vendredi 4 novembre 2011
Sur le terrain
posté à 12h48, par
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Des armes, encore des armes, toujours des armes... En deux jours passés à arpenter les allées de Milipol, plus important des salons mondiaux consacrés à la sécurité intérieure, on en a fait une indigestion, de leurs canons de tous calibres et de toutes fonctions. On s’est donc dit qu’il n’y avait pas de raison pour que vous n’en absorbiez pas votre part, vous aussi. En photos.
Milipol, salon de la sécurité intérieure qui se tient tous les deux ans à Paris, c’est un peu la coupe du monde du maintien de l’ordre. Ou la fashion week de la répression. Un événement à ne rater sous aucun prétexte si on fait dans le commerce de la matraque, de la bombe au poivre, de systèmes de vidéo-surveillance, de flashballs new génération, de jambes bioniques herculéennes (cf. dernière photo) ou de gadgets sécuritaires tous plus ignobles les uns que les autres. The place to be. Article11 n’aurait raté ça pour rien au monde.
Cerise sur la matraque, l’édition 2011, qui se tenait mi-octobre à Paris, a été un joli succès. La preuve : dans un communiqué de presse envoyé après coup1, la direction du salon exulte comme un seul homme : « Bilan très positif pour la 17e édition du salon Milipol Paris qui s’est tenue du 18 au 21 octobre 2011. Les 888 exposants, dont 66% d’internationaux, venus de 47 pays ont présenté leurs innovations aux 27 243 visiteurs professionnels venus de 150 pays, 110 Délégations Officielles (+55% vs 2009) de 53 pays et 469 journalistes issus de 31 pays. »
Bref, un événement incontournable. Pourtant, on ne va pas vous mentir, c’était un peu l’horreur, genre immersion sans pince-nez dans les entrailles de la bête sécuritaire. Pire : le champagne était réservé aux délégations officielles - on veut croire que la vingtaine de hauts gradés de la police russe, que l’on croisait sans cesse au détour des stands, uniformes en goguette, y a fait honneur... Mais eux étaient plutôt l’exception : davantage que d’épaulettes martiales, les travées du salon étaient inondées de jeunes hommes en civil, cheveux ras et torses bombés, allures de mercenaire visiblement habitués à tripoter des armes de tous calibres. Et - surtout - de costumes-cravates, façon marchands de mort à l’élégance de VRP de bas-étage. Là pour signer des contrats, ces derniers squattaient les tables des exposants, discutant discrètement autour d’un café. Et constituent à l’évidence l’archétype de ces « contrôleurs » que Mathieu Rigouste évoquait en un entretien publié sur A11, voilà un peu plus d’un an :
« Avec le XXe siècle et l’apparition des complexes militaro-industriels, le capitalisme a changé de forme. La question du contrôle social ne repose plus seulement sur l’encadrement du capital humain – le prolétariat – pour qu’il continue à produire. Mais contrôler est devenu un marché, avec des acteurs économiques immenses qui ont tout intérêt à ce qu’un certain désordre, gérable, se développe pour mieux le soumettre. Ils y sont d’ailleurs parvenus : depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, la guerre est devenue réellement permanente, elle est partout et tout le temps, rien n’y échappe. Et la sécurité intérieure s’est imposée comme l’un des principaux marchés de cette économie de la guerre permanente. Un marché florissant. »
Ceci dit, en déambulant dans les allées glauques du Palais des congrès en quête d’éléments pour un futur article (teasing de ouf : ce sera normalement pour le numéro 7 de la version papier), on a dégotté quelques scènes croquignoletto-désespérantes, entre 1984 et La croisière s’amuse. On vous les livre en pâture. Et s’il reste des cocktails molotov à quelqu’un, on vous donne le tuyau : l’édition 2012 de Milipol aura lieu au Qatar vers la mi-octobre. On dit ça, on dit rien...
1 Communiqué doublé, pour les plus motivés, d’une clé USB contenant des photos choc de l’événement. On t’en a sélectionné une, dans l’air du temps :