à pratiquer augmentations d’impôts, coupes dans les budgets publics et gels des salaires des fonctionnaires pour satisfaire les marchés - que ces trois peuples, disais-je, n’ignorent désormais plus rien de la très relative efficacité du bouclier social brandi par ses camarades européens.
Que ceux-ci ne se font plus aucune illusion sur les capacités des socialistes à les protéger et à éviter que les spéculateurs ne se sucrent encore et toujours sur leurs dos.
Et qu’ils partagent avec les Grecs un semblable mépris pour ces prétendus hommes de gauche pratiquant la pire des politiques de droite.
Que veux-tu ?
H. Benoît ne doit pas se tenir au courant.
Ou alors : prendrait-il ses électeurs pour des Yαμημένη ?